LE POST-INFARCTUS DU MYOCARDE - Le Moniteur des Pharmacies n° 2988 du 15/06/2013 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2988 du 15/06/2013
 

Cahiers Formation du Moniteur

Ordonnance

ANALYSE D’ORDONNANCE

M. A. vient d’avoir un infarctus

RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE

Pour qui ?

M. Jean A., âgé de 62 ans.

Par quel médecin ?

Un cardiologue hospitalier.

L’ordonnance est-elle recevable ?

Oui.

QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?

Que savez-vous du patient ?

M. A. est un patient bien connu de l’officine. Récemment retraité, c’est un bon vivant qui apprécie les repas entre amis. Il est non-fumeur. En surpoids et souffrant de dyslipidémie, il est traité depuis plusieurs mois par atorvastatine 20, mais il peine à contrôler sa lipidémie en raison de fréquents écarts alimentaires. Il souffre également de gonarthrose et est suivi par un rhumatologue.

Quel était le motif de l’hospitalisation ?

M. A. a été hospitalisé suite à une violente oppression thoracique irradiant jusqu’à l’épaule gauche et la mâchoire. C’est sa femme qui a appelé les secours. A l’hôpital, il a bénéficié d’une angioplastie des coronaires.

Que lui a dit le médecin ?

A l’hôpital, on lui a expliqué qu’il avait fait un infarctus. M. A. a compris que ses coronaires ont été obstruées par un caillot. Le cardiologue lui a expliqué qu’il augmentait la dose de statine et que son traitement comportait aussi des médicaments qui vont faciliter le travail du cœur, baisser la tension artérielle et « fluidifier » le sang. Le médecin lui a également prescrit un spray en cas de douleur à la poitrine et a insisté sur l’importance d’une réduction pondérale. Dans 15 jours, il évaluera l’efficacité et la tolérance du traitement.

Vérification de l’historique du patient

La pharmacie dispense régulièrement à M. A. de l’atorvastatine 20 ainsi que, depuis 2 mois, du diclofénac 50 prescrit par un rhumatologue pour soulager ses poussées congestives de gonarthrose.

LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHéRENTE ?

Que comporte la prescription ?

• Efient 10 (prasugrel) est un antiagrégant plaquettaire qui agit en empêchant l’activation des plaquettes par l’ADP.

• Kardégic 75 (acétylsalicylate de lysine), autre antiagrégant plaquettaire, inhibe la synthèse de thromboxane A2, facteur d’agrégation.

• Aténolol 50 est un bêtabloquant cardiosélectif dépourvu d’activité sympathomimétique intrinsèque. Grâce à ses effets chronotrope et inotrope négatifs, il permet d’abaisser la tension artérielle et de diminuer les besoins en oxygène du cœur.

• Périndopril tertbutylamine 4 est un inhibiteur de l’enzyme de conversion. Son action vasodilatatrice lui permet d’abaisser la tension artérielle.

• Atorvastatine 40 exerce une action hypocholestérolémiante par inhibition de l’HMG-CoA-réductase.

• Omacor est un médicament contenant des acides oméga-3 permettant une baisse des triglycérides. Il est utilisé comme traitement adjuvant en prévention secondaire de l’infarctus du myocarde.

• Natispray 0,30 est un spray de trinitrine agissant comme vasodilatateur veineux (qui diminue les besoins en O2 du cœur) et coronarien (augmentant les apports en O2). Il permet de traiter une crise d’angor, susceptible de se manifester au cas où un nouveau thrombus obstruerait partiellement les coronaires.

Est-elle conforme aux référentiels ?

Oui, il s’agit d’un traitement de référence du postinfarctus, dit traitement BASI (bêtabloquant, antiagrégant, statine et IEC).

• L’aténolol possède une indication en phase aiguë de l’infarctus du myocarde mais pas en postinfarctus. Il est cependant souvent poursuivi en post-infarctus du myocarde.

• Omacor ne fait pas partie des recommandations. Une méta-analyse sur 20 000 patients ayant un antécédent cardiovasculaire n’a pas montré d’effets d’une supplémentation en oméga 3 pour réduire le risque de nouvel accident cardiovasculaire.

• Après un infarctus, il est recommandé d’associer pendant un an l’aspirine au clopidogrel ou au prasugrel ou au ticagrélor pour prévenir le risque de récidive. Puis l’aspirine sera poursuivie en monothérapie au long cours. L’association aspirine + prasugrel est également indiquée après angioplastie, ce qui est le cas de M. A. (réponse 2).

Y a-t-il des médicaments à marge thérapeutique étroite ?

Non.

Y a-t-il des contre-indications physiopathologiques ?

Non. M. A. ne souffre pas d’asthme, ni de BPCO, ni de maladie de Raynaud (contre-indications des bêtabloquants), ni d’affection hépatique (contre-indication des statines et du prasugrel), ni d’ulcère gastrique (contre-indication de l’aspirine). Il n’a aucun antécédent d’AVC qui contre-indiquerait le prasugrel.

Les posologies sont-elles cohérentes ?

• La posologie d’Efient prescrite à M. A. (10 mg/j) est cohérente compte tenu de son âge (< 75 ans) et de son poids (> 60 kilos) (réponse 2).

• Les autres posologies sont également cohérentes. Après la phase aiguë d’infarctus, une dose de 100 mg (en 1 prise/j) d’aténolol est indiquée à partir de la 24e heure selon le RCP, mais en pratique, une dose de 50 mg peut s’avérer suffisante et est mieux tolérée en termes de bradycardie. IEC et bêtabloquant sont initiés à posologie progressive, sauf cas particuliers.

Y a-t-il des interactions ?

La demande de renouvellement de diclofénac 50 pose problème car cet AINS interagit non seulement avec les antiagrégants (majoration du risque hémorragique), mais aussi avec l’IEC (risque d’hyperkaliémie et d’insuffisance rénale aiguë).

Bien qu’il ne s’agisse que d’interactions à prendre en compte, la pharmacienne préfère téléphoner au rhumatologue.

Appel au rhumatologue

– Bonjour Docteur, je suis la pharmacienne de M. A. Je vous contacte car il a fait un infarctus il y a quelques jours. Il sort aujourd’hui de l’hôpital avec une ordonnance d’Efient et de Kardégic. Il voudrait aussi faire renouveler le diclofénac que vous lui aviez prescrit. Mais n’est-il pas plus prudent de changer de traitement désormais ?

