TOUTES LES SOLUTIONS POUR SÉCURISER SON OFFICINE - Le Moniteur des Pharmacies n° 3071 du 14/03/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3071 du 14/03/2015
 

Dossier

Auteur(s) : Chloé Devis

Les pharmacies, tous profils confondus, figurent parmi les points de vente les plus exposés à toute la gamme des actes de malveillance, des incivilités aux braquages à main armée en passant par les vols à l’étalage et les cambriolages. Face aux enjeux matériels et humains de ces risques, s’équiper à la hauteur de ses besoins et adopter les bons réflexes au quotidien sont devenus une nécessité.

Etabli à partir des déclarations adressées par les professionnels à l’Ordre des pharmaciens, le « Panorama 2013 de la sécurité des pharmaciens d’officine » fait état de 161 agressions, un chiffre « bien en deçà de la réalité » déplore Alain Marcillac, référent sécurité de l’institution. « On constate une montée de la violence! », s’alarme également ce pharmacien.

Le nombre de vols à main armée et agressions physiques, qui représentent 39,3 % des faits signalés, enregistre une hausse de presque 5 points par rapport à 2012. Les atteintes à la caisse représentent plus de la moitié des agressions déclarées, pour une progression de 33 % par rapport à 2012. Mais « la vulnérabilité de l’officine est aussi liée à des facteurs spécifiques, comme la vente de produits très convoités, qu’il s’agisse de la parapharmacie ou de stupéfiants. En outre, c’est un lieu qui accueille des patients en souffrance, parfois en détresse sociale, avec des attentes particulières. A cela il faut ajouter un niveau d’exigence des clients de plus en plus élevé en général », relève Sandrine Guyot, spécialiste des violences externes à l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents de travail et des maladies professionnelles (INRS).

Les stupéfiants et les refus de vente pour non-conformité des droits se classent ainsi aux deuxième et troisième rangs des motifs d’agressions. Parallèlement, la « fauche » reste monnaie courante. « Une officine moyenne voit environ 21 000 euros de chiffre d’affaires s’envoler chaque année du fait de la démarque inconnue, et doit vendre trois à quatre produits de plus pour récupérer la marge d’un produit volé. Une hérésie qui justifie amplement les investissements à consentir pour se protéger », estime Olivier Biraud, responsable national des ventes de NT Pharm. Au-delà des pertes pécuniaires, il ne faut pas sous-estimer les conséquences des agressions en termes sanitaires et psychologiques.

Toujours selon le bilan de l’Ordre, 12,6 % des agressions physiques déclarées ont provoqué un arrêt de travail (contre 9,8 % en 2012), voire une hospitalisation dans 5,6 % des cas (3,3 % en 2012). La responsabilité juridique du titulaire est aussi en jeu. « L’employeur a une obligation générale de résultat en matière de sécurité vis-à-vis de ses salariés concernant l’ensemble des risques professionnels, dont font partie les risques psychosociaux liés aux violences causées par un tiers à l’entreprise, rappelle Sandrine Guyot. Il lui incombe donc de définir et mettre en œuvre les moyens de prévenir ce type de situations après avoir identifié la nature des risques. Ces éléments doivent être formalisés au sein du document unique d’évaluation des risques professionnels et réactualisés chaque année. »

Le « diagnostic sécurité », une étape incontournable

En matière de protection des biens comme des personnes, le « diagnostic sécurité » est une étape incontournable. On peut le réaliser en ligne via des formulaires mis à disposition par les chambres de commerce et d’industrie (CCI) et les forces de l’ordre, ou contacter les référents sûreté de la CCI de son département, de la police, de la gendarmerie locale ou encore de l’antenne régionale de l’Ordre des pharmaciens pour une expertise in situ. Cette évaluation permettra d’élaborer un dispositif de sécurisation du point de vente adapté à ses besoins et ses contraintes propres, de jour comme de nuit. Attention, l’efficacité des équipements dépend de leur qualité mais aussi de celle de leur installation ! A ce titre, le CNPP (Centre national de prévention et de protection) délivre des certifications aussi bien aux entreprises spécialisées dans la détection des intrusions (APSAD et NF Service) qu’aux matériels de sécurité électronique et de protection des accès (A2P et NF). Lors de l’examen des devis, il ne faut pas négliger les points concernant la garantie, la maintenance, l’évolutivité des matériels… Mieux vaut également favoriser un installateur proche géographiquement. Pour la plupart des équipements concernés, les prestataires proposent des formules de paiement échelonné dans le temps ou de location.

