La thrombose veineuse profonde - Le Moniteur des Pharmacies n° 2846 du 18/09/2010 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2846 du 18/09/2010
 

Cahiers Formation du Moniteur

Ordonnance

Une prescription à la loupe

Un relais fondaparinux-AVK

RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE

Pour qui ?

Mélanie B., 28 ans.

Par quel médecin ?

Docteur Lacaille, médecin vasculaire exerçant en ville.

L’ordonnance est-elle recevable ?

Oui, les mentions obligatoires sont présentes et les posologies lisibles.

QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?

Que savez-vous du patient ?

Mélanie B. vient régulièrement à la pharmacie chercher sa pilule contraceptive ou de la parapharmacie. Elle fait du sport (course à pied, tennis). Elle n’a pas d’enfant et ne fume pas.

Quel était le motif de la consultation ?

La jeune femme a ressenti une douleur d’apparition progressive au niveau du mollet.

Son médecin traitant, suspectant une thrombose veineuse profonde (TVP), l’a envoyée en urgence chez un médecin vasculaire pour passer un écho-Doppler et confirmer le diagnostic.

Que lui a dit le médecin ?

Le médecin a confirmé que la douleur était due à une thrombose veineuse profonde.

Mélanie doit débuter immédiatement un traitement anticoagulant sous forme injectable et sous forme de comprimés.

En effet, en attendant que les anticoagulants oraux fassent effet (24 à 48 h), un anticoagulant à effet immédiat, ici le fondaparinux, est indispensable. Un relais est donc réalisé entre le fondaparinux et l’AVK. Le port de bas cuisse de contention de classe 3 lui a également été recommandé pendant 2 ans.

Le médecin lui a précisé qu’il devrait la revoir prochainement pour contrôler le traitement et qu’il l’informerait de l’arrêt d’Arixtra selon les résultats de l’INR.

Vérification de l’historique patient

Prise régulière de la pilule œstroprogestative Trinordiol.

LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?

Que comporte la prescription ?

→ Arixtra : afin d’éviter les complications de la TVP (embolie pulmonaire), il faut fluidifier le sang et stopper la formation du caillot. Arixtra (anticoagulant par inhibition sélective du facteur Xa) permet d’inhiber la formation de la thrombine et le développement du thrombus.

→ Coumadine (antivitamine K) inhibe la synthèse de plusieurs facteurs de coagulation. Son activité débute entre 24 et 48 h après la première prise.

→ Les bas de compression améliorent le retour veineux en exerçant une compression dégressive de la cheville aux cuisses.

Est-elle conforme aux référentiels ?

Oui. Arixtra peut être prescrit au même titre qu’une héparine de bas poids moléculaire (HBPM) en traitement d’attaque de la TVP.

Y a-t-il des médicaments à marge thérapeutique étroite ?

Oui, Coumadine est un médicament à marge thérapeutique étroite qui va nécessiter une surveillance stricte par dosage de l’INR.

Y a-t-il des contre-indications pour ce patient ?

Il n’y a pas de contre-indication à la prise du traitement. En revanche, il faut s’interroger sur la contraception de cette patiente.

QU’EN PENSEZ-VOUS ?

La patiente :

1) peut continuer sa contraception par voie orale.

2) doit désormais utiliser une contraception œstroprogestative par patch ou anneau.

3) ne peut plus utiliser de contraception œstroprogestative.

Les œstrogènes étant un facteur favorisant de thrombose, toute contraception à base d’œstrogènes est dorénavant contre-indiquée (réponse 3 ).

Intervention pharmaceutique

– Le médecin vous a bien demandé d’arrêter votre pilule ?

– Oui, de toute façon, je voulais la changer pour des patchs car je l’oubliais souvent !

– Vous ne pourrez pas utiliser de patchs non plus car ils contiennent des œstrogènes qui vous sont désormais interdits.

– Mais comment vais-je faire ?

– En attendant de voir votre gynécologue, vous devez utiliser des préservatifs par exemple. Il pourra vous prescrire une contraception orale progestative, un stérilet… Il est recommandé d’utiliser une contraception en cas de traitement par AVK ce qui est votre cas.

Les posologies sont-elles cohérentes ?

Oui, celle d’Arixtra est adaptée au poids de la personne (7,5 mg/jour entre 50 et 100 kg). Coumadine est systématiquement initiée à 5 mg/jour.

La prescription pose-t-elle un problème particulier ?

Oui, la prescription du port de bas de compression entraîne des objections de la part de la jeune femme : chaleur induite, coloris et maillage incompatibles avec ses goûts.

Demande de la patiente

– Je ne vais pas arriver à mettre ces bas, ils serrent trop !

– Certes, ils ne sont pas agréables à porter mais ils font partie intégrante de votre traitement. Il est normal qu’ils serrent, cela montre leur efficacité. Ils vont améliorer le retour veineux et peuvent vous éviter la survenue d’un accident grave.

– Il fait encore chaud et je ne vais pas les supporter. En plus, je ne pourrai plus porter de chaussures ouvertes.

– C’est une habitude à prendre. Nous pouvons vous proposer une retouche pied ouvert si vous le souhaitez.

– Je ne pourrai plus porter de jupes !

– Les fabricants ont réalisé de gros progrès sur l’esthétique depuis quelques années : le maillage est plus fin et les coloris variés. Je vais vous montrer des échantillons et vous propose de revenir demain matin pour prendre les mesures.

Je vais appeler votre médecin pour vous délivrer une bande de contention en attendant.

Y a-t-il des interactions ?

Non, il n’y a pas d’interaction médicamenteuse.

Le traitement nécessite-il une surveillance particulière ?

QU’EN PENSEZ-VOUS ?

Un traitement par Arixtra et Coumadine nécessite :

1) la surveillance du taux de plaquettes.

2) la surveillance de l’INR.

3) la surveillance du taux de plaquettes et de l’INR.

