BAIES ET PLANTES TOXIQUES - Le Moniteur des Pharmacies n° 2927 du 31/03/2012 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2927 du 31/03/2012
 

Cahiers Formation du Moniteur

Conseil

CONDUITE À TENIR EN CAS D’INTOXICATION 2

« Ma fille a mangé des boules rouges ! »

Le papa de Lucie téléphone :

– Ma fille de 3 ans jouait dans le jardin ; je viens de la retrouver avec des petites boules rouges dans la bouche.

– Présente-t-elle des symptômes ?

– Pas pour l’instant.

– Savez-vous de quelle plante proviennent ces baies ?

– Non.

– Apportez-moi une partie de la plante : une tige avec des feuilles et, si possible, des fleurs ou les baies afin de l’identifier. Nous téléphonerons au centre antipoison si nécessaire.

STATISTIQUES

• Parmi les 4 500 espèces que compte la flore française, 200 peuvent présenter un risque toxicologique. Toutefois, seulement une trentaine sont à l’origine d’intoxications sérieuses.

• En France, les intoxications par les plantes représentent environ 5 ?% des intoxications recensées par les centres antipoison.

Population concernée

• La plupart des intoxications concernent les enfants, en particulier ceux âgés de moins de 5 ans (79 % des cas). Les petits découvrent leur environnement et portent tout à leur bouche. Chez les plus grands, les jeux de dînette sont souvent en cause. Ces intoxications accidentelles sont en général bénignes car la quantité ingérée est faible.

• Chez les adultes, les cas sont plus graves car les quantités ingérées sont généralement plus grandes. L’intoxication peut être accidentelle : confusion avec une plante comestible ou défaut de perception du risque pour des personnes handicapées ou présentant une démence. Dans de rares cas, l’intoxication est volontaire (tentative de suicide) ou criminelle.

• On note aussi chez les enfants comme chez les adultes des intoxications par contact cutané, ou avec la muqueuse buccale, ou bien par projection dans l’œil.

Plantes incriminées

• Les familles de plantes les plus concernées sont les Aracées (dieffenbachia, arum…), les Rosacées (laurier-cerise, buisson-ardent…) et les Solanacées (belladone, datura…).

• Le degré de toxicité d’une plante peut varier selon :

– la partie de la plante ;

– son degré de maturation ;

– la zone géographique où l’on retrouve l’espèce ainsi que les conditions météorologiques auxquelles la plante est soumise.

LES QUESTIONS À POSER

Qui et comment ?

• Déterminer s’il s’agit d’un enfant ou d’un adulte.

• Savoir si l’intoxication a eu lieu par ingestion (demander le poids s’il s’agit d’un enfant), par contact ou par inhalation.

Quoi ?

• Identifier la plante afin d’estimer la gravité de l’intoxication et de mettre en œuvre une prise en charge adaptée. Si la plante ne peut être nommée, s’en procurer une partie. Il peut s’agir d’un échantillon de la plante entière (tige avec feuilles, baies ou/et fleurs) ou d’un fragment récupéré dans les vomissements de la victime le cas échéant. Si ceci est impossible, faire décrire la plante en cause avec précision. Le type de milieu où la plante est rencontrée peut être très utile (bois, prairie, intérieur, jardin…). L’envoi d’une photo peut aussi aider à identifier la plante.

• Dans le cas d’une ingestion, estimer également la quantité de plante qui a été consommée.

Symptômes

Délai

Le délai d’apparition des symptômes après l’ingestion peut donner une indication sur la gravité de l’intoxication. Demander l’heure d’exposition. Si aucun symptôme n’est constaté plus de 2 heures après l’ingestion, le pronostic est en général bon mais n’exclut pas de contacter un centre antipoison pour éliminer un possible effet retardé. Toutefois, plus l’intoxication est traitée tôt, plus le pronostic est favorable.

Nature

La nature des symptômes donne également des indications sur la conduite à tenir. Si des symptômes mettant en jeu le pronostic vital sont constatés (troubles neurologiques, cardiovasculaires, respiratoires, vomissements incoercibles), il est nécessaire de contacter le SAMU le plus rapidement possible. En cas d’absence de symptôme ou en présence de symptômes mineurs, appeler un centre antipoison pour connaître la conduite à tenir.

PRISE EN CHARGE

Intoxications par ingestion

• Dans tous les cas, ne pas faire boire ni vomir.

• En cas d’intoxication grave, la prise en charge est hospitalière.

Charbon activé

Une dose de charbon activé (environ 1 g/kg) peut être administrée si la prise en charge se fait dans l’heure. Toxicarb, disponible en officine, peut être administré sur avis du SAMU en cas d’intoxication grave loin d’un centre hospitalier.

Traitements hospitaliers

• Atropine : elle s’oppose aux effets de l’acétylcholine lors d’intoxication par des plantes cardiotoxiques (muguet, if…).

• Cyanokit (hydroxocobalamine) : précurseur de la vitamine B12, il forme un complexe inactif avec les ions cyanure lors d’intoxication par les plantes cyanogènes (laurier-cerise…).

• Diazépam : benzodiazépine utilisée lors d’intoxication avec convulsions (belladone, datura…).

• Digidot : fragments Fab d’anticorps antidigitaliques formant un complexe inactif avec le cardiotonique lors d’intoxication par la digitale pourpre, le laurier-rose…

• Néostigmine : inhibiteur des cholinestérases utilisé lors d’ingestion de dérivés atropiniques (Solanacées).

Intoxications par contact

• Buccal : chez l’adulte, se rincer la bouche. Chez l’enfant, nettoyer la bouche avec un mouchoir imbibé d’eau pour récupérer les résidus de la plante. S’il y a un œdème important ou des difficultés respiratoires, contacter le SAMU ; sinon, le centre antipoison.

