LES ANTIDIABÉTIQUES - Le Moniteur des Pharmacies n° 3096 du 26/09/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3096 du 26/09/2015
 

Cahiers Formation du Moniteur

Iatrogénie

CAS 1 - EFFETS INDÉSIRABLES

La course aux toilettes !

Mme V., 58 ans, vient à la pharmacie avec une nouvelle ordonnance : metformine 500 mg, 1 comprimé matin et soir pendant 15 jours puis 1 matin, midi et soir qsp 3 mois. Malgré un régime alimentaire depuis 6 mois, la glycémie de Mme V. restait élevée et son HbA1c ne descendait pas en dessous de 7,5 %. Son médecin traitant a donc décidé d’instaurer un traitement antidiabétique. Mme V. exprime sa réticence : « Je n’ai pas très envie de prendre ce médicament. J’ai une amie qui a eu le même et ça lui donnait des diarrhées ! Je suis souvent en réunion, je ne peux pas envisager de devoir courir aux toilettes ! »

Que dire à Mme V. ?

Mme V. commence le traitement à faible dose, ce qui devrait limiter la survenue des troubles digestifs qu’elle redoute.

ANALYSE DU CAS

• La metformine est un biguanide à effet antihyperglycémiant qui réduit la glycémie basale et postprandiale. Elle peut agir par 3 mécanismes :

- réduction de la production hépatique de glucose par inhibition de la néoglucogenèse et de la glycogenolyse,

- augmentation de la sensibilité à l’insuline au niveau musculaire, - retard d'absorption intestinale du glucose.

Elle ne stimule pas la sécrétion d’insuline.

• Les principaux effets indésirables sont des troubles gastro-intestinaux, notamment nausées, vomissements, diarrhées, douleurs abdominales, perte d'appétit, dysgueusie et goût métallique. Ces effets, dose-dépendants, surviennent principalement en début de traitement et régressent spontanément dans la plupart des cas. Ils persistent seulement dans 10 % des cas, nécessitant alors un changement de traitement.

• La metformine constitue le traitement de première intention dans le diabète de type 2. La posologie prescrite à Mme V. correspond au schéma d’instauration progressive préconisé pour prévenir les troubles digestifs.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien rassure Mme V., la dose d’instauration prescrite est faible et progressive pour limiter les troubles digestifs de plus, les effets gastro-intestinaux surviennent principalement au début du traitement et disparaissent la plupart du temps au bout de quelques semaines.

• Pour améliorer la tolérance digestive, le pharmacien conseille également à Mme V. de prendre la metformine au cours ou à la fin des repas.

• En cas de diarrhée, Mme V. pourra prendre ponctuellement du lopéramide. En revanche, si les diarrhées persistent, le traitement devra être réévalué par le médecin traitant.

• Le pharmacien insiste sur la nécessité de bien suivre le traitement médicamenteux pour prévenir les complications associées au diabète.

CAS 2 - EFFETS INDÉSIRABLES

Un rhume qui dure

M. D., 53 ans, est traité pour un diabète de type 2 depuis 2 ans. Le traitement par metformine et glibenclamide ne permettant pas d’équilibrer son diabète, le diabétologue a instauré il y a deux mois une trithérapie : metformine, glibenclamide et saxagliptine. Aujourd’hui, M. D vient à la pharmacie acheter Dolirhume. « Habituellement je nesuis jamais malade, mais depuis un mois je ne m’en sors pas ! Est-ce que mon nouveau traitement pourrait me rendre plus fragile ? »

Que répondre à M. D. ?

Comme toutes les gliptines, la saxagliptine est susceptible d’augmenter le risque d’infections.

ANALYSE DU CAS

• La saxagliptine (Onglyza) est un inhibiteur de la dipeptidylpeptidase 4 (DPP-4) qui entraîne une augmentation de la concentration des incrétines stimulant la sécrétion d'insuline.

• La DPP-4 est une enzyme antigénique exprimée à la surface de nombreuses cellules, dont des lymphocytes. Dans les études cliniques, une légère diminution du nombre absolu de lymphocytes a été observée suite à l’administration de saxagliptine.

• Les infections des voies respiratoires supérieures et urinaires, les gastroentérites et les sinusites sont des effets indésirables fréquents rapportés dans le RCP d’Onglyza.

• Suite à la publication d’une étude américaine mentionnant une augmentation du risque de mortalité par infections chez les patients traités par saxagliptine, l’Agence européenne des médicaments a lancé en juin 2015 une évaluation sur ce point.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien indique que la saxagliptine peut effectivement accroître le risque d’infections.

• Le pharmacien insiste sur la nécessité de poursuivre le traitement antidiabétique et conseille à M. D. de joindre son médecin traitant pour faire le point sur les causes de ses infections récidivantes.

CAS 3 - EFFETS INDÉSIRABLES

Madame B. a des nausées

Ce matin, Mme B., 65 ans, vient demander conseils car elle souffre de nausées depuis 10 jours. En consultant son dossier, le pharmacien constate que Mme B. a reçu un nouveau traitement il y a 15 jours, Byetta 5 µg, en complément de son traitement habituel : metformine, gliclazide, rosuvastatine, périndopril/amlodipine. « Cela ne peut pas être dû à ce traitement. Ce ne sont pas des comprimés mais des piqûres ! »

Les nausées sont-elles dues au nouveau traitement ?

Les nausées sont l’effet indésirable le plus fréquemment rapporté en début de traitement par Byetta (exénatide).

ANALYSE DU CAS

• 40 à 50 % des patients traités par incrétinomimétique par voie injectable (exénatide ou liraglutide) présentent des effets gastro-intestinaux (nausées, vomissements, diarrhées…). Survenant principalement en début de traitement, la fréquence et l’intensité des troubles digestifs diminuent avec la poursuite du traitement.

• Afin d'améliorer la tolérance, le traitement doit être démarré pendant au moins un mois à la dose de 5 µg d'exénatide deux fois par jour. La dose peut ensuite être augmentée à 10 µg deux fois par jour afin d'obtenir un meilleur contrôle glycémique.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien explique à Mme B. que les nausées sous Byetta sont fréquentes mais qu’elles sont la plupart du temps résolutives en quelques jours ou semaines. Il lui conseille cependant de prendre rendez-vous avec son médecin pour évoquer la survenue de cet effet indésirable et sa persistance depuis plusieurs jours. Ensemble, ils réévalueront le traitement et décideront ou non de son maintien.

• En attendant, le pharmacien conseille à Mme B. du diménhydrinate.