→ Le traitement par AVK nécessite un contrôle régulier de l’INR. Le premier dosage doit être réalisé dans les 48 h +/– 12 h suivant la première prise de Coumadine puis tous les 2 à 4 jours jusqu’à stabilisation de la valeur. Ensuite, un dosage sera effectué 2 fois par semaine puis 1 fois par semaine pendant 3 semaines puis espacé jusqu’à un intervalle maximal d’un mois.

En fonction des résultats, le médecin adaptera la posologie par palier de 1 mg (1/2 comprimé à 2 mg).

Coumadine existe en deux dosages (5 mg et 2 mg), ce qui permet un ajustement simple des doses, les comprimés étant sécables en 2 et de couleur différente.

→ Arixtra ne nécessite pas de contrôle des plaquettes car il n’induit pas de thrombopénie immunologique L’Arixtra ne nécessite pas de contrôle des plaquettes car il n’induit pas de thrombopénie immunologique (réponse 2).

Les deux traitements Arixtra et Coumadine sont simultanés, Arixtra sera arrêté dès que 2 INR successifs seront compris entre 2 et 3. Ce chevauchement est variable d’un patient à l’autre, il est en moyenne de 7 jours.

→ Il faut vérifier que la patiente ait l’ordonnance pour la surveillance du traitement et qu’elle ait bien compris le déroulé de celle-ci. Remettre un carnet de suivi du traitement AVK à la patiente et lui préciser de noter les résultats de l’INR dans le carnet.Il faut vérifier Il faut vérifier que la patiente soit en possession d’une ordonnance pour la surveillance du traitement et qu’elle ait bien compris le déroulé de celle-ci. Remettre un carnet de suivi du traitement AVK à la patiente et lui préciser de noter les résultats de l’INR dans ce carnet.

QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?

Il s’agit d’une première délivrance.

Utilisation des médicaments

→ Les injections d’Arixtra peuvent être réalisées par une IDE ou par le malade lui-même, toujours à la même heure. Elles se font une fois par jour en sous-cutanée profonde en position allongée au niveau de la ceinture abdominale en alternant les côtés droit et gauche. La solution doit être examiné avant injection (sans particule et sans colorat Prendre la coumadine le soir afin de pouvoir modifier la posologie dès les résultats de l’INR du matin avec l’accord du médecin. dgfdgfd Les injections d’Arixtra peuvent être réalisées par une IDE ou par le malade lui-même, toujours à la même heure. Elles se font une fois par jour en sous-cutanée profonde, en position allongée, au niveau de la ceinture abdominale en alternant les côtés droit et gauche. La solution doit être examinée avant injection (sans particule et sans coloration).

→ Prendre Coumadine le soir afin de pouvoir modifier la posologie dès les résultats de l’INR du matin avec l’accord du médecin.

Il faut également commander les bas pour Mme B.

QU’EN PENSEZ-VOUS ?

La prise de mesure des bas de compression doit se faire :

1) sur la jambe atteinte.

2) sur les 2 jambes

→ Les mesures des bas de compression sont prises préférentiellement le matin sur les 2 jambes et avec précision pour respecter la classe de compression Les mesures des bas de contention sont prises préférentiellement le matin sur les 2 jambes et avec précision pour respecter la classe de compression (réponse 2).

L’enfilage s’effectue avant le lever ou sur une jambe allongée au moins 30 min. Enfiler les bas en plaçant d’abord le talon correctement, les remonter sans tirer le long de la jambe. Tirer au niveau de la pointe pour libérer les doigts de pieds.

Eviter les plis qui peuvent avoir un effet garrot. Il est parfois difficile d’enfiler les bas mais il existe des aides techniques adaptées : des chausse-bas avec une armature rigide pour des personnes ne pouvant se baisser ou un enfile-bas en toile résistante adapté à des personnes plus mobiles.

Quand commencer le traitement ?

Dès le diagnostic de TVP ce matin, le médecin a injecté le traitement anticoagulant au cabinet. Les injections seront poursuivies le lendemain matin au domicile. Le traitement par AVK commence en même temps. Le port des bas de compression est recommandé dès que possible.

Que faire en cas d’oubli ?

La prise de Coumadine est possible dans les 8 heures après l’heure habituelle de prise. Sinon, ne rien prendre et noter l’oubli dans le carnet de suivi. Ne jamais doubler la dose.

Quand le traitement montrera-t-il son efficacité ?

La première injection limite les risques d’extension du thrombus et prévient l’apparition de complications. Les signes cliniques de la TVP disparaissent progressivement.

Quels sont les principaux effets indésirables ?

→ Mettre en garde la patiente des risques hémorragiques majeurs liés à la prise de Coumadine. La survenue de saignement est également un effet indésirable d’Arixtra. La patiente doit être attentive à la survenue d’épistaxis, hématurie, hématome, gingivorragie…

→ Des diarrhées peuvent être dues à Coumadine. Contacter le médecin.

Quels signes nécessiteraient d’appeler le médecin ?

Les signes d’hémorragies (héma­turie, pétéchies, sensation de malaise…) imposent une consultation médicale d’urgence et un contrôle de l’INR. Ils peuvent être le signe d’un surdosage en anticoagulant.

CONSEILS COMPLÉMENTAIRES

→ Ne pas pratiquer de sport intensif pendant environ un mois puis reprendre progressivement.

→ La prise d’AVK impose d’éviter les activités physiques à risque de blessure.

→ Eviter les modifications trop importantes de consommation d’aliments riches en vitamine ? K (laitue, épinards, choux, brocolis, foie …) et boire de l’alcool de façon modérée.

→ Utiliser le carnet de suivi remis par le médecin ou le pharmacien.

→ Signaler le traitement AVK lors d’une consultation médicale, dentaire ou pour une intervention chirurgicale.

→ Hydrater régulièrement la peau des jambes pour éviter l’effet desquamant des dispositifs de compression.

→ Laver les bas à la machine à 30°C, à l’envers. Ne pas utiliser d’assouplissant, séchage à plat loin d’une source de chaleur. Nettoyer régulièrement la bande adhésive avec du coton et de l’alcool.

