LE CANCER DE LA PROSTATE - Le Moniteur des Pharmacies n° 2997 du 07/09/2013 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2997 du 07/09/2013
 

Cahiers Formation du Moniteur

ORDONNANCE

ANALYSE D’ORDONNANCE

M. B., 65 ans, débute un traitement par Zytiga

RÉCEPTION DES ORDONNANCES

Pour qui ?

M. B., 65 ans. C’est son épouse qui vient chercher les médicaments.

Par quel médecin ?

Le médecin oncologue qui le suit à l’hôpital.

L’ordonnance est-elle conforme à la législation ?

Oui, car le Pr Martin est onco-urologue hospitalier. Or Zytiga est soumis à une prescription initiale hospitalière annuelle émanant d’un médecin compétent en oncologie et Xgeva doit être prescrit par un rhumatologue ou un médecin compétent en oncologie.

QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?

Que savez-vous du patient ?

M. B est atteint d’un cancer de la prostate depuis 10 ans. Après prostatectomie radicale, il a suivi une hormonothérapie qui a inclus un analogue de la LH-RH (Zoladex) et un antiandrogène non stéroïdien (Casodex). L’apparition de métastases a ensuite conduit le médecin à instaurer une chimiothérapie par docétaxel, en association à Zoladex. Affaibli par ces traitements, M. B. est dénutri et souffre de douleurs osseuses au bassin et au rachis.

Quel était le motif de consultation de M. B ?

Elle avait lieu dans le cadre du suivi de son cancer.

Vérification de l’historique patient

M. B. est sous Zoladex depuis 5 ans. Casodex a été arrêté avant la chimiothérapie. M. B. prend un hypocholestérolémiant et un inhibiteur de l’enzyme de conversion en raison des effets indésirables dus à la supression androgénique - induite par l’analogue de la LH-RH (voir p. 9). M. B. prend également du calcium et de la vitamine D3 pour limiter la perte osseuse liée à cette privation androgénique.

LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?

Que comporte la prescription ?

• Zytiga (acétate d’abiratérone) bloque la production d’androgènes par les testicules, les surrénales et les cellules tumorales prostatiques. Il est indiqué après échec de la suppression androgénique ou de la chimiothérapie dans les cancers métastatiques de la prostate. En parallèle de la baisse des androgènes, il induit une chute du cortisol et une hyperaldostéronémie à l’origine d’une rétention hydrique (œdèmes), d’une hypertension artérielle et d’une hypokaliémie.

• La prescription concomitante de prednisone (corticoïde) compense la baisse de cortisol et limite l’hyperaldostéronisme (rétrocontrôle sur l’ACTH).

• Zoladex (goséréline), agoniste de la LH-RH, entraîne, après une phase initiale de « flare-up » (voir p. 11), une baisse du taux plasmatique de testostérone. Cette castration par agoniste de la LH-RH est maintenue durant le traitement par Zytiga.

• Xgeva (dénosumab) est un anticorps monoclonal ciblant un médiateur majeur de la destruction osseuse dans les atteintes métastatiques. Il n’est pas spécifique du cancer de la prostate, mais est indiqué dans la prévention des complications osseuses chez les patients atteints de tumeurs solides présentant des métastases osseuses.

Est-elle conforme à la stratégie thérapeutique de référence ?

Oui, les publications les plus récentes font mention de ces nouveaux traitements et de leur intérêt dans la prise en charge du cancer de la prostate. Zytiga et Xgeva sont ici prescrits selon leurs indications respectives.

Y a-t-il des médicaments à marge thérapeutique étroite ?

Non.

Y a-t-il des contre-indications ?

Non, M. B. ne présente pas d’insuffisance hépatique sévère contre-indiquant la prescription de Zytiga ni d’hypocalcémie contre-indiquant Xgeva.

Les posologies sont-elles cohérentes ?

Oui.

Y a-t-il des interactions ?

Non. A noter toutefois que Zytiga peut être à l’origine de nombreuses interactions avec les inhibiteurs ou inducteurs du CYP3A4 et les médicaments métabolisés par le CYP2D6 (voir page 10).

Le traitement nécessite-t-il une surveillance particulière ?

• Sous Zytiga, pression artérielle, kaliémie et rétention hydrique (prise de poids, œdèmes périphériques) sont évaluées mensuellement (plus souvent si risque d’insuffisance cardiaque). Dosage des transaminases avant le début du traitement puis toutes les 2 semaines les 3 premiers mois puis tous les mois.

• Sous Xgeva : surveillance de la calcémie.

Les prescriptions posent-elles un problème particulier ?

• La prescription de Xgeva interpelle le pharmacien.

Sous Xgeva (comme sous biphosphonate), une supplémentation apportant au moins 500 mg de calcium et 400 UI de vitamine D par jour est impérative, sauf en cas d’hypercalcémie (réponse 1). En effet, des cas d’hypocalcémie sévère incluant des décès ont été rapportés. L’épouse de M. B. précise qu’il lui reste bien des comprimés de Cacit D3 mais que le médecin n’a pas donné de précision sur la poursuite de cette supplémentation en calcium et vitamine D.

QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?

Monsieur B. connaît déjà Zoladex mais pas les autres traitements.

Concernant Zytiga et Xgeva

Les modalités de prise de Zytiga sont particulières et doivent être bien expliquées.

La prise de Zytiga avec de la nourriture augmente l’exposition systémique à l’abiratérone. Le patient doit prendre le médicament en une prise quotidienne 2 heures après un repas, et aucune nourriture ne doit être consommée dans l’heure qui suit (réponse 3).

• L’injection de Xgeva doit être réalisée par un professionnel de santé. Elle s’effectue toutes les 4 semaines en sous-cutané au niveau de la cuisse, du bras ou de l’abdomen.

• La prise du corticoïde s’effectue de préférence le matin.

Quand commencer le traitement ?

Le corticoïde et Zytiga peuvent être débutés dès le lendemain. Le patient doit prendre rendez-vous avec l’infirmière pour débuter les injections de Xgeva dès que possible.

Que faire en cas d’oubli ?

• En cas d’oubli d’un comprimé de Zytiga, le patient ne doit pas rattraper la prise. Il poursuivra son traitement le lendemain à l’heure habituelle sans doubler la prise.

