L’ORDRE SECOUÉ MAIS DEBOUT - Le Moniteur des Pharmacies n° 3070 du 07/03/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3070 du 07/03/2015
 
AMENDE SUR LA BIOLOGIE MÉDICALE

L’événement

Auteur(s) : Serge Benaderette*, Loan Tranthimy**

Condamné par le tribunal de l’Union européenne pour infraction aux règles de la concurrence sur le marché de la biologie médicale, l’Ordre des pharmaciens a jeté l’éponge. Cette décision ne met pas pour autant l’instance ordinale à l’abri d’autres conséquences juridiques et financières. Explications.

Le 24 février, la décision est prise. L’Ordre national des pharmaciens ne formulera pas de pourvoi contre la sanction infligée par le Tribunal de l’Union européenne (TUE) pour entrave aux règles de la libre concurrence sur le marché de la biologie médicale. Il va verser 4,75 millions d’euros à la Commission européenne, une amende réduite par rapport aux 5 millions d’euros auxquels cette instance l’avait condamné initialement en décembre 2010. Malgré la « ristourne » consentie, le tribunal de l’Union européenne, auprès de qui l’Ordre a introduit en 2011 un recours en annulation, ou à défaut sollicité une réduction de l’amende, a confirmé l’essentiel de la sanction.

Dans son arrêt du 10 décembre 2014, le TUE maintient les griefs de l’autorité administrative bruxelloise. Il a été sensible aux « preuves » recueillies par celle-ci lors de la perquisition des bureaux de l’Ordre à Paris en novembre 2008. Les documents saisis attesteraient que l’Ordre a eu des comportements qui outrepassent ses prérogatives de puissance publique qui sont celles d’assurer l’indépendance de la profession et la promotion de la santé publique. Comment en est-on arrivé à une situation que la Commission qualifie de « traque systématique des laboratoires liés à des groupes financiers » et aussi à la poursuite « des pharmaciens qui y exercent » ?

Une évolution du régime d’autorisation

A l’époque, où les laboratoires étaient encore à taille humaine, le régime de l’autorisation administrative avait habitué les préfets à solliciter très souvent l’avis préalable de la section G de l’Ordre (biologistes). Cette règle d’usage jouait aussi bien lors de la création d’une structure qu’à chaque modification du capital ou de composition de la SEL. Confrontée à l’arrivée des groupes financiers de biologie, la section G a été amenée à donner son avis sur des cas de démembrement de propriété, d’usufruit, des montages capitalistiques en holdings, des rachats de laboratoires en cascade. Deux laboratoires, Labco et Unilabs, se sont sentis lésés dans ce processus et ont porté plainte en 2007, Unilabs ayant retiré sa demande au bout de cinq mois.

Depuis, la législation a bougé avec la réforme de la biologie en 2010 et sa ratification en 2013. Le rôle de l’Ordre aussi. Pour les inscriptions au tableau des professionnels et des structures, la sectionG s’appuie dorénavant sur les décisions formulées par les agences de régionales de santé (ARS). Elle se garde bien de rendre des avis comme auparavant – alors que ce n’était pas prévu. Face à ce nouveau condiv, le Conseil de l’Ordre n’a pas jugé opportun de repartir pour plusieurs années dans une nouvelle procédure devant la Cour de justice de l’Union européenne et ainsi revenir sur une législation d’autrefois désormais périmée. Même si les motifs, selon l’Ordre, ne manquent pas pour contredire le tribunal sur certains points (vices de l’enquête de la Commission européenne).

Cette décision ordinale ne met pas pour autant un terme à de nouvelles plaintes. Rien n’empêche en effet Labco mais aussi d’autres laboratoires de biologie de se fonder sur l’arrêt du TUE pour réclamer des dommages et intérêts devant la justice française.

L’Ordre n’aurait pas prévu de hausse des cotisations

Sollicité par Le Moniteur, Labco a refusé pour le moment de répondre à nos questions. Autre conséquence qui inquiète les pharmaciens : une hausse des cotisations ordinales pour payer l’amende. Selon Robert Desmoulins, président de la section G, cette amende s’entend sans hausse de cotisations. L’Ordre la paiera avec « les réserves financières générales où les sommes nécessaires ont été progressivement provisionnées depuis 2010 grâce aux économies réalisées par chacune de ses composantes, dont la section de la biologie ».

Si l’ensemble des syndicats de biologie soutient l’Ordre des pharmaciens, le ton est plus critique du côté des syndicats d’officinaux. « Je soutiens l’Ordre mais, dans cette affaire, c’est à lui d’assumer cette situation et non aux pharmaciens. Il est hors de question que les officinaux paient ne serait ce qu’une partie de l’amende », déclare Gilles Bonnefond, président de l’USPO. « L’Ordre a pris des positions qui ne sont pas ordinales mais syndicales. En tant que syndicat, nous ne serions pas allés là où l’Ordre est allé. Cette affaire va lui servir de leçon. Doit-il engager les fonds professionnels sans avoir les assentiments des syndicats ? Ces derniers temps, l’Ordre s’éloigne de ses missions », estime Michel Caillaud, conseiller de l’UNPF.

De son côté, Philippe Gaertner, président de la FSPF, prévient : « C’est un dossier qui concerne la biologie et non la pharmacie d’officine. Or s’il y a d’autres conséquences financières suite à la décision du tribunal européen, je ne veux pas qu’il y ait de surcoût pour l’officine. ».

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