– Oui, tout à fait ! Je vous faxe une ordonnance d’Ixprim (2 cp en cas de douleurs sans dépasser 8/j). Mais dites-lui de passer me voir quand il se sera reposé pour qu’on fasse le point. Je lui prescrirai un antiarthrosique d’action lente. »

Le traitement nécessite-t-il une surveillance particulière ?

Le traitement par IEC nécessite un contrôle de l’ionogramme sanguin. Le traitement par statine nécessite un suivi du bilan lipidique, ainsi que des CPK et des transaminases. Il faut également contrôler régulièrement les facteurs de risque cardiovasculaire (glycémie et surveillance de la tension). La prise en charge du postinfarctus nécessite une surveillance régulière (consultation trimestrielle du médecin traitant et suivi par le cardiologue au moins 1 fois par an).

QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?

Utilisation des médicaments

• M. A. explique qu’à l’hôpital il prenait le matin les antiagrégants, l’aténolol et le périndopril, et la statine le soir. Ce plan de prise semble cohérent : l’administration de la statine le soir permet une efficacité optimale puisque l’HMG-CoA-réductase a un pic d’activité la nuit. M. A. a bien compris qu’il avait changé de dose d’atorvastatine. Le médecin a rajouté Omacor et Natispray.

• Omacor doit être administré au moment d’un repas pour éviter les troubles digestifs.

• Avoir toujours Natispray à portée de main. En cas de besoin, diriger l’embout sous la langue et expliquer à M. A. qu’il doit être en position assise ou semi-allongée lors de l’administration pour éviter un malaise par hypotension orthostatique.

Quand commencer le traitement ?

Il convient de voir avec M. A. les médicaments qu’il a déjà pris ce matin à l’hôpital.

Que faire en cas d’oubli ?

Le patient doit être observant. En effet, l’arrêt brutal d’un bêtabloquant chez un insuffisant coronarien expose à un risque de troubles du rythme cardiaque, d’infarctus voire de mort subite. En cas d’oubli, les médicaments doivent être pris le plus tôt possible, mais il ne faut surtout pas doubler la dose suivante.

Le patient pourra-t-il juger de l’efficacité du traitement ?

Oui, il ne devrait plus ressentir de douleur thoracique.

Quels sont les principaux effets indésirables ?

• L’association des deux antiagrégants peut être responsable de saignements.

• Les effets indésirables les plus fréquents sous aténolol sont de l’asthénie, une bradycardie, un refroidissement des extrémités et une impuissance. Il peut également induire une hypotension, une dyspnée et des éruptions psoriasiformes.

• Le périndopril peut provoquer une hypotension, des céphalées, une toux sèche rebelle et une hyperkaliémie.

• L’atorvastatine peut être fréquemment responsable de troubles digestifs et d’atteintes musculaires (crampes, myalgies). Plus rarement, elle peut être responsable de rhabdomyolyse et d’atteintes hépatiques.

• Omacor peut fréquemment induire dyspepsies et nausées.

• Outre une hypotension, Natispray peut être responsable d’autres manifestations de vasodilatation (céphalées, bouffées de chaleur).

Quels sont ceux gérables à l’officine ?

• La fatigue sous bêtabloquant est surtout marquée en début de traitement puis s’améliore.

• L’hypotension peut être prévenue en éduquant le patient à se lever prudemment en deux temps. En cas d’hypotension, le plan de prise peut être modifié de façon à ne pas prendre l’aténolol et le périndopril en même temps.

• L’administration d’Omacor pendant un repas limite ses effets indésirables digestifs.

Quels signes nécessiteraient d’appeler le médecin ?

• Des saignements importants ou persistants.

• Une toux sèche persistante, car elle peut justifier de remplacer l’IEC par un ARA-II.

• Des douleurs musculaires, en vue d’un dosage de CPK.

• En cas de douleur thoracique persistante malgré une pulvérisation renouvelée de Natispray (3 min après la première), contacter le 15 (suspicion de récidive d’infarctus).

CONSEILS COMPLéMENTAIRES

• Insister auprès du patient sur la bonne observance du traitement.

• Encourager une réduction pondérale et préconiser un régime hypocholestérolémiant.

• Limiter la consommation de sel et celle d’alcool à deux verres de vin par jour.

• Ne pas consommer de jus de pamplemousse (risque majoré de troubles musculaires sous statine).

• Déconseiller l’automédication et notamment l’ibuprofène (interaction avec les antiagrégants et les antihypertenseurs). §

PATHOLOGIE

Le post-infarctus du myocarde en 4 questions

Le post-infarctus du myocarde désigne la période qui suit la phase aiguë de l’accident coronaire. Le pronostic dépend du type d’infarctus, de son étendue et du mode de prise en charge à la phase aiguë.

1QUELS SONT LES éTIOLOGIES ET FACTEURS DE RISQUE DE L’INFARCTUS ?

La plaque athéromateuse

Initialement, des particules de LDL riches en cholestérol pénètrent et s’accumulent au sein de la tunique de la paroi au contact de la lumière artérielle. Elles y subissent un phénomène d’oxydation, ce qui stimule le système immuno-inflammatoire et provoque une attraction des monocytes et des lymphocytes circulants.

Les monocytes se différencient en macrophages, qui captent le LDL oxydé, l’ensemble prenant le nom de « cellule spumeuse ». Les cellules spumeuses entretiennent la réaction inflammatoire et finissent par former des amas, les « stries lipidiques ».

Peu à peu, s’élabore la plaque adulte, qui comprend un « cœur lipidique » au centre, entouré d’une chape fibreuse dont l’intégrité conditionne la vulnérabilité et la stabilité de la plaque.

La plaque peut progresser peu à peu, obstruant de plus en plus la lumière de l’artère coronaire, avec pour conséquence clinique l’installation d’un angor (angor stable d’effort). La plaque peut se rompre et être à l’origine d’accidents coronariens dont la présentation (angor instable, infarctus du myocarde ST+, infarctus du myocarde non ST+, dépend de l’évolution du thrombus (voir encadré page 7). Dans tous les cas, la prise en charge de la maladie athéromateuse est indispensable.

Les facteurs de risque cardiovasculaire

La maladie coronaire survient le plus souvent en présence de facteurs de risque cardiovasculaire. Certains sont modifiables : hypercholestérolémie, hypertension artérielle, tabagisme, diabète, surpoids, sédentarité. En postinfarctus, la correction de ces facteurs est recommandée afin d’éviter les récidives. D’autres ne sont pas modifiables : âge, sexe, antécédents personnels ou familiaux de maladie athéromateuse.

