ANTIOSTÉOPOROTIQUES - Le Moniteur des Pharmacies n° 2954 du 27/10/2012 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2954 du 27/10/2012
 

Cahiers Formation du Moniteur

Iatrogénie

CAS N° 1 — EFFETS INDÉSIRABLES

« Je veux arrêter mon traitement. »

Lors de son renouvellement d’ordonnance, Mme V., 63 ans, refuse que le pharmacien lui dispense la boîte d’acide alendronique 70 mg. Elle a vu une émission de télévision rapportant le risque d’ostéonécrose de la mâchoire sous biphosphonates. Mme V. est traitée depuis 5 ans pour une ostéoporose (T-score = – 2,6) avec deux antécédents de fractures vertébrales. Son traitement comprend également Calciprat Vit D3 1 000 mg/800 UI (carbonate de calcium, vitamine D3).

Doit-elle être inquiète ?

Non, l’ostéonécrose de la mâchoire est un effet indésirable rare des biphosphonates.

ANALYSE DU CAS

L’ostéonécrose est un effet indésirable rare des biphosphonates. Ce risque d’ostéonécrose apparaît surtout aux doses oncologiques. La fréquence de survenue dépend de la dose de biphosphonate administrée. Ainsi, aux posologies de l’ostéoporose, elle est comprise entre 1/10 000 et 1/100 000, et aux posologies utilisées en oncologie entre 1 et 2 %. L’ostéonécrose serait provoquée par un excès de blocage de la résorption osseuse. Le diagnostic d’ostéonécrose maxillaire est souvent posé devant un retard de cicatrisation après chirurgie buccale, notamment une extraction dentaire. L’exposition éventuelle de l’os à nu s’accompagne de douleur (inconstante), de sensation d’engourdissement, de lourdeur de la mâchoire et de mobilité dentaire. La mâchoire inférieure postérieure en est le plus souvent le siège. Il existe des facteurs de risque associés : l’âge supérieur à 65 ans, les foyers infectieux bucco-dentaires ou parodontaux, les radiothérapies de la tête, la corticothérapie, les traumatismes buccaux, l’alcool, le tabac et la chimiothérapie. Pour Mme V., le traitement de l’ostéoporose se révèle indispensable compte tenu de son T-Score ± – 2,5. Les biphosphonates constituent le traitement de première intention au vu de son anamnèse (deux fractures vertébrales).

ATTITUDE À ADOPTER

Compte tenu de la rareté des ostéonécroses par biphosphonates dans le cadre du traitement de l’ostéoporose, le pharmacien rassure Mme V. Il lui rappelle également qu’elle peut prévenir ce risque par la réalisation d’un suivi buccodentaire annuel et d’une bonne hygiène buccodentaire. Il lui conseille également de consulter son chirurgien-dentiste au moindre symptôme buccodentaire et de l’informer de son traitement actuel. Enfin, il lui réexplique que dans son cas, ce traitement lui est indispensable.

CAS N° 2 – EFFETS INDÉSIRABLES

Annick en a encore

Annick D., 63 ans, est suivi depuis deux ans pour une ostéoporose post-ménopausique. Elle vient à l’officine pour le renouvellement de sa prescription : acide risédronique 70 mg 1 cp/semaine et Idéos (carbonate de calcium, vitamine D3) 2 cp/j. Alors que le pharmacien pose la boite d’Idéos sur le comptoir, elle s’exclame : « Ah non ! Pas celui-ci, j’en ai encore plein chez moi ! » Après discussion, le pharmacien apprend qu’elle ne prend plus d’Idéos depuis bientôt six mois. Elle souffrait de constipation chronique. L’arrêt du calcium a amélioré ses troubles digestifs.

Comment garantir un traitement optimal ?

Le pharmacien cherche une alternative médicamenteuse permettant d’assurer un apport optimal en calcium et vitamine D.

ANALYSE DU CAS

Les traitements antiostéoporotiques spécifiques n’ont montré d’efficacité qu’en cas de correction préalable d’une carence en calcium et vitamine D par leur apport combiné. L’apport quotidien optimum en calcium est estimé à 1 000 mg et à 800 UI pour la vitamine D. L’adhésion aux suppléments vitamino-calciques est fortement compromise par les effets indésirables digestifs. Ils sont la cause principale de non-observance selon les patients. L’observance à un an oscille entre 25 et 45 %. Dans la cas d’Annick D., la non-adhésion au traitement entraîne non seulement une diminution des apports en calcium mais également en vitamine D. Or le calcium peut être facilement apporté par l’alimentation, contrairement à la vitamine D qui joue un rôle majeur dans l’absorption et la fixation du calcium. Seuls 10 % des apports en vitamine D sont alimentaires, le reste provient du métabolisme solaire du cholestérol. En France, une insuffisance en vitamine D est retrouvée chez 80 % des adultes. Le déficit est jugé modéré à sévère pour la moitié. Aussi, il semble important pour le pharmacien de garantir les apports en vitamine D, les effets indésirables étant liés au calcium.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien envisage le découplage du calcium et de la vitamine D. Il s’entretient avec le généraliste et propose de remplacer Idéos par Calcium 500 mg 2 cp/j et Uvédose 1 ampoule par trimestre. Ce dernier souhaite avoir les résultats de la calcémie et du taux de vitamine D avant de prendre la décision. Le pharmacien rappelle à Annick les conseils alimentaires pour augmenter ses apports en calcium.

CAS N° 3 – EFFETS INDÉSIRABLES

Des brûlures d’estomac

Léonie S., 73 ans, vient à la pharmacie pour renouveler son traitement habituel. Elle est notamment traitée depuis 8 ans par Fosamax 70 mg (acide alendronique) 1 cp/semaine et Cacit D3 1000 mg/880 UI (citrate de calcium, vitamine D3) 1 sachet/j. Elle en profite pour demander à la préparatrice un médicament conseil : elle souffre de brûlures d’estomac et de douleurs derrière la poitrine quand elle mange. Après discussion, la préparatrice s’aperçoit que la patiente, depuis quelques mois où elle se sent plus fatiguée, se recouche après la prise de Fosamax.

Fosamax peut-il être responsable des brûlures ?

Une mauvaise utilisation du biphosphonate oriente vers cette étiologie iatrogène.