En matière de vol à l’étalage, « la difficulté vient du fait qu’il n’existe pas un profil type de suspects : des cadres ou des clients réguliers de l’officine peuvent s’y adonner », constate Olivier Biraud. Pour y parer, deux équipements sont de plus en plus souvent associés : les systèmes antivol et les caméras. Avec une certaine efficacité puisque, « dans un secteur donné, on observe un transfert de la démarque inconnue des officines protégées vers celles qui ne le sont pas ou peu », note-t-il.

Systèmes antivol : privilégier l’acoustomagnétique

Les systèmes antivol se composent d’antennes sous forme de portiques placés à l’entrée du magasin, couplées à des étiquettes autocollantes ou insérables équipées de la même technologie, et à des tables de désactivation. Au passage des portiques, les marqueurs non désactivés bipent. La technologie acoustomagnétique est à privilégier car, contrairement à la radiofréquence, elle n’est pas prise en défaut par les emballages métalliques et autres sacs aluminisés. NT Pharm l’intègre dans Paraprotect, tout comme AES dans Pack Pharmacie. Il est également possible de se doter de détecteurs de métal (Metal Stop chez NT Pharm, MetalPointHyperGuard chez Checkpoint Systems, Alert MetalGuard chez Adamis…) qui avertissent le pharmacien dès qu’une personne potentiellement suspecte franchit le seuil de la pharmacie.

Coût : à partir de 1 500 euros pour un portique, de 0,07 euro pour une étiquette adhésive et de 0,42 euro pour une étiquette souple RFID (identification par radiofréquence), et autour de 2 500euros pour un « pack ».

Vidéoprotection : un effet dissuasif à relativiser

Comme les portiques antivol, la vidéoprotection revendique un effet dissuasif, à relativiser néanmoins du fait de sa banalisation et du discernement limité de certains profils d’agresseurs. Elle peut également permettre d’identifier après coup les divs de méfaits. L’installation de caméras requiert une autorisation préfectorale et de la CNIL si les images sont enregistrées, ainsi que l’information du public et son droit d’accès aux images enregistrées, qui doivent elles-mêmes être détruites au bout d’un mois.

L’arrivée de la technologie numérique a permis de miniaturiser les équipements et d’en faciliter l’utilisation, d’améliorer la résolution des images et de proposer de nombreuses fonctionnalités comme la détection de mouvement, l’exportation et le gravage sur CD de séquences, l’impression de photos… De surcroît, les caméras sous IP permettent de consulter les images à distance. Ecrans de dissuasion et caméras factices peuvent compléter le dispositif. « Attention, lorsque des clients fidèles ont été surpris en train de voler, il ne s’agit pas de les perdre en leur bloquant l’accès, mais de les surveiller », conseille Olivier Biraud. Il faut compter pour une officine de taille moyenne entre quatre et six caméras et au moins un écran. Le back-office, voire les issues extérieures, peuvent être également équipées. De nombreux prestataires (Video Consult, NT Pharm, Pharmagest…) proposent des formules clés en main.

En cas d’agression à main armée, il est également possible de recourir à la télésurveillance en donnant l’alerte via une télécommande située sous le comptoir. Mais il est proscrit de déclencher la sirène intérieure sous peine de provoquer un tir involontaire du braqueur pris de panique.

Coût : 4 000 à 5 000 euros pour l’équipement d’une officine de taille moyenne.