Pathologie

La TVP en 5 questions

La thrombose veineuse profonde (TVP) correspond à l’oblitération du flux sanguin d’une veine profonde par un caillot sanguin (thrombus). C’est l’une des deux manifestations de la maladie thrombo-embolique veineuse (MTEV), l’autre étant la complication immédiate de la TVP : l’embolie pulmonaire.

QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?

→ La majorité des TVP (anciennement dénommées phlébites) siège au membre inférieur. L’examen comparatif des deux côtés est alors très contributif (asymétrie des signes). La douleur est variable, allant de la simple pesanteur à la douleur aiguë. Classiquement, elle est associée à un œdème dur et localisé, responsable d’une augmentation du diamètre du mollet. L’examen clinique peut retrouver également une augmentation de la chaleur cutanée, une dilatation du réseau veineux superficiel, et parfois un cordon veineux dur et douloureux. Tous ces signes sont inconstants. Sur le plan général, on retrouve souvent une hyperthermie modérée (38 °C).

→ En cas de TVP du membre supérieur, la douleur siège au bras ou à l’avant-bras.

→ La « phlébite bleue » associe TVP et ischémie aiguë du membre inférieur. C’est une urgence thérapeutique, le risque étant l’amputation du fait de l’ischémie.

QUELLES SONT LES ÉTIOLOGIES ?

→ Trois éléments induisent la formation d’une TVP (triade de Virchow) :

– La stase veineuse, elle-même favorisée par l’alitement ou l’immobilisation prolongés, l’insuffisance cardiaque décompensée, les compressions extrinsèques liées à la présence d’adénopathies ou d’un cancer thoraco-abdominal ou pelvien ;

– Les lésions de l’endothélium veineux sous l’effet de facteurs mécaniques (chirurgie, cathéter veineux central), biologiques ou infectieux ;

– L’activation des facteurs de la coagulation (hypercoagulabilité) favorisée par les traumatismes, l’accouchement, la chirurgie, les déficits acquis ou congénitaux en certains facteurs de la coagulation.

COMMENT EST PORTÉ LE DIAGNOSTIC ?

→ Le diagnostic de TVP est souvent difficile et il faut confronter les éléments cliniques à la présence éventuelle de situations à risque de thrombose pour parvenir à établir un diagnostic de présomption. Des examens complémentaires sont nécessaires à la confirmation du diagnostic.

→ L’enjeu étant d’éliminer une éventuelle embolie pulmonaire associée, différents algorithmes décisionnels combinant divers examens sont proposés.

→ Si l’on s’en tient au strict diagnostic de TVP, les repères sont les suivants. En cas de probabilité clinique de TVP faible ou intermédiaire au score de Wells, on réalise un dosage de D-dimères. Si la probabilité clinique est forte ou si les D-dimères sont supérieurs à 500 µg/l, l’échographie veineuse est indiquée. Sa positivité confirme le diagnostic. Si elle est normale, on répète l’examen quelques jours plus tard en cas de probabilité clinique forte de TVP.

→ Le dosage des D-dimères plasmatiques (produits de dégradation de la fibrine) par test ELISA est un examen très sensible et un résultat négatif plaide fortement en faveur de l’absence de TVP et d’embolie pulmonaire. Leur élévation en revanche n’est pas spécifique car de nombreux facteurs interviennent : âge, infection…

→ L’écho-Doppler veineux permet l’étude morphologique de la veine. En cas de TVP, la veine est incompressible. On peut décrire la structure du caillot, son caractère adhérent ou non à la paroi veineuse, ainsi que son extension et le degré d’obstruction de la veine.

→ La recherche de facteurs biologiques de risque de MTEV n’est pas systématique. De récentes recommandations précisent que cette recherche est justifiée en cas de premier épisode de TVP proximale ou d’embolie pulmonaire survenant avant 60 ans, uniquement lorsque la MTEV survient en dehors de circonstances déclenchantes majeures. Les explorations se limitent alors aux dosages d’antithrombine, de protéine C et S, à la recherche de mutations génétiques des facteurs II et V de la coagulation et au diagnostic du syndrome des antiphospholipides.

→ D’autres examens complémentaires dépendant du condiv peuvent être utiles au diagnostic étiologique (scintigraphie pulmonaire, échographie cardiaque…).

QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE ?

→ De nombreux facteurs de risque de TVP ont été identifiés. Dans 40 % des cas, il s’agit de facteurs de risque transitoires, permanents dans 20 %, et dans 30 à 40 % des cas, aucun facteur de risque n’est retrouvé : la thrombose est dite « idiopathique ».

→ L’âge est le premier des facteurs de risque.

→ Autres facteurs de risque majeurs :

– chirurgie, notamment chirurgie orthopédique de la hanche et du genou, chirurgie carcinologique et chirurgie pelvienne ;

– cancer évolutif (pancréas, lymphome, système nerveux central, poumon, estomac, ovaire). Le traitement chimiothérapique constitue en soi un facteur de risque ;

– fractures (membres inférieurs surtout) ;

– antécédents thrombo-emboliques personnels ;

– syndrome des anti-phospholipides ;

– insuffisance cardiaque ou respiratoire aiguë ;

– accident vasculaire cérébral avec déficit neurologique ;

– anomalies de la coagulation (déficit en antithrombine, en protéine S, mutation du facteur V de Leiden ou du facteur II…).

→ Facteurs de risque modérés :

– anomalies cardiovasculaires : insuffisance cardiaque ou respiratoire chroniques, thrombose veineuse superficielle, cathéter veineux central ;

– antécédents thromboemboliques familiaux ;

– grossesse et post-partum ;

– contraception œstroprogestative et traitement hormonal substitutif de la ménopause ;

– obésité ;

– voyages prolongés (vol au-delà de 6 h…).

→ D’autres facteurs de risque importants existent :

– alitement et immobilisation ;

– sepsis grave ;

– syndrome inflammatoire ;

– déshydratation.

QUELLES SONT LES COMPLICATIONS POSSIBLES ?

Sous traitement anticoagulant, le caillot se résorbe plus ou moins complètement. Il peut persister une occlusion partielle de la veine. En l’absence de traitement, la TVP peut évoluer vers une embolie pulmonaire.