• En cas de retard d’administration de Xgeva, faire l’injection dès que possible et attendre quatre semaines avant de réaliser l’injection suivante.

Quels sont les principaux effets indésirables ?

• Sous Zytiga : hypertension artérielle, œdèmes, hypokaliémie sont les effets indésirables liés à l’hyperaldostéronémie, malgré le traitement correcteur par corticoïde. Fréquents : infection du tractus urinaire et perturbation de la fonction hépatique pouvant nécessiter l’arrêt du traitement.

• Xgeva provoque fréquemment des diarrhées et des dyspnées. L’hypocalcémie doit être corrigée avant le début du traitement car des cas graves d’hypocalcémie ont été rapportés. Une ostéonécrose de la mâchoire peut survenir (moins fréquente que sous biphosphonates), notamment en cas de facteurs de risque connus de cette complication : mauvaise hygiène buccale, interventions dentaires invasives (extraction…). Des infections cutanées à type de cellulites ont également été rapportées.

• Les corticoïdes sont notamment à l’origine de troubles hydroélectrolytiques, métaboliques et musculosquelettiques (atrophie musculaire, ostéoporose), de troubles digestifs et cutanés.

Quels sont ceux gérables à l’officine ?

• Sous Zytiga et corticoïdes, il est recommandé de surélever les jambes en position assise et de manger peu salé pour limiter l’apparition des œdèmes.

• Avant de débuter le traitement par Xgeva, un examen dentaire et si besoin des soins préventifs sont recommandés. Un antidiarrhéique (type diosmectite, à prendre à distance des autres traitements) peut être proposé en cas de diarrhée.

Quels signes nécessiteraient d’appeler le médecin ?

• Sous Zytiga : une augmentation de la tension artérielle, des œdèmes importants ou leur aggravation imposent une consultation en urgence.

• Il en est de même sous Xgeva en cas de dyspnée importante ou s’aggravant, de signes d’infection cutanée (zone de peau rouge, gonflée…), de problème dentaire, de crampes musculaires et/ou d’engourdissements des doigts, des orteils ou du pourtour de la bouche (signes d’hypocalcémie).

• Des résultats biologiques perturbés (augmentation des transaminases, hypokaliémie, hypocalcémie) nécessitent aussi une prise en charge rapide.

Concernant Zoladex

Les délivrances de Zoladex sont régulières. La dernière injection a été faite il y a un mois. La prochaine le sera dans 2 mois et les suivantes poursuivies tous les 3 mois.

Conseils complémentaires

• En plus de la surveillance effectuée au cours des visites de suivi, l’automesure tensionnelle peut être recommandée sous abiratérone.

• L’amélioration de la qualité de vie passe par une prise en charge des troubles associés à la maladie : asthénie, anorexie ou encore douleurs doivent être évoquées avec le médecin.

• Une alimentation riche en protéines et le maintien d’un exercice physique journalier (marche…) limitent la fonte musculaire.

• Prévenir les risques de chute liés à l’ostéopénie (enlever les tapis, s’aider d’une canne…).

• Garder le contact avec l’entourage (conversation avec les voisins, jeu avec les petits enfants…) a un effet positif sur le moral et la maladie.

PATHOLOGIE

Le cancer de la prostate en 4 questions

Le cancer de la prostate soulève de nombreuses questions, notamment en ce qui concerne son dépistage. L’objectif est de repérer précocement les tumeurs agressives en évitant de surtraiter les cancers destinés à rester latents.

1 QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?

Le cancer de la prostate ne donne aucun signe clinique spécifique. Au stade local, il est généralement asymptomatique. Les symptômes urinaires (dysurie, pollakiurie, hématurie, rétention urinaire, voire urétéro- hydronéphrose) n’apparaissent qu’à un stade plus avancé et/ou sont le plus souvent liés à l’hyperplasie bénigne fréquemment associée. A un stade avancé, les symptômes sont liés aux métastases.

2 COMMENT SE FAIT LE DIAGNOSTIC ?

Au stade asymptomatique, le diagnostic est souvent évoqué par le toucher rectal (TR) et le dosage du taux de PSA (Prostate Specific Antigen) sérique puis établi par des biopsies de la prostate. Le cancer peut aussi être trouvé fortuitement à l’examen anatomopathologique des tissus prélevés lors du traitement chirurgical d’une hypertrophie bénigne de la prostate (HBP).

TR et PSA

• Le toucher rectal permet de palper la prostate à travers la paroi antérieure du rectum (taille, consistance, recherche d’une induration ou d’un nodule). Un toucher rectal normal n’élimine pas un cancer de la prostate.

• Le PSA est une glycoprotéine sécrétée par les cellules épithéliales prostatiques.

L’élévation du PSA total dans le sang reflète la présence de certaines pathologies prostatiques (HBP, prostatite, cancer) mais n’est pas spécifique de l’une ou de l’autre. Son dosage est toujours associé à un examen clinique et au toucher rectal. La valeur seuil de PSA la plus souvent utilisée pour le diagnostic de cancer de la prostate est de 4 ng/ml, à moduler en fonction de l’âge et du volume prostatique. Sa normalité n’exclut pas le diagnostic.

• Le dosage du PSA libre (fraction du PSA non liée à des protéines) reste réservé à l’urologue.

• Lorsque le PSA total est supérieur à 4 ng/ml, la réalisation de biopsies prostatiques peut être proposée. Cependant, toute élévation du PSA ne doit pas amener d’emblée à une biopsie. Il peut être utile auparavant de connaître la cinétique du PSA. La vélocité du PSA est exprimée en ng/ml/an. Une augmentation de plus de 0,5 à 0,75 ng/ml/an est suspecte. Le temps de doublement correspond au temps que met le taux de PSA pour être multiplié par deux.

Biopsies prostatiques

• La réalisation de biopsies prostatiques est indiquée en cas de toucher rectal suspect, indépendamment de la valeur du PSA. En l’absence d’anomalies au TR et en présence d’une élévation du taux de PSA, la réalisation de biopsies est envisagée si l’espérance de vie du patient est estimée supérieure à 10 ans. Si l’espérance de vie est réduite, l’intérêt de réaliser des biopsies prostatiques est discuté au cas par cas. Au moins 12 prélèvements biopsiques sont réalisés sur l’ensemble de la glande prostatique. En raison du risque hémorragique et infectieux, une antibioprophylaxie par quinolone est mise en place.