• Cutané : si la lésion est invasive, vérifier l’absence d’épine ou de fragments de plante, puis laver à l’eau savonneuse. Une antisepsie (chlorhexidine aqueuse) est ensuite préconisée avant de poser un pansement. Vérifier la vaccination antitétanique. En cas de surinfection, consulter. En cas de lésion irritante, laver à l’eau claire et appliquer une crème émolliente, apaisante. En cas de prurit, proposer un anti-H1 oral voire un dermocorticoïde local. Une consultation médicale est envisagée si les symptômes sont plus sévères, notamment si la lésion concerne plus de 15 % de la surface corporelle, si des zones sensibles sont touchées (visage, organes génitaux) ou si la lésion a un aspect de brûlure sur une zone importante.

• Oculaire : rincer l’œil à l’eau tiède (filet d’eau d’un diamètre d’un demi crayon) pendant 15 minutes. Consulter si des symptômes persistent 1 h après : œil rouge, larmoiement, douleur, sensation de sable, diminution de la fente palpébrale, baisse de l’acuité visuelle.

INGESTION DE BAIES

« Ma fille joue à la dînette avec des baies »

La maman de Ludivine, 3 ans :

– Ma fille joue souvent à la dînette et je crains qu’un jour elle ne mange les fruits de notre pommier d’amour.

– Les enfants sont souvent attirés par les baies colorées, croyant que ce sont des cerises, des groseilles, des mûres ou des cassis. Expliquez-lui que certaines baies sont dangereuses et qu’il ne faut pas les porter à la bouche.

– Mais, que risque-t-elle réellement ?

– L’intoxication par le pommier d’amour n’entraîne, en général, que des troubles digestifs mineurs. Mais il faut rester vigilant et mettre les plantes hors de portées des enfants.

BAIES LES PLUS TOXIQUES

L’ingestion des baies décrites ci-dessous peut entraîner des troubles graves.

Arum tacheté

• L’arum tacheté (Arum maculatum, Aracées),ou gouet, pied-de-veau, langue de bœuf, manteau de la Vierge, racine amidonnière, vachotte, pain de serpent…, est une plante herbacée vivace de 20 à 50 cm. Ses fruits sont des baies globuleuses de couleur rouge vif à maturité et à la saveur sucrée.

• L’arum tacheté pousse dans les bois frais ou les haies humides d’une grande partie de la France.

• L’oxalate de calcium contenu dans l’arum est responsable d’une irritation de la sphère buccopharyngée (douleurs buccales lancinantes, œdème du pharynx, tuméfaction de la langue et des lèvres, hypersalivation), de troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhées), mais aussi de troubles du rythme cardiaque, d’une somnolence et de convulsions dans les cas graves.

Belladone

• La belladone (Atropa belladonna, Solanacées), également nommée belle dame, cerise enragée, bouton noir, herbe empoisonnée, guigne de la côte…, est une grande plante herbacée vivace pouvant atteindre 2 m de haut. Ses fruits sont des baies globuleuses d’un noir brillant à calice persistant.

• La belladone pousse dans les endroits humides et sur les terrains calcaires des régions montagneuses (jusqu’à 1 600 m d’altitude), notamment dans la moitié est de la France.

• Les alcaloïdes tropaniques (hyoscyamine, scopolamine, atropine) contenus dans la belladone sont à l’origine d’un syndrome atropinique : troubles digestifs (nausées, vomissements), sécheresse buccale, mydriase, tachycardie, hyperthermie, confusion, délire, convulsions voire coma.

• Confusion : les baies de la belladone sont parfois confondues avec les myrtilles. Celles-ci n’ont en revanche pas de calice persistant.

• Exemple d’intoxication : une famille a récemment ramassé des baies de belladone à la place de myrtilles. Ses cinq membres ont été hospitalisés.

Bryone

• La bryone (Bryonia dioica, Cucurbitacées), aussi appelée navet du diable, couleuvrée, vigne blanche, herbe de feu, ipéca indigène…, est une mauvaise herbe en forme de liane pouvant grimper au-delà de 5 m de hdiv. Sa racine est volumineuse, tubérisée en forme de navet et malodorante. Ses fruits sont des baies rouge mat à maturité, de la taille d’une groseille. Cette plante présente des vrilles dans le feuillage.

• La bryone pousse de façon spontanée dans les haies, les broussailles et les décombres dans toute la France. Elle est toutefois moins fréquente dans le pourtour méditerranéen.

• Toute la plante est toxique. Ses saponosides entraînent des vomissements et des diarrhées cholériformes et hémorragiques mais aussi une pâleur, des sueurs, une hypothermie, voire des convulsions, un coma.

• Confusion : en dehors des fruits dont la couleur peut être attractive, les racines peuvent être confondues avec des navets ou des raves (mais qui ont une odeur caractéristique de rave) et la liane avec le houblon, mais on note l’absence de vrilles dans le feuillage de ce dernier.

Camérisier

• Le camérisier (Lonicera xylosteum, Caprifoliacées), ou chèvrefeuille à balais, est un arbrisseau à tige dressée de 1 à 2 m. Ses fruits sont des baies rouges et leur saveur paraît sucrée. Les fleurs ont une odeur agréable caractéristique.

• Le camérisier est souvent retrouvé dans les haies ou en forêt dans les zones montagneuses (1 000 mètres environ).

• L’ingestion des baies, riches en saponosides, peut entraîner vomissements, diarrhées violentes voire sanglantes, sueurs abondantes, larmoiement, mydriase, troubles cardiaques (tachycardie puis arythmie), somnolence ou encore coma.

Phytolaque

• Le phytolaque (Phytolacca americana, Phytolaccacées), encore nommé raisin d’Amérique, herbe à la laque, raisin des teinturiers, vigne de Judée, épinard des Indes…, est une grande plante herbacée pouvant atteindre 2 m de haut. La présence de tiges rougeâtres très ramifiées est caractéristique. Ses fruits sont des baies globuleuses violet-noir à maturité.

• Le phytolaque pousse spontanément dans les décombres ou sur des terrains abandonnés de l’ouest et du midi de la France notamment.

• Les saponosides contenus dans le phytolaque sont responsables de douleurs abdominales, de vomissements, de diarrhées parfois sanglantes, de brûlure de la bouche, d’hypersialorrhée, de sensation de soif, d’œdème de la langue et du pharynx, de troubles neurologiques, cardiaques et hématologiques.