L’embolie pulmonaire

C’est la principale complication de la TVP. Le caillot peut migrer vers l’artère pulmonaire en direction des poumons.

Trois présentations cliniques sont possibles : l’infarctus pulmonaire, la dyspnée isolée ou l’état de choc. Environ 30 % des TVP s’accompagnent d’une embolie pulmonaire asymptomatique. Inversement, on retrouve une TVP asymptomatique dans la majorité des embolies pulmonaires.

Le diagnostic est malaisé, les signes cliniques (douleur thoracique, expectorations sanglantes, toux, fièvre, dyspnée) étant variables et inconstants. Le pronostic dépend de la gravité de l’embolie pulmonaire (risque de défaillance cardiaque).

Les récidives

Elles sont plus fréquentes lorsque les facteurs de risque ne sont pas réversibles (thrombophilie, cancer…) ou en cas de thrombose idiopathique. L’observance et la durée du traitement anticoagulant interviennent également dans le risque de récidive.

Le syndrome post-thrombotique

Il survient dans les 2 ans après la TVP. Il se manifeste par un œdème local dur, permanent et douloureux, la présence de varices de suppléance, et par des troubles trophiques (dermite ocre, hypodermite, ulcère).

Thérapeutique

Comment traiter la TVP ?

Le traitement de la TVP repose sur les anticoagulants par voie parentérale puis orale, la compression et le lever précoce. De nouveaux anticoagulants oraux, commercialisés depuis peu, pourraient bien bouleverser les pratiques à l’avenir.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Traitement curatif

Afin de prévenir les embolies pulmonaires et l’insuffisance veineuse chronique, et de réduire le risque de récidive, un traitement par héparine non fractionnée (HNF), héparine de bas poids moléculaire (HBPM) ou fondaparinux est recommandé. Il peut être débuté dès la suspicion clinique de TVP s’il n’existe pas de risque hémorragique, en attendant la confirmation ou l’exclusion diagnostique. La compression élastique de classe III voire IV est recommandée pendant au moins 2 ans et doit être débutée le plus tôt possible. L’hospitalisation n’est pas systématique et une mobilisation précoce est conseillée dès que possible.

→ Un relais précoce par antivitaminesK (AVK) est recommandé. Les AVK agissant après 24 à 48 h, il est indispensable d’administrer des anticoagulants à effet immédiat (HNF, HBPM ou fondaparinux) en attendant leur action.

Ce relais peut être débuté dès le premier jour du traitement parentéral, et ce dernier arrêté au bout de 5 jours à condition que 2 INR consécutifs à 24 h d’intervalle soient supérieurs à 2. La mesure de l’INR permet d’adapter la posologie de l’AVK. Le traitement par héparine n’influe pas sur sa valeur.

Le traitement par AVK sera poursuivi durant 3, 6 ou 12 mois en fonction du condiv clinique de survenue de la maladie thromboembolique veineuse (MTEV) et du risque de récidive. Une éducation doit être donnée au patient et un carnet de suivi remis.

Prophylaxie

En milieu médical

L’instauration d’un traitement prophylactique est notamment recommandée chez le sujet âgé de plus de 40ans et hospitalisé pour une durée prévue supérieure à 3 jours en raison d’une décompensation cardiaque ou respiratoire aiguë, d’une infection sévère, d’une affection rhumatologique inflammatoire aiguë ou d’une affection inflammatoire intestinale associée à un facteur de risque de MTEV. Ce traitement peut être mené avec une HNF, une HBPM (seules énoxaparine et daltéparine ont l’AMM dans cette indication) ou par fondaparinux. HBPM et fondaparinux seront préférés en raison de leur facilité d’emploi et du moindre risque hémorragique et de thrombopénie induite. La prophylaxie peut être prolongée en cas de persistance du risque thrombotique. La dose d’HBPM utilisée en prophylaxie est inférieure à celle utilisée en curatif.

L’HNF conserve tout son intérêt en cas d’insuffisance rénale sévère avec clairance de la créatinine <20 ml/min ou pour les patients susceptibles de subir une intervention nécessitant l’arrêt temporaire du traitement. Enfin, une prophylaxie par contention veineuse de classe II est suggérée dans tous les cas pour la même durée.

En post-chirurgical

Les thromboses post-chirurgicales étant fréquentes, la prophylaxie est de règle. Pour ce faire, les antithrombotiques les plus utilisés sont les HBPM et toutes possèdent cette indication en cas de risque modéré à élevé. Le fondaparinux est indiqué en cas de chirurgie orthopédique majeure de la hanche ou du genou ou de chirurgie abdominale chez le sujet à haut risque. Enfin, le dabigatran (Pradaxa) et le rivaroxaban (Xarelto), deux nouveaux anticoagulants oraux, sont aussi indiqués en prévention des TVP dans un condiv de chirurgie programmée pour prothèse totale de hanche ou de genou.

LES TRAITEMENTS

Les traitements non médicamenteux ?

La compression veineuse est obtenue par le port de chaussettes (ou mi-bas ou bas-jarrets), de bas, de collants (en préventif 15 à 20 mmHg : classe II et en curatif 30 à 40 mmHg : classe III ou IV).

Cette méthode physique permet de réduire le risque de stase et donc de thrombose. Elle doit être mise en place dès le lever et retirée la nuit. Les mesures doivent être prises régulièrement afin d’adapter la contention à la régression des signes locaux.

Le choix du type de contention est fonction du siège de la thrombose : bas-jarret pour une thrombose surale, bas cuisse ou collant pour une thrombose proximale.

A défaut, des bandes de contention type Biflex peuvent être utilisées (sous réserve d’être correctement appliquées).

Les traitements médicamenteux

L’arsenal thérapeutique anticoagulant est composé à ce jour des héparine non fractionnées, des HBPM, du fondaparinux (Arixtra), des héparinoïdes de synthèse disponibles à l’hôpital (Orgaran), des antivitaminesK ainsi que des nouveaux anti­coagulants oraux (Xarelto et Pradaxa). Des antalgiques peuvent être prescrits si besoin.