ANALYSE DU CAS

Les œsophagites, les irritations et les ulcérations œsophagiennes sont des effets indésirables peu fréquents des biphosphonates, notamment pour leurs formes hebdomadaires. Les personnes souffrant d’œsophagites médicamenteuses se plaignent essentiellement de dysphagie permanente (sensation de gêne ou d’obstacle à la déglutition). Léonie S. présente des brûlures épigastriques, augmentées par l’ingestion d’aliments : ce sont aussi des symptômes liés aux irritations œsophagiennes. Des douleurs rétrosternales peuvent être également observées. L’action toxique du biphosphonate se fait par contact direct entre la muqueuse et le biphosphonate, dans le dernier tiers ou le milieu de l’œsophage. L’ingestion insuffisante d’eau ou la position allongée suite à la prise du médicament favorise mécaniquement la remontée du comprimé le long de l’œsophage. L’irritation provoquée peut se compliquer d’un ulcère puis d’une sténose (rétrécissement de l’œsophage). L’alendronate présente également la particularité de se déposer au niveau de l’œsophage sous forme de cristaux. Le suivi national de pharmacovigilance réalisé par l’Afssaps en 2008 pour l’acide alendronique a montré que 10 % des effets indésirables surviennent suite à un non-respect des précautions d’emploi relatives à l’administration des biphosphonates. 25 % sont jugés graves. La préparatrice appelle la pharmacienne afin de confirmer son hypothèse.

ATTITUDE À ADOPTER

Face au caractère potentiellement grave de l’œsophagite, la pharmacienne contacte directement le médecin généraliste après accord de la patiente. Celui-ci va la recevoir dans la demi-journée afin de l’orienter rapidement en gastro-entérologie pour une exploration endoscopique digestive haute.

CAS N° 4 – EFFETS INDÉSIRABLES

« J’ai des plaques partout ! »

Mme A, 57 ans, se présente inquiète à la pharmacie : « Je crois que je fais une allergie à mon nouveau médicament : Protelos ». Elle est traitée depuis 10 jours pour une ostéoporose post-ménopausique avec deux fractures vertébrales par Protelos (ranélate de strontium) 1 sachet/j et Fixical 1 000 mg/800 UI (carbonate de calcium, vitamine D3) 1 cp/j. Depuis 2 ou 3 jours, elle présente un prurit important sur tout le corps. Le pharmacien prend sa demande très au sérieux.

Le pharmacien a-t-il raison d’être préoccupé ?

Oui, il faut garder en mémoire le risque de DREES du Protelos.

ANALYSE DU CAS

Le prescripteur a prescrit Protelos en premièreintention (normalement indiqué en 2e intention), compte tenu d’un antécédent récent d’ulcère gastrique. En effet, l’utilisation de biphosphonates n’aurait pas été prudente. Le pharmacien soupçonne l’apparition chez Mme A d’un syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse autrement appelé syndrome de DRESS. Il s’agit d’un effet indésirable de Protelos rare (1/30 000) pour lequel l’Afssaps a émis une alerte en 2007. Le syndrome de DRESS est caractérisé par une éruption cutanée généralisée, de la fièvre et une polyadénopathie. Il est caractérisé au niveau hématologique par une hyperéosinophilie. Il peut s’accompagner d’une atteinte viscérale. Les manifestations cliniques apparaissent généralement entre la 2e et la 6e semaine après l’initiation du traitement. Les atteintes systémiques graves sont responsables d’une mortalité de 10 %. Pour Mme A., le simple prurit évoque davantage une allergie qu’un DRESS. Toutefois, il convient d’arrêter le traitement et de contacter le médecin. Début 2012, le taux de remboursement de Protelos est passé de 65 à 30 % compte tenu du risque de syndrome de DRESS et de thrombose suite à une réévaluation de l’ASMR de III à V. Ceci ne remet pas en cause son efficacité dans la réduction du risque de fractures vertébrales et fémorales. Fin octobre 2011, l’Agence Européenne du Médicament (EMEA) a réévalué le rapport bénéfice/risque de Protelos : sa balance bénéfice/risque reste favorable. Cela a conduit à l’ajout de contre-indications (antécédent de maladie thromboembolique et immobilisation prolongée), au renforcement des précautions d’emploi (chez les personnes de plus de 80 ans) et de la surveillance des syndromes de DRESS.

ATTITUDE À ADOPTER

Face à la gravité du syndrome de DRESS, le pharmacien appelle le médecin qui souhaite revoir la patiente.

CAS N° 5 – EFFETS INDÉSIRABLES

Geneviève a des crampes

Geneviève L., 54 ans, vient à la pharmacie pour un conseil : elle souffre de crampes dans les jambes depuis plusieurs jours. Elle est traitée depuis 4 mois pour une ostéoporose post-ménopausique (T-score = – 2,5) par Evista 60 mg (raloxifène) 1 cp/j.

Ses crampes peuvent-elles être d’origine iatrogène ?

Oui, la pharmacienne pense que son traitement antiostéoporotique est à l’origine de ses symptômes.

ANALYSE DU CAS

Le raloxifène est indiqué en traitement et en prévention de l’ostéoporose post-ménopausique. Il ne bénéficie du remboursement que dans les indications de traitement de l’ostéoporose avec ou sans fracture associée à d’autres facteurs de risque de fracture. La survenue de crampes dans les membres inférieurs est un effet indésirable fréquent du raloxifène. On estime qu’il est ressenti par environ 5 à 10 % des femmes sous raloxifène.

Ces crampes, touchant essentiellement les mollets, sont plus fréquentes à l’initiation du traitement (dans les six premiers mois). On remarque qu’elles sont plus fréquentes chez les femmes post-ménopausées jeunes. D’autre part, le raloxifène est associé à un risque accru d’accident thromboembolique veineux. Ces manifestations cliniques pourraient faire penser à une TVP.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne explique le lien de causalité possible entre les crampes et le raloxifène : effet indésirable bénin à l’initiation du traitement ou TVP. Par mesure de prudence, elle oriente Mme L. vers une consultation médicale immédiate pour exclure tout risque de TVP.

CAS N° 6 – EFFETS INDÉSIRABLES

« J’ai attrapé la grippe. »

M. T., 67 ans, entre dans l’officine pour acheter Actifed. « Ca y est ! J’ai attrapé la grippe en plein été ! » s’exclame-t-il. A la consultation du DP, l’étudiante en 6e année constate qu’une première délivrance d’Aclasta 5 mg/100 ml (acide zolédronique) a été effectuée dans une autre officine la semaine précédente. La perfusion a été effectuée il y a 2 jours selon M. T. L’étudiante s’interroge sur l’étiologie des symptômes.

Est-ce vraiment une grippe ?

Une origine iatrogène des symptômes grippaux peut être évoquée dans le cas de M. T.

ANALYSE DU CAS

Aclasta est un biphosphonate administré par voie intraveineuse une fois par an dans le cadre du traitement de l’ostéoporose. Les patients présentent très fréquemment un syndrome pseudo-grippal les 2 à 4 jours après la perfusion d’Aclasta (environ un patient sur dix). Ils ressentent une fièvre, des frissons, une fatigue et des vertiges. D’autres effets indésirables peuvent compléter le syndrome pseudo-grippal : céphalées, nausées, myalgies, arthralgies, douleurs osseuses ou perte d’appétit. Le syndrome pseudo-grippal est d’intensité légère à modérée et disparaît dans les trois jours suivant son apparition. Il ne concerne que les biphosphonates par voie IV et non ceux administrés par voie orale.