CAS 4 - EFFETS INDÉSIRABLES

Un repas trop léger

En début d’après-midi, Mme H., 57 ans, vient à la pharmacie pour qu’on lui mesure sa tension. Elle se plaint de vertiges et de sueurs froides. Le tensiomètre indique 130/82 et 100 pulsations par minute. En consultant le DP, la pharmacienne constate que Mme H. est traitée par metformine 500 mg 2 fois/j et répaglinide 1 mg 3 fois/j. Elle l’interroge sur ce qu’elle a pris au déjeuner. « On m’a collé une réunion à la dernière minute à 12 h 30. J’ai juste eu le temps de manger un yaourt. »

Que suspecte le pharmacien ?

Les symptômes de Mme H. font suspecter une hypoglycémie.

ANALYSE DU CAS

• Le répaglinide est un insulinosécréteur à action rapide. Il entraîne la fermeture des canaux potassiques ATP-dépendants de la membrane des cellules bêta des îlots pancréatiques. La dépolarisation des cellules bêta provoque l’ouverture des canaux calciques à l’origine d’une entrée massive de calcium dans les cellules, induisant une sécrétion d’insuline.

• Le répaglinide est pris dans les 15 minutes précédant le repas. La réponse insulinotrope survient 30 minutes après la prise, assurant un effet hypoglycémiant sur toute la durée du repas.

• Le déjeuner de Mme H., trop léger, n’a pas permis de compenser l’insulinosécrétion induite par le répaglinide.

ATTITUDE À ADOPTER

• Après avoir constaté l’hypoglycémie grâce à une mesure de la glycémie capillaire, la pharmacienne donne à Mme H. plusieurs morceaux de sucre à prendre immédiatement.

• Elle explique que la prise de répaglinide doit être toujours associée à un repas. Si elle saute un repas, la prise doit être supprimée. Au contraire, si elle prend un repas consistant en plus dans la journée, une dose supplémentaire devra être prise.

• La pharmacienne conseille à Mme H. d’appeler son mari pour être raccompagnée à son domicile.

• Elle devra surveiller sa glycémie toutes les 2 heures et rapporter cet épisode à son médecin traitant.

CAS 5 - EFFETS INDÉSIRABLES

Prise de poids

M. F., 57 ans, 100 kg pour 1,85 m, est chef d’entreprise. Un diabète lui a été diagnostiqué il y a 2 ans. Malgré une trithérapie (metformine, gliclazide et acarbose), les contrôles d’HbA1c montraient un diabète mal contrôlé. Il y a 2 mois, son diabétologue a décidé d’initier une insulinothérapie. Aujourd’hui M. F. vient à la pharmacie renouveler son ordonnance et se désole : « Depuis que je suis sous insuline j’ai pris 2 kg ! Je ne sais plus quoi faire… »

La prise de poids peut-elle être liée à l’insulinothérapie ?

Oui. Outre l’hypoglycémie, c’est l’un des effets indésirables les plus fréquents de l’insulinothérapie.

ANALYSE DU CAS

• L’insuline n’est pas un traitement de première intention du diabète de type 2 (sauf si glycémie ≥ 3 g/l ou HbA1c ≥ 10 %). Il est recommandé de l’instaurer si l’objectif glycémique n’est pas atteint avec les traitements oraux.

• Plusieurs mécanismes expliquent la prise de poids sous insuline. En équilibrant la glycémie, la glycosurie, qui constitue une perte calorique, cesse. La néoglucogenèse hépatique et la lipolyse (voies métaboliques consommatrices d’énergie) sont freinées. Ainsi, si les habitudes de vie ne sont pas modifiées, le patient risque de prendre du poids.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien explique à monsieur F. que sa prise de poids peut effectivement être liée à l’insulinothérapie. Cependant, les injections d’insuline sont indispensables pour atteindre les objectifs glycémiques et prévenir les risques de complications de son diabète.

• Il conseille à M. F. de poursuivre ses efforts alimentaires et de pratiquer une activité physique même modérée.

• Un accompagnement par un diététicien serait utile.

CAS 6 - MÉSUSAGE

Mal réveillé !

Ce matin, dès l’ouverture, Hugo, 19 ans, arrive affolé au comptoir. Il a un diabète de type?1 actuellement traité suivant un schéma basal/bolus avec Novorapid à chaque repas et Lantus Solostar le soir. Depuis qu’il est à la fac, Hugo a plus de mal à suivre son traitement. « J’étais mal réveillé et je me suis trompé d’insuline ! Je me suis injecté Lantus à la place de Novorapid avant mon petit déjeuner. Qu’est-ce que je dois faire ? »

Que dire à Hugo ?

• Hugo doit s’injecter immédiatement Novorapid et renforcer sa surveillance glycémique toute la journée.

ANALYSE DU CAS

• Novorapid est un analogue rapide de l’insuline qui assure les bolus d’insuline au moment des repas. Du fait de sa cinétique rapide (délai d’action de 15 min), il doit généralement être administré juste avant un repas. Sa durée d’action est de 2 à 5 heures.

• Lantus, analogue lent, reproduit l’insulinosécrétion basale. Cette insuline glargine est totalement soluble dans la solution injectable au pH acide. Après injection sous-cutanée, la solution acide est neutralisée, formant des microprécipités à partir desquels de petites quantités d’insuline sont libérées de façon continue sur 24 heures.

• Dans le cas d’Hugo, l’injection de Lantus à la place de Novorapid ne va pas permettre de couvrir le pic glycémique associé au petit déjeuner mais l’insulinémie de la journée sera plus importante sur 24 heures.

ATTITUDE À ADOPTER

• La pharmacienne rassure Hugo. Lantus a une cinétique très lente et conduit rarement à des hypoglycémies.

• Hugo doit cependant contrôler sa glycémie toutes les 2 heures jusqu’au soir.

• Il doit réaliser les injections de Novorapid comme d’habitude et s’injecter la quantité habituelle de Lantus le soir.

CAS 7 - MÉSUSAGE

Soirée arrosée

Diabétique de type 1 depuis 15 ans, M. L., 33 ans, vient à la pharmacie pour se faire délivrer un nouveau kit de Glucagen. Il a utilisé le sien ce week-end mais il s’interroge sur son efficacité : « J’ai fait une hypoglycémie samedi soir en rentrant d’une soirée un peu arrosée. Ma femme m’a fait une injection de Glucagen mais cela n’a pas fait remonter ma glycémie. Mon kit était pourtant au frigo et pas périmé ! »

Que suspecte le pharmacien ?

L’injection de glucagon n’est pas efficace pour une hypoglycémie sévère provoquée par l’alcool.

ANALYSE DU CAS

• Le glucagon est une hormone hyperglycémiante glycogénolytique qui mobilise le glycogène hépatique, celui-ci étant alors libéré dans le sang sous forme de glucose.

• Or, l’absorption d’alcool est responsable d’une inhibition de la néoglycogenèse et d’une déplétion des réserves hépatiques en glycogène.

