Principales pathologies n écessitant un anticoagulant - Le Moniteur des Pharmacies n° 2966 du 19/01/2013 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2966 du 19/01/2013
 

Cahiers Formation du Moniteur

SPÉCIAL ANTICOAGULANTS ORAUX

Les anticoagulants sont indispensables dans toutes les situations de thrombose ou de risque de thrombose. Cette thrombose peut affecter une veine : thrombose veineuse profonde, et sa complication grave, l’embolie pulmonaire dans laquelle le thrombus migre jusque dans l’artère pulmonaire. Elle peut également affecter une artère, principalement au niveau cérébral (accident vasculaire cérébral ischémique, parfois en lien avec un trouble du rythme comme la fibrillation auriculaire) ou myocardique (angor, infarctus du myocarde…).

La thrombose veineuse profonde

La thrombose veineuse profonde (TVP) correspond à l’oblitération du flux sanguin d’une veine profonde par un caillot sanguin (thrombus). C’est l’une des deux manifestations de la maladie thrombo-embolique veineuse (MTEV), l’autre étant la complication immédiate de la TVP : l’embolie pulmonaire.

QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?

• La majorité des TVP (anciennement dénommées phlébites) siège au membre inférieur. L’examen comparatif des deux côtés est alors très contributif (asymétrie des signes).

• La douleur est variable, allant de la simple pesanteur à la douleur aiguë. Classiquement, elle est associée à un œdème dur et localisé, responsable d’une augmentation du diamètre du mollet. L’examen clinique peut retrouver également une augmentation de la chaleur cutanée, une dilatation du réseau veineux superficiel, et parfois un cordon veineux dur et douloureux. Tous ces signes sont inconstants.

Sur le plan général, on retrouve souvent une hyperthermie modérée (38° C).

QUELLES SONT LES ÉTIOLOGIES ?

Trois éléments induisent la formation d’une TVP (triade de Virchow) :

• La stase veineuse, elle-même favorisée par l’alitement ou l’immobilisation prolongés, l’insuffisance cardiaque décompensée, les compressions extrinsèques liées à la présence d’adénopathies ou d’un cancer thoraco-abdominal ou pelvien ;

• Les lésions de l’endothélium veineux sous l’effet de facteurs mécaniques (chirurgie, cathéter veineux central), biologiques ou infectieux ;

• L’activation des facteurs de la coagulation (hypercoagulabilité) favorisée par les traumatismes, l’accouchement, la chirurgie, les déficits acquis ou congénitaux en certains facteurs de la coagulation.

COMMENT EST PORTÉ LE DIAGNOSTIC ?

Le diagnostic de TVP est souvent difficile et il faut confronter les éléments cliniques à la présence éventuelle de situations à risque de thrombose pour parvenir à établir un diagnostic de présomption. Des examens complémentaires sont nécessaires à la confirmation du diagnostic, notamment dosage de D-dimères plasmatiques(produits de dégradation de la fibrine). Si la probabilité clinique est forte ou si les D-dimères sont supérieurs à 500 µg/l, l’échographie veineuse est indiquée pour confirmer un diagnostic.

L’écho-Doppler veineux permet l’étude morphologique de la veine. En cas de TVP, la veine est incompressible. On peut décrire la structure du caillot, son caractère adhérent ou non à la paroi veineuse, ainsi que son extension et le degré d’obstruction de la veine.

QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE ?

De nombreux facteurs de risque de TVP ont été identifiés. Dans 40 % des cas, il s’agit de facteurs de risque transitoires, permanents dans 20 %, et dans 30 à 40 % des cas, aucun facteur de risque n’est retrouvé : la thrombose est dite « idiopathique ».

On distingue les facteurs de risque transitoires et les facteurs de risque permanents. Les premiers sont :

– chirurgie, notamment chirurgie orthopédique, chirurgie carcinologique et chirurgie pelvienne ;

– fractures (membre inférieur surtout) ;

– immobilisation, paralysie du membre inférieur, alitement ;

– voyages prolongés (vol long courrier, long trajet en automobile, en train, en car…) ;

– décompensation cardiaque ou respiratoire aiguës ;

– infection aiguë ;

– grossesse et post-partum ;

– contraception estroprogestative et traitement hormonal substitutif de la ménopause ;

– cathéter veineux central.

