Moi, Günther, pharmacien de 2030 - Le Moniteur des Pharmacies n° 3053 du 01/11/2014 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3053 du 01/11/2014
 

L’événement

Auteur(s) : Hélène Mauduit

Alors que les pharmaciens souffrent depuis cinq ans des mesures d’économies sur le médicament et de la concurrence des pharmacies en ligne, la tentation est forte de trouver de la marge sur d’autres produits. Solution, pour l’Union fédérale des associations de pharmaciens (ABDA) : les missions officinales.

Qui seront les pharmaciens allemands de demain ? La réponse est désormais claire : des spécialistes du médicament proches de leurs patients. Lancé en septembre 2013, lors de son congrès annuel, le projet « Apotheke 2030 », a été mené tambour battant sous la houlette de Mathias Arnold, vice-président de l’ABDA, qui regroupe syndicats et chambres ordinales : un groupe de travail, des réunions régionales, une consultation sur Internet en avril (4 400 pharmaciens se sont connectés, soit 20 % de la profession, déposant 1 300 commentaires) et deux jours de convention à Berlin.

Comme prévu, c’est au congrès annuel, à Munich du 17 au 19 septembre, que le document de 10 pages définissant les missions clés du pharmacien a été adopté à la quasi-unanimité. Son contenu a été intensément discuté pendant près d’un an. Au final, le div a beaucoup évolué et l’ABDA se sent revigorée par ce qu’elle considère être un dialogue interne réussi. « Les officinaux veulent être considérés comme les gestionnaires des prescriptions et de leur renouvellement, souligne Mathias Arnold. Apotheke 2030 affirme haut et fort leur rôle de spécialiste du médicament. Cela était nécessaire car certains nous voient que comme des logisticiens, d’autres comme des prestataires de soins. » Le document liste les missions : conseil sur la sûreté des thérapies médicamenteuses (conseils de base sur la prise, l’observance, le dosage), analyse et gestion de médication (pour les patients polymédiqués, un bilan initial pour faire « le ménage », un suivi régulier, un allégement ou une augmentation de dose), pharmacovigilance, surveillance de l’approvisionnement, détection des contrefaçons, préparation individuelle.

La prévention, pour laquelle les pharmaciens mènent déjà de nombreuses actions de sensibilisation auprès de la population, n’est pas oubliée. Dans ce domaine, le président du syndicat des pharmaciens (DAV), Fritz Becker, a estimé que la prochaine loi de santé publique, prévue pour 2015, pourrait utilement impliquer les officinaux dans l’amélioration de la couverture vaccinale. Pas question que les pharmaciens vaccinent eux-mêmes, mais ils pourraient proposer un bilan de vaccination, rapide à mener, notamment pour les jeunes adultes et orienter vers le médecin.

Une rémunération liée au rendement

Sans que l’expression pharmacien référent ou pharmacien de famille figure dans le document, le nouveau profil s’y apparente. Evolution démographique oblige, les officinaux visent surtout le conseil aux patients âgés, malades chroniques et polymédiqués, pour diminuer l’iatrogénie (voir encadré p. 8). Pour le président de l’ABDA, Friedemann Schmidt, pas question de concurrencer le médecin traitant, mais plutôt de le « décharger d’une partie de ses tâches ». Un exemple ? Le renouvellement d’une ordonnance sans consultation au cabinet.

Les pharmaciens veulent aussi davantage travailler en réseaux structurés avec les autres professionnels de santé dans une optique de coordination autour du patient. Le sujet, plus technique, de la rémunération, n’est pas abordé en détail dans ce document stratégique. Il ne mentionne que la nécessité d’une rémunération « liée au rendement, dynamique et correcte ». Mais Fritz Becker a été clair au cours du congrès : le système actuel doit être élargi. Le premier pilier (marge commerciale de 3 % du PFHT, forfait par boîte de 8,35 € et forfait pour le service d’urgence de nuit, soit 252,75 € financés par une contribution de 0,16 € sur chaque boîte) doit être complété par un deuxième pilier, des forfaits sur des services rendus dans la gestion du médicament.

Si les pharmaciens sont satisfaits de ce compromis trouvé au sein de la profession, ils risquent de faire des mécontents, dont les médecins. L’ancien président de l’Union fédérale des médecins conventionnés (KBV), Andreas Köhler, les a mis en garde contre d’éventuelles frictions. « Il va falloir trouver le moyen de bien communiquer avec les syndicats », et les rassurer sur le fait que les pharmaciens ne veulent pas leur retirer de compétences. La question financière sera délicate, a-t-il ajouté, car dans le condiv très contraint d’économies, si les caisses veulent donner plus aux pharmaciens pour reconnaître ces nouvelles tâches, elles seront tentées d’épargner sur les honoraires des médecins.

Apotheke 2030 aborde aussi la question de la formation. Le niveau d’exigence doit être élevé, pour le pharmacien (études universitaires, examen d’Etat, inscription à l’Ordre) et les autres personnels de l’officine, pour assurer ces nouvelles tâches. Friedemann Schmidt a d’ailleurs souhaité l’allongement d’au moins un semestre des études de pharmacie, permettant notamment l’introduction de modules sur la communication avec les patients. Le sujet doit être débattu avec les universités. Les études de pharmacie durent actuellement au minimum 4 ans (8 semestres), plus une année de stage (dont 6 mois obligatoires en officine).

Trois projets pilotes

• Le projet ARMIN, mené depuis l’été 2014 dans les régions de Saxe et de Thuringe, est une collaboration entre pharmaciens et médecins pour maîtriser et sécuriser la consommation de médicaments de patients malades chroniques polymédiqués. Menée avec la caisse d’assurance maladie AOK, elle donne lieu à rémunération : 94,50 € à la première consultation, 21 € par trimestre ensuite (photo ci-dessus).

• Le programme Athina, basé sur le modèle américain du « brown-bag-check », a été lancé en septembre 2013 en Rhénanie du Nord-Westphalie et Basse-Saxe. Il permet de faire le bilan de prise de médicaments d’une personne (prescription et automédication) qui vient à la pharmacie avec tous les médicaments qu’elle prend. Le pharmacien fait un bilan pour vérifier le dosage et les prises et identifier des doublons, des interactions ou une péremption. Ce service est pour l’instant gratuit, il est prévu qu’il devienne payant.

• L’ABDA a signé en mai 2014 avec la caisse maladie TK un programme de suivi par le pharmacien de patients diabétiques (de type 2) volontaires : deux rendez-vous de conseil sur la prise de médicament rémunérés pour le pharmacien : 30 euros le premier rendez-vous (30 minutes), 20 euros le second (15 minutes).

Une extension est envisagée pour les patients atteints de pathologies coronariennes ou souffrant de rhumatismes.

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