Redoul

• Le redoul (Coriaria myrtifolia, Coriariacées), ou corroyère, sumac de Montpellier, sumac de Provence, herbe aux tanneurs…, est un arbrisseau de 1 à 3 m de haut. Ses fruits sont des sortes de baies comportant 5 akènes noirs disposés en étoile.

• Le redoul pousse dans les haies, les bois ou sur le bord des chemins, spontanément dans le sud et le sud-ouest de la France.

• Une lactone sesquiterpénique est à l’origine de troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales), neurologiques (myosis, vertiges, convulsions épileptiformes, coma) mais aussi respiratoires (phases de dyspnée et d’apnée).

• Confusion : les baies du redoul peuvent être confondues avec des mûres, mais les rameaux de la ronce sont épineux. Par ailleurs, les rameaux du redoul peuvent être confondus avec ceux du myrte, un arbrisseau présent en Corse alors que le redoul y est absent.

BAIES SOUVENT RESPONSABLES D’INTOXICATIONS

Les plantes suivantes sont souvent à l’origine d’intoxications, notamment chez les enfants qui sont attirés par leurs baies. Cependant, les cas recensés dans les centres antipoison sont, en général, bénins et n’entraînent que des troubles digestifs car la quantité ingérée est faible.

Buisson-ardent

• Le buisson-ardent (Pyracantha coccinea, Rosacées), ou encore pyracantha, épine ardente, arbre de Moïse, petit corail…, est un arbuste épineux pouvant atteindre 4 m de haut. Les fruits sont de petites baies ayant l’aspect d’une petite pomme et sont de couleur jaune à rouge écarlate selon les variétés.

• Le buisson-ardent a été introduit en France dans les jardins pour constituer des haies.

• Les hétérosides cyanogènes contenus dans le buisson-ardent peuvent être responsables de troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhées).

Cotoneaster

• Le cotonéaster (Cotoneaster horizontalis, Rosacées) est un arbrisseau de 1 à 2 m de haut. Les fruits sont, comme pour le buisson-ardent, de petites baies rouges de 5 à 7 mm ressemblant à de petites pommes.

• Tout comme le buisson-ardent, le cotonéaster a été introduit en France dans les parcs et jardins comme couvre-sol.

• Le cotonéaster contient également des hétérosides cyanogénétiques responsables de troubles digestifs.

Gui

• Le gui (Viscum album, Santalacées), encore appelé bois de sainte croix, blondeau, bouchon, verquet, vert de pommier…, est une plante vivace de 20 à 50 cm à feuilles coriaces et persistantes. Ses fruits sont des baies blanches visqueuses.

• Le gui est un hémiparasite de divers arbres (peupliers, pommiers, tilleuls, saules…) très commun en France. Il est utilisé pour les décorations de Noël.

• Les lectines et les viscotoxines contenues dans le gui peuvent entraîner une irritation digestive, des vomissements, des diarrhées sanglantes et des douleurs abdominales, mais aussi des troubles cardiovasculaires (hypotension, tachycardie) ou neurologiques (dépression neuromusculaire, paralysie).

Houx

• Le houx (Ilex aquifolium, Aquifoliacées), également nommé agrifous, grifeuil, est un petit arbre pouvant atteindre 8 m de haut. Il possède des feuilles caractéristiques brillantes sur le dessus, persistantes et de forme ondulée avec des pointes acérées. Les fruits sont des drupes rouges à maturité.

• Le houx est souvent cultivé dans les haies et jardins. Il pousse dans les endroits frais et ombragés et est fréquent dans une grande partie de la France. Le houx est également utilisé lors des décorations de Noël.

• Ses alcaloïdes peuvent être à l’origine de diarrhées, de vomissements, de douleurs abdominales, de somnolence et de convulsions.

Pommier d’amour

• Le pommier d’amour (Solanum pseudocapsicum, Solanacées), ou cerisier d’amour, cerisier de Jérusalem, oranger de savetier…, est un petit arbrisseau ramifié de 40 cm à 1 m de haut. Ses fruits sont des baies globuleuses d’un rouge orangé brillant.

• Le pommier d’amour est une plante d’intérieur cultivée en pot.

• Ses alcaloïdes peuvent être responsables de troubles digestifs légers (nausées, vomissements, diarrhées, douleurs abdominales).

• Confusion : les baies du pommier d’amour peuvent être confondues avec les tomates cerises, qui sont cultivées dans les jardins à des fins alimentaires alors que le pommier d’amour est une plante d’intérieur.

INGESTION DE PLANTES

« Une tisane d’if pour mon cancer du sein »

Madame B. a lu sur Internet que certains anticancéreux proviennent de l’if :

– J’ai un if dans mon jardin. Pensez-vous que si je fais une tisane avec ses feuilles cela m’aiderait à guérir plus vite de mon cancer ?

– L’if est une plante toxique et il ne faut en aucun cas la consommer. Les médicaments issus de cette plante sont utilisés à des doses connues, lors de protocoles adaptés à chaque patient et sous surveillance médicale.

PLANTES LES PLUS TOXIQUES

L’ingestion de quelques grammes des plantes décrites ci-dessous peut entraîner la mort d’un adulte.

Aconit napel

• L’aconit napel (Aconitum napellus, Renonculacées), ou casque de Jupiter, char de Vénus, coqueluchon, napel petit navet, aconit faux navet…, est une plante herbacée vivace par des racines tubérisées en forme de navet. Ses feuilles sont alternes, découpées, vert foncé sur le dessus et plus clair sur le dessous. Ses fleurs violet-bleu présentent une forme de casque.

• L’aconit pousse en montagne et dans les lieux humides.

• Ses alcaloïdes diterpéniques, comme l’aconitine, provoquent des fourmillements et un engourdissement de l’appareil buccopharyngé et des extrémités ainsi que des vomissements, des nausées, des diarrhées voire des vertiges, une sudation et des frissons. Dans les cas graves, on observe des troubles respiratoires et cardiaques pouvant aboutir au collapsus. C’est l’une des plantes les plus toxiques : elle peut entraîner des troubles par simple contact avec les hampes florales ramassées en bouquet.