ATTITUDE À ADOPTER

Après confirmation auprès du pharmacien, l’étudiante en 6e année rassure M. T. et lui explique que cette « grippe » est un effet indésirable fréquent et bénin d’Aclasta. Elle lui conseille du paracétamol, 1 g 3 à 4 fois par jour. L’an prochain, avant l’administration d’Aclasta, monsieur T. pourra prendre du paracétamol en prévention.

PHARMACOLOGIE

L’OSTÉOPOROSE

• L’ostéoporose est un processus graduel qui conduit à une diminution diffuse de la masse osseuse associée à des modifications micro-architecturales du tissu osseux responsables d’un risque de fractures accru. On distingue l’ostéoporose liée à l’âge, dont la plus courante est l’ostéoporose post-ménopausique, de celles ayant une origine iatrogène (corticothérapie prolongée) ou endocrinienne. La perte osseuse est progressive à partir de la troisième décennie avec une accélération chez la femme à la ménopause par carence brutale en estrogènes. Les vertèbres constituent les sites principaux de la perte osseuse. Le col du fémur est également une zone à risque compte tenu de son étroitesse.

• C’est une maladie fréquente à large prédominance féminine dont la prévalence augmente du fait du vieillissement de la population. En France, on estime à 3 millions le nombre de femmes souffrant d’ostéoporose et environ 500 000 hommes.

• Le traitement de l’ostéoporose et la prévention des fractures passent tout d’abord par des mesures non pharmacologiques.

• On distingue les antiostéoporotiques en deux groupes ?: les antiostéoporotiques spécifiques (les biphosphonates, le raloxifène, le ranélate de strontium, le tériparatide et le dénosumab) des non-spécifiques (supplémentations ectrogéniques et vitaminocalciques). Tous les médicaments antiostéoporotiques spécifiques ont démontré leur efficacité après normalisation des apports vitaminocalciques.

PRINCIPAUX ANTIOSTÉOPOROTIQUES

Biphosphonates

La classe des biphosphonates compte quatre principes actifs administrés per os (acide alendronique, acide ibandronique, acide risédronique, acide étidronique) et un par voie intraveineuse (acide zolédronique).

Les biphosphonates ont une grande affinité pour l’os, où ils se lient fortement à l’hydroxyapatite.

Principaux effets indésirables

• Les effets indésirables les plus fréquents sont d’ordre digestif. Les nausées et diarrhées sont fréquentes, notamment pour les formes quotidiennes. Leur survenue étant dose-dépendante, une réduction de la posologie peut les faire disparaître. Les œsophagites et ulcérations oro-œsophagiennes sont rares. Elles sont généralement associées à un non-respect des précautions d’emploi lors d’une administration per os. Afin de réduire le risque, la prise doit être accompagnée d’un grand verre d’eau du robinet, en position debout ou assise et le patient ne doit pas s’allonger pendant au moins 30 minutes après la prise du comprimé et doit rester à jeun 30 min (même pas un café).

• Des douleurs articulaires et/ou musculaires peuvent être fréquemment ressenties. Elles peuvent apparaître dès le 1er jour de traitement ou plusieurs mois après l’initiation. Elles sont rarement invalidantes et régressent à l’arrêt du traitement.

• L’ostéonécrose maxillaire est l’effet indésirable le plus grave. Le risque est plus important pour les biphosphonates administrés par voie intraveineuse. Avant tout traitement par biphosphonates, le patient doit bénéficier d’un bilan bucco-dentaire, à renouveler une fois par an, excepté pour les patients atteints de pathologie maligne, pour qui il est conseillé tous les quatre mois.

Autres : uvéite (exceptionnelle), fracture fémorale atypique…

Principales interactions médicamenteuses

Les biphosphonates ne doivent pas être administrés en même temps que des cations polyvalents (calcium, magnésium, fer, aluminium, zinc, cuivre) sous peine d’une réduction drastique de la biodisponibilité.

Principales contre-indications

• Les biphosphonates oraux sont contre-indiqués en cas de maladie de l’œsophage, d’alitement prolongé ou chez toute personne ne pouvant tenir la position verticale pendant au moins 30 minutes, compte tenu de leurs effets irritants sur la muqueuse œsogastro-intestinale.

• Ils sont également contre-indiqués en cas de grossesse, d’allaitement, d’hypocalcémie et d’insuffisance rénale sévère.

Raloxifène

Le raloxifène (Evista, Optruma) est un modulateur sélectif de l’activation des récepteurs aux œstrogènes.

Principaux effets indésirables

Les bouffées de chaleur, très fréquentes, les œdèmes périphériques, les crampes et un syndrome pseudo-grippal sont les principaux effets indésirables. Ils sont généralement associés à l’initiation du traitement. Une modification du traitement n’est envisagée qu’en cas de caractère handicapant. Le raloxifène est associé à un risque accru d’accident thromboembolique veineux.

Principales contre-indications

Il ne doit pas être utilisé chez des femmes non ménopausées. Compte tenu de son effet ectrogénique, le raloxifène est contre-indiqué en cas d’antécédent de maladie thromboembolique (phlébite, embolie pulmonaire) et de cancer de l’endomètre. Il est également contre-indiqué en cas d’insuffisances rénales et hépatiques et d’immobilisation prolongée.

Principale précaution d’emploi

Le raloxifène doit être interrompu en cas d’immobilisation prolongée compte tenu de son risque accru d’accident thromboembolique identique à celui décrit pour le traitement hormonal substitutif.

Dénosumab

Le dénosumab (Prolia 60 mg/ml) est un anticorps monoclonal qui neutralise une protéine sécrétée par l’ostéoblaste et surtout l’ostéocyte : le RANK-L. Le RANK-L stimule la différenciation, l’activation et la survie des ostéoclastes.

Principaux effets indésirables

• Le dénosumab entraînerait une augmentation des événements infectieux, notamment cutané, urinaire et pneumopathique. Des éruptions cutanées ont été fréquemment rapportées. Compte tenu de sa récente mise sur le marché, le dénosumab fait l’objet d’un plan de gestion des risques intégrant la surveillance des risques infectieux, de cancers, d’hypocalcémie et d’ostéonécrose maxillaire (même fréquence qu’avec les biphosphonates).

• Des douleurs dans les membres peuvent survenir fréquemment.

Principales contre-indications

Le dénosumab est contre-indiqué en cas d’hypocalcémie.

Ranélate de strontium

Le ranélate de strontium (Protelos) augmente la réplication des pré-ostéoblastes et induit une différenciation des ostéoblastes en ostéocytes. Il diminue également le recrutement, la différenciation et la durée de vie des ostéoclastes.