• L’examen anatomopathologique des prélèvements biopsiques transrectaux confirme le diagnostic. Dans 99 % des cas, le cancer de la prostate est un adénocarcinome. Outre le type histologique, certains éléments permettent de juger de l’agressivité de la tumeur et d’orienter la décision thérapeutique : grade histologique (score de Gleason) reflétant le stade de différenciation des différents foyers cancéreux, extension au tissu périprostatique, nombre de carottes (prélèvements) envahies.

Imagerie

• Aucune imagerie n’est nécessaire. L’échographie endorectale est seulement indiquée pour le guidage des prélèvements biopsiques.

• L’IRM prostatique est souvent utilisée chez des patients dont le taux de PSA continue d’augmenter malgré une première série de biopsies négatives, afin de juger de l’opportunité d’une seconde série de biopsies.

• En cas de cancer avéré, d’autres examens permettent d’évaluer l’envahissement local, ganglionnaire ou à distance (scanner abdominopelvien, IRM prostatique endorectale, scintigraphie osseuse, IRM corps entier).

Classification TNM

A l’issue du bilan initial, la tumeur est classée selon son stade cTNM : « c » désigne le stade clinique préthérapeutique, « T », le stade de la tumeur, « N », la présence d’adénopathies cliniques et « M », l’absence (M0) ou la présence (M1) de métastases à distance. On distingue ainsi les tumeurs localisées (sans franchissement de la capsule) à faible risque évolutif, à risque intermédiaire et à haut risque ; les tumeurs localement avancées (capsule franchie) ; les tumeurs au stade métastatique.

3 QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE ?

• Sont à risque les hommes ayant un antécédent familial de cancer de la prostate : au moins deux cas collatéraux ou de survenue précoce (avant 55 ans). Le risque de cancer de la prostate est multiplié par 2 à 5 en cas d’antécédents familiaux de ce cancer chez des parents du premier degré (père, fils), le risque étant plus élevé lorsque 2 parents ou plus sont atteints.

• L’origine afro-antillaise constitue aussi un facteur de risque. Le risque est faible chez les hommes asiatiques.

• Le rôle protecteur, brièvement évoqué, de la tomate et de ses dérivés, des protéines du soja, du thé vert, du sélénium, de la vitamine E, etc., n’est pas démontré.

4 QUELLE EST L’ÉVOLUTION ?

• Le cancer de la prostate a souvent une évolution très lente, sur plusieurs années, certaines formes restant latentes durant toute la vie.

• Diagnostiqué précocement, il est le plus souvent curable.

• Au stade métastatique, la maladie se traduit par des douleurs osseuses, des fractures au niveau des os longs ou des vertèbres (tassement vertébral) avec parfois des signes de compression médullaire. Les adénopathies métastatiques peuvent être responsables de l’apparition d’une thrombose veineuse, d’un lymphœdème des membres inférieurs ou d’une urétéro-hydronéphrose. Les métastases pulmonaires et hépatiques sont rares.

THÉRAPEUTIQUE

Comment traiter le cancer de la prostate ?

Le choix de la prise en charge thérapeutique du cancer de la prostate prend en compte l’âge du patient, son état de santé général, l’extension ainsi que l’agressivité de la maladie.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

• L’évolution naturelle de la maladie étant relativement lente, on considère que le patient doit avoir au moins 10 ans d’espérance de vie pour tirer bénéfice d’un des deux traitements curatifs (prostatectomie et radiothérapie). Pour le patient dont l’espérance de vie estimée est inférieure à 10 ans, le choix se porte sur une surveillance simple, un traitement hormonal ou un traitement palliatif.

• Lorsque la « guérison » n’est pas atteignable, la prévention de l’extension métastatique ou le ralentissement de la stimulation hormonale de la tumeur sont les objectifs fixés. A tous les stades de la maladie, le but est aussi l’amélioration de la qualité de vie, l’allongement de la survie, la prévention des complications et la prise en charge des effets indésirables des traitements.

Cancer localisé

• Les formes localisées à risque faible de récidive peuvent relever de la surveillance active (voir « Point de vue » p. 12), d’une prostatectomie, de la radiothérapie externe et de la curiethérapie. Le recours aux ultrasons focalisés de haute intensité est possible.

• Les formes localisées à risque intermédiaire relèvent de la prostatectomie (avec curage ganglionnaire) ou de la radiothérapie associée ou non à une hormonothérapie courte (au maximum 6 mois).

• Le traitement des formes localisées à risque élevé et des cancers localement avancés fait appel à la prostatectomie radicale (avec curage ganglionnaire) ou à la radiothérapie en association à une hormonothérapie prolongée (2 à 3 ans).

Au stade métastatique

Le traitement de référence est l’hormonothérapie. Une chimiothérapie ou un traitement par abiratérone est proposé en cas d’échec de l’hormonothérapie traduisant une résistance à la castration.

En pratique

Hormonothérapie

• L’hormonothérapie n’est pas curative mais permet de ralentir la progression de la pathologie et d’accroître la survie. Elle fait appel aux analogues ou aux antagonistes de la LHRH (ou Gn-RH) et aux antiandrogènes non stéroïdiens (bicalutamide, flutamide, nilutamide) ou stéroïdiens (acétate de cyprotérone). Le diéthylstilbestrol est rarement utilisé.

• En pratique, l’hormonothérapie se mène le plus souvent avec un analogue de la LH-RH ou un antagoniste du récepteur à la GnRH (dégarélix). La chirurgie (pulpectomie ou orchidectomie), à l’origine d’une castration irréversible, n’est quasiment plus employée. En cas de traitement par agoniste de la LH-RH, un antiandrogène non stéroïdien est associé à l’agoniste le premier mois de traitement pour pallier la phase initiale de stimulation hypophysaire à l’origine d’une augmentation de la testostéronémie appelée « flare-up » (voir infographie page 11).