• Confusion : les feuilles de l’aconit peuvent être confondues avec celles de l’angélique sauvage et ses racines avec des racines comestibles comme celles d’Apiacées ou de raifort.

Colchique

• Le colchique (Colchicum autumnale, Colchicacées), aussi nommé tue-chien, faux-safran, veilleuse…, est une plante herbacée vivace par un bulbe dur, couvert d’écailles brunes. Ses feuilles sont très allongées et terminées en pointe. Les fleurs sont de forme tubuleuse et de couleur rose mauve.

• On retrouve le colchique dans les prairies humides. Cette plante est plus fréquente dans la moitié sud de la France mais est absente du bassin méditerranéen.

• La plante entière est toxique par la présence d’un alcaloïde à noyau tropolone, la colchicine.

• Lors d’intoxications par le colchique, on observe des brûlures buccales, une soif intense et une hypersalivation ainsi qu’une irritation digestive, des vomissements, des diarrhées parfois sanglantes et des douleurs abdominales. Dans les cas graves, des troubles cardiovasculaires avec hypotension, des troubles respiratoires et des troubles nerveux avec paralysie sont également présents.

• Confusion : les feuilles du colchique peuvent être confondues avec celles de l’ail des ours (mais ces dernières sont odorantes) ou du poireau sauvage, les bulbes avec des oignons ou des échalotes (mais ceux-ci n’ont pas d’écaille) et le pistil avec celui du safran.

• Exemple d’intoxication : un couple de la région de Tarbes consomma en plat principal des bulbes de colchiques confondus avec des oignons sauvages. Seule l’épouse survivra, après un état critique de plusieurs jours.

Datura

• Le datura (Datura stramonium, Solanacées), encore appelé stramoine, pomme épineuse, herbe à la taupe, herbe aux sorciers…, est une plante herbacée annuelle pouvant dépasser 1 m de haut. Il possède de grandes feuilles dentelées, alternes, à odeur fétide et des fleurs blanches, solitaires, à corolle tubuleuse en cornet. Ses fruits sont des capsules épineuses.

• Le datura pousse naturellement dans les champs, les terrains vagues ou les décombres dans toute la France. Il est également très utilisé dans les espaces verts des communes.

• La plante entière est toxique par la présence d’alcaloïdes tropaniques (hyoscyamine, scopolamine, atropine) et est parfois utilisée de manière volontaire en tant que psychotrope. Les symptômes observés dans ce genre d’intoxication sont les symptômes d’un syndrome atropinique avec excitation psychomotrice, hallucinations, angoisse, désorientation, agressivité, mydriase, sécheresse buccale, tachycardie, hyperthermie, rétention urinaire, vomissements, mais aussi, dans les cas graves, convulsions, détresse respiratoire voire coma.

Digitale pourpre

• La digitale pourpre (Digitalis purpurea, Plantaginacées), ou gant de Notre-Dame, est une plante herbacée qui possède de longues feuilles ovales au toucher velouté et des fleurs en forme de « doigt de gant » caractéristiques dont la corolle est pourpre à l’extérieur et marquée de taches pourpres cernées de blanc à l’intérieur.

• La digitale pourpre pousse spontanément dans les régions montagneuses et sur les terrains siliceux.

• La plante entière est toxique, mais surtout ses feuilles. Les molécules responsables de la toxicité sont des hétérosides cardiotoniques. Les symptômes observés sont d’ordre digestif (nausées, vomissements), neurosensoriel (vision jaune, délire, hallucinations) ou encore cardiaque (tachycardie, bloc auriculoventriculaire, troubles de la conduction et/ou de l’automatisme…).

• Confusion : les feuilles de digitale pourpre peuvent être confondues avec celles de la grande consoude ou de la bourrache, rêches au toucher.

• En cas d’intoxication grave, le Digidot permet de neutraliser les hétérosides.

Grande ciguë

• La grande ciguë (Conium maculatum, Apiacées), ou ciguë tachetée, est une plante herbacée dont la tige est cannelée et creuse et présente des tâches rouge violacé. Ses feuilles sont très découpées, vert sombre. Le fruit est un akène et les fleurs sont petites et blanches. La plante dégage une odeur désagréable.

• La grande ciguë pousse dans des terrains abandonnés humides ou des décombres.

• Toute la plante est toxique par la présence d’alcaloïdes pipéridiniques (coniine et gammaconicine). Lors d’une intoxication par cette plante, on peut observer des troubles buccopharyngés (irritation, salivation importante), des troubles digestifs (vomissements, diarrhées, douleurs intestinales) mais aussi des troubles neuromusculaires dans les cas graves (vertiges, troubles visuels, maux de tête, paralysie du diaphragme pouvant entraîner une asphyxie).

• Confusion : les feuilles de grande ciguë peuvent être confondues avec celles du cerfeuil ou celles du persil et ses fruits avec ceux de l’anis, mais l’odeur aide à la distinction.

Laurier-rose

• Le laurier-rose (Nerium oleander, Apocynacées), ou oléandre, est un arbuste à tiges dressées avec des feuilles coriaces et persistantes, allongées, souvent groupées par 3 et caractéristiques par la présence de 40 à 70 paires de nervures secondaires parallèles. Les fleurs sont roses, rouges ou blanches selon les variétés.

• Le laurier-rose pousse spontanément dans les régions chaudes et ensoleillées et est cultivé partout ailleurs.

• Toutes les parties de la plante sont toxiques, surtout les feuilles et les racines. Cette toxicité est due à la présence d’hétérosides cardiotoniques comme l’oléandrine. Les symptômes sont des troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales), neurosensoriels (troubles de la vision, agitation, malaise) mais aussi cardiaques (bradycardie, troubles de la conduction ou de l’automatisme).

• Confusion : les feuilles du laurier-rose peuvent être confondues avec celles de l’eucalyptus dont l’odeur peut être caractéristique.

• En cas d’intoxication grave, le Digidot permet de neutraliser les hétérosides.

