DÉTECTER ET PRÉVENIR LE MAL-ÊTRE AU TRAVAIL - Le Moniteur des Pharmacies n° 3019 du 15/02/2014 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3019 du 15/02/2014
 
RISQUES PSYCHOSOCIAUX

Entreprise

Auteur(s) : Françoise Sigot

Les risques psychosociaux n’échappent pas à la vie officinale. Ces maux, qui peuvent vite virer au fléau pour le personnel, et donc l’entreprise, ne doivent pas être pris à la légère. Il faut savoir les détecter, les anticiper et les neutraliser de manière efficace.

Parfois tabou mais de plus en plus médiatisé, le mal-être au travail est désormais identifié comme un facteur de risques. En jeu, la santé psychologique des salariés, qui est forcément affectée par les réactions agressives d’un client mécontent, une mésentente entre collègues, des consignes contradictoires, un traitement inéquitable entre les salariés… Ces dysfonctionnements sont-ils de nature à développer systématiquement une pathologie ? Non, mais, répétés et cumulés, ils ne sont pas sans conséquences.

« Les risques psychosociaux sont souvent issus de situations multifactorielles », rappelle Sandrine Guyot, assistante conseil sur les risques psychosociaux au sein de l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS). A une pluralité de facteurs s’ajoute également leur pérennité pour que le risque soit avéré. Enfin, la conjonction de difficultés inhérentes à l’officine avec d’autres, personnelles et passagères, est aussi un facteur de risques accrus.

Il n’y a pourtant pas toujours de quoi dramatiser. Comme le souligne Philippe Douillet, chargé de mission au département santé au travail de l’ANACT (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail), « ces difficultés font partie de la vie au sein d’un collectif. Ce qui compte, c’est la capacité à réguler les facteurs de risques à temps ».

Détecter les points susceptibles de créer du mécontentement

« Adopter une démarche proactive est le meilleur moyen de limiter les risques psychosociaux », estime Mathieu Poirot, psychologue social. Le fondateur et dirigeant de Midori Consulting conseille, par exemple, de réaliser une étude de satisfaction simple et ciblée sur une poignée de critères (la qualité du conseil et du service, l’attente, la disponibilité des produits) auprès des clients de l’officine afin d’identifier quels sont les points susceptibles de générer des mécontentements. « L’attente du client est l’une des causes qui peuvent provoquer de l’agressivité et donc favoriser le mal-être des équipes. Et de manière générale, la confrontation à des situations difficiles et à la souffrance est un facteur de risque », ajoute le psychologue.

Reste que les facteurs de risques psychosociaux ne se résument pas à des causes externes. « Dans la pratique, ils s’expriment par des objectifs imprécis ou obligations de résultats mal paramétrées. Plus globalement, la faible autonomie dans le travail, les relations difficiles et conflictuelles au sein de l’équipe et avec sa hiérarchie, ou la peur de perdre son emploi sont susceptibles d’agir sur la santé au sens large », explique Sandrine Guyot.

Utiliser les outils d’aide mis à disposition

Pour être certain de ne pas passer à côté d’un facteur de risques psychosociaux, plusieurs outils sont aujourd’hui disponibles. L’INRS et le ministère du Travail mettent notamment à disposition un diagnostic sur leur site Internet (http://bit.ly/1eNuTQe). Baptisé « L’outil pour faire le point », il se présente sous forme d’une grille Excel qui pointe la présence (ou non) de risques psychosociaux, en répondant à une quarantaine de questions. La tenue d’un document unique d’évaluation des risques renseigné par l’entreprise peut être un moment mis à profit pour s’interroger sur l’état de la situation.

En marge des outils, la vigilance de l’employeur et des managers est de mise car le mal-être au travail est porteur de signaux. « Les symptômes peuvent être diffus, c’est pourquoi il faut savoir les détecter à travers des signes tels que l’absentéisme, surtout s’il est de courte durée, mais répété. La décompensation, qui peut s’exprimer par une crise de larme soudaine face à un client agressif ou une remarque de la hiérarchie, doit alerter, ainsi que la difficulté à se concentrer sur son travail », détaille Sandrine Guyot. Pour Philippe Douillet, « les effets des risques psychosociaux ne sont pas toujours identifiables. C’est donc en étant proche de ses équipes, mais aussi en organisant régulièrement des temps de dialogue individuel, que l’on peut les repérer », ajoute le chargé de mission de l’ANACT.

Agir le plus en amont possible

Détecter ne suffit pas, encore faut-il rapidement prendre des mesures pour faire cesser les risques. Souvent, ouvrir le dialogue est à lui seul porteur de solutions pertinentes. « Au sein d’une pharmacie, on passe beaucoup de temps ensemble sur une surface restreinte, cela favorise les tensions. Il est donc bon de prendre le temps de se parler pour que chacun puisse évoquer calmement son ressenti face à une telle situation », conseille Mathieu Poirot. Pour aller plus loin, les médecins du travail, aidés par des intervenants en prévention des risques professionnels et les antennes régionales de l’ANACT (les ARACT), sont de précieux conseils pour trouver des solutions. Car il faut ouvrir les yeux et changer les modes de relation et d’organisation, sous peine de voir les risques psychosociaux se transformer en fléau. « Dès lors que l’on soupçonne la présence d’un ou de plusieurs facteurs de risque, il faut en parler. Sinon, la situation finit toujours par dégénérer », assure Mathieu Poirot, qui évalue à 30 % le poids des risques psychosociaux sur la productivité d’une organisation ! De quoi faire réfléchir.

Un guide pour prévenir

L’initiative est à mettre à l’actif du syndicat des pharmaciens des Bouches-du-Rhône et du GIMS13, la médecine du travail du secteur. Sa forme ? Un guide qui aborde le sujet des risques en officine et notamment les risques psychosociaux. « Ce guide a été conçu avec des pharmaciens, donc il cible parfaitement les difficultés. C’est un outil simple qui a pour vocation de les aider à rédiger leur document unique d’évaluation », explique Sandrine Muller, responsable du pôle technique au sein du GIMS13. Cet ouvrage didactique est distribué aux pharmaciens des Bouches-du-Rhône. « Il a été conçu à partir d’un travail fait en collaboration avec huit pharmacies du département. Notre objectif est de sensibiliser les titulaires aux risques présents dans l’officine », explique Roland Creuseveau, pharmacien à Marseille, qui a participé à la rédaction du guide.

Obligations de l’employeur

• Prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs en vertu de la loi du 31 décembre 1991.

• Faire l’inventaire des risques (dangers et différents facteurs de pénibilité) dans un document unique d’évaluation.

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