2 QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES EN POSTINFARCTUS ?

• En postinfarctus, une fois passée la phase hospitalière, les signes cliniques résiduels dépendent de nombreux facteurs : taille initiale de l’infarctus, quantité de myocarde nécrosé, qualité de la fonction ventriculaire gauche après la phase aiguë, possibilité de revascularisation, âge et état du patient avant l’hospitalisation…

• Dans le meilleur des cas, le coronarien peut rester « stable » et asymptomatique durant plusieurs années.

• De nos jours, de nombreux patients sont revascularisés : l’artère responsable est reperméabilisée soit par pose d’une endoprothèse coronaire (stent) au cours d’une angioplastie, soit par fibrinolyse intraveineuse, soit par chirurgie de pontage aortocoronarien. En cas d’ischémie résiduelle, des douleurs angineuses peuvent persister ou réapparaître. La douleur est soit typique (médiothoracique rétrosternale, constrictive, irradiant latéralement ou vers les bras, la région cervicale, les mâchoires, l’épigastre), soit atypique (sensation de piqûre, de pincement, siège latérothoracique). Elle peut apparaître à l’effort ou au repos.

• Il peut exister une dyspnée d’effort ou une fatigabilité à l’effort ainsi que des œdèmes des chevilles dus à l’installation d’une insuffisance cardiaque.

3 QUELS EXAMENS COMPLéMENTAIRES ?

• Lors de l’hospitalisation, certains examens sont réalisés afin de rechercher une ischémie résiduelle et évaluer la viabilité myocardique : ECG d’effort, échographie de stress (réalisée au cours d’un effort), scintigraphie myocardique, coronarographie, et, au plan biologique, dosage sérique des troponines T et I et de la CK-MB (créatine-kinase MB).

• Après le retour à domicile, la surveillance cardiologique est généralement trimestrielle au début, ensuite bisannuelle, puis annuelle. Elle comporte un ECG de repos et une épreuve d’effort sur bicyclette ergométrique ou tapis roulant. L’échocardiographie peut compléter le bilan si nécessaire, ainsi que le holter rythmique (surveillance ambulatoire du rythme cardiaque sur 24 h) ou la scintigraphie myocardique.

• Une fois par an, le suivi biologique comporte un bilan lipidique, le dosage de la glycémie à jeun chez le non-diabétique, une microalbuminurie chez le diabétique (en plus de l’HbA1c trimestrielle), un ionogramme sanguin avec calcul de la clairance de la créatinine. Ces mesures sont communes à tous les coronariens, qu’ils aient ou non présenté un infarctus du myocarde, afin de faire le point sur le contrôle des facteurs de risque cardiovasculaire.

• La surveillance biologique des traitements pharmacologiques est à adapter en fonction de l’adaptation des schémas thérapeutiques (changements de posologie ou de molécule) : kaliémie et créatininémie pour les IEC, dosage des transaminases au début du traitement par statine et dosage des CPK en cas d’apparition de symptômes musculaires inexpliqués.

4 QUELLES SONT LES PRINCIPALES COMPLICATIONS À DISTANCE ?

• Qu’il s’agisse d’un angor stable, d’un angor instable ou d’un infarctus du myocarde, tous les patients sont considérés comme étant à haut risque cardiovasculaire. La reprise du processus athéromateux ou l’existence d’une ischémie résiduelle peuvent se traduire par la réapparition d’un angor d’effort et/ou la survenue d’un deuxième infarctus.

• Chez les patients porteurs de stents, un angor d’effort peut aussi révéler une resténose intrastent (processus cicatriciel à l’intérieur de la paroi vasculaire à l’endroit « stenté », réduisant le diamètre de la lumière vasculaire). Une récidive d’infarctus peut être liée à une thrombose de stent (formation brutale d’un thrombus en regard du stent). Après pontage coronaire, la réapparition d’un angor peut orienter vers une sténose du greffon.

• Un AVC peut aussi survenir, soit en raison de la migration d’un thrombus intraventriculaire gauche, soit du fait de la maladie athéromateuse.

• L’insuffisance cardiaque peut être liée à l’étendue de la nécrose, à une complication mécanique sur une valve ou à une arythmie.

• Les troubles du rythme cardiaque sont de gravité variable, en fonction de l’étendue de l’infarctus et de la diminution des performances contractiles du myocarde. Le risque de mort subite est lié aux troubles du rythme ventriculaire (risque plus élevé la première année).

Comment traiter le post-infarctus du myocarde ?

Le traitement du post-infarctus du myocarde a pour objectif de prévenir le remodelage ventriculaire gauche, les troubles du rythme et les troubles de la conduction électrique, conséquences de l’infarctus constitué, et d’empêcher l’athérosclérose.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

• La survenue d’un infarctus du myocarde nécessite la mise en œuvre de soins d’urgence. Une fois la phase aiguë passée, la mise en place d’un protocole thérapeutique au long cours a pour objectif essentiel d’éviter tout nouvel infarcissement et de prévenir les complications cardiovasculaires. Le traitement du postinfarctus est mis en œuvre lors de l’hospitalisation du patient, puis ajusté, reconduit en ambulatoire, et poursuivi a priori à vie. Il doit être adapté à chaque patient et l’ordonnance de sortie peut varier selon la situation clinique. Toutefois, quatre classes de médicaments apparaissent comme des standards dans cette stratégie thérapeutique, constituant le traitement « BASI » (bêtabloquants, antiagrégants plaquettaires, statines et inhibiteurs de l’enzyme de conversion). Cette prise en charge passe aussi par une lutte indispensable contre les facteurs de risque cardiovasculaire comprenant l’arrêt du tabagisme, la prise en charge du diabète et/ou de l’obésité s’ils existent, la mise en place d’une activité physique adaptée et l’instauration d’une réadaptation cardiaque.

• En l’absence de contre-indication absolue, les bêtabloquants font l’objet d’une prescription systématique dans cette indication. Le choix se portera préférentiellement sur un principe actif ne possédant pas d’activité sympathomimétique intrinsèque et la posologie sera d’instauration progressive. La baisse de la pression artérielle, de la fréquence cardiaque ainsi que la diminution de la force de contraction du cœur sont les points bénéfiques recherchés dans l’instauration de ce traitement.