Les facteurs de risque permanents sont :

– âge, antécédents thromboemboliques personnels ou familiaux ;

– obésité ;

– insuffisance veineuse chronique ;

– anomalies de la coagulation (déficit en antithrombine…) ;

– insuffisance cardiaque ou insuffisance respiratoire chroniques, syndrome néphrotique ;

– cancer évolutif, hémopathie, syndrome myéloprolifératif ;

– syndrome des antiphospholipides (SAPL), MICI (maladies inflammatoires chroniques de l’intestin).

QUELLES SONT LES COMPLICATIONS ?

Sous traitement anticoagulant, le caillot se résorbe plus ou moins complètement. Il peut persister une occlusion partielle de la veine. En l’absence de traitement, la TVP peut évoluer vers une embolie pulmonaire. Le caillot migre vers l’artère pulmonaire en direction des poumons. Environ 30 % des TVP s’accompagnent d’une embolie pulmonaire asymptomatique. Inversement, on retrouve une TVP asymptomatique dans la majorité des embolies pulmonaires.

Le diagnostic est malaisé, les signes cliniques (douleur thoracique, expectorations sanglantes, toux, fièvre, dyspnée) étant variables et inconstants.

Le pronostic dépend de la gravité de l’embolie pulmonaire (risque de défaillance cardiaque).

Les récidives de TVP et le syndrome post-thrombotique constitent d’autres complications.

Un accident vasculaire

Un accident vasculaire cérébral est dû à une modification de l’irrigation sanguine du cerveau, impliquant le plus souvent une artère cérébrale ou à distribution cérébrale. Il peut être ischémique (infarctus cérébral, accident ischémique transitoire) ou hémorragique (hémorragie cérébrale). Seuls certains AVC ischémiques relèvent d’un traitement anticoagulant.

QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?

Les manifestations cliniques sont variables, souvent associées, et dépendent du territoire artériel touché. Elles sont d’installation brutale.

• Pour les AVC d’origine carotidienne : troubles visuels, céphalées, hémiplégie brachiofaciale, crurale ou de tout un hémicorps, troubles sensitifs unilatéraux, troubles du langage, anosognosie, troubles de l’orientation spatiale.

• En cas d’ischémie dans le territoire vertébrobasilaire : troubles moteurs et/ou sensitifs d’un ou plusieurs membres (du même côté ou non), troubles visuels, céphalées, troubles de l’équilibre, dysarthrie, troubles de la déglutition.

• Le locked-in syndrome témoigne également d’une ischémie vertébrobasilaire.

QUELLES SONT LES ÉTIOLOGIES ?

• Les trois causes principales des AVC ischémiques sont l’athérosclérose des artères cervicales, intracrâniennes ou de l’aorte, les embolies d’origine cardiaque (arythmie par fibrillation auriculaire, infarctus du myocarde, valvulopathie…) et les maladies des petites artères cérébrales responsables des infarctus lacunaires. Elles représentent 2/3 de l’ensemble des accidents ischémiques cérébraux.

• Certains infarctus cérébraux restent de cause indéterminée.

QUELS SONT LES EXAMENS COMPLÉMENTAIRES ?

Ils ont pour but de déterminer la cause et le mécanisme de l’AVC.

L’IRM cérébrale est l’examen de prédilection, à réaliser en urgence. Si l’accès en urgence à l’IRM est impossible, il est recommandé de réaliser un scanner cérébral sans injection de produit de contraste. Cet examen est moins performant que l’IRM pour détecter des signes d’ischémie récente, mais il permet de visualiser une hémorragie intracrânienne (zone hyperdense).

Autres examens : electrocardiogramme à la recherche d’un éventuel trouble du rythme cardiaque, exploration biologique (hémogramme, glycémie, ionogramme sanguin, évaluation de la fonction rénale, bilan lipidique, coagulation)…

QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE ?

• Outre l’âge, qui augmente le risque d’AVC, les facteurs de risque des AVC ischémiques sont globalement superposables aux facteurs de risque cardiovasculaire : élévation de la pression artérielle (inversement, la baisse de la pression artérielle est associée à une réduction du risque vasculaire), hypercholestérolémie, diabète.

• Le tabac est un facteur de risque indépendant d’infarctus cérébral, avec un doublement du risque chez les fumeurs par rapport aux non-fumeurs.

• Autres facteurs de risque : consommation chronique d’alcool, obésité, sédentarité, facteurs de risque d’origine iatrogène (contraception estroprogestative, traitement hormonal de la ménopause).

QUELLE EST L’ÉVOLUTION ?