• La suppression androgénique ainsi obtenue supprime la sécrétion testiculaire d’androgènes mais ne supprime pas la sécrétion d’androgènes surrénaux. On parle de « blocage androgénique complet » (ou total) lorsque le traitement hormonal bloque à la fois la sécrétion des androgènes testiculaires et celle des androgènes surrénaux. Ceci est par exemple obtenu par l’association d’un antiandrogène stéroïdien ou non stéroïdien à un traitement ciblant la LH-RH (analogue ou antagoniste).

En dehors du flare-up, il n’y a pas de bénéfice au blocage androgénique complet, sauf dans les tumeurs très agressives.

A la phase d’hormonorésistance

Un échappement à la castration (chirurgicale ou médicale) peut survenir après un délai variable (18 à 24 mois après la mise en route de la privation androgénique chez le patient métastatique).

Une chimiothérapie (docétaxel en première ligne, cabazitaxel, mitoxantrone ; traitements à l’hôpital) ou un traitement par abiratérone sont alors indiqués.

Gestion des effets indésirables

• La suppression androgénique par agoniste ou antagoniste de la LH-RH est à l’origine de nombreux effets indésirables. La prise en charge des bouffées de chaleur fait appel aux antiandrogènes stéroïdiens (acétate de cyprotérone), aux progestatifs (médroxyprogestérone…), à la bêta-alanine (Abufène) voire à des molécules hors AMM comme la venlafaxine ou la gabapentine. La prévention des fractures ostéoporotiques repose notamment sur des apports suffisants en calcium et vitamine D (voir page 14). Un inhibiteur de la phosphodiestérase de type 5 (sildénafil…) ou des injections intracaverneuses de prostaglandine sont prescrits aux patients souhaitant un traitement des troubles de l’érection.

L’hypogonadisme induit par l’hormonothérapie s’accompagne de complications métaboliques : prise de poids, intolérance au glucose voire diabète, dyslipidémie, HTA, complications réunies sous le terme de « syndrome métabolique ». Le rappel des règles hygiénodiététiques est impératif (voir « Accompagner le patient » page 14).

• Les biphosphonates ou le dénosumab (Xgeva) sont utilisés en prévention des complications des métastases osseuses : surveillance rénale et bilan dentaire en raison du risque d’ostéonécrose de la mâchoire (notamment sous biphosphonates) ; supplémentation en calcium et vitamine D impérative (sauf en cas d’hypercalcémie).

TRAITEMENTS

Ciblant la LH-RH

Analogues de la LH-RH

Goséréline, leuproréline, buséréline et triptoréline sont essentiellement utilisées sous forme injectable à libération prolongée ou d’implants. Elles sont indiquées dans le traitement du cancer de la prostate hormonodépendant localement avancé ou métastatique ou dans le traitement adjuvant à la radiothérapie externe dans le cancer de la prostate localement avancé. S’ils présentent l’avantage d’une réversibilité et d’une meilleure tolérance que la castration chirurgicale, les analogues nécessitent en contrepartie une observance stricte. La testostéronémie est régulièrement vérifiée (taux < 0,5 à 1 ng/ml) et la réponse thérapeutique évaluée par le taux de PSA, le toucher rectal et parfois la scintigraphie ou le scanner. Un antiandrogène est débuté 8 à 15 jours avant la première injection d’analogue et poursuivi le premier mois de traitement pour pallier la phase de flare-up.

Antagoniste de la LH-RH

Le dégarélix n’induit pas d’effet flare-up et ne nécessite donc pas la prescription concomitante d’antiandrogène le premier mois. Il assure une privation androgénique rapide en 3 jours et nécessite une injection mensuelle.

Effets indésirables

Outre les réactions au point d’injection, ils sont liés à l’abaissement des taux plasmatiques de testostérone. Fréquents à très fréquents (> 10 %) : bouffées de chaleur, troubles de la libido, impuissance, prise de poids. Fréquents (entre 1 et 10 %) : œdème, gynécomastie, mastodynie, acné, céphalées, nausées, troubles de l’humeur, syndrome dépressif, fatigue, anémie. Au long cours, augmentation du risque de fracture osseuse et du risque cardiovasculaire.

Antiandrogènes non stéroïdiens

Flutamide, nilutamide et bicalutamide sont indiqués dans les formes métastatiques, le plus souvent en association à une castration par un agoniste de la LH-RH ou à une castration chirurgicale. Seul le bicalutamide est indiqué dans les formes localement avancées à haut risque de progression en monothérapie ou en traitement adjuvant à la prostatectomie radicale ou à la radiothérapie. Un bilan hépatique est effectué avant le début du traitement et régulièrement par la suite. Effets indésirables : bouffées de chaleur, gynécomasties, douleurs mammaires, atteintes hépatiques dont hépatites fulminantes, anémie. Ils induisent moins de troubles sexuels et diminuent moins la masse osseuse que les traitements ciblant la LH-RH (puisqu’ils ne suppriment pas la sécrétion d’androgènes). Effet antabuse et pneumopathies interstitielles notamment avec le nilutamide. Sous flutamide, risque de photosensibilisation, coloration possible des urines en jaune-vert.

Antiandrogènes stéroïdiens

L’acétate de cyprotérone est généralement proposé quand les traitements ciblant la LH-RH et les antiandrogènes non stéroïdiens ne sont plus efficaces. Il faut éviter la prise de millepertuis (diminution de l’efficacité de l’acétate cyprotérone) et l’association aux inducteurs enzymatiques.

Effets indésirables : gynécomasties, somnolence, dépression, prise de poids, baisse de la libido, impuissance, inhibition de la spermatogenèse, toxicité hépatique, ostéoporose, thrombose veineuse profonde, anémie.

Œstrogènes

Le diéthylstilbestrol (Distilbène) n’est plus utilisé en première intention en raison de la fréquence des complications cardiovasculaires. Son association aux inducteurs enzymatiques est déconseillée (carbamazépine, griséofulvine, phénytoïne, rifampicine, ritonavir…).

Effets indésirables : augmentation du risque d’accident thromboembolique artériel, veineux (prescription concomitante d’acide acétylsalicylique), HTA, hyperlipidémie, ictère, lithiase biliaire, dépression, gynécomastie, atrophie testiculaire et impuissance.

