L’OPEN DATA ENTRE-OUVERTE - Le Moniteur des Pharmacies n° 3064 du 24/01/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3064 du 24/01/2015
 
DONNÉES DE SANTÉ

L’événement

Auteur(s) : Emilie Bollinger

L’article 47 du projet de loi de santé crée un nouveau service public d’accès aux données de santé, conformément à la volonté du gouvernement et d’une directive européenne. Une disposition qui commence à être contestée par les acteurs de l’e-santé.

L’idée du projet de loi est de centraliser les données de santé issues de l’Assurance maladie, des systèmes d’information hospitaliers, du secteur médico-social et des collectivités locales sur les causes de décès ainsi que des systèmes d’information de l’assurance maladie complémentaire, explique Pierre Desmarais, avocat spécialisé en e-santé. L’intérêt en est évidemment cette véritable mine d’or, qui permettra notamment de progresser dans la recherche, la surveillance des épidémies ou l’évaluation des politiques de santé. » Mais dans sa rédaction actuelle, l’article 47 crée un conflit d’interprétation entre les acteurs, certains y voyant une sincère volonté d’ouverture aux données et d’autres une restriction aux seuls acteurs publics. « En l’état actuel du div, l’accès à cette base de données ne sera permis qu’aux organismes à but non lucratif, les autres – les industriels ou la presse par exemple – devront passer par un tiers de confiance validé par la CNIL*, ajoute Pierre Desmarais. L’autre difficulté est que pour être autorisé l’accès aux données devra correspondre à une des finalités prévues par la loi et que la recherche entreprise soit d’intérêt public. Enfin, les résultats des études qui résulteront de l’accès à ces données devront être soumis à un comité d’experts de la CNIL. »

Se sentent notamment exclus des acteurs aussi divers que les associations de patients, les industriels ou les assureurs complémentaires. Ainsi par exemple, l’Observatoire citoyen des restes à charges en santé, composé du Collectif interassociatif sur la santé, du magazine 60 Millions de consommateurs et de la société Santéclair, filiale de complémentaires santé, se sont récemment inquiétés de ne plus pouvoir enquêter sur les coûts de santé faute de ne plus avoir accès aux données à l’avenir. La semaine dernière, lors d’un colloque sur le projet de loi santé, le directeur de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) a assuré que le projet de loi avait pour objectif « une ouverture la plus large possible et compatible avec la protection de la vie privée, sous réserve que l’étude ou la recherche présente un intérêt public », a rapporté l’Agence de presse médicale. Dans son étude d’impact sur le projet de loi, le législateur a indiqué que « le pilotage actuel, centré sur les procédures d’autorisation, a souffert jusqu’à la période récente de l’absence d’une doctrine claire » et que « l’accès des chercheurs est parfois trop difficile, parfois insuffisamment encadré ».

Deux types de données de santé : l’open data régulée et l’open data stricto sensu

Pour sa part, l’Institut des données de santé (IDS), qui a pour mission la mise à disposition de données pour ses membres, vient de souligner dans son rapport annuel au Parlement son souhait de voir « encadrer, tout en simplifiant, la procédure d’accès aux données de santé pour les rendre plus largement disponibles ». Elle rappelle aussi la distinction entre l’open data dite « régulée », qui concerne des données individuelles anonymisées et l’open data « stricto sensu ». Il s’agit dans ce dernier cas des grandes bases de données agrégées qui ont pour l’IDS vocation à « être accessibles directement, y compris par le grand public, car complètement anonymes ». C’est notamment le cas de la plate-forme www.data.gouv.fr ouverte il y a un an et sur laquelle les acteurs du monde de la santé peuvent déposer des jeux de données pour les mettre à disposition du plus grand nombre. Ainsi, par exemple, la Haute Autorité de santé a publié sur ce site, avant Noël, plusieurs de ses bases de données, dont l’évaluation du dispositif médical, les logiciels de prescription certifiés et les accréditations des médecins. Quant à l’Assurance maladie, longtemps accusée de garder pour elle ses données, elle fait montre actuellement d’une volonté d’ouverture. Ainsi, le lundi 26 janvier, elle organise avec Etalab, le service du Premier ministre sur les données publiques, son premier Hackathon. En invitant des développeurs, des économistes, des chercheurs, la journée aura pour but « d’évaluer le potentiel d’utilisation de données médico-administratives, d’identifier les enrichissements à apporter et de valider les principes opératoires en vue d’une ouverture de données de santé ». Concrètement, dans ce test grandeur nature, des jeux de données sur les remboursements mensuels de l’Assurance maladie seront mis à disposition des participants afin de voir quels types d’utilisation peuvent en être faits et dans quelles conditions.

* Commission nationale de l’informatique et des libertés.

INTERVIEW
MARTIAL FRAYSSE PRÉSIDENT DE L’ORDRE RÉGIONALDES PHARMACIENS D’ILE-DE-FRANCE ET MEMBRE DU COMITÉ D’EXPERT DE L’INSTITUT DES DONNÉES DE SANTÉ

« Les pharmaciens doivent s’intéresser à l’open data »

L’article 47 du projet de loi santé pose-t-il aujourd’hui problème ?

La ministre de la Santé avait réuni les représentants de la société civile sur le sujet de l’open data il y a un an. La commission open data avait ensuite établi un rapport qui a été remis à la ministre et à partir duquel elle a élaboré l’article 47 de son projet de loi qui porte sur les données de santé. Cet article très technique comporte aujourd’hui des difficultés d’interprétation sur sa portée véritable en termes d’ouverture des données de santé. Cela sera certainement clarifié lors de l’examen parlementaire.

Les données du dossier pharmaceutiques sont-elles concernées ?

Les pharmaciens sont des créateurs de données de santé, parfaitement confidentielles et traitées de manière tout à fait sécurisées. Mais les données du DP n’entrent pas aujourd’hui dans le champ de l’article 47. En revanche, la volonté aujourd’hui du gouvernement d’avoir un portail en open data sur les données de santé doit encourager les pharmaciens à s’y intéresser et se demander en quoi elles peuvent leur être utiles. Sur le site www.data.gouv.fr, plusieurs données ont déjà été mises en ligne, notamment sur le médicament. C’est intéressant d’aller y jeter un œilet de réfléchir à comment on peut les utiliser, y compris pour améliorer son exercice professionnel.

Propos recueillis par Emilie Bollinger

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