Les héparines non fractionnées

L’héparine est habituellement extraite de la muqueuse intestinale de porc ou de poumon de bœuf. Les HNF actuellement commercialisées sont l’héparine sodique (Héparine Choay) administrée par voie IV (seringue électrique, plutôt à l’hôpital) et l’héparine calcique (Calciparine) administrée par voie sous-cutanée dont l’avantage est de pouvoir être utilisée chez l’insuffisant rénal, contrairement aux HBPM.

→ Surveillance

– La surveillance biologique de l’efficacité du traitement lors d’un traitement curatif par HNF est au minimum quotidienne. On peut utiliser le temps de céphaline activé (TCA) qui doit se situer entre 1,5 et 3 fois le témoin, ou l’activité anti-Xa (encore appelée héparinémie) qui devra se situer entre 0,2 et 0,6 UI/ml.

– Une numération plaquettaire est nécessaire pour éliminer le risque de thrombopénie induite par l’héparine.

Lors d’un traitement préventif, la surveillance du TCA et/ou de l’activité anti-Xa ne sont pas indispensables mais la surveillance de la numération plaquettaire reste nécessaire.

→ Effets indésirables

Les effets indésirables des HNF les plus fréquents sont :

– Des accidents hémorragiques qui s’observent généralement chez le sujet âgé, en cas d’insuffisance rénale, de poids inférieur à 40 kg, de traitement prolongé au-delà de la durée moyenne préconisée de 10 jours, de non-respect des modalités thérapeutiques conseillées ou d’association à des médicaments majorant le risque hémorragique.

– Des thrombopénies. Elles sont soit de type I, les plus fréquentes, généralement modérées (> 100 000/mm3), précoces (avant le 5e jour) et ne nécessitant pas d’arrêt de traitement, soit de type II, plus rares et plus graves, correspondant à un phénomène immunoallergique. Ces dernières, appelées thrombopénies induites par l’héparine (TIH) doivent être suspectées devant un nombre de plaquettes < 100 000/mm3 et/ou une chute relative des plaquettes de 30 à 50 % sur deux numérations successives. Elles apparaissent essentiellement entre le 5e et le 21e jour, avec un pic de fréquence aux environs du 10e jour et entraînent un risque de thrombose liée à l’agrégation des plaquettes. En raison du risque de TIH, une surveillance de la numération plaquettaire est nécessaire, quelles que soient l’indication du traitement et la posologie administrée d’HNF.

La numération sera pratiquée avant traitement ou au plus tard dans les 24 heures après l’instauration, puis deux fois par semaine pendant 21 jours puis 1 fois par semaine.

– La survenue d’hématomes au point d’injection. Ils sont majorés par le non-respect de la technique d’injection ou l’utilisation d’un matériel inadéquat. Des nodules fermes disparaissant en quelques jours traduisent un processus inflammatoire et ne sont pas un motif d’arrêt du traitement.

– Des hyperkaliémies. Ce risque étant majoré en cas d’association avec tout médicament hyperkaliémiant.

Les héparines de bas poids moléculaire

Les HBPM (PM = 5 000 Da) sont obtenues à partir de l’héparine (PM= 30 000 Da) par chromatographie gel filtration ou par précipitation différentielle à l’éthanol. Les HBPM commercialisées à ce jour sont : daltéparine sodique (Fragmine), nadroparine calcique (Fraxiparine, Fraxodi), enoxaparine sodique (Lovenox) et tinzaparine sodique (Innohep Traitement préventif et Innohep Traitement curatif).

Le choix d’une HBPM est privilégié pour sa simplicité d’emploi, son utilisation possible à domicile et son faible coût. Leur utilisation dans la TVP ne doit pas excéder 10 jours (équilibration AVK) sauf en cas de persistance du risque de MTEV. Dans un condiv néoplasique, il est recommandé de poursuivre le traitement à dose curative durant 3 à 6 mois (hors AMM).

→ Posologie

La posologie est fonction du type de traitement, curatif ou préventif, et du poids du patient pour les traitements curatifs. Les traitements préventifs s’administrent 1 fois par jour. Les traitements curatifs, sauf Fraxodi et Innohep, s’administrent le matin et le soir à 12 heures d’intervalle.

→ Surveillance

– Avant d’instaurer un traitement par HBPM, il est nécessaire d’évaluer la fonction rénale en calculant la clairance de la créatinine. Toutes les HBPM sont éliminées par le rein et sont contre-indiquées en cas d’IR sévère. Une HNF peut alors être utilisée.

– La mesure de l’activité anti-Xa n’est recommandée que dans certaines situations (insuffisance rénale, petits poids corporels, âge élevé…).

– Compte tenu de la rareté de l’incidence des TIH sous HBPM, la surveillance plaquettaire systématique évoquée dans l’AMM n’est plus jugée indispensable aujourd’hui (Recommandation Afssaps décembre 2009). Seule une numération plaquettaire avant traitement ou au plus tard dans les 24 heures après instauration du traitement est nécessaire.

→ Effets indésirables

Le profil de tolérance est superposable à celui des HNF, cependant le risque hémorragique est plus faible.

Une grille d’aide à la délivrance des HBPM est disponible sur le site Internet WKpharma (www.WK-pharma.fr).

Fondaparinux

L’activité antithrombotique du fondaparinux (Arixtra) est le résultat de l’inhibition sélective du facteur Xa par l’antithrombine III.

Arixtra est un médicament proche des HBPM en termes d’indications, de profil de tolérance et d’interactions médicamenteuses. Il existe une tendance assez nette à le prescrire s’il existe un doute d’antécédent de TIH. Il est utilisé par voie sous-cutanée profonde en une seule injection quotidienne. La durée de traitement en prophylaxie est de 6 à 14 jours, et la posologie est réduite en cas d’insuffisance rénale avec une clairance à la créatinine comprise entre 30 et 50 ml/min. En curatif, la posologie sera fonction du poids du patient, pour une durée de 5 jours.

→ Surveillance

– Avant d’instaurer un traitement, il est indispensable d’évaluer la fonction rénale en calculant la clairance de la créatinine.

– La surveillance plaquettaire n’est pas nécessaire (pas de risque de TIH).