Inhibiteur de la synthèse des androgènes

• L’abiratérone (Zytiga) est indiquée en association à la prednisone ou à la prednisolone dans les formes métastatiques résistantes à la castration. L’abiratérone entraîne une diminution de la synthèse des androgènes mais aussi du cortisol ; il en découle une augmentation de la synthèse de l’aldostérone (stimulation de l’ACTH par rétrocontrôle). L’adjonction d’un corticoïde diminue les effets secondaires (hypokaliémie, HTA et rétention hydrique) de l’hyperaldostéronisme en limitant le rétrocontrôle positif sur l’ACTH.

• La castration médicale par analogues de la LH-RH doit être maintenue durant le traitement pour les patients n’ayant pas subi de castration chirurgicale.

• Tension artérielle, kaliémie et rétention hydrique (prise de poids, œdèmes périphériques) sont surveillées mensuellement (davantage en cas de risque d’insuffisance cardiaque). Les transaminases font l’objet d’un suivi toutes les 2 semaines pendant les 3 premiers mois de traitement puis tous les mois ensuite.

Effets indésirables les plus fréquents : œdèmes périphériques, hypokaliémies, hypertensions artérielles, infections du tractus urinaire. Autres : hépatotoxicité, affections cardiaques, fractures. Contraception efficace de la partenaire et rapports protégés sous traitement.

Interactions : les inhibiteurs du CYP3A4 (kétoconazole, clarithromycine, atazanavir…) et les inducteurs (phénytoïne, carbamazépine, rifampicine…) sont à éviter. La prudence est également recommandée avec les traitements interférant avec le CYP2D6 (métoprolol, propranolol, flécaïnide, venlafaxine, codéine, tramadol…) : une diminution de la dose de ces molécules peut être nécessaire.

Délivrance : prescription initiale hospitalière annuelle. Prescription réservée aux spécialistes en cancérologie et oncologie médicale.

Chimiothérapie

Sont utilisés les dérivés de l’if, docétaxel (Taxotère) et cabazitaxel (Jevtana), la mitoxantrone (Novantrone) et, rarement, l’estramustine (Estracyt).

Effets indésirables : toxicité hématologique, nausées, vomissements, stomatites, cardiotoxicité (sous mitoxantrone), accidents thromboemboliques (sous estramustine).

Traitement non médicamenteux

Prostatectomie totale

La prostatectomie totale (ou radicale) consiste en l’exérèse de la prostate et des vésicules séminales. Le curage ganglionnaire est optionnel pour les tumeurs localisées à faible risque évolutif. Lorsque le cancer est localisé, il s’agit du traitement de référence chez le patient dont l’espérance de vie est supérieure à 10 ans. Lorsque le cancer ne franchit pas la capsule, les bandelettes neurovasculaires sont préservées, ce qui facilite la récupération des érections spontanées. A long terme, environ 10 % des patients souffrent d’une incontinence urinaire. Le taux de récupération des érections est très variable.

Radiothérapie externe

Elle consiste à exposer la région prostatique à une irradiation. Les complications sont des cystites et des rectites radiques (douleurs abdominales et rectales, impériosités urinaires et fécales, brûlures urinaires), une incontinence urinaire (< 5 %), une impuissance (50 % à 5 ans).

Curiethérapie

La curiethérapie consiste à implanter dans la prostate sous anesthésie générale, des grains radioactifs (iode 125) qui vont détruire les cellules cancéreuses. Elle est réservée aux cancers localisés à faible risque. Les effets indésirables de cette technique durent 3 à 6 mois en général, avec risque de difficultés à uriner, présence de sang dans les urines et le sperme, saignements du rectum et parfois incontinence urinaire. 10 % des patients verront ces effets perdurer.

Traitement par ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU)

La technique consiste à obtenir une fibrose complète de la prostate par effet thermique d’un faisceau d’ultrasons de haute intensité (Ablatherm). Le recul est aujourd’hui insuffisant pour pouvoir juger des bénéfices à long terme.

Effets indésirables : rétentions et infections urinaires, incontinence urinaire d’effort et dysfonction érectile.

Cryothérapie

La cryothérapie consiste à détruire la tumeur par un refroidissement intense (azote liquide). Cette technique, en cours d’évaluation, ne s’adresse à ce jour qu’à un nombre limité de patients.

Perspectives thérapeutiques

• L’enzalutamide est un antiandrogène non stéroïdien indiqué en cas de cancer métastatique résistant à la castration après au moins une chimiothérapie préalable par docétaxel. L’ANSM a accordé en février 2013 une ATU de cohorte à ce médicament.

• L’histréline en implant (Vantas), analogue de la LH-RH, devrait être bientôt commercialisée.

• Le cabozantinib est un inhibiteur de tyrosine-kinase. Une étude de phase III débute actuellement, le comparant à la mitoxantrone.

ACCOMPAGNER LE PATIENT

Gérard, 58 ans, commercial

« Après une année difficile suite à l’opération d’un kyste sacré, on m’a diagnostiqué un cancer de la prostate après un dosage systématique du PSA dans le cadre du dépistage. J’ai d’abord été traité par une radiothérapie et hormonothérapie, ce qui a provoqué une inflammation de la vessie (avec des envies impérieuses) et des problèmes d’érection. J’avais beaucoup de bouffées de chaleur et j’étais très fatigué. Depuis un an, le traitement est arrêté mais, dernièrement, le taux de PSA a augmenté à nouveau. Le médecin me propose de reprendre le traitement hormonal. A 58 ans, c’est très dur ! »

LE CANCER DE LA PROSTATE VU PAR LES PATIENTS

Impact psychologique

L’annonce d’un cancer, notamment chez des patients jeunes, est terrible : perte des repères, altération de l’image de son corps, angoisse profonde, peur de l’évolution de la maladie…

Impact sur la vie sexuelle

Chez les patients jeunes en particulier, les troubles de l’érection et de la libido ont un impact important : perte de l’estime de soi aggravée par la crainte et la culpabilité de ne plus satisfaire sa partenaire.

Impact professionnel et social

Il est important, lié à la fatigue et aux autres effets indésirables des divers traitements.