Principaux effets indésirables

• Des nausées et diarrhées sont fréquemment rapportées à l’initiation du traitement. Elles sont généralement résolutives avec le temps. Néanmoins, elles peuvent être responsables d’arrêt du traitement.

• Des dermatites et eczémas ont été observés.

• Des syndromes de DRESS ont été exceptionnellement décrits. Leur apparition doit conduire à l’arrêt du traitement.

Principales interactions médicamenteuses

• Le ranélate de strontium ne doit pas être administré de manière concomitante avec du calcium : sa biodisponibilité est réduite de 60 à 70 %. La diminution d’absorption est moindre mais réelle (25 %) avec l’aluminium et le magnésium ; leur prise doit être postérieure.

• Le ranélate de strontium doit être interrompu en cas de traitement par tétracyclines ou fluoroquinolones, ces antibiotiques forment des complexes non absorbés avec les cations divalents.

Principales contre-indications et précautions d’emploi

En raison du risque accru d’accident thromboembolique, le ranélate de strontium est contre-indiqué en cas d’antécédent de maladie thromboembolique et chez la personne alitée. Il devra être utilisé avec précaution chez les personnes à risques de maladie thromboembolique et chez les plus de 80 ans.

Tériparatide

Le tériparatide (Forsteo 20 g/80 l) est un polypeptide de synthèse qui correspond aux 34 acides aminés de la partie active de la parathormone. Il stimule les ostéoblastes, la réabsorption rénale du calcium et du phosphore ainsi que l’absorption intestinale du calcium.

Principaux effets indésirables

Les principaux effets indésirables rencontrés sont les nausées, les céphalées, les sensations de vertiges et les crampes. Des dyspnées, des palpitations, une hypersudation, une hypercholestérolémie, une hernie hiatale ou une fatigue sont également fréquentes.

Principales interactions médicamenteuses

En raison des modifications de calcémies induites par le tériparatide, son utilisation doit être prudente chez les patients sous digitaliques.

Principales contre-indications

Le tériparatide est contre-indiqué en cas d’antécédents de radiothérapie, de métastases osseuses et de maladie de Paget. La période d’utilisation est limitée à 24 mois (18 mois remboursés) non renouvelable au cours de la vie à cause du risque potentiel de développement d’ostéosarcome. Le tériparatide ne doit pas être utilisé en cas d’insuffisance rénale sévère ou d’hypercalcémie.

Calcium et vitamine D

Le calcium entre dans la composition des cristaux d’hydroxyapatite par combinaison avec des phosphates. La vitamine D est considérée comme une hormone. Elle augmente la calcémie et la phosphatémie principalement en augmentant leur absorption intestinale mais aussi en le mobilisant à partir des os et en réduisant leur excrétion rénale.

Principaux effets indésirables

Les principaux effets indésirables dont souffrent les patients prenant du calcium sont les nausées, diarrhées ou constipation, flatulences et douleurs abdominales.

Principales interactions médicamenteuses

• L’administration concomitante de calcium réduit fortement la biodisponibilité des biphosphonates, des fluoroquinolones et des tétracyclines. Leur prise doit s’effectuer deux heures avant ou après la prise de calcium.

• La vitamine D ne doit pas être administrée en même tant que l’orlistat ou la colestyramine.

Principales contre-indications

Hypercalcémie et d’hypercalciurie.

CAS N° 7 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Une confusion possible ?

Mlle P., 67 ans, est traitée depuis un mois par prednisone 20 mg/j pour une pseudo-polyarthrite rhizomélique. Elle était sous Fosamax pour une ostéoporose avec antécédent de fracture vertébrale qui a été désormais remplacé par Forsteo 20 µg/j (tériparatide) et Fixical D3 1 000 mg/800 UI (carbonate de calcium, vitamine D3) 1 cp/j. Elle est également traitée pour un diabète insulinodépendant. Aujourd’hui, elle vient à la pharmacie car depuis le début d’après-midi, elle souffre de vertiges quand elle se met debout.

A quoi faut-il penser ?

Le pharmacien pense à un effet indésirable de Forsteo mais n’exclut pas une mauvaise utilisation du stylo.

ANALYSE DU CAS

Le tériparatide est indiqué pour Mlle P. : elle est traitée pour une ostéoporose cortisonique avec antécédent de fracture vertébrale. Les vertiges décrits par Mlle P. évoquent une hypotension orthostatique. Ils débutent dans les 4 heures suivant l’administration et disparaissent spontanément en quelques minutes à quelques heures. Un autre facteur semble à prendre en compte : Mlle P. est diabétique et traitée par insuline. Il est possible qu’elle ait confondu le stylo de Forsteo et un stylo à insuline : même présentation, même stockage (frigo), même mode d’administration (voie sous-cutanée) et mêmes aiguilles adaptables sur chacun des stylos ! Des cas de surdosages en tériparatide par erreur de manipulation ont été décrits. Les patients peuvent alors ressentir des nausées, une faiblesse ou une hypotension.

ATTITUDE À ADOPTER

L’initiation du traitement date du mois précédent. Après avoir suggéré à Mlle P. de mettre par exemple un élastique autour du stylo de Forsteo pour le distinguer et ne pas risquer de confusion. Il rassure également Mlle P. : les hypotensions sont un effet indésirable fréquent mais transitoire du tériparatide.

CAS N° 8 – INTERACTIONS MEDICAMENTEUSES

Prolia et infection cutanée

Maria F., 62 ans, est allée chez son généraliste pour un érysipèle : elle souffre d’une inflammation douloureuse au niveau de l’extrémité basse de la jambe droite, accompagnée de fièvre à 39°C et de frissons nocturnes. Il lui prescrit de l’amoxicilline, 3 g/j pendant 15 j. La pharmacienne se souvient lui avoir dispensé Prolia récemment mais également avoir lu quelque chose à ce sujet.

Existe-t-il un lien entre Prolia et l’érysipèle ?

Oui, Prolia a été associé à une augmentation du risque infectieux cutané dans l’essai de phase 3.

ANALYSE DU CAS

Prolia est commercialisé depuis janvier 2012. Le dénosumab a été associé à une augmentation du nombre d’infections cutanées graves de type cellulite ou érysipèle, conduisant parfois à une hospitalisation, dans l’essai de phase 3.

Prolia est soumis à un plan de gestion des risques (PGR) européen. L’érysipèle est une dermohypodermite bactérienne aiguë pour laquelle seule l’origine streptococcique est démontrée. Bien que les infections cutanées ne figurent pas dans l’AMM de l’amoxicilline, il s’agit d’un des antibiotiques per os de référence. La durée moyenne de l’épisode infectieux observé est de 5,5 jours et il répond bien à l’antibiothérapie.