→ Effets indésirables

Comme pour tout anticoagulant, l’effet indésirable majeur réside dans le risque hémorragique.

Les antivitamines K

Deux familles chimiques composent cette classe : les dérivés coumariniques, warfarine (Coumadine) et acénocoumarol (Sintrom et Mini-sintrom) et les dérivés de l’indanedione avec la fluindione (Préviscan). Les AVK à demi-vie longue sont préférés (Préviscan ou Coumadine), en dépit d’un équilibre plus long à obtenir, on observe une meilleure stabilité en une prise par jour. Les AVK s’utilisent en relais de l’héparine ou du fondaparinux.

Lorsqu’une intervention chirurgicale lourde est programmée, un relais par héparine doit être instauré.

Une contraception est souhaitable chez les femmes en âge de procréer.

→ Posologie

La posologie d’initiation est de 5 mg pour la warfarine, 20 mg pour la fluindione et 4 mg pour l’acénocoumarol. La prise se fait de préférence le soir pour pouvoir ajuster la posologie en fonction de l’INR réalisé le matin. Sintrom peut être administré en 2 prises par jour.

→ Surveillance

Le TP (Taux de Prothrombine) permet d’explorer les facteurs II, VII et X qui sont déprimés par les antivitamines K. L’INR ou International Normalized Ratio est un mode d’expression du taux de prothrombine. Il réduit les causes de variabilité interlaboratoires et permet un meilleur suivi thérapeutique. L’INR d’un sujet normal est de 1.

Dans la majorité des situations, un INR compris entre 2 et 3 avec une valeur cible de 2,5 est recherché. Pour certaines indications (valvulopathies mitrales et prothèses valvulaires), il peut être plus élevé : 3,7 (INR 3 à 4,5). Dans les autres situations, un INR inférieur à 2 reflète une anticoagulation insuffisante, un INR supérieur à 3 traduit un excès d’anticoagulation et dans tous les cas, un INR supérieur à 5 est associé à un risque hémorragique.

Le premier contrôle doit s’effectuer dans les 48 heures ± 12 h après la première prise d’antivitamine K, pour dépister une hypersensibilité individuelle : un INR supérieur à 2 annonce un surdosage à l’équilibre et doit faire réduire la posologie. Le deuxième contrôle s’effectue en fonction des résultats du précédent pour apprécier l’efficacité anticoagulante. Les contrôles ultérieurs doivent être pratiqués tous les 2 à 4 jours jusqu’à stabilisation de l’INR, puis avec un espacement progressif (2/semaine puis 1/semaine pendant 3 semaines) jusqu’à un intervalle maximal de 1 mois. L’équilibre du traitement n’est parfois obtenu qu’après plusieurs semaines. Le traitement parentéral peut être arrêté lorsque 2 INR consécutifs sont entre 2 et 3.

→ Effets indésirables

– Les accidents hémorragiques sont en tête des effets indésirables des AVK en termes de fréquence et de gravité. Ils surviennent essentiellement en cas de traumatisme, de saignement d’une lésion méconnue (ulcère) ou de surdosage. Les manifestations les plus fréquentes sont l’hémoptysie, l’hématémèse ou les hématomes du psoas.

– Les effets immunoallergiques non dose-dépendants sont des complications plus rares.

– Des diarrhées peuvent également survenir.

→ Interactions

Les médicaments susceptibles d’interagir avec les AVK sont très nombreux. Si un autre traitement doit être débuté, modifié ou supprimé, il est nécessaire d’effectuer un contrôle de l’INR 2 à 4 jours après chaque modification, puis jusqu’à stabilisation tous les 4 à 8 jours, voire de renforcer la surveillance de l’INR (antibiotiques…).

Une grille d’aide à la délivrance des AVK est disponible sur le site Internet WKpharma (www.WK-pharma.fr).

Les nouveaux antithrombotiques oraux

Le dabigatran étexilate (Pradaxa) agit comme inhibiteur direct puissant, compétitif et réversible de la thrombine. Le rivaroxaban (Xarelto) est un inhibiteur direct hautement sélectif du facteur Xa.

Leur indication est pour l’instant limitée à la prévention des événements thromboemboliques veineux chez les patients adultes ayant bénéficié d’une chirurgie programmée pour prothèse totale de hanche ou de genou. Ce ne sont pas des médicaments à marge thérapeutique étroite comme les AVK. Aucune surveillance n’est à réaliser. La prudence est de mise en cas d’insuffisance rénale même s’il existe des nuances entre les 2 médicaments.

→ Effets indésirables

– L’utilisation de ces produits peut être associée à un risque accru de saignement, ce qui peut entraîner une anémie.

– Ils peuvent entraîner une élévation des gamma GT et des transaminases.

LES PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES

Des études ont montré que le traitement des TVP par Pradaxa ou Xarelto se révèle au moins aussi efficace que le traitement standard par HBPM + AVK. Le rivaroxaban a présenté le même risque de saignements alors que le dabigatran a diminué ce risque. Ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives dans la prise en charge des TVP. Il reste nécessaire de vérifier la sécurité et surtout de s’assurer de l’observance de ces traitements dont on ne peut surveiller l’efficacité. Des études sur leur efficacité en prévention des AVC sont en cours.

Accompagner le patient

LA TVP VUE PAR LES PATIENTS

Impact psychologique

La contrainte de prendre des anticoagulants hautement iatrogènes avec une surveillance régulière de l’INR et le port des bas de compression sont mal acceptés.

Impact sur le quotidien

→ Il est impératif d’arrêter le tabac.

→ L’alimentation peut parfois avoir un impact : les aliments riches en vitamine K (choux, laitue, foie…) ne doivent pas être consommés avec excès. Ne pas faire de jeûne ou de régime pour ne pas perturber l’INR.

→ Chez une jeune femme, le port des bas de compression n’est pas facile. La patiente aura tendance à ne porter que des pantalons.

→ La pratique sportive est réduite dans le premier mois suivant le diagnostic. Puis, le patient sous anticoagulants doit éviter les sports demandant des pics de tension musculaire (musculation, tennis…) et ceux à forts risques de blessures ou coupures (sports de combat…).