Ricin

• Le ricin (Ricinus communis, Euphorbiacées), ou palme du Christ, est une grande plante herbacée pouvant atteindre 2 m de haut. Ses fruits sont des capsules rougeâtres à 3 coques épineuses contenant 3 grosses graines marbrées luisantes.

• Le ricin est souvent cultivé dans les parcs et les jardins. Cette plante est subspontanée dans le midi de la France.

• Ce sont les graines contenues dans le fruit qui sont particulièrement toxiques en raison de la présence de lectines (ricine). Une intoxication par les graines de ricin se traduit par des troubles digestifs (nausées, vomissements incoercibles, diarrhées sanglantes, douleurs abdominales) mais aussi une déshydratation, une hyperthermie, une hypotension, une insuffisance rénale aiguë, une hémolyse ou encore une atteinte hépatique dans les cas graves.

Vératre

Le vératre (Veratrum album, Mélanthiacées), ou ellébore blanc, varaire…, est une plante herbacée vivace par un court rhizome et de nombreuses racines. Il présente des feuilles alternes à nervures parallèles et des fleurs de couleur blanc verdâtre.

• Le vératre pousse dans les prairies et les pâturages de montagne (> 800 m d’altitude).

• La plante entière est toxique, surtout le rhizome et les racines. Ses alcaloïdes stéroïdiques provoquent des troubles buccopharyngés (brûlures, soif intense, hypersalivation, problème de déglutition), digestifs (vomissements importants, diarrhées douloureuses) mais aussi neurologiques (vertiges, troubles de la conscience), cardiaques (bradycardie, collapsus) et respiratoires.

• Confusion : les racines de vératre sont souvent confondues avec celles de la gentiane jaune utilisées pour la fabrication de boissons apéritives. Toutefois, la gentiane présente des feuilles opposées et des fleurs jaunes et l’odeur de sa racine est forte, contrairement à celle du vératre.

PLANTES SOUVENT RESPONSABLES D’INTOXICATIONS

Les plantes qui suivent sont fréquemment en cause dans les cas d’intoxication recensés par les centres antipoison, mais un risque vital est rarement encouru.

Cytise

• Le cytise (Laburnum anagyroides, Fabacées), ou faux ébénier, cytise aubour, pluie d’or…, est un arbuste de 3 à 10 m de hdiv à feuilles alternes couvertes de poils à leur partie inférieure. Ses fleurs sont papilionacées, jaunes d’or et disposées en longues grappes pendantes.

• Si le cytise est retrouvé spontanément dans les bois secs et les coteaux calcaires de l’est de la France, il a été introduit partout dans le pays.

• Sa toxicité est due à des alcaloïdes quinolizidiniques, comme la cytisine, contenus principalement dans les graines, même si la plante entière est toxique. Les symptômes observés lors d’intoxications par le cytise sont des brûlures buccopharyngées, une hypersalivation, des nausées et des vomissements, des douleurs abdominales mais aussi des céphalées, des vertiges, un délire, une excitation voire des convulsions et des troubles cardiaques (tachycardie) et respiratoires (paralysie).

• Confusion : les fleurs du cytise sont souvent confondues avec les fleurs du robinier faux acacia, utilisées en cuisine pour faire des beignets. Toutefois, ces dernières sont blanches et les rameaux du robinier sont épineux.

If

• L’if (Taxus baccata, Taxacées), ou ifreteau, est un arbre dioïque (pieds mâle et femelle séparés) pouvant atteindre 15 mètres de haut. Il possède un feuillage persistant vert sombre et des aiguilles plates, molles et non piquantes. Le fruit de l’if est une fausse baie ouverte au sommet dont l’arille (partie charnue rouge vif) entoure la graine.

• L’if est spontané à moyenne altitude mais souvent cultivé dans les parcs et jardins comme arbre d’ornement.

• Toute la plante est toxique en raison de la présence de diterpènes (taxol), sauf l’arille (partie charnue rouge qui entoure la graine). Les symptômes observés lors d’une intoxication par l’if sont des troubles digestifs (vomissements, diarrhées), nerveux (tremblements, vertiges, troubles visuels, excitation, dépression) et cutanés (tâches ecchymotiques), respiratoires (dyspnée, apnée) et cardiovasculaires (hypotension, bradycardie) pouvant aller jusqu’au coma avec signes convulsifs et collapsus (moins d’une heure après l’apparition des symptômes).

• Confusion : le feuillage de l’if peut être confondu avec celui des sapins dont les aiguilles ne sont pas décurrentes, contrairement à celles de l’if.

• Exemples d’intoxication : certaines années, l’if entraîne des décès en montagne, dans la faune sauvage des cervidés affamés lorsque la neige recouvre trop longtemps les prairies et ne laisse émerger que la cime des conifères, dont les ifs. Jadis, les chevaux des pompes funèbres s’intoxiquaient souvent en mangeant les branches des ifs qui traditionnellement ornaient les cimetières. Les oiseaux, grands consommateurs de baies d’ifs, ne s’intoxiquent pas car le noyau n’est pas croqué. Il est rejeté intact, ce qui d’ailleurs facilite la dissémination des ifs.

Laurier-cerise

• Le laurier-cerise (Prunus laurocerasus, Rosacées), ou laurier palme, est un arbuste de 3 à 6 m de haut présentant de grandes feuilles alternes brillantes, coriaces et persistantes et à odeur caractéristique d’amande amère. Ses fleurs sont blanches et disposées en épis dressés.

• Le laurier-cerise est souvent cultivé pour former des haies, notamment en région méditerranéenne.

• La plante entière est toxique et surtout les graines par la présence d’hétérosides cyanogénétiques responsables de malaise, de dyspnée, de sueurs, de tachycardie, de convulsions, voire de coma.

• Confusion : les feuilles peuvent être confondues avec celles du laurier-sauce mais ces dernières sont ondulées sur les bords et dégagent une odeur aromatique caractéristique.

• En cas d’intoxication, l’hydroxocobalamine (Cyanokit) chélate le cyanure, le complexe formé est non toxique.