CONDUITE À TENIR

Le lien entre l’érysipèle dont souffre Maria F. et Prolia n’est pas établi. Néanmoins, comme la pharmacovigilance s’appuie sur la notification spontanée,la pharmacienne juge important de décrire ce cas. Elle se met en contact avec le médecin pour rédiger la notification de pharmacovigilance.

CAS N° 9 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Marylise prend du magnésium

Marylise L., 66 ans, sort de chez son généraliste. Il lui a renouvelé son traitement : Adrovance 70 mg/2 800 UI (alendronate et cholécalciférol) 1 cp/semaine et Orocal 500 2 cp/j sauf le jour de la prise d’Adrovance. Le médecin lui a prescrit une cure de Mag 2 pour une fatigue et une irritabilité passagère. Le pharmacien détecte une interaction médicamenteuse avec le biphosphonate.

Cette interaction est-elle contre-indiquée ?

Non, l’interaction entre le magnésium et l’alendronate n’est pas dangereuse mais elle est indispensable à prévenir.

ANALYSE DU CAS

Les biphosphonates, dont l’alendronate, ont une biodisponibilité très médiocre estimée entre 1 et 5 %. Une simple eau très calcaire la réduit de 60 %. C’est une interaction que l’on rencontre avec tous les cations polyvalents : calcium, magnésium, fer, aluminium, zinc, cuivre. Elle est inhérente au mécanisme d’action même des biphosphonates : leur structure chélate le calcium. Ainsi, ils ont une très forte affinité pour l’os. De même la présence de cations polyvalents dans le tube digestif provoque la formation d’un complexe insoluble non absorbable. Bien qu’il ne s’agisse que d’une précaution d’emploi, l’absorption des biphosphonates est très fortement compromise en association avec du magnésium.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique à Marylise l’interaction. Il lui rappelle d’espacer les prises entre le magnésium et Adrovance d’au moins deux heures ou simplement de sauter la prise de magnésium le jour de la prise d’Adrovance (1 fois par semaine) : il s’agit de la même règle que pour le calcium.

CAS N° 10 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Modification du moment de prise

Nicole T., 61 ans, souffre d’une cystite aiguë non compliquée. Son généraliste lui a prescrit : norfloxacine 400 mg 2 cp/j pendant 3 jours. Grâce à son DP, la pharmacienne constate la dispensation régulière d’Orocal D3 (carbonate de calcium, vitamine D3) et d’Actonel 35 mg (acide risédronique). Elle l’interroge sur les moments de prise.

Pourquoi la pharmacienne s’enquiert-elle du plan de prise ?

Il existe une interaction pharmacocinétique entre le calcium et l’antibiotique.

ANALYSE DU CAS

La norfloxacine est une fluoroquinolone de 2e génération. Les interactions entre les cations divalents et les quinolones sont documentées comme des précautions d’emploi dans le Thésaurus des interactions médicamenteuses de l’ANSM. L’efficacité du traitement antibiotique est compromise : la biodisponibilité de la norfloxacine peut être réduite de 50 %. Les molécules d’oxygène présentes sur les cycles des quinolones peuvent emprisonner un cation Ca2+ (chélation) formant un complexe insoluble non absorbable par l’intestin. La prise concomitante de calcium avec la norfloxacine n’engendre pas de risque en elle-même pour Nicole T. mais elle augmente le risque de complications infectieuses et de résistances.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne explique à Nicole T. que l’interaction est évitable en décalant de deux heures les administrations du calcium et de la norfloxacine. Mais Nicole T. est réticente : elle a en mémoire les troubles digestifs connus lors de la prise à jeun. Aussi la pharmacienne lui conseille de suspendre le traitement pendant trois jours.

CAS N° 11 – PROFILS PARTICULIERS

« J’en prends beaucoup, non ? »

Sarah J. a 46 ans et elle souffre depuis 4 ans d’une polyarthrite rhumatoïde pour laquelle elle est soignée par méthotrexate 20 mg/semaine, Speciafoldine 5 mg (acide folique), Cortancyl (prednisone) 8 mg/j, Caltrate D3 600 mg/400 UI (carbonate de calcium, vitamine D3) 2 cp/j et Actonel 5 mg (acide risédronique) 1 cp/j. A la dernière ostéodensitométrie, elle présente une ostéopénie avérée avec un T-score au niveau du sol fémoral de – 1,8. Elle questionne la pharmacienne : « Est-ce que tous ces comprimés sont nécessaires ? J’en prends beaucoup, et ceux à prendre à jeun ne sont pas pratiques ! »

Actonel est-il indispensable ?

Sarah J. bénéficie d’un traitement cortisonique sur une longue durée rendant indispensable une prise en charge de l’ostéoporose.

ANALYSE DU CAS

La polyarthrite rhumatoïde est associée à une augmentation du risque d’ostéoporose et de fracture, quelle que soit la durée de l’évolution de la maladie. De plus, la cortisone entraîne une diminution de la masse osseuse, une altération de la microarchitecture et de la qualité de l’os : le risque de fracture vertébrale est 5,2 fois plus important pour une dose ≥ 7,5 mg d’équivalent prednisone. L’augmentation du risque est significative dès le 6e mois après le début du traitement mais diminue dès le 3e mois après son arrêt, quelle que soit la durée. L’ostéoporose doit être prévenue lors d’une corticothérapie per os de plus de trois mois, pour une dose ≥ 7,5 mg/j d’équivalent prednisone. Elle repose sur un apport en calcium de 1 500 mg/j (alimentation et médicament) et en vitamine D de 800 UI/j. Les biphosphonates sont le traitement de référence des patients ayant des fractures ou à risque élevé d’en avoir durant le traitement cortisonique ou ayant un T-score < -1,5. Il est indiqué pour toute femme ménopausée et pour les femmes non ménopausées ou les hommes en fonction de l’ostéodensitométrie. Seules les formes quotidiennes d’acide risédronique et d’acide alendronique ont l’indication pour l’ostéoporose cortisonique et ont un bénéfice sur les risques vertébral et fémoral. Cependant, il est fréquent de voir des prescriptions de forme hebdomadaire chez ces patients.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne rappelle l’intérêt de chaque médicament et notamment celui d’Actonel. Elle conseille à la patiente de discuter de son traitement avec son médecin pour éventuellement remplacer Actonel. La pharmacienne lui propose d’en parler lors de la prochaine réunion du réseau et l’invite à participer à un programme d’éducation thérapeutique.

CAS N° 12 – PROFILS PARTICULIERS

Brigitte est plâtrée

Brigitte F., 56 ans, sort de la clinique. « Je me suis cassé la jambe en glissant dans la rue ! » s’exclame-t-elle en tendant sa prescription pour Lovenox 4000 1 inj/j. Brigitte F. est connue à l’officine. Le pharmacien se souvient qu’elle prend Optruma (raloxifène) 1 cp/j, Calciforte D3 500 mg/ 400 UI (carbonate de calcium, vitamine D3, Saccharomyces cerevisiæ) 2 cp/j et que la mère de Brigitte F. a souffert d’une phlébite l’année dernière.

