CINQ CONSEILS POUR S’ORGANISER - Le Moniteur des Pharmacies n° 3027 du 12/04/2014 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3027 du 12/04/2014
 
AMPLITUDES HORAIRES ÉLARGIES

Entreprise

Auteur(s) : Chloé Devis

L’amplitude horaire est une variable d’ajustement intéressante pour mieux répondre aux besoins de ses clients et en recruter de nouveaux, dans un contexte économique tendu. Mais la décision d’élargir ses plages d’ouverture doit être réfléchie et concertée.

1 Miser sur le service plus que sur la rentabilité à court terme

La tendance est à l’accroissement des amplitudes horaires des pharmacies, en lien avec l’augmentation de leur taille moyenne, mais aussi avec l’évolution de leur environnement et des modes de vie. On peut ainsi vouloir s’aligner sur les horaires des structures de soins locales ou encore des grandes surfaces à proximité, mais aussi chercher à capter les actifs à leur départ ou à leur retour du travail, à la ville comme à la campagne. C’est à la demande même de ses clients que Tifenn Faury et ses associés de la Pharmacie du Réolais, à La Réole (Gironde), ont décidé de ne plus faire de coupure méridienne.

De son côté, Eric Viller, titulaire à Saint-Astier (Dordogne), a choisi d’élargir ses horaires pour « garantir la continuité des soins. Désormais, nous baissons le rideau en même temps que le cabinet médical le soir, et nous ouvrons le samedi après-midi jusqu’au début de la garde, alors qu’aucune autre officine ne le fait sur un canton de 20 000 habitants ». Avec des surprises quant au profil des clients qui profitent de ces nouveaux créneaux, comme « des aide-ménagères qui viennent le soir pour prendre les traitements des personnes dont elles s’occupent pour le lendemain, ou des infirmières ayant besoin de matériel en urgence ». Le service au client et l’image de l’officine en sortent renforcés. Mais à condition de ne pas attendre de miracle économique. Malgré quarante personnes reçues pendant les deux heures supplémentaires d’ouverture le samedi décidées récemment, Eric Viller témoigne qu’entre la hausse du chiffre d’affaires et le coût des heures supplémentaires, l’officine ne tire aucun bénéfice financier.

2 Définir en amont les contraintes et les besoins

« La mise en place d’horaires plus étendus doit relever d’un choix mûrement réfléchi et ce, pour une raison simple : il n’est pas question de revenir en arrière, prévient Brigitte Defoulny, directrice du cabinet Héliotrope. Le titulaire doit avoir analysé en amont le condiv de l’officine, les besoins de ses clients et de ceux qu’il espère attirer. Cette réflexion doit être aussi globale que possible car il peut y avoir des répercussions sur son offre et son positionnement. »

Le modèle économique de l’officine doit aussi permettre d’assumer le coût des heures supplémentaires - que le titulaire peut obliger ses salariés à effectuer-voire celui d’un recrutement. Des facteurs comme la taille de l’équipe et le nombre d’associés, mais aussi la qualité de l’ambiance de travail, sont décisifs pour la bonne marche de la nouvelle organisation, sans oublier que la présence d’un pharmacien reste requise tout au long de la plage d’ouverture. « Il existe un risque non négligeable pour le titulaire d’avoir à jouer les “bouche-trous”, avec des journées chargées à la clé, si l’équipe est trop restreinte ou pas assez motivée », alerte Brigitte Defoulny. On peut suivre l’exemple d’Eric Viller, qui a choisi d’élargir progressivement ses plages d’ouverture pour tester la pertinence de sa démarche.

A noter : la durée quotidienne de travail effectif ne peut excéder 10 heures par jour dans le cadre d’une journée de travail dont l’amplitude ne pourra être supérieure à 12 heures.