• M. L. ayant consommé de l’alcool en quantité importante, ses réserves hépatiques en glycogène se sont trouvées épuisées, expliquant l’inefficacité de l’injection de glucagon.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien explique à M. L. que le glucagon a peu ou pas d’effet en cas d’hypoglycémie induite par l’alcool. Seule l’absorption orale de sucre ou une injection de glucose peut remonter la glycémie dans ce cas.

• En cas de consommation d’alcool, le pharmacien préconise à M. L. de surveiller sa glycémie plus fréquemment dans les 12 à 18 heures. Une collation avant le coucher est parfois nécessaire si une baisse de la glycémie est observée.

• Le pharmacien rappelle que la meilleure façon d’éviter l’hypoglycémie lors de l’ingestion d’alcool est d’en limiter la quantité et de ne pas boire sans avoir mangé ni après une séance de sport.

• Il précise également à M. L. que Glucagen Kit peut être conservé 18 mois à température ambiante (25 °C).

CAS 8 - MÉSUSAGE

Double dose

Mme A. appelle dès 14 heures à la pharmacie pour demander conseil à son pharmacien. Son mari, 61 ans, est traité par Velmetia (sitagliptine et metformine) 2 fois/j, acarbose 100 mg 3 fois/j, simvastatine 20 mg/j et Coversyl (périndopril) 5 mg/j. Ce midi, par inadvertance, il a pris 2 fois son comprimé d’acarbose. Mme A. s’inquiète de la survenue d’une hypoglycémie.

Qu’en pense le pharmacien ?

L'acarbose diminue l'hyperglycémie mais n'induit pas lui-même d'hypoglycémie.

ANALYSE DU CAS

• L'acarbose est un pseudo-tétrasaccharide d'origine microbienne qui inhibe de façon compétitive les alphaglucosidases intestinales. Il réduit la dégradation des carbohydrates (di-, oligo- et polysaccharides) en monosaccharides absorbables, diminuant ainsi l'hyperglycémie postprandiale.

• La posologie usuelle est de 50 mg à 100 mg 3 fois par jour. Dans quelques rares cas, la dose pourra être augmentée jusqu'à 200 mg, 3 fois par jour.

• Dans le cas de M. A., l’erreur de prise n’expose pas à un risque accru d’hypoglycémie.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien explique à Mme A. que l’acarbose ne provoque pas d’hypoglycémie.

• L’augmentation de la dose peut entraîner des troubles digestifs dus à la fermentation des hydrates de carbone. Afin de les limiter, M. A. doit éviter les aliments sucrés pendant les 4 à 6 heures suivant le surdosage.

• Si toutefois une hypoglycémie survenait dans la journée, il est recommandé d'administrer du glucose (en sachet Gifrer ou Cooper) pour obtenir une remontée rapide de la glycémie et non des morceaux de sucre composés de saccharose dont la digestion est retardée par l'acarbose.

PHARMACOLOGIE

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Diabète de type 1

• Caractérisé par une carence absolue ou quasi absolue de l’insulinosécrétion, le diabète de type 1 est d’emblée traité par insulinothérapie. Celle-ci est initiée au cours d’une hospitalisation.

• L’objectif thérapeutique est de reproduire la sécrétion physiologique d’insuline selon le schéma basal-bolus.

• Deux types de schémas peuvent être proposés.

Schéma physiologique optimisé :

- Classiquement, il comporte une injection d’un analogue lent d’insuline le soir avant le dîner ou avant le coucher, combiné à 3 injections d’un analogue rapide avant chaque repas.

- Si l’effet de l’analogue lent n’est pas suffisant pour couvrir les besoins de base sur 24 heures, une injection d’analogue lent le matin, avant le petit déjeuner, est ajoutée au schéma précédent.

- Si l’analogue rapide injecté avant le déjeuner ne couvre pas les besoins insuliniques de l'après-midi (hyperglycémies en fin d'après-midi), l'analogue rapide du midi est remplacé par une insuline biphasique (analogue rapide associé à une insuline d’action intermédiaire).

Schéma physiologique conventionnel : de moins en moins recommandé, il reste toutefois utilisé chez les patients refusant de se faire 4 à 5 injections d’insuline par jour. Plus simples, ces schémas comprennent deux ou trois injections d’insuline mixte par jour. Par exemple, une injection avant le petit déjeuner et le repas du soir ou une injection avant les trois principaux repas.

• La pompe à insuline permet de délivrer un débit de base fixe ou variable selon les horaires (jour, nuit) complété par un bolus avant les prises alimentaires.

Diabète de type 2

• Le diabète de type 2 associe à des degrés divers une insulinorésistance et une diminution de l’insulinosécrétion.

• Ces phénomènes étant associés la plupart du temps à un excès de graisse abdominale, le traitement repose en priorité sur des mesures hygiénodiététiques couplées à une activité physique.

• Un antidiabétique oral est indiqué si l’HbA1C reste supérieure à 7 % (dans la plupart des cas) après 4 à 6 mois de régime et d’activité physique régulière. La metformine est, dans toutes les recommandations actuelles, le traitement médicamenteux de première intention. Si le contrôle glycémique n’est pas adéquat après 3 à 4 mois de monothérapie, des associations d’antidiabétiques oraux en bithérapie, voire en trithérapie sont envisagées. Les traitements doivent alors être réévalués au bout de 3 à 6 mois (voir page 2).

• Le choix des antidiabétiques oraux est orienté par les effets indésirables de chaque classe et les risques associés en fonction du profil du patient.

• L’insulinothérapie est envisageable à chaque étape du traitement si le diabète est très déséquilibré ou lorsque les objectifs glycémiques ne sont pas atteints. Son instauration nécessite une éducation thérapeutique du patient.

MÉDICAMENTS DISPONIBLES

Insulines et analogues de l’insuline

Insulines rapides : Umuline rapide, Actrapid, Insuman Infusat. Les insulines d’origine humaine d’action rapide miment le pic physiologique postprandial. Délai d’action : 30 minutes.

Durée d’action 7-8 heures.

Analogues rapides : Humalog (insuline lispro), Apidra (insuline glulisine), Novorapid (insuline aspartate). Les analogues rapides sont des molécules d’insuline ayant subi des substitutions d’acides aminés empêchant la formation d’hexamères en solution. Restant sous forme de monomères, l’absorption est plus rapide.

Délai d’action : 15 minutes.

Durée d’action : 2 à 5 heures.

Insulines intermédiaires : Umuline NPH, Insulatard. L’insuline est couplée à la protamine qui précipite lors de l’injection SC, ce qui ralentit l’absorption.

Délai d’action : 60 minutes.