Que vérifie le pharmacien ?

Il cherche s’il n’y a pas de contre-indication entre le raloxifène et le nouvel état physiopathologique de Brigitte F.

ANALYSE DU CAS

Suite à sa fracture, Brigitte F. connaît une immobilisation prolongée d’un membre inférieur. Elle présente un facteur de risque majeur de thrombose veineuse et deux modérés (raloxifène et antécédent familial). Un traitement par héparine est nécessaire.

Le pouvoir procoagulant du raloxifène semble identique à celui du Traitement Hormonal de la Ménopause (THM). Bien que ce soit un effet indésirable peu fréquent, le risque de thrombose veineuse profonde est environ 2,5 fois plus élevé chez les femmes sous raloxifène que chez les femmes sous placebo. L’immobilisation prolongée n’est pas une contre-indication au raloxifène mais impose de réévaluer la balance bénéfice-/risque. Pour le pharmacien, elle semble défavorable pour Brigitte F. le temps de l’immobilisation prolongée.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien contacte le généraliste de Brigitte F. : il lui propose l’arrêt temporaire du raloxifène jusqu’à reprise de la mobilité complète de Brigitte F. Le médecin accepte et le remercie de l’avoir prévenu.

CAS N° 13 – PROFILS PARTICULIERS

Une nouvelle contre-indication

M. R. vient à l’officine avec une ordonnance au nom de sa femme, 81 ans : Lovenox 6000 2 inj./j puis relais par Coumadine (warfarine), bas de contention Classe III 2 paires. Elle est connue à la pharmacie pour prendre tous les mois Protelos (ranélate de strontium) 1 sachet/j et Calperos D3 (carbonate de calcium, vitamine D3). La préparatrice a souvenir d’avoir lu une alerte de l’ANSM en lien avec une possible contre-indication de Protelos. Elle appelle le pharmacien.

De quoi se souvient la préparatrice ?

En avril 2012, l’ANSM a adressé aux professionnels de santé une lettre relative à de nouvelles contre-indications.

ANALYSE DU CAS

Une étude observationnelle sur 7 pays, demandée par la HAS, a conclu à un risque plus élevé de maladies thrombo-emboliques chez les patientes traitées par Protelos, notamment de plus de 80 ans. Suite à la réévaluation de sa balance bénéfice/risque, Protelos est désormais contre-indiqué en cas de maladie thrombo-embolique ancienne ou actuelle. Un suivi de pharmacovigilance sur 3 ans a montré que le délai médian de survenue d’un événement thrombo-embolique par rapport à l’initiation du ranélate de strontium est de 92 jours et qu’au moins un facteur de risque de thrombose veineuse est retrouvé chez un tiers des patientes affectées. Mme R souffre d’une « phlébite » potentiellement due à Protelos qui lui est désormais contre-indiqué.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien appelle le généraliste de Mme R. pour proposer l’arrêt du ranélate de strontium. Le médecin accepte et réévaluera le traitement antiostéoporotique lors de la prochaine consultation. Le pharmacien notifie également le cas afin d’alimenter la pharmacovigilance.

CAS N° 14 – PROFILS PARTICULIERS

Une erreur dangereuse ?

La semaine dernière, le pharmacien a dispensé pour la première fois à René M., 73 ans, Casodex (bicalutamide) 50 mg 1 cp/j, Actonel (risédronate monosodique) 35 mg 1 cp/semaine, Calcium/vitamine D3 2 cp/j. Il est également traité par Lasilix (furosémide) 20 mg 1 cp/j, Coversyl (périndopril) 5 mg 1 cp/j, propranolol LP 160 mg 1 cp/j, Amarel (glimépiride) 2 mg 1 cp/j, metformine 500 mg 3 cp/j, Séroplex (escitalopram) 10 mg 1 cp/j et alprazolam 0,25 mg 2 cp/j. René M. vient de subir une castration chirurgicale suite à un cancer de la prostate. Ses antécédents alcoolotabagiques sont connus de la pharmacie et il a un T-score du rachis lombaire de – 1,6. Sa fille revient à la pharmacie une semaine plus tard : « Il a pris les 4 cp d’Actonel 4 jours de suite en même temps que les sachets ! »

Est-ce grave ?

Non, le pharmacien estime le risque d’intoxication faible.

ANALYSE DU CAS

Casodex initié chez René M. dans le cadre d’un traitement hormonal antiandrogénique d’un cancer de la prostate est responsable d’un hypogonadisme iatrogénique. La perte osseuse ainsi induite peut être responsable de fractures vertébrales spontanées. L’alcool et le tabac sont aussi deux facteurs de risques supplémentaires partagés par René M. Il présente un T-score < -1,5 : le traitement par biphosphonate est approprié.

Le risque d’intoxication aux biphosphonates est associé à une hypocalcémie, une hypophosphorémie, des troubles gastro-intestinaux hauts du type œsophagite. On ne dispose pas de données spécifiques sur la conduite à tenir en cas de surdosage par le risédronate. Compte tenu de la formation d’un complexe insoluble entre le calcium et les biphosphonates et de leur biodisponibilité médiocre, du lait doit être administré en cas d’intoxication. Aussi, prenant en compte ces éléments, le cas de René M. n’inquiète pas outre mesure le pharmacien : les comprimés ont été pris en même temps que le calcium et de manière continue seulement 4 jours.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien rassure la fille de René M. et note sur le dossier informatique la nécessité de revoir avec son père les modalités de prise d’Actonel. Afin d’éviter les erreurs de prises, il établit un plan de prise mensuel.

Prévenir l’iatrogénie

Les questions à se poser lors de la délivrance d’un antiostéoporotique

Profil physiopathologique du patient

A-t-il eu une thrombose veineuse profonde ?

Le raloxifène et le ranélate de strontium sont contre-indiqués.

A-t-il eu une radiothérapie ?

• Le tériparatide est contre-indiqué.

• Risque accru d’ostéonécrose de la mâchoire sous biphosphonate.

A-t-il une chimiothérapie ?

Risque accru d’ostéonécrose de la mâchoire sous biphosphonate.

A-t-il une mauvaise hygiène buccodentaire ?

Risque accru d’ostéonécrose de la mâchoire sous biphosphonate.

Médicaments associés

Prend-il des compléments alimentaires ou des antiacides contenant des cations polyvalents ?

Diminution drastique de la biodisponibilité des biphosphonates per os, espacer les prises de 2 heures.

Prend-il une fluoroquinolone ou une tétracycline ?