• Concernant le traitement antiagrégant plaquettaire, le choix sera dicté par la stratégie de prise en charge de l’infarctus à sa phase aiguë, et par la tolérance au traitement. L’acide acétylsalicylique, dosé à 75 ou 160 mg/j, est le traitement de première intention, associé au clopidogrel à la posologie de 75 mg/jour. Le prasugrel et le ticagrélor quant à eux seront utilisés en association à l’aspirine en cas d’angioplastie transluminale. Quelle que soit la stratégie choisie, la bithérapie sera maintenue durant une année, le traitement étant ensuite poursuivi par aspirine seule au long cours. Le prasugrel sera uniquement prescrit chez les patients âgés de moins de 75 ans et pesant plus de 60 kg au regard du risque hémorragique. Les AVK, compte tenu de leur risque hémorragique important, sont réservées aux patients à haut risque d’événements thromboemboliques (infarctus du myocarde antérieur étendu, anévrisme ou thrombus du ventricule gauche, fraction d’éjection < 30 %, fibrillation auriculaire) ou ne pouvant recevoir d’antiagrégants plaquettaires.

• Concernant l’intérêt de la prescription systématique d’une statine, il a été démontré qu’il faut traiter les patients à risque cardiovasculaire même en présence de taux de LDL-cholestérol considérés comme normaux.

• De même, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion à dose progressive font eux aussi l’objet d’une prescription systématique en l’absence de contre-indication absolue, permettant de réduire les complications immédiates et à long terme de l’infarctus. Les antagonistes du récepteur à l’angiotensine II trouvent aussi une place intéressante en cas de tolérance imparfaite aux IEC.

• Chez les patients présentant une insuffisance cardiaque ou une dysfonction ventriculaire gauche, l’éplérénone (Inspra), médicament antialdostérone récemment commercialisé, peut être associé au traitement BASI si la fraction d’éjection ventriculaire gauche est inférieure à 40 % avec une kaliémie < 5 mmol/l et une créatininémie < 2 ou 2,5 mg/dl selon le sexe du patient.

• En dehors de l’association médicamenteuse BASI représentant le traitement de fond, il est indispensable d’expliquer au patient la juste attitude à avoir en cas d’apparition d’une nouvelle douleur angineuse : s’asseoir ou s’allonger, s’autoadministrer un dérivé nitré d’action sublinguale (Natispray 0,15 ou 0,30 mg/dose, Trinitrine Laleuf cp) et renouveler l’administration après 5 minutes en cas d’inefficacité. La persistance douloureuse doit amener le patient à contacter le SAMU. Les nitrés permettent d’effectuer un diagnostic différentiel sur une douleur qui va céder et que l’on pourra alors qualifier d’angine de poitrine, et une douleur résistante que l’on qualifiera d’infarctus.

TRAITEMENT

Bêtabloquants

Les bêtabloquants sont les principes actifs les mieux étudiés et les plus efficaces pour la prévention secondaire post-IDM. Leur utilisation permet de diminuer le risque de mort subite, les récidives et la mortalité totale d’environ 25 %. Le rapport bénéfice/risque est favorable à leur utilisation y compris chez les patients souffrant de BPCO, de diabète ou d’insuffisance cardiaque. Parmi les différents principes actifs de cette classe pharmacologique, tous ne possèdent pas cette indication (voir tableau page 13). L’instauration du traitement sera précoce, généralement entre le 3e et le 21e jour après l’épisode aigu à doses progressives. On évitera les arrêts brutaux. Les effets indésirables les plus fréquemment rencontrés sont de type asthénie, refroidissement des extrémités, bradycardie, troubles digestifs (gastralgies, nausées, vomissements, diarrhées), impuissance, insomnie ou cauchemars.

Antiagrégants plaquettaires

L’utilisation d’un antiagrégant plaquettaire permet de réduire le risque d’une nouvelle occlusion de l’artère coronaire.

Aspirine

L’acide acétylsalicylique devrait faire l’objet d’une prescription systématique chez tout patient ayant subi un infarctus du myocarde, excepté les situations de contre-indications absolues. En prévention secondaire, la dose préconisée est de 75 à 160 mg/j (même si les dosages à 300 mg possèdent aussi cette indication) en traitement chronique, permettant de réduire la mortalité de 10 à 15 %, le risque de réinfarctus de 20 à 30 % et les accidents ischémiques cérébraux de 20 à 30 %. La question de la dose optimale à utiliser n’est toujours pas tranchée. Les données cliniques disponibles ne semblent pas apporter d’argument en faveur d’une administration de doses d’aspirine supérieures à 75-81 mg par jour, les dosages plus importants n’apportant pas de plus-value et augmentant le risque de saignements gastro-intestinaux. Concernant l’intérêt de la prescription systématique d’un protecteur gastrique, il convient d’insister sur les recommandations de l’Afssaps (novembre 2007), indiquant qu’« il n’y a pas d’argument suffisant pour recommander l’association systématique d’un gastroprotecteur lors de l’utilisation d’aspirine à faible dose (AFD) et bien que l’association AFD-clopidogrel augmente le risque digestif, il n’y a pas de preuve d’efficacité des IPP : l’association est recommandée pour les patients ayant eu un antécédent d’hémorragie digestive sous AFD ».

Clopidogrel et ticlopidine

Le clopidogrel (Plavix) est indiqué chez les patients souffrant d’un infarctus du myocarde datant de quelques jours à moins de 35 jours. La ticlopidine (Ticlid), autrefois largement utilisée dans cette indication a vu son usage tomber en désuétude depuis la commercialisation du clopidogrel, ce dernier présentant moins d’effets indésirables. Les saignements sont les effets indésirables les plus fréquemment rapportés.

Prasugrel et ticagrélor

Prasugrel (Efient) et ticagrélor (Brilique), sont indiqués après une intervention coronaire percutanée. Pour les patients de plus de 75 ans ou pesant moins de 60 kg, l’utilisation d’une dose d’entretien de 5 mg d’Efient serait envisageable, mais incompatible avec le dosage à 10 mg non sécable, seul dosage commercialisé en France. Les saignements sont les effets indésirables les plus fréquents sous prasugrel, alors qu’ils sont de type dyspnée, contusions et épistaxis sous ticagrélor.