• La qualité de la prise en charge initiale influe considérablement sur le pronostic et l’évolution des AVC. Ainsi, le traitement de l’ischémie cérébrale par thrombolyse intraveineuse peut se solder par la régression complète des signes de déficit.

• Après un infarctus cérébral, le risque de récidive est estimé à 10 % la première année et à plus de 30 % à 5 ans. Il existe aussi un risque de survenue d’événements cardiaques.

• Parmi les patients atteints d’infarctus cérébraux, 50 % gardent des séquelles invalidantes, 10 % décèdent au cours du premier mois, 23 % la première année, et plus de 50 % à 5 ans. Les décès précoces sont en rapport avec l’œdème cérébral et l’hypertension intracrânienne.

• Les séquelles fonctionnelles potentielles des AVC sont nombreuses : troubles de l’équilibre et de la marche, troubles de la déglutition, perturbations des fonctions cognitives…

La fibrillation auriculaire

La fibrillation auriculaire est le plus fréquent des troubles du rythme cardiaque. Avec environ 2 % de prévalence dans la population adulte et plus de 8 % au-delà de 80 ans, le vieillissement de la population en fait une pathologie aux allures épidémiques (prévalence multipliée par 2,5 en 2050).

QU’EST-CE QUE C’EST ?

• La fibrillation auriculaire ou atriale (FA) est une tachycardie irrégulière née de l’oreillette, ayant pour conséquence un rythme cardiaque rapide et irrégulier (tachyarythmie) et la paralysie mécanique des oreillettes source de stase sanguine, de thrombose et d’embolies (cf. schéma). Elle est le plus souvent associée à une cardiopathie dont elle aggrave les conséquences.

• Sur l’ECG, les ondes P sont remplacées par des oscillations de la ligne de base, irrégulières, rapides et variables par leur amplitude et leur morphologie (cf. schéma).

QUELS SONT LES SYMPTÔMES ?

• Lorsqu’elle est symptomatique (2/3 des patients), la FA se manifeste par des palpitations, une dyspnée, une asthénie, des précordialgies (douleur thoracique située devant le cœur), des lipothymies voire une syncope. Elle peut aussi se révéler par une complication, en particulier un AVC.

• La FA peut être paroxystique (retour spontané en rythme sinusal rythme cardiaque normal < 7 jours, le plus souvent < 48 h), persistante (nécessité d’une cardioversion pour restaurer le rythme sinusal) ou permanente (échec de régularisation ou décision de laisser en l’état). La FA paroxystique ou permanente est volontiers récidivante. La FA reste une pathologie relativement réfractaire aux traitements médicamenteux actuels.

QUELS SONT LES FACTEURS PRÉDISPOSANTS ?

• Les principaux facteurs prédisposants sont l’HTA, l’hypertrophie ventriculaire gauche, l’insuffisance cardiaque, les valvulopathies mitrales, le diabète.

• La FA peut également être due à une cause transitoire et réversible : hyperthyroïdie ou une hypokaliémie.

QUELLES SONT LES COMPLICATIONS ?

• Complications thrombo-emboliques : le principal risque est celui d’AVC. Il concerne en moyenne 5 % des patients atteints de FA par an. La FA est responsable de plus d’1 AVC sur 5. Les AVC liés à la FA sont particulièrement sévères. Un score prédictif, dénommé CHA2DS2-Vasc, est utilisé afin d’évaluer le risque embolique individuel et déterminer la stratégie de traitement antithrombotique. Il dépend de différents critères, pour l’essentiel : antécédent d’AVC, âge et présence d’une insuffisance cardiaque, d’un diabète ou d’une HTA.

• Complications hémodynamiques : la FA est une cause majeure d’aggravation d’une insuffisance cardiaque préexistante ou de décompensation d’une cardiopathie jusqu’alors bien tolérée. La FA peut induire à elle seule une insuffisance cardiaque sévère.

L’infarctus du myocarde et le post-infarctus

L’infarctus du myocarde (IDM) reste l’une des pathologies médicales les plus fréquentes : entre 100 et 120 000 Français en sont victimes chaque année. Lorsque la prise en charge est rapide est adéquate, le taux de mortalité après un IDM est de l’ordre de 5 à 10 % le premier mois, de 5 à 10 % ensuite pour la première année puis de 2 à 4 % par an.

QU’EST-CE QUE C’EST ?

L’IDM est une nécrose ischémique du muscle cardiaque. Il concerne avant tout le ventricule gauche. Des atteintes du ventricule droit ou des oreillettes sont plus rares.