Diminution de moitié de la biodisponibilité des antibiotiques par le calcium ; espacer les prises de 2 heures.

Surveillance lors du traitement

Le patient présente-t-il une éruption cutanée généralisée ?

Le ranélate de strontium est responsable de syndrome d’hypersensibilité sévère incluant le syndrome de Stevens-Johnson, la nécrolyse épidermique toxique et le syndrome DRESS.

Le patient présente-t-il une infection cutanée grave ou profonde ?

Le dénosumab augmenterait le risque infectieux.

Le patient effectue-t-il son bilan buccodentaire annuel ?

Prévention de l’ostéonécrose de la mâchoire sous biphosphonate.

Le patient prend-il son traitement ?

• Adapter le traitement au rythme de vie du patient.

• Evaluer les apports calciques quotidiens en cas de non-observance de la supplémentation vitaminocalcique.

Le patient respecte-t-il les modalités d’administration ?

• Lui demander comment il prend son médicament.

• Risque d’œsophagite en cas de non-respect pour les biphosphonates per os.

• Risque de mauvaise absorption en cas de non-respect du jeûne pour les biphosphonates per os.

Pharmacovigilance

Les antiostéoporotiques peuvent être associés à des effets indésirables graves. Aclasta et Prolia font actuellement l’objet d’un plan de gestion des risques par l’ANSM et l’EMEA. Il est donc important de signaler tout effet indésirable grave aux centres régionaux de pharmacovigilance.

À RETENIR

Chez un patient sous biphosphonates au long cours, il est indispensable de réaliser un suivi buccodentaire annuel et de consulter au moindre symptôme.

Ostéodensitométrie : le T-score

• Le diagnostic de l’ostéoporose repose sur la mesure de la densité minérale osseuse : c’est l’examen d’ostéodensitométrie. Cet examen de référence permet d’évaluer le risque de fracture provoquée par de petits traumatismes. Il est effectué au niveau du rachis et du col du fémur. Le résultat de cet examen est rendu sous la forme du T-score. Le T-score est l’écart entre la densité osseuse mesurée chez la patiente et la densité osseuse moyenne d’une population adulte âgée de 30 à 40 ans, définie par l’OMS. Chez la femme, les densités minérales osseuses sont classées en quatre catégories suivant le T-score :

– T-score > – 1, densité minérale osseuse normale ;

– – 2,5 < T-score ≥ –1, ostéopénie ;

– T-score ≥ –2,5, ostéoporose ;

– T-score ≤ –2,5 et une ou plusieurs fractures de fragilité, ostéoporose sévère.

• Les facteurs de risques d’ostéoporose primaire sont l’âge, le sexe, l’origine ethnique, la ménopause.

• Selon la HAS, une ostéodensitométrie est indiquée :

– chez toute personne présentant des signes d’ostéoporose (fracture vertébrale ou périphérique survenue sans traumatisme majeur) ou en cas de pathologie ou traitement potentiellement inducteurs d’ostéoporose (corticothérapie) ;

– chez la femme ménopausée ayant un antécédent de fracture du col fémoral sans traumatisme majeur chez un parent au premier degré, ou ayant un IMC < 19 kg/m2, ou étant ménopausée avant l’âge de 40 ans, ou ayant eu une corticothérapie.

À RETENIR

Il est important de détecter la non-adhésion aux suppléments vitamino-calciques pour cause d’effets indésirables.

Mesures hygiénodiététiques

• Assurer des apports suffisants en calcium. En règle générale, on n’observe pas de carence dans la population générale en apports calciques : l’alimentation diversifiée suffit. Par exemple, 2 yaourts, 300 g de gruyère, 300 g de fromage blanc ou 1 bol de lait apportent 300 mg de calcium. Eviter les sodas de type cola qui réduisent son absorption. Limiter le sel à deux cuillères à dessert et la consommation de thé ou de café à 300 ml par jour afin de limiter la fuite urinaire de calcium. Il existe quelques idées fausses : un aliment allégé en graisse n’est pas appauvri en calcium. Le lait de soja ne remplace pas les produits laitiers sauf s’il est enrichi en calcium. Boire des eaux riches en calcium (Contrex, Courmayeur…).

• Prévenir une carence en vitamine D. Elle concerne principalement la population âgée, notamment institutionnalisée avec faible exposition solaire. Il est conseillé de s’exposer au soleil 15 minutes, tête et bras nus, 3 jours par semaine d’avril à octobre mais l’hiver, la supplémentation est indispensable chez les personnes âgées.

• Proposer un sevrage tabagique et une maîtrise de la consommation d’alcool. Tous deux réduisent l’activité des ostéoblastes.

• Rester vigilant au poids de la personne. Un IMC < 19 kg/m2 est un facteur de risque d’ostéoporose. Les masses graisseuses et musculaires exercent une extra-pression sur l’os lui permettant d’être plus solide. Il est nécessaire de prévenir tôt une perte de poids importante chez la personne âgée : les masses graisseuses peuvent protéger l’os en cas de chute.

• Encourager l’activité physique à tout âge. Elle doit être adaptée : cela peut être 30 minutes de marche par jour, monter les escaliers plutôt que prendre l’ascenseur. L’activité physique renforce la densité minérale osseuse. Elle prévient le risque de chute chez la personne âgée par l’entretien de la musculature et de l’équilibre.

• Prévenir le risque de chute de la personne âgée par l’aménagement du domicile (baignoire, sol glissant, tapis), le respect des bonnes pratiques de prescriptions des psychotropes et le contrôle de la vue.

ATTENTION

Rappeler régulièrement aux patients de prendre les biphosphonates avec un grand verre d’eau du robinet, sans les croquer, les écraser ou les faire fondre et ne pas se coucher dans les 30 minutes qui suivent.

Le traitement hormonal de la ménopause (THM) dans l’ostéoporose

• Les estrogènes possèdent un pouvoir antiostéoclastique : ils réduisent le remodelage osseux. Aussi, apporter des estrogènes à dose suffisante peut permettre de compenser la carence hormonale liée à la ménopause. Le THM se présente soit sous forme d’estrogènes seuls ou en association avec un progestatif. Les progestatifs n’ont pas d’effet anti-estrogénique sur l’os.

• Dès le début du THM et au cours des deux premières années, on observe une augmentation significative de la densité minérale osseuse. Puis elle se maintient à la poursuite du traitement avant de diminuer à l’arrêt du THM. Cet effet est indépendant de la voie d’administration du THM.

• Le THM est efficace sur le risque de fractures. Cet effet concerne les fractures fémorales et vertébrales. Les études épidémiologiques suggèrent que la réduction du risque de fractures est de l’ordre de 50 %.

