L’ARTHROSE - Le Moniteur des Pharmacies n° 2877 du 09/04/2011 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2877 du 09/04/2011
 

Cahiers Formation du Moniteur

Ordonnance

ANALYSE D’ORDONNANCE

M. Durand souffre de diarrhées

RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE

Pour qui ?

M. Durand, 72 ans.

Par quel médecin ?

Dr P., rhumatologue libéral.

L’ordonnance pose-t-elle un problème législatif ?

Non.

QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?

Que savez-vous du patient ?

M. Durand est un patient que le pharmacien connaît depuis longtemps. Il est traité par le Dr ?P., rhumatologue, depuis une dizaine d’années pour une gonarthrose évolutive, ainsi que par son généraliste pour un syndrome dépressif léger.

Quel était le motif de la consultation ?

• Depuis son dernier rendez-vous chez le rhumatologue, M. Durand se plaint de diarrhées qui ne cèdent pas.

• La diacéréine est un dérivé proche des laxatifs anthraquinoniques (séné : Idéolaxyl, Modane…). Environ un tiers des patients traités par cette substance présentent des diarrhées plus ou moins importantes (réponse 1). Sur les conseils de son pharmacien, M. Durand a avancé le rendez-vous avec son rhumatologue pour en parler avec lui.

• Le patient en a également profité pour signaler au médecin que Doliprane semblait être de moins en moins efficace.

Que lui a dit le médecin ?

Le médecin lui a confirmé que son traitement habituel est sans doute à l’origine des diarrhées. Il lui propose de le modifier. Flexea remplace donc Art. Le médecin a également changé le traitement antalgique d’appoint en proposant deux médicaments à utiliser ponctuellement selon l’intensité des douleurs.

Vérification de l’historique patient

• En consultant l’historique, le pharmacien constate que M. Durand prend Séroplex 10 mg depuis un peu plus d’un an pour un syndrome dépressif léger, et de l’oméprazole.

LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?

Que comporte la prescription ?

Sur la prescription figure Flexea (glucosamine), un traitement de fond des douleurs arthrosiques, ainsi que deux médicaments d’appoint pour le traitement des douleurs aiguës : Bi-Profénid (kétoprofène), un AINS, et Ixprim (tramadol + paracétamol), une association d’antalgiques simples de palier I et II.

Est-elle conforme aux référentiels ?

• Dans l’ensemble, oui. L’utilisation de la glucosamine en traitement de fond ainsi que celle d’un AINS ou d’un antalgique de palier II en cas d’échec du paracétamol pour le traitement des douleurs sont des options citées dans les recommandations internationales de l’OARSI (Osteoarthritis Research Society International) de 2009.

• Selon les RMO de 1998, il n’y a pas lieu de poursuivre de traitement par AINS sur une longue période dans le cas d’arthrose simple des membres inférieurs. De plus, les recommandations internationales sur la prise en charge de l’arthrose soulignent l’intérêt d’une prescription la plus courte possible en évaluant à l’échelon individuel le rapport bénéfice/risque des AINS. Le fait que Bi-Profénid soit prescrit « si besoin » doit être explicité au patient.

Y a-t-il des médicaments à marge thérapeutique étroite ?

Non.

Y a-t-il des interactions ?

Il n’y a pas d’interaction contre-indiquée mais il existe une interaction à prendre en compte. En effet, le tramadol (Ixprim) et l’escitalopram (Séroplex) inhibent la recapture de la sérotonine ce qui augmente le risque de survenue d’un syndrome sérotoninergique.

• Le syndrome sérotoninergique est relativement rare mais parfois mortel. En cas de symptômes inhabituels tels que tremblements, hyperthermie, tachycardie, diarrhées, confusions…, le patient doit consulter rapidement son médecin (réponse 3).

• L’utilisation des antalgiques de palier II est recommandée en dernière intention, pour M. Durand. L’existence de cette interaction incite également à utiliser Ixprim en dernier recours lorsque Bi-Profénid n’est pas assez efficace.

Y a-t-il des contre-indications pour ce patient ?

• Non, les contre-indications de Bi-Profénid sont l’insuffisance cardiaque, rénale ou hépatique sévère, un antécédent de crise d’asthme déclenché par un AINS, la varicelle ou un ulcère évolutif.

• Ixprim ne présente pas de contre-indication importante ou fréquente.

• Pour Flexea, la glucosamine étant extraite de crustacés, il convient simplement de s’assurer que le patient n’est pas allergique aux crustacés.

Les posologies sont-elles cohérentes ?

Oui. Bi-Profénid et Flexea sont prescrits à la dose maximum.

La posologie d’Ixprim (3 à 4 par jour si besoin) ne dépasse pas 300 mg de tramadol par jour, soit 8 comprimés au maximum.

La prescription pose-t-elle un problème ?

• Oui, chez les patients âgés de plus de 65 ans traités par AINS, la HAS recommande la coprescription d’un inhibiteur de la pompe à protons (IPP) pour limiter les risques d’atteinte digestive. Ici, M. Durand est déjà sous oméprazole (NB : n’importe quel IPP peut être utilisé à l’exception du rabéprazole qui n’a pas d’AMM dans cette indication).

Le traitement nécessite-t-il une surveillance particulière ?

Chez tous les patients utilisant des AINS, il est important d’avoir un contrôle régulier de la fonction rénale, d’autant plus lorsque le patient est âgé. Cette surveillance est biologique (clairance de la créatinine) et clinique (surveillance de la diurèse).

QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?

Il s’agit d’une première délivrance de ces médicaments. Il faut donc expliquer soigneusement l’ordonnance à M. Durand, et en particulier préciser les posologies des deux médicaments prescrits « si besoin ».

Intervention pharmaceutique

– Le Dr P. vous a prescrit deux médicaments à prendre si besoin. Avez-vous compris comment les prendre précisément ?

– A vrai dire, pas vraiment.

– Ce sont des médicaments à ne prendre qu’en cas de douleurs et non de façon systématique.

– Et je dois prendre les deux ?

– Non, pas nécessairement. Commencez par un des deux, de préférence un comprimé de Bi-Profénid si vous pouvez manger quelque chose en même temps. Et si cela ne vous soulage pas après 1 à 2 heures, vous pourrez prendre un ou deux comprimés d’Ixprim.

– Dois-je systématiquement prendre la quantité inscrite sur l’ordonnance ?