Statines

Initialement indiquées dans le but d’abaisser un niveau de cholestérol sanguin élevé, les statines se révèlent efficaces dans la réduction du risque de survenue d’un nouvel accident cardiaque, quelle que soit la valeur du cholestérol. Les statines ayant démontré une baisse d’événements cardiovasculaires sont l’atorvastatine (40 à 80 mg 1 fois par jour au coucher), la simvastatine (40 mg), la pravastatine (40 mg) et la fluvastatine (80 mg après un traitement par cathétérisme coronaire). La rosuvastatine (Crestor) est souvent prescrite hors AMM.

Les effets indésirables sont rares, essentiellement des troubles digestifs, des maux de tête, des vertiges et des crampes musculaires.

Inhibiteurs de l’enzyme de conversion

Seuls le captopril, le ramipril, le trandolapril et le périndopril possèdent cette indication. Si le traitement par IEC n’est pas débuté à la phase aiguë, il est suggéré de commencer le traitement entre le 3e et le 16e jour post-infarctus, dès que les conditions de mise sous traitement sont réunies, à savoir une stabilité hémodynamique et une éventuelle ischémie résiduelle prises en charge. La posologie sera obligatoirement d’instauration très progressive. Les effets indésirables les plus courants sont des altérations du goût, des sensations vertigineuses, des nausées, des vomissements, des irritations gastriques, des douleurs abdominales, des diarrhées ou de la constipation, une sécheresse buccale, un prurit, un rash, une alopécie ou une toux sèche et irritative qui pourra justifier le remplacement par un antagoniste du récepteur de l’angiotensine II.

Le valsartan est indiqué en cas de dysfonction systolique ou d’insuffisance cardiaque symptomatique lorsque les IEC ne peuvent être utilisés. Le telmisartan possède également une indication dans le post-infarctus.

Antialdostérones

L’éplérénone (Inspra) est un médicament antialdostérone indiqué en complément du traitement standard chez des patients présentant un dysfonctionnement ventriculaire gauche et des signes cliniques d’insuffisance cardiaque après un infarctus du myocarde récent. Le traitement débute idéalement entre le 3e et le 14e jour après l’IDM, à la posologie de 25 mg/j. Cette posologie est augmentée au bout de 4 semaines jusqu’à la dose cible de 50 mg/j en prise unique, en tenant compte de la kaliémie mesurée avant traitement, puis à la première semaine, puis 1 mois après le début et après chaque ajustement de la posologie. Hyperkaliémie, étourdissements, hypotensions, diarrhées, nausées, éruptions cutanées sont les effets indésirables fréquemment rencontrés sous Inspra.

Traitements non médicamenteux

• La réadaptation cardiovasculaire consiste en un contrôle des risques cardiovasculaires, en une éducation thérapeutique du patient (ETP) et en une réadaptation à l’effort par des activités physiques de type marche rapide, jogging, vélo ou nage, à raison de 2 à 5 séances hebdomadaires pendant 4 à 6 semaines dans une unité de réadaptation cardiovasculaire. Cette activité physique régulière va avoir aussi des effets favorables sur le poids, le taux de lipides, la pression artérielle et la régulation de la glycémie du patient. Un régime de type méditerranéen, pauvre en sel et graisses saturées avec des apports en poisson, fruits, légumes et céréales est indispensable dans ce condiv. La diminution de la consommation d’alcool ne trouve d’intérêt que chez les forts consommateurs. En revanche, l’arrêt de la consommation de tabac est indispensable.

• Les indications de défibrillateur implantable et de suppléance cardiaque (pacemaker) dépendent de la fraction d’éjection et de l’existence d’une insuffisance cardiaque non contrôlée par le traitement médicamenteux. Ainsi, l’implantation d’un stimulateur ou pacemaker peut être proposée aux patients souffrant d’insuffisance cardiaque chronique sous traitement médical maximal. L’implantation d’un défibrillateur automatique sera discutée en cas d’insuffisance cardiaque sévère.

ACCOMPAGNER LE PATIENT

Christian, 70 ans, retraité de la fonction publique

« J’ai fait un infarctus il y a 6 ans. Je me souviens que j’ai ressenti une douleur dans la poitrine et que mon cœur battait très vite. Ma femme était affolée ! J’ai été hospitalisé, on m’a posé un stent. Moi qui étais un très gros mangeur (je pesais 102 kg), j’ai changé mes habitudes alimentaires du jour au lendemain ! Je mange sans sel, j’évite les viandes rouges, je consomme beaucoup de légumes verts et je ne bois que de l’eau, plus du tout de vin ni d’apéritif. Aujourd’hui, je pèse 92 kg ! Ma femme ne croyait pas que j’y arriverais, mais cela ne me semble pas du tout difficile, car depuis mon infarctus je suis très angoissé. J’ai peur que ça recommence, d’autant que j’ai déjà fait un AVC. Je suis d’ailleurs sous Xanax et suivi régulièrement par un psychologue. J’ai beaucoup de médicaments à prendre, car j’ai en plus des problèmes de prostate, mais je sais à quoi ils servent tous et j’utilise un pilulier pour mieux m’y retrouver. »

LE POST-INFARCTUS VU PAR LE PATIENT

Impact sur le quotidien

• En post-infarctus immédiat, un arrêt de travail est prescrit par le médecin. Sa durée dépend des séquelles cardiaques de l’infarctus, mais aussi du type de profession exercée (4 semaines en moyenne pour un infarctus non compliqué, jusqu’à plusieurs mois en cas de complications et de travail physique). La médecine du travail peut accorder un aménagement du poste.

• Certains patients craignent la reprise d’une activité physique. Celle-ci ne sera envisagée qu’avec l’accord du cardiologue et sous réserve qu’il s’agisse d’un sport adapté. Mais la pratique d’une activité physique d’endurance modérée doit être encouragée car elle contribue à lutter contre l’obésité et à maîtriser la glycémie et le taux de cholestérol. Les programmes de réadaptation à l’effort sont utiles pour revenir doucement à une activité : l’objectif est d’atteindre 30 min d’activité physique modérée 5 fois/semaine.

• Les mesures hygiénodiététiques (régime hypocholestérolémiant et éventuellement hypocalorique en cas d’IMC ≥ 30) peuvent être vécues comme une frustration par le patient. Si certains, angoissés par leur infarctus, s’y soumettent volontiers, pour d’autres c’est une véritable contrainte et, une fois la peur liée à l’accident aigu passée, la motivation peut s’estomper.

Impact psychologique

• Les répercussions psychologiques d’un infarctus ne sont pas négligeables (choc de l’hospitalisation, sentiment de vulnérabilité, angoisse de la récidive). Elles peuvent même induire une dépression nerveuse.