Muguet

• Le muguet (Convallaria majalis, Asparagacées), également appelé lis de mai, lis des vallées clochette des bois, guillet…, est une petite plante vivace dont les feuilles sont au nombre de 2 et de forme ovale et allongée. Le muguet possède de petites fleurs blanches en grappes à odeur et forme caractéristiques (clochettes) et ses fruits sont des baies rouges.

• Le muguet pousse spontanément dans les bois humides mais se cultive sur presque tous les terrains.

• La plante entière est toxique par la présence d’hétérosides cardiotoniques (fleurs et graines) et de saponosides (fruits). Les symptômes observés lors d’une intoxication par le muguet sont des troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhées), des troubles du rythme cardiaque, des vertiges, des spasmes musculaires.

• Confusion : les feuilles peuvent être confondues avec celles de l’ail des ours, mais ces dernières sont, elles, odorantes. Il arrive parfois que les baies soient confondues avec les groseilles.

INTOXICATIONS PAR CONTACT

« Mon fils de 3 ans a arraché les feuilles de notre dieffenbachia »

La maman de Louis, se présente à la pharmacie et demande conseil :

– Je viens de retrouver mon fils avec des feuilles de dieffenbachia dans les mains. Cette plante est toxique. Que peut-il lui arriver ?

– La toxicité de cette plante s’observe surtout au niveau buccopharyngé. A-t-il porté les feuilles à sa bouche ?

– Je ne sais pas.

– Je vais lui décontaminer la bouche avec un mouchoir humide et regarder si il n’y pas de lésions ou d’irritation. Si c’est le cas, une surveillance hospitalière doit être faite.

CONTACT AVEC LA PEAU

Dermite irritative

• Mécanisme : réaction inflammatoire consécutive à une irritation mécanique (poils, épines présentes sur une plante) ou chimique (plante urticante, vésicante ou caustique).

• Symptômes : érythème, douleur, œdèmes, éruptions cutanées (papules, vésicules, macules). Ces lésions peuvent aller jusqu’à la nécrose ou l’ulcération.

• Localisation des lésions : uniquement au niveau des zones qui ont été en contact avec la plante.

• Plantes responsables :

– poils : c’est le cas principalement pour la famille des Borraginacées avec la bourrache, l’héliotrope… ;

– suc : plusieurs familles sont représentées comme les Aracées avec le dieffenbachia, l’anthurium, les arums ou le philodendron, dont le suc contient des cristaux d’oxalate de calcium. On peut citer aussi les Moracées avec le ficus ou le caoutchouc qui sont également irritantes par leur suc, les Euphorbiacées avec le croton ou le poinsettia, ou encore la chélidoine (Papavéracées) dont le latex est connu pour ses propriétés verrucides ;

– écorces : c’est le cas des daphnés dont le seul contact des écorces avec la peau peut provoquer une vive réaction inflammatoire.

• Exemple d’intoxication : une dissection de bulbes de jacinthe dans une classe a entraîné 30 cas d’irritation de contact au niveau des mains. Par ailleurs, la chélidoine, réputée cholagogue ou cholérétique, doit être consommée à partir de la plante sèche. Ceux qui la consomment en plante fraîche pour être plus proches de la nature en gardent un souvenir… brûlant.

• Prise en charge : si la lésion est invasive, vérifier l’absence de fragments de plantes, puis laver à l’eau savonneuse. Appliquer ensuite un antiseptique puis un pansement. En cas de surinfection, consulter. En cas de lésion irritante, laver à l’eau claire et appliquer une crème émolliente, apaisante. En cas de prurit, administrer un antihistaminique H1 oral, voire appliquer un dermocorticoïde local. Une consultation médicale est envisagée si les symptômes sont plus sévères.

Dermite allergique

• Mécanisme : réaction d’hypersensibilité retardée, qui se manifeste en général de 24 heures à 72 heures après le contact avec un allergène. Il s’agit d’un mécanisme immunologique faisant intervenir les lymphocytes T. La réaction se manifeste lors d’un second contact avec l’allergène, la sensibilisation ayant eu lieu lors du premier contact.

• Symptômes : eczéma, lésions érythémato-œdémateuses, prurit intense, vésicules suintantes pouvant se surinfecter puis kératose, voire choc anaphylactique.

• Localisation des lésions : initialement au niveau des zones de contact avec la plante mais possible extension à d’autres zones.

• Plantes responsables :

– plantes de culture : ail, oignon, asperge, endive, artichaut… ;

– plantes sauvages : ambroisie, armoise, coquelicot, pissenlit… ;

– plantes aromatiques : giroflier, vanillier, cannelier, laurier-sauce, anis, anis étoilé, gingembre, menthe, thym… ;

– plantes ornementales : lierre, tulipe, narcisse, jonquille, sumac, géranium, dahlia, chrysanthème, lavande, œillet, poinsettia… ;

– plantes entrant dans la composition de baumes : benjoin, baume du Pérou, baume de tolu ;

– plantes utilisées pour la confection de meubles, d’objets : teck, okoumé, palissandre…

• Prise en charge : la prise en charge est la même que celle d’une dermite irritative.

Erythème polymorphe

• Mécanisme : réaction de même type que la dermite allergique.

• Symptômes : lésions arrondies de 1 à 2 cm de diamètre disposées en cocarde. Le centre de la lésion a un aspect cyanosé ou purpurique alors que son pourtour est érythémateux.

• Localisation des lésions : zones de contact avec la plante.

• Plantes responsables : la principale plante en cause est la primevère.

• Prise en charge : laver la zone atteinte à l’eau claire sans frotter. Une consultation médicale est nécessaire pour mettre en place une corticothérapie par voie orale. Une antisepsie locale est aussi préconisée.

Urticaire

• Mécanisme : réaction d’hypersensibilité de type I ou réaction faisant suite à une libération d’histamine sous l’action d’une substance histaminolibératrice. L’urticaire se manifeste immédiatement après contact avec la plante.

• Symptômes : érythème, papules œdémateuses à contour net (semblable à des piqûres d’ortie), prurit intense, réaction pouvant allez jusqu’au choc anaphylactique.

• Localisation des lésions : la zone atteinte peut parfois être importante et s’étendre au-delà des zones ayant été en contact avec la plante (urticaire géante).