– Non, il s’agit des posologies maximales, mais si vous n’en ressentez pas le besoin, il est inutile de prendre tous ces comprimés.

Utilisation du médicament

• Les deux comprimés de Flexea doivent être pris en une seule fois.

• Bi-Profénid doit être pris au cours d’un repas ou d’une collation.

Question du patient

– Puis-je couper mon comprimé de Bi-Profénid les jours où je sens que je n’ai pas besoin d’un comprimé entier ?

– Il est possible de couper Bi-Profénid. Néanmoins, une fois coupé, la durée d’action du médicament sera plus courte que d’habitude car il perd sa propriété de libération prolongée.

Quand commencer le traitement ?

• Flexea peut-être débuté ce soir.

• Ixprim et Bi-Profénid devront être pris seulement au moment des douleurs.

Que faire en cas d’oubli ?

• En cas d’oubli de Flexea, le patient ne doit pas rattraper la prise oubliée. Il doit poursuivre le traitement normalement.

Le patient pourra-t-il juger de l’efficacité du traitement ?

• Oui. Bi-Profénid et Ixprim ont un délai d’action d’environ 10 minutes avec un pic d’efficacité aux alentours de 30 minutes, grâce auxquels les douleurs devraient cesser ou diminuer.

• L’effet antalgique de Flexea est plus lent, il apparaît en quelques semaines, voire 1 ou 2 mois. Le patient devrait alors constater une diminution du nombre de crises douloureuses ainsi qu’une baisse de la consommation des antalgiques.

Quels sont les principaux effets indésirables ?

• Flexea n’a pas d’effets indésirables majeurs.

• Bi-Profénid est susceptible de provoquer notamment des atteintes gastriques plus ou moins importantes, ou des troubles rénaux.

• Le tramadol, contenu dans Ixprim, inhibe la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline et a une action agoniste des récepteurs morphiniques µ. L’agonisme des récepteurs µ entraîne des effets morphiniques généraux (nausées, sensations vertigineuses, constipation, sédation et dépendance physique lors des traitements longs), tandis que l’inhibition de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline favoriserait, entre autres, la survenue de syndromes sérotoninergiques.

Quels sont ceux gérables à l’officine ?

• Il faut informer M. Durand de l’importance de prendre Bi-Profénid pendant un repas pour limiter les risques d’atteinte gastrique. Il faut également lui conseiller d’arrêter ce médicament si des douleurs ou brûlures stomacales surviennent.

• M. Durand ne conduisant plus, l’effet sédatif d’Ixprim n’est pas gênant.

• Une utilisation d’Ixprim aux posologies maximales tous les jours pendant plusieurs mois nécessiterait un arrêt progressif du médicament afin de limiter les risques de syndrome de sevrage.

Quels signes nécessiteraient d’appeler le médecin ?

• Des douleurs gastriques importantes et/ou ne cédant pas à l’arrêt du traitement, ainsi que des vomissements de sang probablement dus à l’AINS imposent de suspendre le traitement et de consulter un médecin.

• Le patient doit également contacter son médecin en cas d’oligurie ou en cas de prise continue d’Ixprim. Dans ce cas, une réévaluation du traitement doit être envisagée et un schéma de sevrage doit être mis en place.

CONSEILS COMPLÉMENTAIRES

• M. Durand, 1 m 75, 90 kilos, est en surpoids. Une perte de poids est conseillée afin de limiter les contraintes physiques sur les articulations des membres inférieurs.

• Le patient doit maintenir une activité physique : marche, vélo, natation… En revanche, des efforts physiques trop longs (trek, marche sur la journée…) pourraient augmenter l’usure mécanique des cartilages.

• Porter des chaussures à semelles épaisses.

• Aménager son logement en faisant appel à un ergothérapeute peut soulager et limiter les sollicitations excessives des articulations atteintes.

• Limiter les positions statiques pendant la journée, notamment lors des longs trajets.

PATHOLOGIE

L’arthrose en 5 questions

L’arthrose est une maladie chronique de l’articulation caractérisée en particulier par la dégradation du cartilage, des remaniements constants de l’os sous-chondral, la production d’ostéophytes et une inflammation intermittente de la membrane synoviale. Elle peut entraîner un handicap fonctionnel important.

1 QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?

• La dégradation articulaire s’accompagne progressivement de phénomènes douloureux et d’une diminution de la fonction articulaire.

• On peut noter 3 profils évolutifs de l’arthrose :

– lent et progressif, sans poussées apparentes ;

– par poussées, avec alternance de phases de stabilité (sans douleur) et de chondrolyse (douleurs) ;

– rapide : le cartilage est détruit en quelques années, voire en quelques mois.

• On retrouve 4 signes cliniques principaux :

• Douleur. Au début, le patient peut ne ressentir qu’une simple gêne. Puis une douleur apparaît, uniquement lors d’efforts (calmée par le repos), et elle ne réveille pas le patient la nuit. Elle est de type mécanique. Lors des poussées, elle devient de type inflammatoire : elle survient dès le matin et peut réveiller le patient la nuit. Elle persiste même au repos et s’accompagne d’un épanchement intra-articulaire de liquide synovial.

• Raideur. Elle apparaît plus tard et évolue progressivement. Au début, elle est limitée à certains mouvements et aux changements de position. Le matin (ou après une station assise prolongée pour le genou), le patient doit attendre 5 minutes, voire plus, afin de dérouiller l’articulation.

• Déformation de l’articulation. A un stade plus évolué, l’articulation est déformée par la formation d’ostéophytes ou par un épanchement articulaire (genou en varum ou valgum…).

• Impotence fonctionnelle. Conséquence des 3 autres signes cliniques, son importance est variable. Elle est progressive, mais limite lentement les possibilités d’utilisation de l’articulation.

• Pratiquement toutes les articulations peuvent être atteintes (épaule, cervicales, coude, poignet, cheville…), mais l’arthrose se retrouve plus fréquemment au niveau du genou (gonarthrose), de la hanche (coxarthrose ), des doigts (arthrose digitale) et du pouce (rhizarthrose).

• Dans l’arthrose digitale, la gêne esthétique et l’impotence amènent souvent le patient à consulter. Les doigts sont déformés par la présence de nodosités aux articulations interphalangiennes distales (nodosités d’Heberden), puis proximales (nodosités de Bouchard).

2 COMMENT SE FAIT LE DIAGNOSTIC ?

Le diagnostic est clinicoradiologique.