Durée d’action : 18 à 20 heures.

Analogues lents : Lantus (insuline glargine), Levemir (insuline détémir). Insuline ayant subi des modifications de chaînes entraînant un long délai pour le retour à la forme monomère assimilable (l’insuline glargine précipite lors de l’injection SC, l’insuline détémir se fixe à l’albumine).

Délai d’action : 1 à 4 heures.

Durée d’action : 14 à 24 heures.

Insulines prémélangées : Umuline profil, Novomix, Humalog mix, Mixtard. Insuline rapide associée à une insuline intermédiaire en proportions variées (10% rapide/90% intermédiaire, 15/85, 25/75, 30/70, 50/50).Délai et durée d’action : elles dépendent des mélanges.

Principaux effets indésirables

Hypoglycémie en cas d’inadaptation des doses ou de prise alimentaire insuffisante, prise de poids, lipodystrophies aux sites d’injections (faire varier le lieu d’injection), hypokaliémie

Interactions significatives

- Renforcer la surveillance glycémique en cas d’association à des médicaments hyperglycémiants (glucocorticoïdes, danazol, œstroprogestatifs, sympathomimétiques, hormone de croissance, hormones thyroïdiennes, diurétiques thiazidiques, antipsychotiques atypiques, sucre dans les sirops…) ou hypoglycémiants (antidiabétiques oraux, aspirine à forte dose, fibrates, IMAO, fluoxétine, inhibiteurs de l'enzyme de conversion, sulfamides antibiotiques…).

- Attention : les bêtabloquants, même cardiosélectifs, peuvent masquer les prodromes de l’hypoglycémie.

Antidiabétiques oraux et injectables

Biguanides

Le seul représentant de cette classe est la metformine. Son élimination presque exclusivement rénale impose une surveillance de la fonction rénale avant et pendant le traitement.

Principaux effets indésirables : nausées, diarrhées, douleurs abdominales, sensation de goût métallique, entre autres, surtout en début de traitement, limitées par l’augmentation progressive de la posologie et par la prise au milieu du repas. Rarement : survenue d’une acidose lactique favorisée par une accumulation de metformine.

Contre-indications : insuffisance rénale sévère ou affections aiguës susceptibles d’altérer la fonction rénale (déshydratation, infection grave…), pathologies à l’origine d’une hypoxie (insuffisance cardiaque, respiratoire…), insuffisance hépatique, intoxication alcoolique aiguë, alcoolisme, grossesse.

Interactions significatives : tous les médicaments qui induisent une insuffisance rénale peuvent être à l’origine d’une acidose lactique, notamment les produits de contraste iodés, contre-indiqués avec la metformine, et les diurétiques de l’anse à prendre avec précaution.

Inhibiteurs des alphaglucosidases

L’acarbose et le miglitol diminuent l’hyperglycémie postprandiale.

Principaux effets indésirables : flatulences, météorismes, troubles du transit, iléus.

Contre-indications : maladies inflammatoires chroniques de l’intestin, occlusion intestinale, insuffisance rénale sévère, grossesse, allaitement.

Interactions significatives : les absorbants intestinaux (charbon), la colestyramine et les produits à base d’enzymes digestives (amylase…) peuvent diminuer l’effet des alphaglucosidases.

Sulfamides hypoglycémiants

La glibenclamide, le gliclazide, la glimépiride, le glipizide diminuent l’hyperglycémie à jeun et postprandiale. Une autosurveillance glycémique est recommandée en début ou en cas de modification de traitement.

Principaux effets indésirables : risque d’hypoglycémies et prise de poids possible. Plus rarement, atteintes cutanées (prurit, urticaire, éruptions cutanées), troubles hématologiques, photosensibilisation. Sous glibenclamide et glipizide, effet antabuse.

Contre-indications : insuffisance rénale ou hépatique sévère, hypersensibilité aux sulfamides (y compris antibiotiques, diurétiques), grossesse, allaitement. Glipizide LP : patient âgé de plus de 65 ans.

Interactions significatives : l’association au miconazole par voie générale et gel buccal est contre indiquée (augmentation de l’effet hypoglycémiant). Plus généralement les antifongiques azolés, inhibiteurs enzymatiques, sont susceptibles d’augmenter les concentrations des sulfamides. Le danazol, à effet diabétogène, est déconseillé. L’association aux bêtabloquants, bêta-2-mimétiques, chlorpromazine, clarithromycine, érythromycine et IEC impose une surveillance renforcée de la glycémie.

Glinide

Seul représentant, le répaglinide a une demi-vie plus courte que les sulfamides. Il diminue l’hyperglycémie à jeun et postprandiale.

Principaux effets indésirables : hypoglycémie, diarrhées, douleurs abdominales, nausées, douleurs articulaires.

Contre-indications : insuffisance hépatique sévère, grossesse, allaitement

Interactions significatives : association contre-indiquée avec le gemfibrozil, inhibiteur du CYP2C8 (risque d’hypoglycémie), déconseillée avec le triméthoprime et la ciclosporine (augmentation de la concentration plasmatique des glinides). Renforcement de la surveillance glycémique avec la clarithromycine et les bêtabloquants.

Inhibiteurs de la DPP-4 ou gliptines

La saxagliptine, la sitagliptine et la vildagliptine agissent en stimulant la sécrétion d’insuline et diminuant celle du glucagon. La prise de vildagliptine impose une surveillance des transaminases.

Principaux effets indésirables : troubles gastro-intestinaux notamment en début de traitement, infections des voies respiratoires supérieures, œdèmes périphériques, réactions d’hypersensibilité (incluant syndrome de Stevens-Johnson), insuffisance cardiaque, pancréatite.

Contre-indications : grossesse, allaitement, antécédent de réaction d’hypersensibilité grave avec un inhibiteur de la DPP-4.

Interactions significatives : l’association à un IEC majore le risque de survenue d’angio-œdème et doit être prise en compte. Les inhibiteurs et inducteurs du CYP3A4/5 peuvent déstabiliser le traitement. Majoration des hypoglycémies en association à l’insuline ou à un sulfamide hypoglycémiant.

Analogues du GLP-1

L’exénatide et le liraglutide stimulent la production d’insuline et diminuent la sécrétion de glucagon de façon glucose-dépendante (uniquement en cas d’hyperglycémie). Ils ralentissent la vidange gastrique et induisent une sensation de satiété.

Principaux effets indésirables : nausées, vomissements et diarrhées ou constipation en début de traitement, hypoglycémie, pancréatite.

Contre-indications : grossesse, allaitement

Interactions significatives : surveillance renforcée en cas d’association à des médicaments à marge thérapeutique étroite en raison d’un ralentissement de la vidange gastrique, majoration des hypoglycémies en association à un sulfamide hypoglycémiant.