À DIRE AUX PATIENTS

A propos du cancer de la prostate

• Le cancer de la prostate est le plus souvent d’évolution lente et qui peut être guéri dans la très grande majorité des cas.

• Il faut encourager le patient à préparer les questions à poser aux soignants (trouble de l’érection, incontinence…) et parfois l’orienter vers les associations de patients.

• La fatigue et parfois une anémie peuvent s’installer suite à l’hormonothérapie ou la chimiothérapie, ou tardivement par l’évolution propre de la maladie. Inciter le patient à parler de sa fatigue précocement pour, si besoin, instaurer un traitement correcteur.

• Encourager une bonne hygiène de vie, en particulier sous hormonothérapie (voir ci-après), inciter le patient à conserver au maximum ses activités physiques, sportives et sociales.

• Une prise en charge psychologique, la consultation d’un sexologue, la pratique de thérapies douces (sophrologie, yoga…) peuvent améliorer l’estime de soi et permettre de mieux appréhender les effets indésirables des traitements.

A propos des traitements

• Prostatectomie totale : l’incontinence et surtout les troubles sexuels sont les complications les plus appréhendées par les patients. Ces complications peuvent s’atténuer jusqu’à deux ans après l’opération. La conservation du sperme est proposée aux patients qui le souhaitent avant l’opération. Une rééducation périnéale précoce par kinésithérapie accélère le retour à la continence urinaire. Les exercices doivent être quotidiens (contractions du périnée de façon répétée en dehors des mictions). Concernant les troubles de l’érection, différents traitements peuvent être proposés : inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (IPDE-5), injections intracaverneuses (alprostadil). Il peut être aussi discuté du vacuum ou de l’anneau pénien. Favorisant l’érection, ces dispositifs ne doivent surtout pas être portés plus de 30 minutes (risque de souffrance des corps caverneux par manque d’oxygène). En dernier recours, la mise en place d’une prothèse pénienne peut être proposée.

• Radiothérapie : elle expose à des inflammations au niveau de la vessie ou du rectum (pollakiurie, impériosités urinaires et fécales, constipation et/ou diarrhée). Recommander une hydratation suffisante si besoin, des traitements locaux (antihémorroïdaires) ; limiter les aliments irritants pour le rectum (plats épicés, crudités, alcool…). Une impuissance sexuelle s’installe progressivement.

• Suppression androgénique : les effets indésirables liés à l’hypotestostéronémie sont nombreux.

Troubles sexuels : les traitements par IPDE-5, alprostadil, vacuum, anneau pénien ou prothèses peuvent être proposés.

Ostéoporose et prévention des fractures : l’activité physique, l’exposition régulière à la lumière, un apport suffisant en calcium et vitamine D et la prévention des chutes sont les principales mesures préconisées.

Prise de poids, fonte musculaire, syndrome métabolique (HTA, hyperlipidémie, risque de diabète) : recommander une alimentation équilibrée (pauvre en graisses saturées…), une activité physique (30 minutes de marche quotidienne et quelques exercices 3 ou 4 fois dans la semaine : foot, vélo avec les petits-enfants…). Les aliments dits « protecteurs » sur le développement du cancer peuvent être recommandés (soja, tomate, choux, brocolis…) même si leur effet n’est pas clairement démontré. L’arrêt du tabac est recommandé.

Troubles cognitifs, dépression : la difficulté à se concentrer, la diminution des capacités intellectuelles et parfois un syndrome dépressif peuvent être présents. Prévenir la famille de ces possibles modifications comportementales et encourager les exercices de stimulation intellectuelle (mots croisés…).

Gynécomastie : fréquente sous antiandrogènes, elle est en partie réversible à l’arrêt du traitement.

• Sous abiratérone : rappeler les modalités de prise (voir page 5). Vérifier qu’un suivi régulier (tension artérielle, poids, kaliémie, transaminases) est réalisé (médecin généraliste et/ou oncologue). Une surveillance plus rapprochée de la tension artérielle peut être proposée en début de traitement (à la pharmacie ou en encourageant l’automesure).

• Sous biphosphonate et dénosumab : bilan et surveillance buccodentaire avant et pendant le traitement, supplémentation en calcium et vitamine D.

PRÉVENTION

L’AFU recommande un dosage annuel du PSA associé à un toucher rectal chez les hommes de 50/55 ans à 75 ans ayant une espérance de vie supérieure à 10 ans. Ce dépistage est individuel et s’effectue au cas par cas après information du patient. Il est recommandé dès 45 ans chez les hommes ayant un risque accru de cancer de la prostate (origine afro-antillaise, antécédents familiaux, notamment chez des parents du premier degré : père, fils…).

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

ORDONNANCE 1 : OUI, mais il est impératif de contacter le médecin car il manque la prescription d’un corticoïde en association à l’abiratérone (Zytiga). En effet, l’abiratérone induit une chute de la biosynthèse des androgènes mais également du cortisol, ce qui induit une augmentation de l’aldostéronémie. L’association systématique de 10 mg/j de prednisone ou de prednisolone limite les effets indésirables liés à l’hyperaldostéronisme : HTA, hypokaliémie, rétention hydrique.

ORDONNANCE 2 : OUI, en rappelant au patient comment va se dérouler son traitement et les conseils à y associer. L’antiandrogène (Eulexine) inhibe la phase de stimulation initiale induite par l’agoniste de la LH-RH (Eligard) et à l’origine d’une hypertestostéronémie. Après le premier mois de traitement, l’analogue de la LH-RH sera poursuivi seul, si bien toléré, sans doute à l’aide d’une forme retard pour limiter le rythme des injections (tous les 3 ou 6 mois). Recommander une alimentation pauvre en graisse, une activité physique suffisante, l’arrêt du tabac pour prévenir les complications cardiovasculaires ; vérifier que le patient a une prescription de calcium et vitamine D pour limiter la perte osseuse.

MÉMO-DÉLIVRANCE

SOUS HORMONOTHÉRAPIE

Traitement par analogue de la LH-RH

• Bigonist, Décapeptyl, Eligard, Enantone, Gonapeptyl, Suprefact, Zoladex.