• L’interrogatoire et l’examen clinique du malade sont primordiaux. L’interrogatoire consiste à déterminer les facteurs de risque et questionner le patient sur la nature de sa douleur (horaire : mécanique ou inflammatoire, siège…), s’il existe une raideur, un épanchement articulaire (pour le genou, le patient note une augmentation de volume), une impotence fonctionnelle, le terrain…

• En imagerie, la radiologie est l’examen clé. Les autres techniques d’imagerie sont le plus souvent inutiles. Son intérêt est toutefois limité par l’absence de parallélisme entre les signes radiologiques et la sévérité des symptômes. On y retrouve 4 signes : un pincement de l’interligne articulaire (en général localisé, témoin de l’amincissement du cartilage), une condensation de l’os sous-chondral sous la zone de pincement articulaire, des ostéophytes et des géodes.

• Il n’existe pas de marqueurs biologiques spécifiques pour l’arthrose (VS et CRP normales).

Lors des poussées, une ponction au niveau de l’épanchement met en évidence un liquide de type mécanique, c’est-à-dire clair, visqueux et contenant peu d’éléments. Le liquide synovial est retrouvé uniquement lors des poussées car en temps normal, il n’existe pas en quantité suffisante pour permettre un prélèvement.

3 QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE ?

Si les causes de l’arthrose restent inconnues, des facteurs de risques ont été mis en évidence.

• Le surpoids est un facteur de risque et de gravité majeur, en particulier pour le genou. Il induit des perturbations mécaniques locales, mais également biochimiques, ce qui explique qu’il est également un facteur de risque d’arthrose digitale. Des études sont en cours pour évaluer le rôle des adipokines dans la physiopathologie de l’arthrose. En effet, il semblerait que le bénéfice engendré par une perte de l’IMC serait davantage dû à une perte de la masse grasse plutôt qu’à une perte de poids total. Un patient en surpoids, souffrant de gonarthrose, voit son risque de recours à la chirurgie diminuer de 25 % s’il perd 10 % de son poids.

• L’âge, le sexe féminin et la ménopause augmentent également le risque d’arthrose.

• Certaines arthroses telles que l’arthrose des doigts et la gonarthrose font intervenir des facteurs génétiques.

• Des anomalies d’axe (varus, valgus), de courbure (scoliose), une luxation congénitale de la hanche, une instabilité rotulienne, des pathologies métaboliques (goutte), des pathologies osseuses ou articulaires favorisent aussi la survenue d’arthrose.

• Des microtraumatismes répétés chez les sportifs de haut niveau (arthrose des orteils et de la hanche chez les danseurs), chez les professionnels à risque (arthrose du coude ou du poignet due au marteau-piqueur) ou des macrotraumatismes (fractures) sont des facteurs de risque.

4 AVEC QUELLES MALADIES NE PAS CONFONDRE ?

• Il convient tout d’abord d’éliminer les douleurs non articulaires : atteinte des tendons, ménisques, ligaments, os, muscles. Un examen clinique associé à une radiographie suffit le plus souvent.

• La topographie permet ensuite d’orienter le diagnostic. Par exemple, l’atteinte des doigts dans la polyarthrite rhumatoïde est surtout située aux articulations métacarpophalangiennes et interphalangiennes proximales, contrairement à l’atteinte des doigts dans l’arthrose digitale où elle est volontiers distale (puis proximale).

• Le caractère mécanique ou inflammatoire de la douleur est important dans le diagnostic.

• En phase de stabilité, la douleur de l’arthrose est de type mécanique. La radiologie permettra de la différencier d’un traumatisme, d’une fracture de fatigue sous-chondrale, des autres arthropathies endocrinométaboliques…

• Lors des poussées, la douleur est de type inflammatoire, ressemblant à une poussée de goutte, d’arthrite septique, de polyarthrite rhumatoïde, de spondylarthrite ankylosante… Une ponction articulaire sera alors nécessaire : dans le cas d’une arthrose, le liquide synovial est de type mécanique (pauvre en cellules), alors que dans les pathologies inflammatoires, il est de type inflammatoire (riche en cellules).

5 QUELLE EST L’ÉVOLUTION ?

• L’évolution de la maladie est très variable et imprévisible.

• Il n’existe pas à ce jour de facteurs pronostiques.

L’impact de la maladie sur la vie quotidienne (limitation dans les activités quotidiennes) est telle que le patient peut développer une dépression réactionnelle. Lorsque la douleur et le handicap deviennent trop importants, une prothèse doit être envisagée lorsque cela est possible.

• Un suivi par l’évaluation de la douleur et de ses capacités dans les gestes de la vie quotidienne est recommandé tous les 6 mois. Des questionnaires (indice de Lequesne par exemple pour la gonarthrose et la coxarthrose) standardisés permettent de suivre la sévérité des symptômes, l’efficacité de la prise en charge, et également d’orienter vers la mise en place d’une prothèse (au-delà d’un indice à 10-12 pour la hanche).

• En dehors des poussées, une radiographie tous les 2 ans permet de suivre la dégradation du cartilage. Lors des poussées, elle permet de diagnostiquer les chondrolyses rapides afin de renforcer les traitements.

THÉRAPEUTIQUE

Comment traiter l’arthrose ?

Stratégie thérapeutique

• Le triple objectif thérapeutique du traitement de l’arthrose est de réduire les douleurs, d’améliorer la mobilité de l’articulation toute entière et si possible de ralentir la dégradation du cartilage. Ce traitement tiendra compte de la présence ou non de poussée congestive.

Avant tout, une information doit être donnée au patient et il est nécessaire d’évaluer régulièrement la sévérité du handicap, l’intensité de la douleur, l’importance de la destruction articulaire et les traitements suivis.

• A l’heure actuelle, le choix du traitement est fonction du patient, notamment de son âge et des éventuelles pathologies associées. Il est important de lui rappeler que cette maladie est bénigne. La prise en charge médicale des patients atteints d’arthrose repose sur des traitements non médicamenteux (perte de poids, exercice physique et rééducation, mesures ergonomiques et orthopédiques : chaussures, semelles, orthèses et cannes…), des traitements médicamenteux antalgiques et symptomatiques (antalgiques, anti-inflammatoires non stéroïdiens ou opioïdes faibles) ou de fond (antiarthrosiques d’action lente, glucosamine), des traitements locaux (injections intra-articulaires de corticoïdes, lavage articulaire, viscosupplémentation) et en dernier recours des traitements chirurgicaux conservateurs ou non. Les traitements sont en général associés. La viscosupplémentation est d’efficacité comparable à l’utilisation d’AINS.