CAS 9 - OBSERVANCE

Un arrêt dangereux

Ce lundi matin, Louise vient à la pharmacie pour sa grand-mère, Mme C., 82 ans. Elle demande au pharmacien s’il peut avancer une boîte de metformine 1 000 mg et de Januvia 100 mg. Mme C. a rendez-vous chez son médecin traitant en fin de semaine mais elle n’a plus de médicaments depuis 7 jours. Louise s’inquiète car sa grand-mère a un comportement inhabituel. « Hier, au repas de famille, elle était un peu désorientée. Elle mélangeait les prénoms des gens et confondait les mots. Je suis passée la voir ce matin. Je l’ai trouvée fatiguée avec les yeux cernés. ». Le pharmacien, qui a récemment suivi une session de formation continue sur le diabète, tique immédiatement.

Que craint le pharmacien ?

Chez les personnes âgées diabétiques de type 2, un arrêt brutal du traitement peut entraîner un syndrome hyperglycémique hyperosmolaire (SHH).

ANALYSE DU CAS

• Le SHH (également appelé coma hyperosmolaire) se définit par une osmolarité plasmatique > 350 mmol/l, une glycémie ≥ 6 g/l, théoriquement sans cétose ni acidose, mais une cétose modérée (traces à une croix sur bandelette urinaire) est possible. Il s’agit d’une complication grave du diabète, mortelle dans la moitié des cas.

• Cette complication métabolique survient surtout chez des personnes âgées présentant un diabète de type 2 connu ou ignoré, peu autonomes et incapables d’une réhydratation spontanée dès le début des troubles.

• D’installation progressive, la phase de précoma peut durer des jours ou des semaines et passer inaperçue, les premiers symptômes évocateurs étant peu spécifiques : adynamie, troubles neurologiques (désorientation, obnubilations…), perte de poids.

• Ils s’accompagnent d’une polyurie (avec glycosurie massive) et d’une glycémie très élevée, supérieure à 3 g/l.

• Dans le cas de Mme C. la dégradation de son état général concomitante de la rupture thérapeutique doit faire évoquer un accident hyperosmolaire.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien indique à Louise que le comportement inhabituel de sa grand-mère peut être dû à un déséquilibre important de son diabète survenu du fait de l’arrêt brutal des traitements antidiabétiques.

• Compte tenu de l’âge de Mme C., le pharmacien explique qu’il y a un risque de complication relativement grave et qu’elle ne peut pas attendre le rendez-vous prévu en fin de semaine.

• Le pharmacien propose à la jeune femme d’appeler le médecin traitant de sa grand-mère pour lui faire part de la situation. Ce dernier propose de recevoir Mme C. dès l’après-midi pour un examen clinique approfondi et la réalisation d’une glycémie.

CAS 10 - INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Mme G. doit passer un scanner

Mme G., 63 ans, se présente à la pharmacie avec une ordonnance d’Ioméron 300 mg. Elle doit passer un scanner la semaine prochaine. Lucie, la préparatrice, qui connaît bien Mme G., se souvient qu’elle est traitée par Eucreas 1 000 mg/50 mg (1 cp 2 fois par jour) dans le cadre d’un diabète de type 2. Elle fronce les sourcils à la lecture de l’ordonnance.

La prescription expose-t-elle à une interaction ?

Oui. Eucreas contient de la metformine qui n’est pas compatible avec l’injection concomitante de Ioméron, produit de contraste triiodé.

ANALYSE DU CAS

• Eucreas associe la vildagliptine, insulinosécréteur, et la metformine, réduisant l’insulinorésistance.

• L'injection intravasculaire de produits de contraste iodés peut conduire à une insuffisance rénale fonctionnelle. La metformine étant éliminée par le rein, l’administration concomitante d’un produit altérant la fonction rénale peut entraîner une accumulation de metformine.

• La metformine induit une baisse de l’absorption intestinale de glucose qui est alors metabolise en lactate. Elle diminue également la production de glucose par le foie en interférant avec la néoglucogenèse via une diminution de la captation des lactates.

• Une accumulation de metformine expose donc à un risque d’acidose lactique potentiellement grave.

• L’association de metformine et de produits de contraste iodés est contre-indiquée selon le « Thésaurus » de l’ANSM.

ATTITUDE À ADOPTER

• Lucie explique à Mme G. que la metformine doit théoriquement être arrêtée avant ou au moment de l'examen pour une période d'au moins 48 h ou jusqu'au retour d'une fonction rénale normale.

• Mme G. doit consulter avant l’examen d’imagerie son médecin traitant pour déterminer avec lui la conduite à tenir et la surveillance associée.

CAS 11 - CONTRE-INDICATIONS

Ce n’est pas le pied !

Mme E., 67 ans, a un diabète de type 2 depuis 15 ans. Aujourd’hui, elle vient à la pharmacie renouveler son ordonnance : Glucophage 1 000 mg 1 cp matin et soir, Diamicron LM 60 mg 1 cp le matin et Humalog Mix50 KwikPen 16 UI matin et soir. Elle souhaite également acheter des pansements à la feuille de saule car elle a un durillon sous le pied. « Cela ne me fait pas mal mais j’aimerais m’en débarrasser car il est assez gros et c’est un peu rouge autour », indique-t-elle.

Le pharmacien peut-il délivrer ?

Non. L’utilisation de feuille de saule contenant de l’acide salicylique kératolytique est inappropriée chez le diabétique.

ANALYSE DU CAS

• Les lésions du pied chez les diabétiques sont très fréquentes et à haut risque d’ulcération et de surinfection pouvant conduire à l’amputation.

• Ces lésions résultent des complications du diabète : la microangiopathie à l’origine de troubles trophiques retardant la cicatrisation et la neuropathie diabétique associée à une baisse de sensibilité des nerfs de contact, empêchant la perception des petites blessures ou anomalies du pied.

• Le durillon plantaire est une lésion sérieuse chez le diabétique car pouvant évoluer rapidement vers le mal perforant plantaire.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien ne délivre pas le pansement et indique à Mme E. que toute lésion aux pieds nécessite de consulter rapidement son médecin.

• Il rappelle que l’assurance maladie prend en charge (à 60 % ou 100 % en ALD) les soins et actes de prévention podologiques des patients diabétiques, à raison de quatre à six séances par an au maximum en fonction du grade des lésions (grade 2 ou 3).

