PASSÉ DE MODE - Le Moniteur des Pharmacies n° 3087 du 04/07/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3087 du 04/07/2015
 

Marchés : la collection 2014

MÉDICAMENT REMBOURSABLE

Auteur(s) : François Pouzaud

L’évolution du marché pharmaceutique en France confirme l’ancrage du médicament remboursable en territoire négatif, en termes de chiffre d’affaires. En cause essentiellement, la baisse des prix qui devrait perdurer…

La poursuite de la tendance baissière sur le médicament remboursable s’explique essentiellement par les baisses de prix. A cela sont venus s’ajouter la substitution générique, qui reste à un niveau relativement élevé bien que ne progressant plus, les conséquences des réévaluations des molécules (déremboursement des SMR insuffisants, taux de remboursement de 15 %), le large éventail d’actions de la CNAM ciblées auprès des médecins et la forte déconvenue des médicaments d’automédication (- 4,2 %).

La communication annuelle d’IMS sur l’évolution du marché pharmaceutique en France montre que la seule croissance du secteur provient des prescriptions hospitalières dispensées en ville (+ 161 M€ en PFHT). Car les prescriptions des médecins généralistes sont en baisse de 5 %, générant un déficit de 486 M€ par rapport à 2013.

La rétrocession, c’est-à-dire les médicaments achetés par les hôpitaux et dispensé aux patients en ambulatoire, mais comptabilisés dans l’enveloppe des soins de ville de l’Assurance maladie, est à l’origine d’une croissance d’environ 10 % de la dépense hospitalière. Cette dépense étant essentiellement tirée par les nouveaux traitements de l’hépatite C.

En ce qui concerne les remboursements du régime obligatoire, hors Sovaldi, le médicament de ville décroît faiblement de 0,6 %, soit davantage qu’en 2013 (- 0,1 %) mais moins qu’en 2012 (- 1,6 %), année marquée par un très fort effet générique.

Ce faible recul trouve pour partie son origine dans l’abandon des anciens traitements contre le VHC et dans une hausse en 2014 des versements de la rémunération sur objectif de santé publique des pharmaciens. A l’inverse, les remboursements dits de rétrocession hospitalière augmentent de presque 70 %, cette très forte hausse étant intégralement liée à l’arrivée de nouveaux traitements contre le VHC en début d’année 2014.

En 2015, l’effet de levier des médicaments de l’hépatite C devrait également entraîner un léger rebond du marché puisque l’Assurance maladie a provisionné une enveloppe de 700 millions d’euros pour cette catégorie de produits. Mais les plans de maîtrise étant de plus en plus sévères et pénalisants pour le médicament, Claude Le Pen, professeur d’économie de la santé et consultant pour IMS Health, s’attend malgré tout à une nouvelle année de baisse du marché des médicaments remboursables en 2015. «  La santé est toujours sous pression, l’objectif national des dépenses d’assurance maladie pour 2015 est le plus bas depuis le plan Juppé de 1996 et le retour à l’équilibre des comptes sociaux est encore loin.  »

Sinon, la croissance se cantonne aux classes traditionnellement dynamiques de la Pharmacopée : les immunosuppresseurs (+ 11,2 % en valeur en prix public, source : IMS), les immunomodulateurs (+ 10,9 %), en particulier les anti-TNF alpha avec une nouvelle poussée (+ 9,6 %) dans la polyarthrite rhumatoïde, les anticancéreux en général (+ 9,4 %) et, à l’intérieur de cette vaste famille, les antinéoplasiques inhibiteurs protéiques (+ 11,5 %). Y participent également des lancements réussis liés à une réelle innovation thérapeutique, comme Xtandi dans le cancer de la prostate.

Concernant les contributeurs à la baisse, toujours selon l’IMS, on retrouve là aussi des habitués du top-10 comme les antihypertenseurs (- 8,2 % en valeur en PFHT), les psychoanaleptiques (- 13,3 %), les anti-Alzheimer (- 25,3 %). En matière de sensibilisation des prescripteurs, la Sécurité sociale a donné un sérieux coup de frein en 2014 à la prescription des hypolipémiants (- 12 % en PFHT, - 13,3 % en PPTTC). D’ailleurs, depuis le 1er novembre 2014, les médecins doivent soumettre une demande d’accord préalable à l’Assurance maladie avant de prescrire Crestor et Ezétrol à leurs patients. Et ce pour toute initiation de traitement, c’est-à-dire quand le médicament n’a pas été administré au patient depuis six mois. Les raisons ? Un trop grand nombre de prescriptions et une prise en charge estimée «  particulièrement coûteuse » par l’Assurance maladie. En 2013, Crestor était le 3e médicament le plus remboursé en France (342,8 M€).

Après avoir vu leurs ventes baisser en 2013, les antiulcéreux se reprennent en volume (+ 4,3 %). Les unités vendues en tranquillisants et antidépresseurs se maintiennent respectivement à + 0,9 % et + 1,5 %. Représentant près de 24 % des volumes de médicaments remboursables (prescrits et non prescrits), les analgésiques non morphiniques gardent le cap de la croissance en volume (+ 1,9 %), et stabilisent leur chiffre d’affaires (- 0,1 % en prix public TTC) dans un marché en régression (- 1,1 %).