• Les traitements non médicamenteux nécessitent le respect de règles, dont le but est de réduire les contraintes subies par l’articulation et de maintenir les amplitudes de sa fonction. La perte de poids est un élément essentiel. De même, il est important de corriger les défauts de statique et de supprimer certaines activités à risque (toute activité qui sollicite l’articulation : sports avec saut… ).

• L’exercice est indispensable afin de renforcer la musculature et d’entretenir les amplitudes articulaires. Pour cela, la marche en dehors des périodes de poussées est un excellent exercice. En revanche, lors des périodes douloureuses, la marche et la station debout prolongée, ainsi que le port de charges lourdes sont à éviter.

• Afin de réduire la charge sur l’articulation portante, l’utilisation d’une canne, le port de semelles orthopédiques, ou l’utilisation d’une genouillère peut être judicieuse.

• Enfin, la crénothérapie, tout comme la physiothérapie, possède des vertus antalgiques et myorelaxantes souvent utiles.

• Des orthèses d’immobilisation pour une période courte peuvent être indiquées lors des phases évolutives. Elles sont utilisées en traitement d’appoint afin de réduire la consommation médicamenteuse.

• Concernant les traitements médicamenteux, le paracétamol est indiqué en première intention en raison de son profil de tolérance. En cas d’inefficacité, les AINS peuvent être prescrits éventuellement en association avec un protecteur gastrique. Si les AINS sont contre-indiqués, inefficaces ou mal tolérés, des antalgiques opioïdes faibles, avec ou sans paracétamol, peuvent être utiles. Un traitement de fond antiarthrosique symptomatique d’action lente (AASAL) est souvent proposé : glucosamine, chondroïtine sulfate, diacéréine et insaponifiables d’avocat et de soja qui ont une action retardée sur la douleur et sur la fonction articulaire. Certains AINS locaux peuvent être associés (diclofénac, le seul à posséder l’AMM pour la gonarthrose). Des injections intra-articulaires de corticoïdes sont préconisées en cas d’épanchement. Des injections d’acide hyaluronique sont proposées dans les autres cas. En cas de gonarthrose, des lavages articulaires sont parfois pratiqués.

• En dernière ligne, un traitement chirurgical doit être envisagé en cas de douleurs rebelles, de handicap fonctionnel ou de lésions anatomiques spécifiques. On parle alors d’arthroplastie par prothèse en remplaçant complètement ou partiellement l’articulation douloureuse voire plus rarement de fusion par arthrodèse.

Les traitements

Traitements médicamenteux par voie orale

Paracétamol

Le paracétamol est toujours utilisé en première intention, compte tenu de son rapport efficacité/effets indésirables élevé. On veillera à l’utiliser à doses suffisantes (3 à 4 g/j) avant de conclure à son inefficacité. La tolérance est excellente. Les patients sous AVK doivent prendre en compte l’interaction entre paracétamol, à la posologie maximale pendant au moins 4 jours, et AVK. Une surveillance rapprochée de l’INR est nécessaire.

Dérivés opioïdes de palier II

En cas d’inefficacité, le recours aux associations fixes de paracétamol + dérivé opioïde faible (tramadol, dihydrocodéine, codéine…) est une alternative intéressante.

Les effets indésirables fréquents sont des troubles neuropsychiques à type de confusion, des convulsions, vomissements, une somnolence, des céphalées, vertiges, une hypersudation, sécheresse buccale, constipation.

Les opioïdes de palier III sont réservés aux douleurs sévères et aux circonstances particulières.

Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)

Les AINS (kétoprofène, naproxène…), par leur action antalgique mais aussi anti-inflammatoire voient leur utilisation préférentiellement ciblée dans les poussées congestives de la maladie.

• Mécanisme d’action

Aux doses thérapeutiques, les AINS inhibent majoritairement la COX-2 et peu la COX-1. Les inhibiteurs sélectifs de la COX-2 ou coxibs (célécoxib : Celebrex, étoricoxib : Arcoxia) inhibent sélectivement la COX-2.

La COX-1 et la COX-2 sont responsables de la synthèse des prostaglandines et du thromboxane.

La COX-1 participe à la protection de la muqueuse gastrique et à l’homéostasie de la fonction plaquettaire.

La COX-2 est induite par des stimuli pro-inflammatoires et est admise comme étant la principale responsable de la synthèse des médiateurs prostanoïdes de la douleur, de l’inflammation et de la fièvre.

• Effets indésirables

– Les effets indésirables digestifs sont les plus fréquents. Le risque digestif et rénal doit être évalué avant leur prescription. Leur utilisation sur des périodes courtes (8 à 15 jours) et la coprescription d’un protecteur gastrique sont conseillées. Les principaux effets indésirables relevés sont de type gastralgies, vomissements, hémorragies digestives, diarrhées, dyspepsie, dysphagie.

L’avantage des coxibs est qu’ils présenteraient moins d’effets secondaires digestifs graves. En effet, en agissant uniquement sur la COX-2 ils respecteraient la synthèse des prostaglandines digestives.

– Les effets cutanéomuqueux sont fréquents (prurit, urticaire) et souvent liés à une allergie.

– L’action des AINS sur la COX-2 entraîne un impact rénal se traduisant par une rétention hydrosodée. Celle-ci peut provoquer ou aggraver une HTA, décompenser une cardiopathie congestive… Les coxibs induisent plus fortement cet effet et sont donc contre-indiqués en cas de cardiopathie ischémique avérée, d’antécédent d’AVC… Les AINS doivent être utilisés avec prudence par les patients présentant des facteurs de risque cardiovasculaire, tels qu’une hypertension, un taux de cholestérol élevé, un diabète ou un tabagisme.

• Interactions

Les AINS augmentent le risque d’accident hémorragique sous traitement anticoagulant, notamment sous AVK. L’association AINS et AVK (ou héparine) est déconseillée.

Antiarthrosiques symptomatiques d’action lente (AASAL)

Les médicaments composants cette classe thérapeutique possèdent une efficacité sur les manifestations fonctionnelles de l’arthrose.

• Chondroïtine, diacéréine et insaponifiables d’avocat et de soja

• La chondroïtine sulfate est un glycosaminoglycane qui agit en inhibant le catabolisme du collagène et en stimulant la synthèse de la matrice. Les effets secondaires décrits sont de type nausées, diarrhées, douleurs abdominales, éruptions cutanées.