CAS 12 - PROFILS PARTICULIERS

Baisse de moral

Sylvie T., 36 ans, est diabétique de type 1 depuis 30 ans. Actuellement, elle est traitée par Apidra 100 U/ml 3 injections/jour et Levemir 100 U/l 1 injection le soir. Son diabète est bien équilibré. Ce matin, Sylvie vient à la pharmacie avec une nouvelle ordonnance : fluoxétine 20 mg 1 cp le matin et alprazolam 0,25 mg 1 cp le matin et 2 cp le soir. Il y a quelques mois, Sylvie a perdu son travail. Elle se sent très seule et déprimée. Elle a consulté un psychiatre pour se faire aider. « Je ne me souviens plus ce que le médecin m’a dit sur l’influence de ce nouveau traitement sur mon diabète », dit-elle à la pharmacienne.

Ce traitement expose-t-il à une interaction ?

Chez les patients diabétiques, la glycémie peut être perturbée lors d'un traitement par un inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS).

ANALYSE DU CAS

• La fluoxétine est un ISRS. Comme tout antidépresseur sérotoninergique, elle réduit l’hyperglycémie, normalise le métabolisme glucidique et augmente la sensibilité à l’insuline.

• Des hypoglycémies au cours du traitement par la fluoxétine et des hyperglycémies à l'arrêt du traitement ont été rapportées.

• Jusqu’alors bien équilibré, le diabète de Sylvie T. est susceptible d’être déséquilibré avec ce nouveau traitement.

• Le risque d’hypoglycémie est d’autant plus élevé que la fluoxétine induit fréquemment une baisse d’appétit et des troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhées) en début de traitement, limitant la prise alimentaire et donc les apports glycémiques.

ATTITUDE À ADOPTER

• La pharmacienne réexplique à Sylvie le risque d’hypoglycémie associé à son nouveau traitement. Elle doit être vigilante aux signes d’alerte d’une hypoglycémie : tremblements, sueurs, palpitations… Il est important qu’elle ait toujours sur elle de quoi se resucrer rapidement. Le pharmacien conseille d’emporter systématiquement 6morceaux de sucre, soit l’équivalent de deux resucrages.

• Il est également nécessaire de renforcer la surveillance glycémique. Le pharmacien insiste sur l’augmentation de la fréquence des tests glycémiques : passer de 4 à 6 tests par jour. En fonction des résultats, la posologie de l'insuline devra éventuellement être diminuée.

• Le pharmacien conseille à Sylvie d’informer son médecin traitant de l’instauration de ce nouveau traitement.

CAS 13 - PROFILS PARTICULIERS

Gare aux infiltrations !

M. N., 70 ans, est diabétique de type 2 depuis 18 ans. Il fait attention à son alimentation et conduit bien son traitement antidiabétique (metformine et glimépiride). Avec une hémoglobine glyquée inférieure à 7 %, son diabète est équilibré. Cependant, depuis 5 jours, il constate des taux glycémiques plus élevés que d’habitude. « Je ne comprends pas, je n’ai pas fait d’excès ni changé quoi que ce soit. » En consultant son dossier pharmaceutique, le pharmacien constate que 2 boîtes d’Altim ont été délivrées à M. N. le mois dernier.

Qu’en pense le pharmacien ?

L’injection locale d’un corticoïde peut avoir déséquilibré le diabète de M. N.

ANALYSE DU CAS

• Le cortivazol (Altim) est un glucocorticoïde utilisé en infiltrations pour traiter des affections rhumatologiques.

• Si l’effet hyperglycémiant est bien connu pour la corticothérapie orale, il existe également en cas d’infiltration du fait d’un passage systémique du corticoïde.

• La corticothérapie locale n’est pas contre-indiquée chez le patient diabétique mais nécessite une surveillance rapprochée de la glycémie.

• M. N. n’a rien changé à ses habitudes. Les 2 infiltrations rapprochées, pour soulager son arthrose, semblent donc être à l’origine du déséquilibre soudain de son diabète.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien rassure M. N. Le déséquilibre sera transitoire, sur 2 à 3 semaines, sans incidence sur sa maladie dont les complications sont à long terme, à condition de ne pas répéter trop souvent ces infiltrations.

• Le pharmacien conseille à M. N. d’augmenter la surveillance glycémique sur quelques jours et d’informer son médecin traitant et le rhumatologue de la situation.

CAS 14 - PROFILS PARTICULIERS

Un diabète gestationnel

Mme H., 37 ans, est dans son 6e mois de grossesse. Il y a une semaine, elle a fait un test qui a révélé une glycémie trop élevée. Ce matin, elle vient à la pharmacie et est inquiète car, malgré ses efforts alimentaires, sa glycémie ne descend pas en dessous des objectifs fixés. « Le médecin m’a parlé d’injection d’insuline. Je déteste les piqûres. Il n’y a pas des comprimés efficaces ? »

Que répond le pharmacien ?

Les antidiabétiques oraux sont contre-indiqués au cours de la grossesse. Il n’existe à l’heure actuelle que l’insuline pour traiter le diabète gestationnel.

ANALYSE DU CAS

• Le diabète gestationnel est dépisté aux 1er et 3e trimestres de la grossesse chez les femmes à risque (IMC ≥ 25, âge ≥ 35 ans, antécédents de diabète ou d’enfant pesant plus de 4 kg).

• Le diabète gestationnel comporte un risque pour la mère comme pour l’enfant. La complication la plus fréquente est la macrosomie de l’enfant (> 4 kg), pouvant entraîner un accouchement difficile. D’autres complications peuvent survenir : hypoglycémie néonatale, détresse respiratoire… Pour la mère, la complication la plus grave est une prééclampsie.

• Bien que des travaux sur l’emploi des antidiabétiques oraux pendant la grossesse soient en faveur de leur sécurité d’emploi, le manque d’études contre-indique encore leur utilisation chez la femme enceinte.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien explique à Mme H. que son diabète doit être impérativement traité car il expose à des complications graves.

• Il précise que les injections d’insuline sont peu douloureuses. Il recommande d’alterner les sites d'injection, de se piquer dans des zones pourvues de tissu graisseux (cuisse, fesse…) moins sensibles que les parties musclées. Si les injections restent douloureuses, insensibiliser la peau avec un glaçon.

CAS 15 - PROFILS PARTICULIERS

Coup de pompe

Marine, 21 ans, a été diagnostiquée diabétique de type 1 à l’âge de 17 ans. D’abord traitée par injections pluriquotidiennes d’insuline, elle porte depuis 1 an une pompe à insuline. Depuis, son diabète est bien équilibré (HbA1C < 7 %). Aujourd’hui, elle vient à la pharmacie pour acheter Spasfon et Vogalib. Elle se plaint de crampes abdominales et de nausées. « Cela m’a pris d’un seul coup. Je n’ai rien pu manger ce midi. » Cette précision alerte la pharmacienne.

Que suspecte la pharmacienne ?

Les troubles digestifs évoqués peuvent être des signes d’alerte d’une décompensation du diabète.