• La reprise des activités professionnelles, physiques et de loisirs est bénéfique pour combattre cet état dépressif.

• Dans le cadre d’un programme de réadaptation, il peut être proposé de consulter un psychologue.

Impact sur les proches

Un infarctus est source d’angoisse pour les proches, notamment pour ceux qui ont été témoins de l’accident et qui ont appelé les secours. Ces derniers peuvent également accabler le patient, lui reprochant son tabagisme ou ses écarts alimentaires.

L’inquiétude des proches peut majorer celle du patient.

À DIRE AU PATIENT

A propos de la pathologie

• S’assurer que le patient a bien connaissance des objectifs chiffrés à atteindre (TA < 140/90 mmHg, tour de taille < 102 cm chez l’homme et 88 chez la femme ; maintien d’une HbA1c < 7 % chez la plupart des diabétiques, LDL-cholestérol < 70 mg/dl).

• Apprendre au patient à reconnaître les signes d’alerte : douleur thoracique en étau irradiant le creux de l’estomac, le bras et la mâchoire, pâleur, sueurs, essoufflement. Chez la personne âgée, un accident coronarien peut se manifester par des troubles du rythme cardiaque, des troubles digestifs, des malaises ou un syndrome confusionnel.

• En cas d’alerte, prendre de la trinitrine sublinguale, réitérer éventuellement l’administration 3 à 5 minutes après. Si la douleur est trinitrorésistante, appeler le 15.

Avoir toujours sur soi la trinitrine sublinguale et les numéros de téléphone du cardiologue et du médecin traitant.

A propos du traitement

Importance de l’observance

• Insister sur la nécessaire bonne observance du traitement BASI (bêtabloquants, antiagrégants plaquettaires, statines et IEC) pour éviter les récidives. Il s’agit d’un traitement à vie. Respecter des horaires réguliers pour la prise des médicaments permet d’éviter les oublis.

• Renseigner de façon simple le patient sur le rôle de ses médicaments lui permet d’en mieux comprendre l’importance et d’optimiser l’observance.

• Ne jamais interrompre brutalement un traitement bêtabloquant (effet rebond).

Gestion des effets indésirables

• Eduquer le patient à ne pas modifier ou arrêter lui-même son traitement, mais à signaler au médecin les effets indésirables (toux sèche, crampes, lésions cutanées ou impuissance, saignements…) car ils peuvent justifier une adaptation posologique ou le remplacement par une autre classe thérapeutique.

• La fatigue sous bêtabloquant se manifeste surtout en début de traitement puis s’améliore.

• Prévenir le patient diabétique traité par insuline ou insulinosécréteurs que les bêtabloquants masquent les signes d’hypoglycémie. Renforcer les contrôles de glycémie capillaire.

• Prévenir une hypotension orthostatique en conseillant au patient de se lever en 2 temps. Le port de bas de compression veineuse peut également s’avérer utile dans cette indication.

• Insister sur l’importance d’être en position assise lors de l’administration de trinitrine sublinguale pour éviter les malaises.

• Eduquer le patient à signaler son traitement antiagrégant à tout prescripteur potentiel, mais aussi en cas de soins dentaires, infirmiers ou de pédicurie.

Automédication

Déconseiller l’usage des AINS en automédication car ils interagissent avec le traitement BASI.

PRÉVENTION

• Insister sur la nécessaire correction des facteurs de risque cardiovasculaire.

• Encourager l’arrêt définitif du tabac (et y veiller au fil des ans). L’augmentation du risque d’infarctus du myocarde est directement proportionnelle au nombre de cigarettes (1 paquet/j multiplie par 7 le risque d’infarctus).

• Conseils diététiques : privilégier les viandes blanches, les huiles végétales (colza, olive) et les modes de cuisson à la vapeur, éviter la charcuterie, les graisses animales, les pâtisseries et les viennoiseries, manger des fruits et des légumes, des poissons riches en oméga-3. Limiter la consommation de sel et de sucres rapides et la consommation d’alcool à 2 verres de vin par jour.

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

ORDONNANCE 1 : OUI, car il ne faut jamais interrompre brutalement un traitement bêtabloquant chez un malade coronarien. Néanmoins, il faut suspecter un psoriasis induit par l’acébutolol et inciter M. G. à consulter rapidement son cardiologue pour confirmer le diagnostic et envisager le remplacement du bêtabloquant par un inhibiteur calcique bradycardisant (diltiazem ou vérapamil).

ORDONNANCE 2 : NON. Il faut prendre contact avec le prescripteur car la posologie de Brilique n’est pas cohérente. La dose recommandée est de 2 comprimés/jour. En effet, dans l’année qui suit l’infarctus, l’aspirine (à 75 ou 160 mg/j) est associée au ticagrélor à la dose de 180 mg/j, soit à 1 comprimé de Brilique matin et soir.

MÉMO-DÉLIVRANCE

TRAITEMENTS MÉDICAMENTEUX

Le patient connaît-il son traitement ?

Le traitement postinfarctus, appelé « BASI », est composé d’un bêtabloquant, d’un antiagrégant plaquettaire (deux antiagrégants plaquettaires durant la première année), d’une statine et d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion. Cependant, selon certaines contre-indications, ces médicaments peuvent être substitués par d’autres (par exemple IEC par antagoniste de l’angiotensine 2…). L’éplérénone peut être associée au traitement BASI.

Le patient a-t-il conscience de l’importance de l’observance du traitement ?

Le patient doit être particulièrement observant afin d’éviter tout risque de récidive d’infarctus du myocarde. De plus, l’arrêt brutal du bêtabloquant peut avoir des conséquences cardiaques graves (troubles du rythme voire mort subite). En cas d’effets indésirables, le patient ne doit pas modifier son traitement mais doit contacter son médecin.

Le patient connaît-il la conduite à tenir en cas de douleurs angineuses ?

En cas de douleur thoracique irradiant le creux de l’estomac, le bras et la mâchoire, de pâleurs, sueurs et d’essoufflements, le patient doit s’asseoir ou s’allonger, s’autoadministrer un dérivé nitré sublingual et renouveler l’administration après 3 à 5 minutes en cas d’inefficacité. En cas de persistance de la douleur, il doit contacter le 15.

Le patient sait-il qu’il doit éviter certains médicaments d’automédication ?