• Néanmoins, selon les recommandations actuelles, la place du THM dans la prise en charge de l’ostéoporose est limitée :

– Il est indiqué en 2e intention chez les femmes ayant un risque élevé de fracture, en cas d’intolérance ou de contre-indication des autres traitements indiqués dans la prévention de l’ostéoporose.

– Il est indiqué en première intention dans l’ostéoporose postménopausique sans fracture (voire des fractures mineures, c’est-à-dire autres que vertébrale ou fémorale) chez les patientes ostéopéniques âgées de 50 à 60 ans et présentant des troubles du climatère (ensemble des symptômes induits par la carence ectrogénique telle que les bouffées de chaleur) altérant la qualité de vie. Il doit être instauré à la dose minimale efficace pour la durée la plus courte possible et réévaluation régulière de sa balance bénéfice/risque.

ATTENTION

Sous Protelos, tout signe cutané doit être signalé au médecin.

Facteurs de risques dans l’ostéoporose

La constitution du capital osseux lors de la croissance puis la perte osseuse sont sous la dépendance de facteurs génétiques, nutritionnels et environnementaux qui constituent un ensemble de facteurs de risques de l’ostéoporose. On peut les classer suivant leur caractère évitable ou inéluctable.

• Parmi les facteurs de risques qu’on peut combattre, figurent en premier lieu les régimes alimentaires inappropriés qui sont pauvres en produits laitiers ou en calcium, excessifs en sels, en protéines, en soda (> 2,5 l/j) ou en café (> 400 ml/j).

• Les facteurs de risques évitables peuvent également être comportementaux : le manque d’activité, une immobilisation prolongée, en particulier chez les personnes âgées et le manque d’ensoleillement, source principale de vitamine D, en particulier chez la personne âgée en institution, le tabagisme, la maigreur.

• D’autres facteurs de risque ne peuvent pas être modifiés. Néanmoins il est important de les connaître en cas de survenue d’ostéoporose : l’âge élevé, le sexe féminin, l’ethnie caucasienne ou asiatique. Les facteurs de risque les plus importants sont les antécédents parentaux et personnels de fracture.

• Certaines pathologies peuvent créer les conditions favorables à la survenue d’une ostéoporose : les maladies endocriniennes comme l’hyperthyroïdie, la maladie de Cushing, le diabète, les maladies digestives avec les pancréatites, les cirrhoses hépatiques, les gastrectomies, les rhumatismes inflammatoires tels les polyarthrites rhumatoïdes, la spondylarthrite ankylosante et l’hémochromatose.

• Enfin, l’ostéoporose peut aussi avoir, pour partie, une cause iatrogène : les corticoïdes per os sur une longue durée, les hormones thyroïdiennes et les héparines non fractionnées sur une longue durée.

À RETENIR

Les crampes aux mollets sont des effets indésirables fréquents du raloxifène mais bénins et résolutifs avec le temps.

À RETENIR

En cas de première dispensation d’Aclasta, prévenir les patients du risque de survenue de syndrome pseudo-grippal dans les 3 jours suivant la perfusion.

Le tissu osseux est en constant remodelage dans lequel s’intriquent la résorption par les ostéoclastes et la formation par les ostéoblastes. L’os est formé de millions d’unités fonctionnelles de remodelage, mobiles et progressant dans le tissu osseux (les ostéoclastes étant à l’avant des ostéoblastes). L’os est constitué de cellules (les ostéocytes qui proviennent de la différenciation des ostéoblastes) et d’une matrice extra-cellulaire (collagène, protéines non collagéniques et cristaux d’hydroxyapatite de calcium). Un cycle dure environ 4 mois chez l’adulte, la formation étant plus longue que la résorption. L’activité des ostéoblastes et des ostéoclastes est fortement intriquée.

À RETENIR

Les hypotensions sont un effet indésirable fréquent mais transitoire de Forsteo.

ATTENTION

Prolia pourrait augmenter le risque infectieux.

À RETENIR

Prendre en compte toutes les sources de cations telles que les compléments alimentaires et les antiacides, qui sont susceptibles d’interagir avec les biphosphonates.

À RETENIR

Le calcium interagit avec les fluoroquinolones en diminuant leur biodisponibilité. Leurs prises doivent être espacées d’au moins 2 h.

À RETENIR

Il est important de s’assurer de la prescription d’un traitement de l’ostéoporose cortisonique dès le 3e mois d’une corticothérapie per os prolongée.

À RETENIR

Il est important d’évaluer ou réévaluer le risque de thrombose veineuse profonde pour chaque patient sous raloxifène, notamment dans des situations d’immobilisation prolongée

À RETENIR

Le ranélate de strontium augmente le risque de thrombose : il est désormais contre-indiqué en cas d’antécédents de maladie thrombo-embolique.

ATTENTION

Il est important de s’assurer de la compréhension des patients quant au rythme de prise des biphosphonates.

L’ostéoporose masculine

• L’ostéoporose n’est ni anecdotique ni à mésestimer chez l’homme. Sa prévalence est estimée à 15 % chez les hommes de plus de 50 ans. 25 % des fractures dues à l’ostéoporose surviennent chez des hommes. 25 % des hommes âgés de plus de 50 ans auront une ou plusieurs fractures ostéoporotiques au cours du reste de leur vie. Le dépistage et la prise en charge des hommes ostéoporotiques se révèlent primordiaux : un tiers des hommes ayant eu une fracture du col du fémur décède dans l’année. Cette surmortalité est plus importante que chez les femmes.

• A la différence de ce qui est observé chez les femmes, l’ostéoporose masculine est associée dans quasiment la moitié des cas à une pathologie ou à un traitement. Sont à haut risque de fractures ostéoporotiques, les hommes :

– gros fumeurs ou avec intoxication éthylique chronique ;

– traités par une corticothérapie de longue durée (maladie inflammatoire, transplantation) ou par un traitement antiandrogénique ;

– ayant des antécédents de fracture vertébrale non traumatique ou de fractures périphériques multiples ;

– présentant des séquelles de maladies neurologiques avec handicap neurosensoriel ou une maladie hépatodigestive.

• Le traitement de l’ostéoporose masculine repose tout d’abord sur la correction des facteurs étiologiques lorsque ceci est possible. Il s’agit d’éliminer l’alcool et le tabac et d’initier un traitement substitutif par testostérone le plus tôt possible en cas d’hypogonadisme. La testostérone a un effet positif sur la densité minérale osseuse. Lorsqu’il existe un antécédent de fracture ostéoporotique, le risque de nouvelle fracture est important et la prise en charge thérapeutique ne se discute pas. Chez un homme sans fracture, la prise en charge est à envisager quand la densité est basse (T score < – 2,5) et qu’il existe d’autres facteurs de risque de fractures. Les biphosphonates ont la même efficacité que chez la femme. Le tériparatide et le strontium ont également l’indication dans l’ostéoporose masculine.

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