Des caisses automatiques pour mieux protéger l’équipe

A raison de 120 par an, les braquages à main armée constituent également une menace sérieuse pour les officines. Les systèmes d’encaissement automatique contribuent à décourager les malfaiteurs potentiels en supprimant la manipulation des pièces et billets et en sécurisant la recette. Ils participent également d’une réduction du stress, facteur d’agressivité, en garantissant l’absence d’erreur de rendu de monnaie et en permettant au personnel de se focaliser sur la relation avec le patient. Le prix reste toutefois élevé. On privilégiera les systèmes compacts, d’intégration aisée, comme le modèle exclusif Cashguard distribué par NT Pharm ou Cashkeeper chez Sokei.

Coût : environ 15 000 euros.

Surveillance humaine : pensez mutualisation

Par ailleurs, les surfaces importantes au rayon parapharmacie conséquent pourront faire appel à la surveillance humaine en s’adressant à une société bénéficiant d’un agrément préfectoral. La prestation peut être mutualisée entre commerçants du même secteur au sein d’un centre commercial, et la présence des agents modulée en fonction de la fréquentation du point de vente. Attention, la législation exige le consentement des personnes pour les fouilles, mais autorise l’appréhension par tout citoyen des individus pris en flagrant délit en vue de les remettre aux forces de l’ordre dans les plus brefs délais.

Coût : à partir de 18,50 euros par heure.

Protection mécanique des accès : la première ligne de défense

Lorsque l’officine est fermée, la protection mécanique des accès constitue sa première ligne de défense, sachant qu’au bout de cinq minutes d’efforts 80 % des malfaiteurs renoncent à leur projet. Le CNPP recommande la pose d’un bloc porte complet résistant à l’effraction et doté d’une serrure à double entrée avec cinq points de condamnation. A défaut, il faut renforcer le dispositif existant et vérifier la solidité du vantail, des huisseries et des gonds. En ce qui concerne la vitrine, l’utilisation d’un verre retardateur d’effraction (classé P6 à P8B) est préconisée pour les officines. Quant aux rideaux, « les plus appropriés sont les modèles métalliques motorisés à lame pleine pour occulter totalement la vitrine », fait savoir Mickaël Silva, chef de produits France Fermetures. La société propose également des modèles en lames ajourées occultantes mais dotées de microperforations qui laissent la possibilité de voir ce qui se passe à l’intérieur de l’officine. « Dans les secteurs les plus sensibles, on prévoira des points de fixation au sol et des serrures renforcées », ajoute Mickaël Silva. Les ouvrants et parois n’échappent pas aux efforts des cambrioleurs. Fenêtres et volets doivent être équipés de barreaux solidement scellés et, côté murs, le choix de matériaux résistants s’impose, ou à défaut le renforcement des parties vulnérables. Attention enfin aux accès possibles par des locaux adjacents et aux caves communicantes.

Coût : hors pose, il faut compter entre 1 000 et 3 000 euros selon le modèle, le type de moteur, etc.

Des systèmes qui détectent les intrus

Versant électronique, les systèmes de détection d’intrusion doivent faire l’objet d’une information visible en vitrine et d’une vérification régulière de leur bon fonctionnement. La pénétration et les déplacements d’intrus peuvent être repérés par la détection périmétrique (ouverture, chocs et vibrations) au niveau des accès et murs, et par la détection volumétrique, le plus souvent par infrarouges passifs, à l’intérieur. Les informations sont transmises à une centrale d’alarme qui active un dispositif d’alarme sonore, éventuellement complété par une alarme lumineuse. Si les systèmes filaires sont réputés plus fiables et permettent d’intégrer davantage de détecteurs, les systèmes sans fil sont plus souples et évolutifs. Certains peuvent être connectés à des caméras pour renforcer la levée de doute, et contrôlés à distance via une application, comme la gamme sans fil E-Sens, chez Daitem. Pour les officines les plus exposées, le système d’alarme peut être complété par un générateur de brouillard, à même de ralentir voire de bloquer la progression des malfaiteurs. Le débit doit atteindre un minimum de 23 m3/seconde pour une réelle efficacité.