Le patient ne doit pas utiliser d’AINS car ils interagissent avec le traitement BASI.

TRAITEMENTS NON MÉDICAMENTEUX

Le patient pratique-t-il une activité physique ?

La reprise de l’activité physique doit être accordée par le médecin. Un programme de réadaptation à l’effort est utile pour revenir progressivement à une activité sans risque. L’objectif est d’atteindre 30 min d’activité physique 5 fois par semaine.

Le patient connaît-il les autres mesures hygiénodiététiques à mettre en place ?

Afin de prévenir tout risque de récidive, le patient doit arrêter le tabac (mais aussi le cannabis et la cocaïne !), limiter sa consommation d’alcool à 2 verres au maximum par jour. Il doit consommer des viandes blanches, des huiles végétales, des fruits et légumes et des poissons riches en oméga-3. Il doit éviter la charcuterie, les graisses animales, les pâtisseries et viennoiseries, le sel et les sucres rapides. Si le patient est en surpoids ou obèse, il doit perdre du poids avec un objectif d’IMC < 25.

LE CAS : Il y a quelques jours Mme A., très inquiète, était venue à la pharmacie chercher du réconfort car suite à une violente douleur thoracique gauche irradiant l’épaule, son époux avait été hospitalisé en urgence. Aujourd’hui, M. A. sort de l’hôpital et, accompagné de sa femme, vient chercher son traitement de postinfarctus.

ANGIOPLASTIE DES CORONAIRES

Egalement appelée angioplastie transluminale ou intervention coronaire percutanée, elle consiste à dilater une coronaire au moyen d’une sonde munie d’un ballonnet. L’artère coronaire est cathétérisée par voie radiale ou fémorale.

Vous avez été confronté à une ordonnance à problème ? Contactez-nous : ordonnance@wolters-kluwer.fr

Qu’en pensez-vous

L’association de deux antiagrégants plaquettaires est :

1) redondante et inutile

2) conforme aux référentiels

Qu’en pensez-vous

La posologie usuelle recommandée d’Efient est :

1) 5 mg par jour

2) 10 mg par jour

3) 10 mg matin et soir

ACTIVITÉ SYMPATHO-MIMÉTIQUE INTRINSÈQUE

Activité diminuant l’effet bradycardisant des bêtabloquants par stimulation sympathique.

EFFET CHRONOTROPE NÉGATIF

Diminution de la fréquence cardiaque.

EFFET INOTROPE NÉGATIF

Diminution de la force des contractions cardiaques.

RHABDO-MYOLYSE

Destruction des masses musculaires striées.

EN CHIFFRES

• Environ 100 000 personnes sont atteintes d’infarctus du myocarde chaque année en France.

• En 2008, 56 102 personnes domiciliées en France ont été hospitalisées pour infarctus du myocarde, soit une baisse de 7,4 % par rapport à 2002.

• 48 961 décès par cardiopathies ischémiques ont été enregistrés en France en 1990, 45 068 en 2000 et 35 324 en 2010.

• 7 % des patients pris en charge pour infarctus du myocarde décèdent dans le premier mois, 13 % la 1re année. Cependant, la mortalité à 30 jours a baissé de 60 % en 15 ans.

• En 2007, 175 000 endoprothèses coronaires (stents) ont été posées en France, dont 40 % de stents « actifs ».

ENDOPROTHÈSE CORONAIRE (STENT)

Tube maillé en acier destiné à maintenir l’artère coronaire ouverte après dilatation.

ANGIOPLASTIE

Dilatation mécanique d’une artère obstruée avec pose d’une endoprothèse.

PONTAGE AORTO-CORONARIEN

Intervention chirurgicale consistant à dériver le flux sanguin entre l’aorte et l’artère coronaire obstruée au moyen d’un fragment de veine ou d’artère afin de faire circuler le sang au-delà de l’obstruction de l’artère coronaire malade.

PHYSIOPATHOLOGIE

• La maladie coronaire est la conséquence de la formation de plaques athéromateuses dans la paroi des artères coronaires. Chaque plaque est constituée d’un cœur lipidique recouvert d’une chape fibreuse. Celle-ci peut être le siège de phénomènes de rupture, fissuration ou érosion. Un thrombus se forme lorsque les éléments du centre lipidique entrent en contact avec le sang.

– Si le thrombus occlut totalement et brutalement l’artère coronaire en cause, une ischémie myocardique aiguë survient dans la zone en aval de l’occlusion : c’est le syndrome coronaire aigu ST+ ou infarctus du myocarde ST+.

– Si le thrombus se fragmente et embolise en l’aval de l’artère vers les capillaires, on observe à ce niveau de petits foyers de nécrose myocardique : c’est le mécanisme des infarctus du myocarde non ST+.

– Si le thrombus réduit brutalement la lumière de l’artère sans l’occlure complètement, la conséquence clinique est l’angor instable.

– Parfois, le matériel thrombotique est réintégré à l’intérieur de la plaque et participe alors à la réduction de la lumière vasculaire, sans conséquence clinique immédiate.

• L’importance de l’ischémie et sa durée conditionnent l’importance de la nécrose d’aval, perturbant plus ou moins la fonction contractile de la zone atteinte. Si un geste de revascularisation est possible et pratiqué assez tôt, la reperfusion du myocarde permet d’éviter la nécrose et la récupération de la fonction contractile est possible.

Si la zone nécrosée est très étendue, s’installe à la longue un remodelage ventriculaire et une dilatation cavitaire responsable d’une insuffisance cardiaque.

• On distingue, selon le profil clinique, électrocardiographique et biologique, deux types de SCA : le SCA avec sus-décalage du segment ST à l’électrocardiogramme (SCA ST+), et le SCA sans sus-décalage de ST (SCA non ST+). Le premier correspond à l’infarctus du myocarde ST+ (fig 2). Le SCA non ST+ se subdivise lui-même en deux entités : l’angor instable et l’infarctus du myocarde non ST+ (fig 3).

INFARCISSEMENT

Foyer circonscrit de nécrose hémorragique provoquée par une oblitération veineuse au niveau d’un viscère.

CE QUI A CHANGÉ

APPARU

• Eplérénone (Inspra) : commercialisation de ce médicament antialdostérone spécifiquement indiqué chez les patients présentant une dysfonction ventriculaire gauche avec insuffisance cardiaque après un IDM récent (janvier 2005).