• La diacéréine, anthraquinone extraite de crêtes de coq, aurait un effet antiarthrosique par inhibition de l’interleukine-1. Les effets secondaires décrits sont de type selles molles, diarrhées, urines jaune foncé et douleurs épigastriques.

• Les insaponifiables d’avocat et de soja, agiraient par l’intermédiaire des métalloprotéases du cartilage et par stimulation du TGF-bêta. Une régurgitation à odeur lipidique est possible.

• Leur tolérance est très satisfaisante. Ils ne peuvent être considérés comme ayant une efficacité chondroprotectrice démontrée, mais ils possèdent néanmoins un effet structuromodulateur sur l’os.

• La glucosamine

Son mécanisme d’action n’est pas élucidé, mais la glucosamine pourrait augmenter l’action lubrifiante du liquide synovial et ralentir la dégradation du cartilage. Les patients allergiques aux crustacés ne doivent pas prendre ces médicaments car la glucosamine est obtenue à partir de crustacés. La glucosamine provoquerait une augmentation de la résistance à l’insuline et est déconseillée chez les patients diabétiques ou obèses. La glucosamine peut entraîner des selles molles, des nausées, une hypercholestérolémie, une exacerbation de l’asthme, des céphalées, des saignements des patients sous AVK (surveillance de l’INR rapprochée) et, rarement, des malaises gastro-intestinaux.

• Les AASAL ont un délai d’action relativement lent, de l’ordre de 1 à 2 mois, et une efficacité rémanente persistant plusieurs semaines après leur arrêt. Ils sont généralement prescrits pour une durée initiale de 3 à 4 mois, afin de pouvoir juger de leur efficacité. Ils permettent de réduire la consommation d’antalgiques (notamment d’AINS).

Traitements médicamenteux par voie locale

AINS par voie locale

Les AINS (diclofénac, ibuprofène, kétoprofène…) ont démontré une efficacité supérieure au placebo dans le traitement symptomatique de l’arthrose douloureuse des doigts et des genoux par voie percutanée.

Les effets indésirables les plus fréquemment rencontrés sont les réactions cutanées, un prurit et des réactions d’hypersensibilité ou de photosensibilisation.

Injections intra-articulaires de dérivés cortisoniques

En inhibant les enzymes responsables de l’inflammation synoviale et de la destruction du cartilage, les dérivés cortisoniques (cortivazol, bétaméthasone…) administrés en injection intra-articulaire sont efficaces localement. Leur effet est généralement court, environ quatre semaines. En présence d’un épanchement au niveau de l’articulation, il est indispensable de l’évacuer avant de procéder à l’infiltration, afin de procéder à un examen bactériologique et cytochimique, et de renforcer l’efficacité du geste thérapeutique. La quantité injectée est fonction de la taille de l’articulation. Ces infiltrations sont réservées aux arthroses en poussée congestive.

La tolérance est bonne, excepté le risque d’infection locale (arthrites septiques), d’atrophie ou de dépigmentation localisée, de calcifications locales, de réactions allergiques locales et systémiques, de flush, d’hypotension et de douleur au point d’injection.

Injections intra-articulaires d’acide hyaluronique

L’acide hyaluronique est le principal constituant du liquide synovial, et est présent en forte concentration dans le cartilage articulaire. Sa viscosité étant diminuée dans l’arthrose, il n’est pas illogique d’administrer ce fluide viscoélastique en injection intra-articulaire. Cet enrichissement relance également la synthèse endogène.

L’efficacité de ce type de traitement est a priori supérieure, améliorant significativement la douleur et la gêne fonctionnelle sur le long terme. Leur action apparaît en 3 à 4 semaines et est rémanente (6 à 12 mois). L’acide hyaluronique est indiqué en dehors des poussées congestives. La tolérance est généralement excellente : de rares douleurs, accompagnées plus ou moins d’inflammation au point d’injection ainsi que d’hydarthrose ont été rapportées.

Lavage articulaire

Cette technique arthroscopique est une alternative aux injections intra-articulaires. Elle a pour objectif de laver l’articulation de ses produits de dégradation du cartilage, de ses cristaux, ainsi que des cytokines et protéases responsables de la douleur, en passant 1 à 2 litres de sérum physiologique sous anesthésie locale.

Son efficacité à 1 mois est identique à celle d’une infiltration de corticoïdes, en revanche elle dure au moins 6 mois.

Le lavage articulaire est indiqué dans les gonarthroses restant symptomatiques après 2 à 3 infiltrations de corticoïdes ou avant infiltration de corticoïdes.

Traitement chirurgical

Arthroplastie

L’arthroplastie (ou pose de prothèse articulaire) totale ou partielle est une intervention chirurgicale ayant pour but de rétablir la mobilité d’une articulation, en créant une nouvelle articulation en métal et polyéthylène. Les points faibles des prothèses sont leur durée de vie limitée (15 ans).

Arthrodèse

Certaines articulations doivent être fusionnées pour supprimer les douleurs. Ce sont en général de petites articulations peu mobiles jouxtant d’autres plus mobiles. Le mouvement global est donc conservé.

Greffe de cellules cartilagineuses autologues

Le traitement de l’arthrose par greffe de cellules cartilagineuses autologues, se différencie des traitements conventionnels par son aspect non médicamenteux et régénératif au niveau du cartilage et induit une néovascularisation et un effet antalgique notoire. Ce traitement est réservé à l’hôpital (Chondrocelect, suspension pour implantation).

Perspectives thérapeutiques

• La microfracture, consistant à perforer l’os sous-chondral pour permettre l’afflux de cellules mésenchymateuses de la moelle osseuse est en phase de recherche.

• La plastie mosaïque est en cours d’évaluation.