3 Associer l’équipe à la démarche

« Certes, d’un point de vue réglementaire, l’employeur peut modifier les horaires de travail des salariés à temps plein sans avoir besoin d’obtenir leur accord préalable. Cet accord n’est requis que pour les seuls salariés à temps partiel », rappelle Annie Cohen-Wacrenier, associée au cabinet ACW Conseil. Pour autant, le choix des nouvelles modalités d’organisation ne peut faire l’économie d’une concertation avec l’équipe. « En tenant compte des impératifs de chacun, on aboutira à une solution moins conflictuelle et plus pérenne à terme, observe Bertrand Poulet, consultant chez Demos. A ce titre, la première étape est de partager avec l’équipe le constat qui amène à envisager une telle option en s’appuyant sur des chiffres et des faits. » Le consultant recommande également au titulaire de laisser aux collaborateurs le temps de réfléchir à la problématique exposée, sans imposer d’emblée ses idées. « On est plus prompt à s’approprier une démarche que l’on a contribué à élaborer », arguë-t-il. Pour Brigitte Defoulny, « le titulaire doit avoir réfléchi en amont, de la manière la plus posée et objective possible, à l’organisation qu’il pourrait mettre en place en fonction des compétences, des profils mais aussi des situations familiales de chacun ». Elle recommande ensuite de procéder à des entretiens individuels pour se faire une idée précise des desiderata de chacun, mais sans s’engager encore à ce stade. Pour Bertrand Poulet « la négociation collective est à privilégier afin de ne pas donner prise aux soupçons de favoritisme ». Une fois venu le moment d’élaborer le nouveau planning, c’est bien le titulaire qui devra trancher, « en s’appuyant sur des critères clairs et explicites », insiste-t-il. Les compensations peuvent être de différente nature : paiement d’heures supplémentaires, repos compensateur, adaptation des horaires à des contraintes familiales…

Eric Viller a ainsi réussi à mettre sur pied une formule « gagnant-gagnant » : « Les préparatrices viennent travailler le samedi par roulement et récupèrent le lundi matin, tandis que mon associé et moi assurons l’heure supplémentaire le soir, détaille-t-il. Pour avoir les effectifs nécessaires lors des pics d’activité, nous avons également mis en place un compte-temps qui permet à nos collabo- ratrices de récupérer le temps de travail supplémentaire accumulé sous forme de journées ou de demi-journées. »

4 Communiquer auprès des confrères et des clients

Si rien n’oblige à avertir ses confrères d’un changement de ses horaires, « la façon d’agir dépendra des motivations de sa décision et de la qualité de ses relations avec les autres officines du secteur. Si elles sont bonnes, mieux vaut les préserver en les informant à l’avance de sa démarche », suggère Brigitte Defoulny. Vis-à-vis des clients, il s’agit cette fois de communiquer au comptoir d’une part, mais aussi en faisant passer l’information auprès du cabinet médical et des autres structures de soins voisines. « On favorisera la prise en compte de ce changement en le calant à une date repère comme le début d’année ou la rentrée scolaire », ajoute la dirigeante d’Héliotrope.

A noter : il est possible d’afficher les nouveaux horaires en vitrine ou de diffuser des flyers auprès de ses clients à l’intérieur de l’officine, voire auprès du service de garde de l’hôpital le plus proche, en restant dans un registre purement informatif, respectueux des recommandations ordinales.

5 Animer la nouvelle organisation

« Une fois le remaniement horaire mis en œuvre, le manager devra rester vigilant et assurer le suivi nécessaire pour pérenniser le nouveau système, insiste Bertrand Poulet. Il y aura sans doute des retards, des ratés, c’est à lui de maintenir la cohésion de l’équipe en veillant au respect des règles et des arbitrages effectués. » Parallèlement, « le titulaire devra rester à l’écoute des difficultés éventuelles rencontrées par ses salariés et procéder à des réajustements si nécessaire ». Les trois premiers mois sont cruciaux en ce sens. « Au terme de cette période, il faut aussi savoir reconnaître et valoriser les efforts accomplis, et pourquoi pas marquer le coup par un déjeuner d’équipe par exemple », suggère Bertrand Poulet.

Ouverture 24 h/24 : des enjeux spécifiques

« Une pharmacie ouverte 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 bénéficie d’une notoriété incontestable, mais les contraintes liées aux coûts salariaux et à la gestion du personnel sont fortes, relève l’avocate Annie Cohen-Wacrenier. Ainsi, afin de couvrir le coût d’un pharmacien et d’un vigile, le chiffre d’affaires minimal à réaliser la nuit est de 1 500 € HT. En outre, peu de pharmaciens acceptent de travailler la nuit. Le taux de renouvellement du personnel est donc très élevé. » L’avocate rappelle que « dès lors qu’une modification des horaires, temporaire ou définitive, a pour effet de faire travailler un salarié la nuit, son accord préalable est requis. Le salarié peut refuser s’il établit que ce rythme est incompatible avec ses obligations familiales, sans que cela constitue une faute ou un motif de licenciement. En moyenne, la masse salariale est augmentée d’environ 20 %, pour un CA qui augmente d’environ 10 %. »

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