• Prasugrel (Efient) : commercialisation de ce médicament antiagrégant plaquettaire indiqué pour prévenir l’ischémie myocardique lors de l’intervention coronaire avec syndrome coronaire aigu (février 2009).

• Ticagrélor (Brilique) : commercialisation de ce médicament antiagrégant plaquettaire partageant la même indication qu’Efient (AMM décembre 2010).

• Interaction médicamenteuse clopidogrel/IPP : le clopidogrel est une prodrogue et le CYP2C19 semble jouer un rôle important dans la formation de son métabolite actif. En théorie, une faible activité de ce cytochrome pourrait diminuer la réponse thérapeutique du clopidogrel. Certains IPP (comme l’oméprazole) seraient associés à un tel risque. Cette interaction est à prendre en compte.

• Xarelto (rivaroxaban) est autorisé dans l’UE pour la prévention secondaire des patients adultes après syndrome coronarien aigu avec élévation des biomarqueurs cardiaques, à la dose de 2,5 mg deux fois par jour en association avec un traitement antiplaquettaire. Le dosage Xarelto 2,5 mg devrait être bientôt disponible en France

ANGIOPLASTIE TRANS-LUMINALE

Indiquée pour traiter les occlusions ou les sténoses artérielles, elle utilise un petit ballonnet gonflable à usage unique permettant de dilater l’artère à l’endroit du rétrécissement. Ce geste est souvent complété par la mise en place d’une endoprothèse métallique (stent) pour éviter la reformation d’un rétrécissement.

VIGILANCE !!!

Certaines contre-indications doivent être connues du pharmacien :

• Bêtabloquants : asthme et BPCO sévères, insuffisance cardiaque non contrôlée, bradycardie, phénomène de Raynaud, hypotension.

• Acide acétylsalicylique : ulcère gastroduodénal en évolution, maladie hémorragique, grossesse à partir du 6e mois sauf exception.

• Clopidogrel : insuffisance hépatique sévère et lésion hémorragique évolutive.

• Ticlopidine : affections hémorragiques, lésions organiques susceptibles de saigner, antécédents de troubles hématologiques (leucopénie, thrombopénie ou agranulocytose).

• Prasugrel, ticagrélor : saignement pathologique avéré, antécédent d’AVC ou d’accident ischémique transitoire, insuffisance hépatique.

• Statines : Affection hépatique évolutive ou élévation prolongée inexpliquée des transaminases, grossesse et allaitement.

• IEC : angio-œdème sous IEC, grossesse à partir du 2e trimestre.

• ARA II : obstruction biliaire, insuffisance hépatique sévère, grossesse à partir du 2e trimestre.

• Eplérénone : kaliémie > 5 mmol/l à instauration du traitement, insuffisance rénale modérée à sévère (clairance de la créatinine < 50 ml/min), insuffisance hépatique sévère.

POINT DE VUE Pr Jean Ferrières, cardiologue, PU-PH, Fédération de cardiologie, CHU de Toulouse, interrogé par Carole Fusi, pharmacienne

« Le rôle du pharmacien dans l’observance est capital »

Quelle est la place des oméga-3 dans le traitement post-infarctus du myocarde ?

Très utilisés notamment pour leur action antiarythmique, ils le sont désormais moins depuis la quadrithérapie BASI. Si l’observance est bonne, ils ont également moins d’intérêt.

Quelles sont les perspectives thérapeutiques ?

Actuellement, nous procédons à des essais cliniques avec des anticorps monoclonaux, développés par différents laboratoires, utilisés par voie sous-cutanée 1 fois par mois ou une fois tous les 15 jours. Ces anticorps agissent sur une protéine, la PCS K9. Cette action permettrait une diminution conséquente du LDL-cholestérol. Ce traitement pourrait donc être utilisé à terme en prévention secondaire et remplacer les statines si sa tolérance s’avère excellente et si le pronostic sous traitement s’améliore.

Qu’aimeriez-vous dire aux pharmaciens d’officine ?

Leur rôle est capital dans l’observance des traitements. Je suis souvent sidéré lorsque mes patients me disent qu’ils ont arrêté tout ou partie de leur traitement depuis leur dernière visite. Je pense que le pharmacien a vraiment un rôle à jouer pour éviter cela. Les médecins ne parlent pas assez en détail des médicaments alors que le pharmacien peut développer des informations complémentaires et insister notamment sur l’importance de bien prendre tous les jours la totalité du traitement BASI sans jamais l’arrêter. D’autre part, 70 % des morts coronaires sont extrahospitalières. Les pharmaciens ont aussi un rôle important à jouer en s’équipant de défibrillateurs semi-automatiques car ils sont au plus près des patients, notamment dans les villages. Depuis le décret du 4 mai 2007, tout le monde peut utiliser ces défibrillateurs sans aucun danger pour les patients et les sauveteurs, permettant de sauver de nombreuses vies.

STIMULATEUR OU PACEMAKER

Dispositif implanté dans l’organisme délivrant des impulsions électriques au cœur et permettant par exemple d’accélérer ce dernier lorsqu’il est trop lent.

DÉFIBRILLATEUR AUTOMATIQUE

Stimulateur cardiaque indiqué dans la prévention de la mort subite.

QUESTION DE PATIENTS

« Puis-je utiliser un sel de régime pour rehausser le goût de mes plats ? »

Les sels de régime ne contiennent pas de sodium, mais peuvent renfermer une quantité non négligeable de potassium et modifier la kaliémie. Ainsi, leur utilisation n’est envisagée qu’après avis médical et contrôle rigoureux de l’ionogramme sanguin, d’autant que les IEC sont eux-mêmes hyperkaliémiants.

QUESTION DE PATIENTS

« Mon fils me dit qu’un de ses amis de 30 ans a fait un infarctus. Est-ce vraiment possible ? »

Oui, il est de plus en plus fréquent de constater des infarctus du myocarde chez de jeunes adultes du fait d’une consommation excessive de cannabis ou de cocaïne. Ces patients arrêtent très difficilement cette addiction. De fait, il arrive fréquemment qu’ils récidivent. Ces produits étant interdits, communiquer à ce sujet est d’autant plus difficile.

SITE INTERNET

www.fedecardio.org

Le site de la Fédération française de cardiologie comporte un onglet « Je suis cardiaque ? » où le patient peut trouver des informations fiables, notamment sur les examens cardiaques et sur ses traitements (angioplastie…).

Prévoyez-vous de fermer votre officine le 30 mai prochain en signe de protestation ?


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