ANALYSE DU CAS

• Toute modification brutale de l’état de santé d’un patient diabétique doit faire évoquer une décompensation du diabète et, a fortiori, un mauvais fonctionnement de la pompe chez les sujets appareillés.

• Nausées, anorexie, douleurs abdominales, crampes et haleine acétonique sont des symptômes évocateurs d’une cétose.

• La cétose survient en cas d’insulinopénie sévère. Dans le cas de Marine, le pharmacien suspecte une panne de la pompe ou un problème d’occlusion du cathéter qui aurait empêché l’injection d’insuline.

• La chute du taux d'insuline provoque la dégradation des triglycérides stockés dans le tissu adipeux et la libération d'acides gras dans le sang. Les acides gras abondants dans le flux sanguin sont utilisés par le foie pour synthétiser des corps cétoniques.

• La cétose non maîtrisée finit par entraîner un déséquilibre du pH sanguin du à l’accumulation excessive de corps cétoniques dans le sang. On parle alors d’acidocétose. Engageant le pronostic vital, elle constitue une urgence thérapeutique.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien explique à Marine que ses symptômes peuvent être dus à un dysfonctionnement de sa pompe ayant entraîné une hyperglycémie et une cétose.

• Il propose à Marine de réaliser immédiatement une mesure de la glycémie.

• Constatant une glycémie capillaire supérieure à 3 g, il décide d’appeler le SAMU afin que Marine soit prise en charge dans une unité spécialisée. Une perfusion d’insuline et une réhydratation permettront de rétablir la glycémie. Le problème de fonctionnement de la pompe à insuline sera pris en charge en diabétologie.

Prévenir l’iatrogénie

Les questions à se poser lors de la dispensation

Profil du patient

• Altération de la fonction rénale (infection grave, injection d’un produit de contraste iodé, déshydratation) : la metformine est contre-indiquée, inhibiteurs des alphaglucosidases et sulfamides hypoglycémiants en cas d’insuffisance rénale sévère.

• MICI ou occlusion intestinale : inhibiteurs des alphaglucosidases sont contre-indiqués.

• Intoxication aiguë ou chronique à l’alcool : contre-indication de la metformine.

• Patient > 65 ans : contre-indication du glipizide.

• Femme enceinte ou allaitante : contre-indication de tous les antidiabétiques oraux.

Le patient prend-il d’autres médicaments ?

• Médicaments - ou hyperglycémiants : surveillance glycémique renforcée, surtout sous insuline.

• Produits de contraste iodés et tout médicament induisant une insuffisance rénale : arrêt de la metformine durant 48 h à partir de l’examen (risque d’acidose lactique par altération de la fonction rénale).

• Miconazole : contre-indiqué avec les sulfamides hypoglycémiants (augmentation de l’effet hypoglycémiant).

• Bêtabloquants : masquent les prodromes de l’hypoglycémie.

• Alerter sur la présence de sucre dans certains médicaments conseil (sirops antitussifs…).

Prévenir et gérer les effets indésirables

• Troubles digestifs :

Metformine : prendre au milieu ou en fin de repas.

Inhibiteurs des alphaglucosidases : prendre avec les premières bouchées du repas.

- Dans tous les cas : augmentation progressive des posologies à l’instauration du traitement.

• Hypoglycémie :

Répaglinide : prendre 30 min avant un repas assez consistant et seulement s’il est pris.

Sulfamides hypoglycémiants : prendre lors de trois repas équilibrés dans la journée, suffisamment riches en féculents.

Exénatide : dans l’heure précédant les repas.

• Hyperglycémie : éviter toute rupture brutale des traitements??; vérifier le fonctionnement de la pompe à insuline. A évoquer en cas de survenue brutale de troubles digestifs ou un comportement anormal (obnubilations, somnolence).

• Hypo- et hyperglycémie : surveillance glycémique régulière.

• Réactions au site d’injection : rotation des sites d’injection.

• Infections respiratoires liées à la prise de gliptines : procéder à des lavages de nez réguliers, orienter vers une consultation si les symptômes persistent.

• Limiter la consommation d’alcool : risque d’hypoglycémie ne répondant pas au glucagon. Effet antabuse avec le glibenclamide et le glipizide.

Quels conseils donner ?

• Rappeler les règles hygiénodiététiques.

• S’assurer que le patient connaît les signes d’alerte d’une hypo- et d’une hyperglycémie.

• Insister sur l’observance pour prévenir les complications liées au diabète.

• Orienter vers un médecin en cas de lésions aux pieds.

• Orienter le patient une association de malades, qui l’aidera à accepter la maladie et à apprendre à vivre avec.

À RETENIR

Les troubles digestifs associés à la metformine, pourtant transitoires, restent la première cause d’arrêt du traitement.

À RETENIR

De par leur mécanisme d’action, les gliptines sont susceptibles d’augmenter le risque d’infections respiratoires.

À RETENIR

Les incrétino-mimétiques par voie injectable sont responsables d’effets gastro- intestinaux très fréquents en début de traitement.

À RETENIR

La prise de répaglinide doit être supprimée en cas d’alimentation omise ou insuffisante.

Hypoglycémie chez le diabétique

• La valeur généralement retenue pour définir l’hypoglycémie est 0,7 g/l (plus basse chez la femme enceinte et plus élevée chez les personnes âgées).

• L’insulinothérapie en est la cause la plus fréquente, mais les sulfamides et le répaglinide exposent également à un risque d’hypoglycémie.

• Signes d’alerte (glycémie : 0,7 à 0,5 g/l) : différents d'un sujet a l'autre, ils peuvent être absents ou émoussés en cas d’hypoglycémies à répétition, de neuropathie, de traitement par bêtabloquants.

• Signes d’hypoglycémie profonde (< 0,5 g/l) : troubles de l’humeur, du comportement, hémiplégie transitoire, paresthésies buccales, etc., puis coma.

• Traitement :

- Si le patient est conscient : resucrage per os par 15 g de sucres rapides (3 morceaux de sucre) et mesure de la glycémie toutes les 2 heures.

- Si le patient présente des troubles de la conscience sévères : injection IM ou SC de glucagon. Si inefficace, injection de glucose à 30 % par voie IV.

- Cas particulier des patients sous insulinosécréteurs (sulfamides hypoglycémiants et glinide) avec perte de connaissance : hospitalisation systématique avec perfusion prolongée de glucose et surveillance d’au moins 48 heures du fait du risque de récidive.

• Prévention :

• surveillance régulière de la glycémie,

- connaissance des signes d’alerte,

- connaissance des circonstances favorisantes : repas insuffisamment glucidique, prise d’alcool en dehors des repas, exercice intense ou prolongé (risque d’hypoglycémie pendant les 12 à 24 heures suivant un effort prolongé),

- connaissance de la conduite à tenir dès les premiers signes.