ACCOMPAGNER LE PATIENT

Chantal, 64 ans, inspecteur du travail retraitée « Cela fait des années que je souffre d’arthrose. C’est apparu de façon progressive. Au début, j’avais quelques douleurs qui passaient rapidement, mais rien d’important. Maintenant ça s’est aggravé, j’ai des douleurs partout : aux genoux, aux épaules et surtout aux deux pieds. Le matin quand je me lève, ça me fait vraiment souffrir, je marche comme une mamie. Une fois lancée ça va à peu près, mais si je m’assois longtemps dans la matinée, ça recommence. J’ai suivi beaucoup de traitements différents pour ce problème. A chaque fois c’est un peu la même chose, au début les médicaments me soulagent et puis au bout de quelques temps c’est de moins en moins efficace. Aujourd’hui je n’arrive plus à être soulagée en continu. Cela me pose des problèmes au quotidien. Le principal a été l’incidence sur mon travail. J’étais inspecteur du travail, un métier où l’on marche beaucoup. Les dernières années d’exercices, il y a environ 4 ans cela devenait vraiment pénible. »

L’ARTHROSE VUE PAR LES PATIENTS

Impact social

• Les douleurs dues à la maladie, principalement celles localisées aux genoux et aux hanches, rendent parfois la marche difficile ou impossible. Les patients ont rapidement tendance à ne plus sortir et à s’isoler. Ces difficultés à se mouvoir normalement peuvent empêcher une activité professionnelle.

La douleur limite souvent les patients dans la pratique de leurs loisirs (sport, jardinage, informatique…) et limite ou empêche parfois totalement les relations sexuelles.

• De même, la toilette et l’habillement peuvent devenir extrêmement compliqués et certains patients peuvent paraître négligés.

Cela participe encore davantage à isoler les patients et à abaisser l’image qu’ils ont d’eux-mêmes.

• Cet isolement social peut avoir des conséquences délétères pour la santé des patients.

Impact psychologique

L’arthrose induit des douleurs parfois très importantes et surtout chroniques. Certains patients souffrent de dépression liée à l’arthrose.

Impact sur le sommeil

En cas d’atteinte de la colonne vertébrale, lombaire ou cervicale, il arrive que le sommeil soit perturbé par les douleurs lors des mouvements nocturnes.

A DIRE AUX PATIENTS

A propos de la maladie

L’arthrose est une maladie, pour laquelle il n’existe pour l’instant pas de traitement curatif. Certains patients restent des années sans aggravation des symptômes, alors que des cas fortement invalidants peuvent se développer sur quelques années. Il est donc important de ne pas « comparer sa maladie à celle de son voisin ».

• Des règles hygiéno-diététiques doivent être mises en place.

La perte de poids est absolument indispensable. Cet amaigrissement limite l’évolution de la maladie et apporte parfois un effet antalgique en mettant les articulations au repos.

• Des mesures ergonomiques et orthopédiques peuvent être mises en place. Le port de chaussures à semelle épaisse et souples limitent l’évolution des arthroses des membres inférieurs. Les semelles orthopédiques amortissent l’onde de choc liée à la marche. Une aide à la marche lors des poussées, type canne anglaise du côté opposé à la douleur, peut soulager le patient. Un port d’attelles nocturnes peut aussi calmer les douleurs mais il faut éviter de les garder plus de 3 jours. Privilégier les matelas fermes, éviter les sièges trop mous ou trop profonds.

• Avec l’avis du rhumatologue, pratiquer une activité physique régulière adaptée pour éviter la fonte musculaire autour de l’articulation, liée à la non-utilisation du membre souffrant. Les marches et stations debout prolongées, les courses, les escaliers, le ménage et le port de charges lourdes sont à éviter, néanmoins le maintien d’une activité physique minimum est conseillé. Il faut marcher chaque jour mais sans trop prolonger l’effort. Les sports à effort brusque sont déconseillés, préférer la natation, le cyclisme, l’aquagym, le jogging (sol meuble et bonnes chaussures indispensables).

A propos des traitements

• Une rééducation est réalisée si nécessaire par le kinésithérapeute, elle consiste soit à ré-axer une articulation, soit à renforcer la musculature qui entoure une articulation et lutte contre les attitudes antalgiques vicieuses. Ces techniques permettent une limitation de la douleur ainsi qu’une baisse de la gêne quotidienne.

• La thermothérapie (pansement chauffant, bain chaud…) et les cures thermales peuvent aussi s’avérer bénéfique. Commencer la journée avec un bain chaud pour un déverrouillage en douceur.

• Expliquer au patient la différence entre le traitement des poussées et celui du long terme.

• Patients sous anti-arthrosiques d’action lente : ce sont des traitements extrêmement bien tolérés (à l’exception de la diacéréine qui donne des diarrhées fréquentes), mais avec une efficacité modeste. Il convient de prévenir les patients que leur action est retardée (délai de 3 à 6 semaines avant effet).

• Patients sous antalgiques de palier I : le paracétamol ne pose pas de problème particulier tant que l’on respecte les doses maximum. Prévenir les patients des risques de surdosage dus aux mélanges avec les nombreuses spécialités.

Il est également important de souligner le risque d’atteinte gastrique lié aux AINS. Prendre les AINS pendant un repas et les arrêter et consulter en cas d’apparition de douleurs épigastriques. Attention à ne pas prendre d’autres AINS en automédication.

• Patients sous antalgiques opiacés de palier II : les principaux effets indésirables de ces médicaments sont la sédation, les nausées et la constipation. Il convient de prévenir les patients. Néanmoins si l’utilisation reste modérée, il y a peu d’effets indésirables. En cas d’usage régulier (quasi quotidien) une tolérance vis-à-vis de ces effets indésirables s’installe, à l’exception de la constipation. En même temps que cette tolérance aux effets indésirables, une dépendance physique et psychologique peut s’installer.

• Patients sous traitement locaux (infiltrations) : les infiltrations (corticoïdes et acide hyaluronique) présentent un risque infectieux.

Il faut informer les patients des délais habituels d’efficacité antalgique et de leur durée. Pour les injections de corticoïdes, l’effet est rapide, de l’ordre de 24 h et il persiste pendant environ 4 semaines. Pour les injections d’acide hyaluronique, l’effet est retardé, en général 3 à 4 semaines et peut perdurer pendant plusieurs mois.

L’application d’une poche de glace, la prise d’antalgiques et une réduction de l’activité pendant 24 h après l’infiltration sont conseillées. Tout gonflement douloureux et chaud avec fièvre dans les jours qui suivent doit être notifié rapidement au médecin.

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

ORDONNANCE 1 : NON. Lasilix Retard 60 mg et Un-alfa 1 µg sont des médicaments utilisés chez des patients insuffisants rénaux. Or, chez ces patients, les prostaglandines jouent un rôle important dans la filtration rénale. Dans ces conditions, les AINS, inhibant ces prostaglandines, sont susceptibles de provoquer ou aggraver cette insuffisance rénale fonctionnelle grave. Le pharmacien ne peut pas délivrer cette ordonnance.