Coût : 1 000 à 2 500 euros pour un système complet. A partir de 2 500 euros pour un générateur de brouillard.

La télésurveillance pour parachever le dispositif de sécurité nocturne

Le dispositif de sécurité nocturne de l’officine peut être parachevé par le recours à la télésurveillance. Là encore, l’intérêt est à la fois de dissuader par une mention claire du dispositif et, en cas d’intrusion, de permettre l’intervention rapide d’une équipe, habilitée à faire appel aux forces de l’ordre. En amont, dès le déclenchement des alarmes, la centrale reliée au système de détection aura procédé à une levée de doute soit par l’intermédiaire de micros ou de caméras, soit par interpellation avec code d’identification à composer.

Coût : à partir de 15 euros/mois.

Pour aller plus loin

A lire : la brochure Sécurité des commerces de proximité, publiée par la CNPP et la CCI de l’Essonne, à commander sur www.cnpp.com

A télécharger :

– http://bit.ly/1BjpE6n

Formalités en ligne :

– Ministère de l’Intérieur : http://bit.ly/1F3ok9i

– CNIL : http://bit.ly/1wTQQJd

– Police et gendarmerie : http://bit.ly/1tKnJG2

Et pour les gardes ?

Les gardes requièrent la mise en place de mesures spécifiques en termes d’aménagement comme la mise en place d’un guichet sécurisé et/ou d’un sas. L’agenceur A2M propose ainsi le dispositif Medisafe : ce guichet modulaire en acier inoxydable se décline en deux versions: l’une, compacte, à 2 525 euros HT, et l’autre pourvue d’une fenêtre en verre pare-balles à 3 285 euros HT, à installer sur un mur ou une vitrine.

Gérer les suites d’une agression

En cas d’agression, il faut toujours privilégier la sécurité des personnes en s’abstenant de toute résistance. En revanche, observer attentivement – mais discrètement – son ou ses agresseurs facilitera leur identification ultérieure. Le 17 doit être composé dès que possible. Par la suite, le dépôt de plainte peut être effectué sur rendez-vous et une déclaration d’agression doit être transmise à l’Ordre via son site internet. « Pour les salariés choqués, une prise en charge médicopsychosociale doit intervenir dans les 24 à 48 heures, en prévention du stress posttraumatique », indique Sandrine Guyot (INRS). Là encore, avoir, en amont, identifié les recours possibles (psychiatres formés à la prise en charge des traumatismes, existence d’une cellule spécialisée au sein du CHU le plus proche…) et élaboré une procédure adaptée avec la médecine du travail permet d’être réactif. Selon Sandrine Guyot, « il faut être d’autant plus vigilant que ce n’est pas la nature de l’événement qui détermine la gravité des conséquences psychologiques mais la manière dont il résonne chez chacun ».

Bien s’assurer vis-à-vis des risques de malveillance

Les conseils de Philippe Lequeux-Sauvage, délégué du CDIA (Centre de documentation et d’information sur les assurances).

• Bien connaître son risque vis-à-vis de son activité afin d’informer l’assureur de ses particularités. Dans le cas d’une pharmacie à risque lourd, une visite de risques afin de vérifier les mesures de sécurité permet une meilleure visibilité.

• Lorsque l’on s’installe ou qu’on renouvelle son système de protection, en parler à son assureur qui va peut-être exiger la mise en place d’équipements spécifiques, avec certains agréments, indispensables pour être couvert le cas échéant.

• S’assurer que les garanties du contrat sont en phase avec les stocks de médicaments détenus par l’officine.

• Prévoir des garanties d’agression sur le personnel.

• En cas de réalisation du risque, faire une déclaration à son assurance sous 48 heures au maximum après avoir eu connaissance des faits et réaliser l’état des pertes et dégradations pour pouvoir le soumettre à l’expert. Les vols à l’étalage ne peuvent être indemnisés, il faut qu’il y ait eu effraction ou dégradation.

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