- toujours avoir du sucre sur soi.

PRINCIPAUX SIGNES D’ALERTE

À RETENIR

L’insulinothérapie est souvent associée à une prise de poids.

À RETENIR

Les injections d’insuline rapide doivent être maintenues même en cas d’injection accidentelle d’une dose supplémentaire d’insuline lente.

À RETENIR

Le glucagon n’est pas efficace chez les patients dont les réserves hépatiques en glycogènes sont épuisées.

À RETENIR

Le surdosage en acarbose ne majore pas le risque d’hypoglycémie. Seuls des troubles digestifs peuvent être observés.

À RETENIR

L’arrêt brutal des antidiabétiques oraux chez le sujet âgé peut entraîner un syndrome hyperglycémique hyperosmolaire, potentiellement mortel.

Complications métaboliques chez le patient diabétique

• Des complications métaboliques aiguës peuvent émailler l’évolution d’un diabète ou le révéler. Sévères, elles peuvent entraîner un coma voire un décès et relèvent d’une urgence.

• L’hypoglycémie reste la complication la plus redoutée par sa fréquence, la difficulté de la prévenir et sa gravité potentielle (voir page 4).

• Les complications hyperglycémiques du diabète sont l’acidocétose et le syndrome d’hyperglycémie hyperosmolaire (SHH). Elles se manifestent par une augmentation de la prise hydrique et de l’élimination urinaire, des nausées et vomissements, des douleurs abdominales et parfois des troubles de la conscience. Elles sont dues à une diminution du taux d’insuline ou de son action. L’hyperglycémie qui en découle entraîne une glycosurie avec diurèse osmotique et déshydratation. Dans l’acidocétose s’ajoute une production de corps cétoniques. Dans le condiv de carence insulinique, la lipolyse est augmentée. Les acides gras produits en grande quantité sont oxydés dans le foie en corps cétoniques. Dans la SHH, une sécrétion résiduelle d’insuline empêcherait la formation de corps cétoniques. Les principaux facteurs déclenchants sont un diabète inaugural (acidocétose de l’enfant) ou, chez le diabétique, une infection et l’inobservance au traitement.

• L’acidose lactique résulte le plus souvent du non-respect des règles de prise de la metformine (contre-indiquée en cas d’insuffisance rénale). L’accumulation d’acide lactique serait due à l’inhibition de la néoglucogenèse dont l’un des substrats est le lactate et à l’augmentation de sa production au niveau intestinal. La survenue de douleurs diffuses ou de crampes, éventuellement associées à des troubles digestifs (anorexie) et des malaises, doit faire évoquer cette complication rare mais grave (choc cardiovasculaire, collapsus).

À RETENIR

Tout médicament ou produit susceptible d’entraîner une insuffisance rénale est à éviter avec la metformine.

À RETENIR

Toute plaie au niveau des pieds chez le diabétique nécessite un avis médical.

À RETENIR

L’instauration d’un traitement par antidépresseurs ISRS expose à un risque d’hypoglycémie chez le patient diabétique.

Médicaments modifiant la glycémie

• De nombreux médicaments, autres que les antidiabétiques, peuvent induire des perturbations glycémiques, exposant le sujet diabétique à la survenue de complications métaboliques (1,5 % des accidents hyperosmolaires sont dus aux médicaments).

• Principaux médicaments hyperglycémiants :

- Glucocorticoïdes

- Diurétiques (notamment furosémide à forte dose et autres diurétiques de l’anse)

- œstroprogestatifs, progestatifs

- Bêta-2-stimulants

- Interféron alpha

- Neuroleptiques au long cours

- Inhibiteurs de la protéase du VIH

- Immunosuppresseurs (ciclosporine, tacrolimus)

- Lévothyroxine

- Danazol

• Principaux médicaments hypoglycémiants :

- Aspirine à forte dose

- Tramadol

- Certains antiarythmiques (cibenzoline, disopyramide, hydroquinidine)

- Inhibiteurs de l’enzyme de conversion

- Fibrates

- Sulfamides antibactériens

- Fluoroquinolones

- Antidépresseurs inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine et inhibiteurs de la monoamine-oxydase non sélectifs

- Testostérone et autres stéroïdes anabolisants

• L’emploi de ces médicaments chez un sujet diabétique, s’il est nécessaire, nécessite une surveillance rapprochée (augmentation des contrôles glycémiques journaliers) voire une adaptation posologique des antidiabétiques.

Source : « Guide Prescrire des interactions médicamenteuses », 2015

À RETENIR

Les corticoïdes ont un effet hyperglycémiant quelle que soit leur voie d’administration.

À RETENIR

Après les mesures hygiéno-diététiques, l’insulinothérapie est le seul traitement du diabète gestationnel.

À RETENIR

Les patients traités par pompe à insuline doivent être particulièrement vigilants et réactifs face à la survenue brutale de troubles digestifs évocateurs d’une cétose.

Traitement par pompe à insuline

• La pompe à insuline permet une perfusion continue et modulable reproduisant la sécrétion physiologique d’insuline.

• Le traitement par pompe à insuline est indiqué chez des patients atteints d’un diabète de type 1 (le bénéfice dans le diabète de type 2 insulinorequérant manque encore de preuve scientifique) motivés et éducables à son emploi. La pompe peut également être utilisée chez le nourrisson ou des enfants d’âge préscolaire, nécessitant de petites doses avec des besoins très fluctuants et soumis à des prises alimentaires fréquentes.

• Avantages :

- Evite les limites de durée d’action des injections discontinues d’insuline.

- Plus grande stabilité glycémique et HbA1c significativement plus basse.

- Diminue les traumatismes cutanés associés aux injections répétées.

- Plus grande flexibilité en termes de prises alimentaires et d’activités professionnelles ou de loisir (possibilité de débrancher la pompe 1 à 2 h).

- Diminuerait la mortalité par maladies cardiovasculaires (d’après une étude sur une cohorte suédoise, British Medical Journal, 2015).

• Inconvénients :

- Apparition rapide d’une cétose (2 heures en moyenne) en cas de défaut de perfusion en insuline par dysfonctionnement de la pompe ou obstruction du cathéter.

- Incidence accrue des hypoglycémies (erreurs de programmation).

• Conseils aux patients :

• Avoir un stylo d’analogue rapide en permanence sur soi.

• Autosurveillance glycémique régulière, 6 fois par jour.

- Inspecter le cathéter au moins une fois par jour et le changer en cas de doute (sa durée d’implantation ne doit pas dépasser 3 jours).

- En cas de panne, contacter au plus vite la plate-forme téléphonique d’assistance (disponible 7 j/7 et 24 h/24).

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