• Vérifier qu’un antiandrogène a bien été prescrit 8 à 15 jours avant la première injection de l’analogue pour éviter la phase initiale de flare-up. L’antiandrogène est poursuivi le premier mois du traitement par analogue de la LH-RH.

• Vérifier l’adéquation entre le rythme des injections et la forme retard prescrite : selon le cas, mensuel ou tous les 3 ou 6 mois.

Traitement par antagoniste de la LH-RH

• Firmagon (dégarélix) en injection mensuelle.

• Pas d’effet « flare-up, donc pas de coprescription d’un antiandrogène le premier mois.

Traitement par inhibiteur de la synthèse des androgènes

• Zytiga (abiratérone).

• Prescription : PIH annuelle réservée aux spécialistes. Prescription concomitante d’un corticoïde. Traitement instauré en complément de la castration chirurgicale ou médicale (par analogue ou antagoniste de la LH-RH).

• Administration : en prise unique au moins 2 heures après un repas. Ne pas manger dans l’heure qui suit.

• Suivi régulier : tension artérielle, poids, kaliémie, transaminases.

• Contraception efficace et rapports protégés durant le traitement.

• Nombreuses interactions impliquant CYP3A4 et CYP2D6.

Gestion des effets indésirables

• Commune à tous les traitements hormonaux : ci-dessus et antiandrogènes stéroïdiens (acétate de cyprotérone) et non stéroïdiens (bicalutamide, flutamide, nilutamide), estrogènes.

• Bouffées de chaleur : progestatifs, bêta-alanine, voire hors AMM venlafaxine, gabapentine peuvent être proposés.

• Impuissance : prise en charge par inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5, (alprostadil), vacuum, étui pénien peuvent être proposés.

• Complications métaboliques (prise de poids, HTA…) au long cours : préconiser une alimentation équilibrée, la normalisation du poids, l’arrêt du tabac, une activité physique quotidienne.

• Ostéopénie : supplémentation en calcium et vitamine D, exercice physique pour entretenir la masse musculaire.

• Retentissement cognitif et sur l’humeur : les signes d’une dépression doivent alerter l’entourage. Maintenir des activités intellectuelles et sociales.

TRAITEMENTS NON MÉDICAMENTEUX

• Prostatectomie : intérêt d’une rééducation périnéale précoce (kinésithérapie) associée à des exercices quotidiens de contraction du périnée pour prévenir l’incontinence urinaire. Une prise en charge précoce est aussi recommandée pour limiter les troubles sexuels (reprise d’une stimulation sexuelle, IPDE-5, alprostadil, vacuum, anneau pénien).

• Radiothérapie : hydratation suffisante et traitements locaux si besoin (de type antihémorroïdaire) pour lutter contre l’inflammation de la vessie et du rectum. Impuissance d’installation progressive pouvant être prise en charge comme précédemment.

LE CAS : M. B, 65 ans, est atteint d’un cancer de la prostate métastatique résistant à la castration. D’abord traité par Zoladex et Casodex, il a ensuite subi une chimiothérapie par docétaxel. Devant la progression des lésions cancéreuses, le médecin lui prescrit un nouveau traitement à visée palliative comportant notamment Zytiga et Xgeva.

Que lui a dit le médecin ?

« Les cellules cancéreuses se sont adaptées à l’absence de testostérone et ont progressé, malgré la chimiothérapie. Je vous prescris un nouveau traitement qui entraînera une privation plus complète en hormones et induira moins d’effets indésirables que la chimiothérapie. Je vous prescris aussi un médicament injectable pour lutter contre les douleurs dues aux métastases ?

Qu’en pensez-vous

Xgeva doit systématiquement être prescrit avec

1) une supplémentation en calcium et vitamine D

2) une supplémentation en fer

3) une supplémentation en fluor

Qu’en pensez-vous

La prise de Zytiga doit se faire impérativement :

1) au cours d’un repas

2) en deux prises matin et soir

3) 2 heures après un repas

Vous décidez de contacter l’hôpital

« Bonjour, je suis le pharmacien de Monsieur B., suivi dans votre service pour un cancer de la prostate. Sa prescription mentionne Xgeva mais pas de supplémentation en calcium et vitamine D. Doit-il encore poursuivre la supplémentation ?

- Il ne doit surtout par la stopper. Nous faxons une ordonnance pour qu’il n’interrompe pas le traitement jusqu’au prochain rendez-vous. »

EN CHIFFRES

- Cancer masculin le plus fréquent dans les pays occidentaux et au premier rang des cancers incidents chez l’homme. 71 000 nouveaux cas estimés en 2011 en France métropolitaine, soit une incidence de 125,8 pour 100 000.

- L’incidence est très faible avant 50 ans. Plus de 69 % des cancers de la prostate surviennent après 65 ans. L’incidence est plus élevée aux Antilles (Martinique, Guadeloupe, Guyane) qu’en métropole.

- Taux de survie relative à 1 et 5 ans : respectivement 94 et 80 %.

- Au 3e rang des décès par cancer chez l’homme (après le cancer colorectal et le cancer du poumon) : 8 700 décès estimés en 2011.

- Entre 1984-88 et 2004-08, le taux de mortalité par cancer de la prostate en France a diminué de 28 %.

Dépistage et diagnostic précoces

• Aujourd’hui, il n’est pas possible de prédire, au début de l’évolution, quels cancers deviendront invasifs et quels cancers vont rester latents. C’est tout l’enjeu de la question du dépistage, l’important étant de ne pas laisser passer la fenêtre de curabilité.

• Selon la HAS, le dépistage systématique du cancer de la prostate par dosage du PSA n’est pas justifié qu’il s’agisse de la population générale ou des hommes présentant des facteurs de risque. Les hommes intéressés par un dépistage individuel doivent recevoir une information quant aux bénéfices potentiels et aux risques associés aux interventions diagnostiques et thérapeutiques.

• L’Association française d’urologie souligne que l’absence d’intérêt démontré du dépistage systématique (en population générale ou pour une population d’hommes à risque) ne dispense pas d’une démarche de diagnostic précoce. L’objectif est de diagnostiquer précocement les formes agressives de cancer de la prostate afin de les traiter à temps, tout en évitant le surdiagnostic et le surtraitement des formes à évolution plus lente. Cette démarche associe recherche de facteurs de risque, toucher rectal et dosage du PSA.