ORDONNANCE 2 : NON. Néanmoins, chez tous les patients traités par AVK, la modification ou l’initiation d’un traitement associé doit amener à une surveillance accrue de l’INR. De plus, Dolénio et Doliprane ont été impliqués dans certains cas de saignements et d’augmentation de l’INR chez les patients sous AVK. Il faut rester prudent et conseiller à Mme G. de contrôler son INR 3 à 4 jours après initiation du traitement.

MÉMO-DÉLIVRANCE

SOUS ANTALGIQUE

Le patient sait-il utiliser correctement les antalgiques ?

• Le patient ne doit pas dépasser les doses prescrites et utiliser les antalgiques seulement en cas de douleurs. Il doit prendre garde à l’automédication afin d’éviter les surdosages.

• Il doit utiliser les AINS aux cours d’un repas ou d’une collation pour éviter toute complication gastrique. En cas d’effets indésirables gastriques, le patient doit arrêter les AINS et consulter son médecin.

SOUS ANTI-ARTHROSIQUE SYMPTOMATIQUE D’ACTION LENTE (AASAL)

Le patient constatera-t-il immédiatement l’efficacité de ces médicaments ?

Les AASAL (chondroïtine, diacéréine, insaponifiables d’avocat et de soja, glucosamine) agissent en 1 à 2 mois et sont efficaces plusieurs semaines après leur arrêt. Ils permettent de réduire la consommation d’antalgiques. Leur efficacité sera évaluée après 3 à 4 mois de prescription.

SOUS INFILTRATION INTRA-ARTICULAIRE

Quelle est la durée d’action des différentes infiltrations ?

• Concernant les injections intra-articulaires de corticoïdes, le patient est soulagé rapidement et jusqu’à 4 semaines environ.

• Pour les infiltrations d’acide hyaluronique, l’effet est retardé (en général 3 à 4 semaines) et perdure pendant plusieurs mois.

Le patient doit-il prendre des précautions particulières après l’infiltration ?

• Il est conseillé d’appliquer une vessie de glace et de laisser l’articulation au repos pendant 24 h après injection de corticoïdes ou d’acide hyaluronique. La prise d’antalgiques est également parfois nécessaire.

• Après toute infiltration, un gonflement douloureux et chaud avec fièvre dans les jours qui suivent doit être notifié rapidement au médecin.

POUR TOUS

Quelles sont les mesures hygiéno-diététiques à conseiller ?

• Le patient doit perdre du poids afin de réduire les contraintes subies par l’articulation.

• De plus, certaines activités et sports sont déconseillées : marche longue, sports avec saut, port de charges lourdes, station debout prolongée… Préférer la natation, l’aquagym, le cyclisme…

• Des mesures non médicamenteuses type port d’orthèses et de semelles orthopédiques, utilisation d’une canne, mise en place de mesures ergonomiques, rééducation kinésithérapique, cure thermale… peuvent également être mises en place.

LE CAS : M. Durand est un patient régulier de la pharmacie. Il y a environ un mois, il est venu chercher des médicaments pour sa gonarthrose : Art et Doliprane, et s’est plaint de souffrir de diarrhées depuis quelques mois. Le pharmacien lui a dit que son traitement était peut-être en cause et qu’il faudrait en parler à son médecin. Il revient aujourd’hui avec une nouvelle ordonnance.

Vous avez été confronté à une ordonnance à problème ?

Contactez-nous :

ordonnance@wolters-kluwer.fr

Qu’en pensez-vous

Ces diarrhées peuvent-elles être liées à la prise d’Art ?

1 – C’est probable, c’est un effet indésirable fréquent.

2 – Non, en pratique cela reste extrêmement rare.

Qu’en pensez-vous

Face à l’association Ixprim/Séroplex :

1 – Vous délivrez le traitement.

2 – Vous ne délivrez pas le traitement.

3 – Vous délivrez le traitement avec des conseils spécifiques au patient.

EN CHIFFRES

• Arthropathie la plus fréquente

• Touche environ 8 millions de Français

• 2e cause d’invalidité après les maladies cardiovasculaires

• Nombre de nouveaux cas par an : environ 2 pour 1 000 adultes pour la gonarthrose et 0,5 pour 1 000 adultes pour la coxarthrose

• Prévalence : elle augmente avec l’âge : 3 % chez les moins de 45 ans, 65 % chez les plus de 65 ans, 80 % chez les plus de 80 ans

OSTEOPHYTES

Excroissances osseuses.

VARUM

Déviation d’un membre vers l’intérieur par rapport à l’axe du corps (les genoux se touchent).

VALGUM

Déviation d’un membre vers l’extérieur par rapport à l’axe du corps.

Physiopathologie de l’arthrose

• Le cartilage est un tissu composé d’un seul type de cellules : les chondrocytes. Ils baignent dans une matrice composée essentiellement de fibres de collagènes et de protéoglycanes, qui forment un « filet » retenant de nombreuses molécules d’eau. A l’état normal, le cartilage est le siège d’un équilibre entre la synthèse de la matrice et sa dégradation et assure la résistance aux forces de tension et de compression.

• En cas d’arthrose, cet équilibre est rompu par la surexpression de médiateurs (cytokines, prostaglandines… ) entraînant une surproduction des métalloprotéases, enzymes sécrétées par les chondrocytes et responsables de la dégradation de la matrice. Le cartilage s’autodétruit. Il se fissure, se détache et la surface osseuse finit par se mettre à nue.

• En réaction, l’os sous-chondral tente de compenser par une condensation pour mieux résister aux contraintes mécaniques. Des ostéophytes se forment afin d’augmenter les surfaces articulaires. L’os sous-chondral intervient également dans les mécanismes de la dégradation du cartilage en synthétisant des médiateurs prodégradatifs en réponse au stress mécanique répété.

• La membrane synoviale quant à elle est souvent le siège d’une inflammation due à l’accumulation des débris de cartilages. Par réaction, elle va produire des médiateurs inflammatoires et prodégradatifs.

GÉODES

Cavités dans l’os.

ADIPOKINES

Cytokines sécrétées par le tissu adipeux.

OS SOUS-CHONDRAL

Partie de l’os situé sous le cartilage.

CRÉNOTHÉRAPIE

Application thérapeutique des eaux minérales, particulièrement au lieu où se trouve leur source (cure thermale).