→ Les activités type bricolage… doivent être réalisées avec prudence.

→ Le rasage à la lame est à éviter. Privilégier le rasoir électrique.

Impact sur la vie sexuelle

→ L’arrêt de la pilule contraceptive œstroprogestative implique de déterminer une autre méthode de contraception compatible avec la maladie.

A DIRE AUX PATIENTS

A propos de la maladie

→ La TVP peut se compliquer ou récidiver à tout moment : il est donc essentiel d’être observant vis-à-vis du traitement. Après arrêt du traitement, une contention veineuse reste nécessaire en cas de situation à risque : long trajet, alitement, grossesse…

→ Certaines mesures d’hygiène de vie facilitent le retour veineux : éviter les sources de chaleur sur les jambes (chauffage par le sol, sauna, bottes…), éviter la station debout prolongée, ne pas croiser les jambes, ne pas porter des vêtements ou chaussettes trop serrées, porter des petits talons (idéalement 4/5 cm), ne jamais marcher à plat, lutter contre le surpoids, la sédentarité et la constipation, privilégier les douches froides et dormir avec les pieds surélevés.

→ En cas de travail en station debout prolongée, prévoir des pauses au cours desquelles on effectue des rotations de cheville, essayer de s’asseoir ou de s’appuyer sur un siège haut et porter régulièrement une compression veineuse. Pour les personnes assises à leur travail, se lever régulièrement au cours de la journée pour déambuler quelques minutes.

→ Il est important de signaler cet épisode de TVP lors des consultations médicales suivantes, sans limite de temps, afin que les professionnels de santé puissent juger de l’utilité d’une prophylaxie selon le condiv.

A propos du traitement médicamenteux

→ Un traitement par AVK présente un risque hémorragique important (première cause iatrogénique d’hospitalisation). Contacter un médecin en urgence en cas d’hémorragie. Les premiers signes de surdosage par ordre croissant d’urgence de prise en charge sont gingivorragies, hémorragies conjonctivales, épistaxis, ecchymoses, ménorragies, rectorragies, hémoptysie, hématurie et douleurs abdominales. Avoir des pansements hémostatiques et de l’eau oxygénée à 10 volumes pour résorber les saignements bénins.

– Demander au patient quand a eu lieu sa dernière surveillance biologique et quand est la prochaine. Rapprocher la surveillance de l’INR si introduction ou arrêt d’un médicament.

– Réaliser des INR au moins une fois par mois lorsque le traitement est équilibré et les noter dans le carnet de suivi (commande gratuite par le pharmacien sur le site Internet du Cespharm www.cespharm.fr).

– En cas d’oubli de moins de 8 h, la prise d’AVK peut être rattrapée. Au-delà, l’oubli doit être signalé au médecin et noté dans le carnet. Ne jamais doubler la dose.

– En cas de traitement par AVK, ne pas pratiquer d’injections intramusculaires (hématomes).

– Signaler le traitement a tous les professionnels de santé et porter sur soi une carte signalant le traitement.

→ Concernant l’administration d’HBPM par voie sous-cutanée, le patient doit : se laver les mains, désinfecter le site avec de l’alcool modifié, s’asseoir les jambes allongées ou s’allonger sur un lit, ne pas purger l’air de la seringue et alterner les sites d’injection côté droit et gauche de la ceinture abdominale antérolatérale et postlatérale. L’aiguille doit être introduite perpendiculairement et non tangentiellement, dans l’épaisseur d’un pli cutané formé entre le pouce et l’index. Le pli doit être maintenu durant toute la durée de l’injection. Ne pas masser la zone après l’injection.

A propos du traitement non médicamenteux

→ La contention permet une mobilisation précoce dès son port.

→ Enfiler la contention le matin avant de se lever, ou après la douche mais en s’allongeant au moins 30 minutes avant. Pour les enfiler plus facilement : passer la main à l’intérieur, pincer le tissu juste en dessous du talon, retourner le bas jusqu’à ce point, introduire le pied puis enfiler jusqu’au talon. Une fois bien positionnée, dérouler jusqu’à la cheville puis le long de la jambe sans tirer en s’assurant de l’absence de plis et libérer les orteils en tirant sur la pointe.

→ Ne pas les enfiler avec des bagues ou des ongles mal limés. Si besoin, mettre des gants pour assurer une meilleure prise. Un enfile-bas permet de réaliser cette opération en cas de difficulté. Une colle spéciale peut être utilisée pour fixer les bas. Superposer un bas de classeI et un de classe II permet d’obtenir une classe III.

→ Les laver quotidiennement de préférence en machine à 30°C. Dégraisser la bande autofixante avec un coton et de l’alcool pour une meilleure adhérence. Séchage à plat loin d’une source de chaleur.

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

Ordonnance 1 : OUI. A des doses antiagrégantes (50 à 375 mg/j), l’association Kardegic/Previscan est toutefois à prendre en compte. Le risque hémorragique est augmenté et il faut mettre en place une surveillance renforcée de l’INR. Vérifier que le patient a une surveillance de l’INR adéquate.

Ordonnance 2 : NON. L’association Sintrom/Daktarin est contre-indiquée car elle peut entraîner des hémorragies imprévisibles éventuellement graves. Cette prescription nécessite d’appeler le médecin.

Par ailleurs, l’association Sintrom/Zithromax (comme avec tous les antibiotiques) est à prendre en compte. Il y a augmentation de l’effet anticoagulant et augmentation du risque hémorragique : il faudra réaliser des contrôles plus fréquents de l’INR afin d’adapter la posologie de l’AVK si nécessaire.

Mémo délivrance

Sous héparine non fractionnée (HNF)

→ Injection par voie SC (Calciparine) ou IV par seringue électrique (Héparine Choay) en 2 ou 3 injections/jour, selon produits.

→ Surveillance de la numération plaquettaire.

→ En curatif : surveillance du TCA ou de l’activité anti Xa.

Sous héparines de bas poids moléculaires (HBPM)

→ Injection par voie SC 1 fois/jour en prévention et 1 à 2 fois/jour en curatif selon les produits.