• Plantes responsables : les principales plantes incriminées sont l’ortie, la pariétaire, le ricin…

• Prise en charge : laver la zone à l’eau claire sans frotter. Le traitement repose ensuite sur la prise par voie orale d’antihistaminiques H1.

Photosensibilisation

• Mécanisme : réaction cutanée survenant après contact avec une plante photosensibilisante suivie d’une exposition à la lumière solaire et favorisée par l’humidité. Ces plantes contiennent des furocoumarines capables d’absorber et de transformer l’énergie de la lumière ultraviolette, leur conférant ainsi un pouvoir toxique. D’autres molécules ont des effets similaires tels les dérivés des dianthrones.

• Symptômes : éruption cutanée, pigmentation excessive de la peau, lésions vésiculaires voire phlycténulaires. Ces symptômes peuvent s’accompagner de maux de tête, de fièvre ou/et de prurit.

• Localisation des lésions : zones de contact avec la plante après exposition au soleil.

• Plantes responsables :

– à furanocoumarines : les Apiacées comme la grande berce, le panais, la berce du Caucase, l’angélique, le persil ou encore le fenouil, les Rutacées comme la rue fétide ou la fraxinelle ou les Citrus… ;

– à dérivés de dianthrones : le millepertuis ou le sarrasin.

• Prise en charge : identique à celle d’une dermite irritative ou allergique.

CONTACT AVEC LA BOUCHE

• Le contact avec la cavité buccale est fréquemment rencontré chez les jeunes enfants qui portent tout à leur bouche, mais aussi chez les adultes lors du mâchonnement de l’extrémité d’une tige ou d’un fragment de feuille d’une plante toxique pour les muqueuses.

• Symptômes : sensation de brûlure de la cavité buccale, tuméfaction labiale et linguale, hypersalivation, irritation buccopharyngée, œdème pouvant atteindre l’oropharynx et entraîner une aphonie, des troubles de la déglutition, des troubles respiratoires voire une asphyxie. Dans tous les cas, s’assurer de l’absence de déglutition.

• Plantes responsables : les principales plantes responsables de ce type de toxicité sont celles contenant des cristaux d’oxalate de calcium (dieffenbachia, arums, tamier, anthurium…) ou celles dont le latex est irritant pour la peau et les muqueuses (poinsettia, croton, ficus…). D’autres plantes entraînent également des troubles de la cavité buccale tels le vératre ou encore le cytise.

• Prise en charge : décontaminer la cavité buccale soit à l’aide d’un mouchoir imbibé chez les enfants, soit à grande eau chez les adultes. Contacter le SAMU en cas d’œdème ou de difficultés respiratoires. L’urgence vitale concerne principalement le dieffenbachia ou toute autre Aracée qui aurait libéré de grandes quantités d’oxalate de calcium. En cas de symptômes mineurs, appeler le centre antipoison qui, selon les cas, préconisera soit une surveillance à domicile, soit une consultation médicale.

CONTACT AVEC LES YEUX

• La réaction apparaît suite à la projection dans l’œil de substances (sève, suc, résine) irritantes ou suite à une contamination manuportée en se frottant les yeux avec des doigts contaminés par de telles substances.

• Symptômes : irritation, rougeur, gêne oculaire, larmoiement et œdème conjonctival. Une atteinte de l’épithélium cornéen est possible.

• Plantes responsables : les plantes contenant sève, suc ou résine irritants comme la chélidoine, le caoutchouc, l’aloé…

• Prise en charge : effectuer un lavage de l’œil à l’eau tiède. consulter en cas de persistance des symptômes une heure après le lavage oculaire.

L’INTERVIEW Elisabete Gomes PHARMACIENNE AU CENTRE ANTIPOISON ET DE TOXICOVIGILANCE DE NANCY

« Il est important de connaître les plantes qui nous entourent »

Le Moniteur : Qui est le plus touché par les intoxications dues aux plantes ?

Elisabete Gomes : Trois appels sur quatre pour une intoxication de plantes concernent les enfants âgés de moins de 5 ans. Nous avons d’ailleurs un pic d’appel lors de la fructification des plantes et un autre pic au moment des fêtes de fin d’année. Pendant ces périodes, de nombreuses plantes aux couleurs attractives sont offertes ou utilisées pour la décoration. Les personnes âgées ou atteintes de démence sont aussi concernées par les intoxications accidentelles. Les adultes, eux, s’intoxiquent en raison de confusions avec des plantes comestibles. Les intoxications volontaires restent rares et concernent principalement des conduites addictives.

Comment prévenir les intoxications accidentelles ?

Il est difficile de vivre dans un environnement sans plantes. Il est donc important de connaître celles qui nous entourent (dans la maison, le jardin, sur le trajet qui mène à l’école…). Il en est de même dans les institutions (maison de retraite, école) où le choix des plantes doit être réfléchi. A la maison, il faut garder les plantes hors de portée des jeunes enfants, conserver les étiquettes de celles en pot et s’enquérir de leur toxicité lors de l’achat. Au jardin, il faut enlever les plantes indésirables régulièrement, toujours en se protégeant et en évitant de le faire les jours de plein soleil. Les plantes photosensibilisantes comme la grande berce ou irritantes pouvant provoquer de réelles brûlures, porter des gants et des lunettes de protection, changer de vêtements et, si possible, prendre une douche après le jardinage. L’éducation des enfants est également importante : il faut leur apprendre à reconnaître les plantes toxiques de celles qui sont comestibles.

Et concernant les cueillettes ?

En cas de doute, il est indispensable de faire identifier les récoltes auprès de professionnels compétents. Les horticulteurs et les pharmaciens sont souvent sollicités. Ces derniers ne doivent répondre aux sollicitations que s’ils sont sûrs de leur réponse.

INFOS CLÉS

• En cas d’ingestion d’une plante toxique, ne pas faire boire ni vomir. Déterminer les circonstances : adulte, enfant, quantité et heure d’exposition.

• En cas de contact cutané, muqueux ou oculaire avec une plante irritante, rincer abondamment.

QU’AURIEZ-VOUS RÉPONDU ?