CE QUI A CHANGÉ

DISPARU

• Vioxx (rofécoxib) a été retiré du marché en octobre 2004 (augmentation du risque d’accidents cardiovasculaires graves).

• Jonctum (oxacéprol) gélule, utilisé dans le traitement d’appoint des douleurs arthrosiques de la hanche et du genou, a été retiré du marché en avril 2010.

APPARU

• Arcoxia (étoricoxib) a obtenu une AMM dans l’arthrose en août 2008.

• Pour les topiques contenant du kétoprofène : ajout sur les conditionnements d’un pictogramme incitant les patients à ne pas s’exposer au soleil, même voilé.

• Le piroxicam est réservé, depuis un avis de l’EMEA en juin 2007, au traitement symptomatique de l’arthrose. Il ne doit pas être utilisé en première intention et doit être administré à la dose la plus faible (pas plus de 20 mg/jour).

• Restriction sur le nimésulide : l’EMEA recommande de le limiter à 15 jours et le contre-indique en cas d’association à d’autres subtances hépatotoxiques et chez les patients alcooliques. Arrêt en cas de fièvre ou syndrome grippal.

• Restriction de la posologie du kétoprofène à 100 mg/prise et 200 mg/jour.

PHYSIO-THÉRAPIE

Discipline paramédicale qui améliore la fonction physique et la motricité en utilisant des moyens physiques, tels que la thérapie manuelle, la chaleur, la cryothérapie, l’électrothérapie (stimulation musculaire/ sensorielle, ultrasons, laser…), l’hydrothérapie, les exercices et les massages.

ARTHRODÈSE

Geste chirurgical dont la finalité est de provoquer l’immobilisation définitive d’une articulation de façon à ce qu’elle ne soit plus source de douleurs et qu’elle soit stable.

VIGILANCE !!!

Certaines contre-indications absolues au traitement médicamenteux de l’arthrose doivent être connues du pharmacien :

AINS : Ulcère gastroduodénal, insuffisance cardiaque, hépatique ou rénale sévère, grossesse et allaitement.

Coxibs : Maladie inflammatoire de l’intestin, insuffisance cardiaque congestive, cardiopathie ischémique avérée, artériopathie périphérique et/ou antécédent d’accident vasculaire cérébral, grossesse et allaitement, ulcère gastro-intestinal, insuffisance rénale ou hépatique sévère.

Diacéréine : Colopathies organiques, syndrome occlusif et insuffisance hépatique sévère.

Corticoïdes en infiltration : Infection locale ou générale et hypocoagulabilité sévère.

Acide hyaluronique : Traitement anticoagulant et infection locale ou générale.

Traitements disponibles en conseil

• De nombreux compléments alimentaires sont disponibles en conseil.

• Le MSM, composé soufré présent en très faible quantité dans les aliments, provient de l’oxydation d’un produit de la pulpe de bois. Grâce au soufre qu’il renferme, le MSM contribuerait à préserver les fonctions immunitaires et à maintenir en bon état les tissus conjonctifs. Le MSM est contre-indiqué chez les patients souffrant de troubles rénaux ou recevant une chimiothérapie anticancéreuse.

• Le silicium est un élément constitutif du tissu conjonctif dont sont formés, entre autres, le cartilage, les tendons et les ligaments. Par ailleurs, de nombreux kinésithérapeutes l’utilisent couramment par voie locale car des applications quotidiennes peuvent soulager les articulations.

• L’harpagophyton (Harpagophytum procumbens) doit ses propriétés antidouleur à l’harpagoside contenu dans ses racines et ses tubercules. Il possède des propriétés anti-inflammatoires. Il est contre-indiqué en cas de grossesse, d’allaitement et d’ulcère gastroduodénal et peut provoquer des troubles gastro-intestinaux.

• Les acides gras oméga-3 auraient des propriétés anti-inflammatoires et sont utilisés dans les compléments alimentaires indiqués dans l’arthrose.

HYDARTHROSE

Présence de liquide fabriqué en excédent dans une cavité articulaire.

PLASTIE MOSAÏQUE

Elle consiste à extraire des cylindres osseux/cartilagineux d’une région non soumise aux pressions de l’articulation atteinte, pour les replacer dans la région atteinte, en mosaïque.

POINT DE VUE Dr Hubert Marotte, rhumatologue, au CHU de Saint-Etienne

Beaucoup de recherches dans l’arthrose sont en cours

Que pensez-vous des compléments alimentaires pour l’arthrose ?

Je ne pense pas qu’ils aient une grande efficacité et je ne les recommande pas à mes patients. Si ces derniers en sont demandeurs, je leur recommande de les acheter en officine et non sur Internet. Je ne prescris pas non plus de médicaments à base de glucosamine.

Y a-t-il des perspectives thérapeutiques dans l’arthrose ?

Beaucoup de recherches sont en cours notamment les inhibiteurs des TNF-alpha tels que l’adalimumab (Humira) ou l’infliximab (Remicade). Les résultats sont encourageants : en phase IV pour le traitement de l’arthrose du genou par l’infliximab et en phase III pour le traitement de l’arthrose digitale par l’adalimumab.

D’autres études sur la calcitonine et les anticorps monoclonaux anti-IL-1 sont en cours.

QUESTION DE PATIENTS « Est-ce que l’humidité aggrave mon arthrose ? »

Il existe peu d’études, mais celles disponibles montrent qu’il n’y a pas de lien de causalité. Le seul risque lié à l’humidité vient du fait que durant les périodes de pluie intense les patients, peu mobiles, ont tendance à moins sortir. Dans ce cas, le patient ne stimule plus du tout le cartilage et présente un risque de fonte musculaire péri-articulaire qui peut aggraver la maladie.

QUESTION DE PATIENTS « Mon voisin m’a dit qu’il fallait porter des talonnettes pour l’arthrose de la hanche. »

Chez certains patients, l’arthrose de la hanche pourrait être due à une inégalité de longueur des membres inférieurs. Dans ces cas seulement, le port d’une talonnette du coté le plus court peut permettre de rééquilibrer les pressions sur les deux membres et limiter l’évolution de la maladie.

SITE INTERNET

www.rhumatologie.asso.fr

Le site Internet de la Société Française de Rhumatologie répond à toutes les interrogations des patients et des professionnels de santé sur l’arthrose et propose des fiches pour les patients (auto-exercice selon la localisation de l’arthrose, information sur l’infiltration…).

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