La France exclue de la reprise

L’an dernier, le marché du médicament remboursable en France a évolué à l’écart de la tendance mondiale qui reste bien orientée en 2014 (+ 8,8 % en valeur), et qui devrait se maintenir à l’horizon 2018 à un rythme de progression soutenu de + 4 % à + 7 % par an grâce au dynamisme des pays émergents qui contribuent pour plus de la moitié à la croissance mondiale.

Si le temps est au beau fixe dans ces pays, il s’éclaircit pour plusieurs pays matures qui renouent significativement avec la croissance (+ 12 % en 2014 pour les Etats-Unis par exemple), un retour qui s’explique par une exposition moins forte des laboratoires de princeps aux pertes de brevets et à une hausse des prix faciaux plus forte qu’en 2013. «  Cette tendance de rebond va se prolonger jusqu’en 2018, sauf pour la France qui restera atone, voire en légère involution », annonce Vincent Bildstein, président d’IMS Health France.

Au niveau des Big Pharmas, les cartes se redistribuent. N’arrivant pas à prendre la part de marché qui devrait leur revenir dans les pays émergents, leur croissance est inférieure à celle du marché, exception faite de Johnson & Johnson qui tire son épingle du jeu grâce à son portefeuille innovant. Ainsi, à l’intérieur d’un top-20 des laboratoires qui est relativement stable, des acteurs très spécialisés sur une aire thérapeutique comme Novo Nordisk dans le diabète et des grands laboratoires de génériques (Teva, Actavis, Mylan) montent en puissance.

Autre tendance de fond soulignée par Vincent Bildstein : le marché pharmaceutique se fragmente avec une présence accrue d’acteurs, à l’inverse des acheteurs qui se concentrent et renforcent leur puissance d’achat (Walgreens, McKesson/Celesio, CVS/pharmacy…). De fait, le poids du top-20, aujourd’hui de 64 %, devrait fondre à 47 % d’ici à 2020 et son renouvellement devrait se faire au profit d’acteurs très spécialisés (Biogen…).

+ 0,2 %

EN VOLUME

2,72 milliards d’unités

- 1,1 %

EN VALEUR

28,5 milliards d’euros

LES DURÉES DE VIE SE RÉDUISENT

Un médicament de spécialité se caractérise aujourd’hui par un cycle de vie court, de quelques années, plutôt que des 17 ans habituels. « Ce cycle de vie est totalement compressé par un flux constant d’innovations qui représentent souvent des progrès majeurs et qui sont alors adoptées à un rythme accéléré », explique Vincent Bildstein, président d’IMS Health France.

L’exemple emblématique est celui des médicaments innovants et très chers dans le traitement de l’hépatite C. Incivo, de Johnson & Johnson, a eu une durée de vie de trois ans avant d’être évincé du marché par Sovaldi de Gilead, aujourd’hui également sur la sellette. Selon IMS, cette tendance va devenir plus fréquente avec le basculement du marché vers des produits de spécialité au coût élevé mais à très forte valeur médicale ajoutée pour les patients, ce qui pose un problème particulier de financement pour ces innovations de rupture et appelle les payeurs à réfléchir à de nouveaux schémas de tarification de l’innovation.

MÉDICAMENT REMBOURSABLE

TOP10

des présentations en volume

1 Doliprane 1 000 mg, cp séc. (8)

2 Dafalgan 1 g, cp pell. (8)

3 Dafalgan 500 mg, gél. (16)

4 Efferalgan 1 g, cp eff. (8)

5 Kardégic 75 mg, sach. (30)

6 Doliprane 1000 mg, cp eff. (8)

7 Uvédose, amp. buv. (1)

8 Lamaline, gél. (16)

9 Doliprane 500 mg, cp séc. (16)

10 Doliprane 1000 mg, gél. (8)

Source : IMS

TOP10

des présentations en valeur

1 Lucentis 10 mg/1 ml, sol. inj. (1 × 0,23 ml)

2 Humira 40 mg, stylo prérempli (2 × 0,8 ml)

3 Lantus Solostar 100 UI/ml (5 × 3 ml)

4 Doliprane 1 000 mg, cp. séc. (8)

5 Zytiga 250 mg, cp. (120)

6 Eyléa 40 mg, sol. inj. (1 × 1 ml)

7 Humira 40 mg, ser. préremplie (2 × 0,8 ml)

8 Seretide Diskus 500/50 (60 doses)

9 Neulasta 6 mg, ser. préremplie (1 × 0,6 ml)

10 Truvada, cp pell. (30)

Source : IMS

UNE CLAUSE DE SAUVEGARDE SUR L’INNOVATION

Les traitements de l’hépatite C ont coûté 650 millions à la sécurité sociale en 2014, grâce à l’accord sur le prix du Sovaldi. 14 000 patients ont été traités par ce médicament l’an dernier, ce qui a dépassé les estimations initiales de 10 000 patients du laboratoire. « Pour limiter les dépenses sur les nouveautés thérapeutiques très chers, les pouvoirs publics ont mis en place un système de réversion en cas de dépassement », explique Claude Le Pen.

Ainsi, en novembre dernier, le prix de Sovaldi a été ramené à 41 000 € pour une cure de 12 semaines. Et en vertu de l’application d’une « clause de sauvegarde », le laboratoire a dû reverser la moitié des dépenses excédentaires de l’Assurance-maladie au-delà de 450 M€.

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