BÂTIR UNE POLITIQUE DE RÉMUNÉRATION - Le Moniteur des Pharmacies n° 3099 du 17/10/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3099 du 17/10/2015
 
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Entreprise

Auteur(s) : Fabienne Rizos-Vignal

Pour augmenter la productivité d’une entreprise, quelle que soit sa taille, il est primordial de structurer la rémunération des collaborateurs. Cet acte de gestion doit se faire avec méthode, objectivité et transparence.

L’une de vos préparatrices n’est pas très performante en techniques de vente mais elle est créative et a toujours de bonnes idées pour mettre en scène et renouveler les vitrines. Plus pragmatique, son collègue préparateur est excellent dans les tâches opérationnelles, telles que la gestion des tickets de promis, du stock et la mise à jour des procédures qualité. Quant à votre adjointe, désorganisée, elle ne brille pas dans les activités de back-office mais sa sensibilité doublée de ses compétences pointues en pharmacologie lui permettent de tisser au comptoir des liens étroits avec les patients qui louent son professionnalisme. Au final, chacun apporte sa contribution, avec ses qualités, au projet d’entreprise. En bon manager, vous savez identifier et reconnaître les spécificités de chacun de vos collaborateurs afin d’utiliser leurs complémentarités.

Cette saine approche permet de valoriser les compétences sans créer des conditions de compétition défavorables et contre-productives. Reste à mettre en place une politique de rémunération cohérente et juste.

Apprécier la dimension collective du salarié

« Lorsqu’il s’agit de rétribuer les performances, l’employeur doit placer le curseur à deux niveaux : collectif et individuel. Dans l’appréciation individuelle, il est important de réintroduire un critère collectif qui vienne récompenser la capacité de chacun à travailler en équipe, la disponibilité vis-à-vis des autres collaborateurs, l’apport global à l’ambiance. Il est opportun lors de l’entretien annuel d’évaluation de déterminer des objectifs liés au savoir-faire, mais également au savoir-être », préconise Michel Lora, dirigeant de Gii, société de formation spécialisée en communication et management.

Fédérateurs et consensuels, les bonus d’équipe profitent à tous les collaborateurs. Ce sont des primes globales, réparties équitablement entre chaque salarié. Revers de la médaille : un tel système peut conduire à une démobilisation des salariés les plus impliqués, puisque tout le monde perçoit le même montant. Quant aux challenges proposés par les laboratoires ou les groupements, ils donnent lieu à des primes, des chèques cadeaux ou des avantages matériels. Ponctuels et ludiques, ces challenges ne peuvent porter que sur les produits de parapharmacie. Ce n’est donc pas l’outil le plus pertinent pour structurer la rémunération des collaborateurs.

Ni augmentation ni prime à la tête du client

Les augmentations de salaire et les primes individuelles font partie de l’arsenal de gestion dont dispose le chef d’entreprise pour récompenser les bons résultats de son équipe. Mais avant d’actionner ces leviers, il est nécessaire de prendre en considération de multiples paramètres. Si vous augmentez un collaborateur – et pas les autres – vous devez être en mesure d’expliquer cet écart de traitement.

Dans un arrêt rendu le 6 mai 2015 (chambre sociale, n°  de pourvoi 13-25821 D), la Cour de cassation a pour la première fois exigé des preuves d’objectivité et de transparence pour justifier l’exclusion d’un salarié du bénéfice d’une augmentation. Amené à s’expliquer devant les tribunaux, l’employeur s’est contenté d’évoquer « des résultats décevants et un manque de performances ». Faute d’éléments chiffrés et étayés, ses arguments n’ont pas convaincu les juges qui l’ont condamné à 3 000 euros de dommages et intérêts pour discrimination. « D’où l’intérêt de s’appuyer sur les entretiens annuels d’évaluation pour justifier une différence de traitement », insiste Dan Nahum, avocat.

Autre inconvénient, les augmentations de salaire et les primes devenues des usages deviennent des avantages acquis. Une fois qu’elles sont attribuées, elles sont pérennes et l’employeur ne peut plus revenir en arrière. Elles deviennent alors déconnectées des résultats de l’employé. « Le mois du versement de l’augmentation de salaire, l’équipe percevra ce bonus comme une véritable récompense. Puis, cet effet s’estompera et, au fil du temps, l’augmentation de salaire sera perçue comme un dû. Mieux vaut utiliser un autre outil plus souple, plus modulable, et qui ne pèse pas sur les charges salariales de l’entreprise », met en garde Laurent Cassel, expert-comptable au cabinet AdequA.

Privilégier l’intéressement

Idéal, l’intéressement permet au chef d’entreprise de responsabiliser les salariés sur des objectifs concrets et des progrès à réaliser. C’est un outil sur mesure. « Pour le mettre en place, il faut faire preuve d’imagination, de pragmatisme et de pédagogie pour adapter les contrats en fonction de la taille, de la rentabilité, des objectifs de l’officine, de la compétence et de la maturité de l’équipe », explique Amaury Tierny, expert-comptable au cabinet AdequA. L’intéressement légal procure certains avantages financiers comme des exonérations de charges et d’impôt sous conditions.

En pratique, il est nécessaire de négocier un accord d’intéressement avec les salariés. La durée, de trois ans en général, peut être reportée à un an pour les plus petites entreprises (TPE et PME). Une fois signé, l’accord attribue le même montant à tous les salariés, selon des critères négociés et définis à l’avance. Ces critères doivent être formalisés par une formule d’intéressement, qui doit être simple et lisible par les salariés. Des critères comme la productivité, l’absentéisme, l’atteinte d’objectifs, la qualité peuvent être mixés à des critères chiffrés tels que les résultats comptables.

« La référence au chiffre d’affaires n’est pas adéquate. Celle relative à des objectifs de marge en valeur l’est déjà plus. Il est également possible de mettre en place un objectif en fonction de la rentabilité et d’y intéresser l’ensemble de l’équipe. Le titulaire pourra décider de déclencher un intéressement au-delà d’un niveau de rentabilité à atteindre par référence à la performance commerciale et de gestion. À la différence de l’excédent brut d’exploitation, la performance commerciale et de gestion ne dévoile pas la rémunération et les charges sociales des titulaires », analyse Laurent Cassel. La formule ne risque pas de mettre en péril la société car l’intéressement n’est déclenché que si sa situation financière le permet. C’est là tout le but d’une politique de rémunération judicieusement construite.

À RETENIR

Dans un condiv économique aléatoire et régressif, l’employeur peut librement décider de suspendre le versement des primes sur objectifs.

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