Comprendre le cancer de la prostate

• La prostate participe, avec les vésicules séminales, à la production du liquide séminal qui constitue l’essentiel du volume du sperme, les spermatozoïdes étant produits par les testicules. Elle est entourée d’une capsule qui l’isole des tissus avoisinants.

• On distingue 3 zones glandulaires. La zone périphérique, correspondant à la partie postérieure de la glande, est le siège des 3/4 des cancers prostatiques. Elle est proche du rectum, ce qui explique que la tumeur soit souvent palpable au toucher rectal, mais tardivement symptomatique. Dans 25 % des cas, la tumeur se développe dans la zone de transition, située autour de l’urètre. Cette zone s’hypertrophie avec l’âge (hyperplasie bénigne de la prostate). La zone centrale forme la base de la prostate.

• La croissance du cancer prostatique est généralement très lente. La tumeur envahit progressivement la glande, puis la capsule, qu’elle franchit, atteignant l’urètre, les vésicules séminales et la vessie. Des cellules cancéreuses peuvent migrer vers d’autres organes par voie lymphatique ou sanguine, où elles constituent des métastases.

• Le cancer de la prostate est hormonodépendant. Les androgènes testiculaires et surrénaux se fixent au niveau des récepteurs des cellules prostatiques, normales ou tumorales et en conditionnent la croissance et la survie.

CE QUI A CHANGÉ

APPARU

• Décapeptyl LP 22,5 mg (triptoréline) : en février 2010, compléments de gamme présentant l’avantage d’une injection tous les 6 mois (comme Enantone LP 30 mg, leuproréline).

• Firmagon (dégarélix) : antagoniste de la LH-RH (février 2010).

• Zytiga (abiratérone) : inhibiteur de la biosynthèse des androgènes (septembre 2011) disponible en pharmacie de ville depuis juillet 2012. Extension d’indication en mars 2013 : traitement du cancer métastatique de la prostate résistant à la castration lorsque la chimiothérapie n’est pas encore indiquée (auparavant, uniquement indiqué en cas de progression de la maladie pendant ou après une chimiothérapie par docétaxel).

• Xgeva (dénosumab) : anticorps monoclonal indiqué dans la prévention des complications osseuses chez les patients présentant des métastases osseuses (début 2013).

• Jevtana à l’hôpital (cabazitaxel) : taxane de seconde intention indiqué dans le cancer de la prostate après échappement au docétaxel (mars 2012).

• Rapport d’évaluation de la HAS sur le traitement par ultrasons focalisés à haute intensité (HIFU) concluant à un faible degré de preuve de l’efficacité clinique (décembre 2010).

VIGILANCE !!!

Les contre-indications absolues des traitements sont les suivantes :

• Abiratérone : insuffisance hépatique sévère.

• Bicalutamide, flutamide, nilutamide : insuffisance hépatique sévère. Nilutamide : insuffisance respiratoire sévère.

• Acétate de cyprotérone : affections hépatiques graves, tumeurs hépatiques, tuberculose, affections thromboemboliques, dépression chronique sévère, anémie à hématies falciformes.

• Diéthylstilbestrol : accident thromboembolique artériel (infarctus du myocarde, AVC) ou veineux (TVP, embolie pulmonaire), hypertension artérielle, pathologie oculaire d’origine vasculaire, diabète compliqué de micro- ou de macroangiopathie, affection hépatique sévère ou récente.

• Estramustine : affection hépatique grave, affection cardiovasculaire grave, maladie thromboembolique.

POINT DE VUE
Par le Pr Alexandre de la Taille, servie d’urologie de l’hôpital Henri-Mondor, Créteil

« La surveillance active implique un suivi rigoureux »

A qui s’adresse la surveillance active ?

Elle s’adresse aux patients atteints de cancer localisé à faible risque évolutif et permet de différer l’instauration d’un traitement dont les effets indésirables ne sont pas négligeables. Mais, à la différence de l’« abstention-surveillance », proposée aux patients âgés ayant une tumeur peu agressive et dont l’espérance de vie est inférieure à 10 ans, la surveillance active nécessite de suivre étroitement l’évolution du cancer pour ne pas passer à côté de la « fenêtre de curabilité », avec notamment dosage du PSA tous les 3 à 6 mois, toucher rectal tous les 6 à 12 mois et biopsie prostatique tous les 12 à 18 mois.

En quoi consiste l’hormonothérapie intermittente ?

De plus en plus proposée, elle consiste à interrompre la suppression androgénique après quelques mois de traitement (uniquement en cas de bonne réponse au traitement) et à ne la reprendre qu’en cas de progression tumorale ou d’élévation du taux de PSA. Des études ont montré que l’hormonothérapie intermittente est aussi efficace qu’une hormonothérapie continue avec l’avantage de diminuer les effets indésirables du traitement sur les os, les bouffées de chaleur et les troubles de l’érection, d’où une amélioration de la qualité de vie du patient.

QUESTION DE PATIENTS

« On va m’enlever la prostate, j’ai peur de devenir impuissant. »

« Non, ce n’est pas systématique. Il existe 2 facteurs prédictifs : la qualité des érections avant l’intervention chirurgicale et la conservation ou non des bandelettes neurovasculaires, ce qui dépend de l’agressivité du cancer. Une prise en charge précoce permet de limiter les troubles de l’érection. »

QUESTION DE PATIENTS

« Comment soulager les bouffées de chaleur ? »

« Similaires à celles des femmes ménopausées, elles sont invalidantes et concernent la majorité des hommes traités par dépression androgénique. Il convient d’en parler au médecin car des traitements spécifiques peuvent être proposés. Outre les conseils classiques (vêtements légers en coton, limiter l’alcool et les plats épicés qui peuvent aggraver les bouffées de chaleur…), les compléments alimentaires destinés aux femmes ménopausées (isoflavone de soja, sauge, actée à grappes noires…) peuvent être essayés. »

SITES INTERNET

www.urofrance.org

Le site de l’Association française d’urologie donne les recommandations destinées aux professionnels de santé et de nombreuses fiches d’information pour les patients.

www.anamacap.fr

Site de l’Association nationale des malades du cancer de la prostate.

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