L’IDM est le résultat d’une ischémie myocardique prolongée en aval de l’occlusion thrombotique complète ou incomplète d’une branche artérielle coronaire.

La thrombose coronaire se produit, dans l’immense majorité des cas, en regard d’une plaque d’athérosclérose. C’est la déstabilisation de la plaque (rupture ou érosion de la chape fibreuse superficielle) qui déclenche la formation d’un thrombus, aboutissant à l’occlusion coronaire complète ou incomplète.

Les conséquences de la nécrose myocardique sont de deux ordres.

• Le myocarde nécrosé (ou sévèrement ischémié) cesse de se contracter. Le pouvoir de contraction du ventricule gauche est diminué. Il peut en résulter une insuffisance ventriculaire gauche aiguë plus ou moins prononcée puis une insuffisance cardiaque chronique.

• Le territoire nécrosé constitue un foyer d’instabilité électrique qui peut engendrer des troubles du rythme variés, notamment ventriculaires : extrasystoles, tachycardie, fibrillation. Ce risque accru de troubles rythmiques ventriculaires, donc de mort subite, est maximum au tout début de l’infarctus puis diminue.

La taille de l’infarctus dépend du siège de l’obstruction coronaire et des possibilités d’une circulation collatérale de suppléance. La nécrose n’est pas totale d’emblée, mais s’étend progressivement du centre du territoire coronaire intéressé vers la périphérie au cours des 6 à 12 heures suivant l’occlusion coronaire. Un traitement adapté peut donc empêcher la nécrose d’une partie de zone ischémiée.

QUELLE EST L’ÉTIOLOGIE ?

L’athérosclérose est une affection chronique de la paroi vasculaire.

Au plan anatomopathologique, elle est caractérisée par un épaississement focal de l’intima des artères de gros et moyen calibre. La lésion élémentaire est la plaque athéroscléreuse qui associe un athérome et une sclérose.

L’athérome, essentiellement composé d’un dépôt lipidique où prédomine le cholestérol, forme le centre de la plaque. La sclérose est une armature fibreuse qui forme le pourtour de la plaque, enchâssant le centre athéromateux.

Les plaques tirent leur gravité potentielle du fait qu’elles peuvent croître jusqu’à perturber l’écoulement sanguin dans les artères où elles siègent. La rupture d’une plaque se complique immédiatement d’une thrombose qui peut :

– se développer rapidement et boucher la lumière artérielle,

– se détacher pour former une embole qui occlut une artère en aval.

L’étiologie de l’athérosclérose n’est pas connue.

QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES DU POST-INFARCTUS ?

Après un IDM, le patient redevient en général asymptomatique : il ne ressent aucune douleur thoracique, aucun essoufflement. Il a alors tendance à penser qu’il est guéri.

QUELLES SONT LES COMPLICATIONS ?

• Trouble du rythme ventriculaire

Les phénomènes électriques qui s’observent sur l’électrocardiogramme (ECG) à la phase initiale de l’IDM s’atténuent en 24-48 heures. Mais la zone cicatricielle peut rester source de troubles du rythme à distance de la phase aiguë : une fibrillation ventriculaire, responsable d’une mort subite, peut se produire plusieurs mois ou plusieurs années après un IDM.

• Récidive d’infarctus

Après un IDM, la maladie coronaire athéroscléreuse résiduelle peut être responsable d’une ischémie dans le territoire myocardique initialement partiellement infarci ou dans d’autres territoires. Elle expose à une récidive d’infarctus.

• Dysfonction du ventricule gauche

Dans les mois ou les années suivant un IDM peuvent apparaître des signes d’insuffisance cardiaque gauche. Le remodelage ventriculaire gauche postinfarctus est le principal responsable de cette situation.

• Evolution de l’athérosclérose

Le patient est aussi exposé aux risques d’évolution des lésions athéroscléreuses au niveau d’autres artères. L’athérosclérose des artères carotides peut provoquer des accidents ischémiques cérébraux ou oculaires. L’atteinte de l’aorte abdominale peut être à l’origine du développement d’un anévrisme. Celle des artères des membres inférieurs entraîne une claudication intermittente ou une ischémie aiguë des extrémités.

COORDONNÉES UTILES

• Centre de référence et d’éducation des antithrombotiques d’Ile-de-France, joignable 24 h/24 h au 01 42 81 12 13 ou à creatif.lrb@lrb.aphp.fr

• Site internet d’information pour les patients : www.avkcontrol.com

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