Madame M. cueille de la vigne rouge dans son jardin pour en faire une tisane « circulation » :

– Les plantes, ça ne peut pas me faire de mal…

– Il faut toujours demander l’avis d’un médecin ou d’un pharmacien avant d’utiliser des plantes. En particulier, la vigne rouge peut être confondue avec une autre plante toxique.

Votre confrère a-t-il bien répondu ?

Oui, l’automédication avec des plantes peut s’avérer dangereuse s’il y a confusion avec une plante toxique. Madame M. peut facilement confondre la vigne rouge (aux feuilles palmatilobées dentées et aux baies noires) avec la vigne vierge, toxique (aux feuilles composées de 3, 5 ou 7 folioles dentées et aux baies bleu-noir).

QU’AURIEZ-VOUS RÉPONDU ?

Madame G. se présente à la pharmacie avec des fruits rouges qu’elle a cueillis lors d’une promenade :

– Je ne connais pas ces fruits, mais j’ai remarqué que certains animaux en mangeaient. Sont-ils comestibles ?

– Si les animaux se nourrissent de cette plante, il est fort probable qu’elle soit comestible pour l’homme…

Votre confrère a-t-il bien répondu ?

Non, certains végétaux peuvent être toxiques pour l’homme et inoffensifs pour les animaux, et inversement. L’oignon, bénéfique pour l’homme, est toxique pour le chien et le chat (toxicité hématologique) alors que le buisson-ardent, souvent consommé par les oiseaux, présente une toxicité pour l’homme.

QU’AURIEZ-VOUS RÉPONDU ?

La maman de Justine, 7 ans :

– Ma fille a ramassé des graines de ricin dans le parc et les a utilisées pour fabriquer un collier. Est-ce dangereux ?

– Non, je ne pense pas. L’huile que l’on extrait de ces graines est utilisée comme purgatif. Votre fille risque seulement d’avoir des troubles digestifs en cas d’ingestion.

Que pensez-vous de la réponse de votre confrère ?

La ricine contenue dans les graines de ricin n’est pas soluble dans l’huile. D’où son absence dans l’huile de ricin, non toxique. En revanche, il existe bien un risque d’intoxication si les graines sont mâchonnées. De plus, leur manipulation peut provoquer des réactions allergiques chez certaines personnes. En règle générale, il faut se méfier des colliers en graines car ces dernières peuvent s’avérer toxiques. C’est le cas notamment des graines rouge et noir d’Abrus precatorius, encore appelées grains d’église, graines de jéquirity, graines de paternoster, aux propriétés hémagglutinantes (voir aussi « Question de comptoir » du Moniteur n° 2917).

Dieffenbachia

Le dieffenbachia (Dieffenbachia sp.) est une plante herbacée souvent cultivée en pot comme plante ornementale. Elle mesure jusqu’à 1 m de haut et possède de grandes feuilles ovales, vertes avec des tâches blanc-crème et des bords légèrement ondulés. Son suc contient des cristaux d’oxalate de calcium à l’origine de dermite irritative. Par contact buccal, il peut être à l’origine de lésions, d’irritations ou de douleur de la cavité buccale. Dans les cas les plus graves, un œdème peut apparaître. Il nécessite l’hospitalisation de la personne pour prévenir une détresse respiratoire.

INFOS CLÉS

• Contact cutané : laver à l’eau savonneuse puis appliquer un antiseptique, si dermite invasive. En cas d’irritation, laver à l’eau claire et conseiller une crème émolliente, voire un dermocorticoïde ou un antihistaminique par voie orale si besoin.

• Contact buccal : rincer à l’eau. Si œdème ou difficultés respiratoires, appeler le SAMU.

• Contact oculaire : rincer 15 minutes et consulter si les symptômes sont toujours présents au bout d’une heure.

Rue fétide

La rue fétide (Ruta graveolens) est une plante herbacée vivace dont l’odeur désagréable est caractéristique. Ses fleurs jaunes ont quatre pétales hormis la fleur centrale de la cyme qui en possède cinq. Ses feuilles alternes très découpées contiennent des furanocoumarines à l’origine de photosensibilisation.

Chélidoine

La chélidoine (Chelidonium majus) est une plante herbacée qui pousse dans les décombres et les ruines. Sa tige est velue et ses feuilles sont grandes et lobées. Ses fleurs sont jaunes et possèdent 4 pétales disposés en croix et de nombreuses étamines. Toute la plante possède un latex que l’on peut observer si l’on blesse la plante. Ce latex jaune et qui rougit à l’air est irritant pour la peau et les muqueuses.

L’ambroisie

• L’ambroisie (Ambrosia artemisiifolia) est une plante herbacée souvent retrouvée sur le bord des routes et dans les terrains en friche. Son pollen est très allergisant. La pollinisation a lieu d’août à septembre et peut entraîner, chez les personnes sensibles, rhinite, conjonctivite, asthme mais aussi urticaire.

• Il s’agit d’un réel problème de santé publique : plus de la moitié des départements français sont touchés par ce fléau et cette plante est en constante propagation.

• D’autres plantes, notamment celles de la famille des Graminées ou Poacées, qui pollinisent au printemps, présentent des pollens allergisants.

QU’AURIEZ-VOUS RÉPONDU ?

Monsieur Y. se présente à la pharmacie :

– J’ai taillé mon laurier-rose ce matin. Je sais que cette plante est toxique, mais puis-je quand même faire brûler cette coupe ?

– Cette plante est effectivement toxique. Il vaut mieux éviter de brûler les feuilles. Mettez votre taille dans une poubelle.

Votre confrère a-t-il bien répondu ?

Oui, le laurier-rose est une plante très toxique, à la fois par ingestion de ses feuilles mais aussi lors d’inhalation de fumées émises lors de leur combustion. Des cas d’intoxication ont également été recensés lors de consommation de viande qui avait été embrochée sur des tiges de laurier-rose. D’autres plantes émettent des fumées toxiques lors de leur combustion : bois exotiques ou encore de lierre. Il ne faut donc pas faire brûler ces plantes ni utiliser leur taille pour allumer un barbecue.

L’essentiel à retenir

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