→ Avant traitement : mesure de la clairance de la créatinine (contre-indiqué si < 30 ml/min) et numération plaquettaire.

Sous fondaparinux (Arixtra)

→ Injection par voie SC profonde, 1 fois / jour.

→ Mesure de la clairance de la créatinine avant traitement pour adaptation des doses (CI si < 30 ml/min).

Mode d’administration

→ Se laver les mains avant de procéder à l’injection et désinfecter le site avec de l’alcool modifié. S’asseoir sur un lit les jambes allongées ou s’allonger.

→ Ne pas purger l’air de la seringue. L’aiguille doit être introduite perpendiculairement et non tangentiellement, dans l’épaisseur d’un pli cutané entre le pouce et l’index de l’opérateur. Le pli doit être maintenu durant toute la durée de l’injection.

Ne pas masser la zone après injection.

→ Alterner les sites d’injection côté droit et gauche de la ceinture abdominale antérolatérale et postlatérale.

Sous AVK

→ Par voie orale en 1 prise le soir (rarement 2 fois par jour).

→ Premier contrôle INR dans les 48 h +/– 12 h après la première prise puis tous les 2 à 4 jours jusqu’à stabilisation de l’INR puis espacement progressif.

→ A chaque délivrance, demander quand a été réalisé le dernier INR.

→ Après équilibration, surveillance de l’INR au moins tous les mois, plus rapprochée en cas d’introduction d’un médicament avec interactions ou modification de posologie : 2 à 4 j après changement et répété jusqu’à stabilisation tous les 4 à 8 j.

→ INR entre 2 et 3 dans le traitement de la TVP.

→ Vérifier la possession d’un carnet de suivi par le patient.

Relais héparine/fondaparinux – AVK

Prendre l’AVK dès le 1er jour de traitement parentéral et arrêt du traitement parentéral au bout de 5 jours à condition que deux INR consécutifs à 24 h d’intervalle soient supérieurs à 2.

Sous Pradaxa ou Xarelto

→ Par voie orale 1 fois/ jour.

→ Indication encore limitée.

→ Aucune surveillance.

Sous compression veineuse

→ Associé à tous traitements curatifs ou prophylactiques

→ En préventif : classe II et en curatif : classe III voire IV.

Le cas

Mélanie B. arrive à l’officine vers 18 heures. Elle revient de chez le médecin. Active et sportive, elle est cliente régulière de la pharmacie et vient habituellement chercher sa pilule Trinordiol tous les 3 mois.

Plan de prise conseillé

→ Arixtra : injecter en sous-cutanée profonde dans un pli cutané réalisé entre le pouce et l’index au niveau de la ceinture abdominale antérolatérale et postlatérale. Respecter l’horaire d’injection.

→ Coumadine : avaler le comprimé le soir avec un verre d’eau.

→ Bas de compression : les mettre en place le matin avant le lever. Les enlever la nuit.

LES CHIFFRES

→ Données françaises imprécises car le diagnostic est difficile et de nombreux épisodes de TVP passent inaperçus.

→ 300 000 nouveaux cas estimés de TVP des membres inférieurs par an (5 pour 1 000 habitants).

→ 60 000 nouveaux cas estimés d’embolies pulmonaires par an (1 pour 1 000 habitants).

→ Incidence des MTEV augmentant avec l’âge : 0,01 % chez l’adulte jeune contre plus de 1 % au-delà de 60 ans.

SCORE DE WELLS

Score associant éléments cliniques et présence de facteurs de risque permettant de calculer la probabilité de TVP.

PELVIS

Zone anatomique comprenant la vessie, le rectum, les organes génitaux.

Physiopathologie de la TVP

→ La plupart des thromboses naissent dans les membres inférieurs et le pelvis. Le thrombus se forme dans les veines profondes qui aboutissent soit à la veine cave inférieure, soit à la veine cave supérieure. La formation du thrombus débute à l’intérieur de la lumière vasculaire dans un « nid » valvulaire entre la valvule et la paroi de la veine.

→ La formation du caillot sanguin correspond à la transformation du fibrinogène soluble contenu dans le plasma en fibrine insoluble, emprisonnant dans ses filaments les cellules circulantes (phénomène de coagulation). Cette transformation résulte d’une cascade de réactions enzymatiques nécessitant la présence de facteurs de coagulation numérotés de I à XIII. A ce stade, le thrombus est asymptomatique. Lorsque les capacités de lyse physiologique du patient sont dépassées, le caillot s’étend en amont et en aval : il n’adhère pas à la paroi, d’où le risque de migration et d’embolie pulmonaire.

→ En une semaine environ, il devient adhérent à la paroi, obstruant complètement la lumière vasculaire. Le risque d’embolie pulmonaire diminue, mais le problème est alors l’obstruction du vaisseau.

Les principaux diagnostics différentiels :

→ hématome intramusculaire,

→ claquage musculaire,

→ érysipèle,

→ lymphangite,

→ lymphœdème,

→ maladie post-phlébitique,

→ compression extrinsèque (adénopathies, tumeur, utérus gravide),

→ sciatique tronquée,

→ rupture de kyste poplité…

SYNDROME DES ANTIPHOSPHOLIPIDES

Dû à des anticorps dirigés contre plusieurs types de protéines associées à des phospholipides. Chez les patients porteurs de ce type d’anticorps, la coagulation est perturbée. Fréquent en cas de lupus érythémateux disséminé.

ERYSIPÈLE

Infection cutanée aiguë d’origine streptococcique, se manifestant par une inflammation des téguments associée à des signes généraux.

FILTRE CAVE

Appareil qui entrave la migration proximale des thrombus persistant dans les veines des membres inférieurs.

Ce qui a changé

Disparu

→ La surveillance plaquettaire n’est plus systématiquement recommandée sous HBPM depuis 2009.

→ La reviparine (Clivarine) n’est plus commercialisée.

Nouveau

→ Mise sur le marché de deux nouveaux antithrombotiques oraux : Pradaxa (décembre 2008) et Xarelto (mai 2009).

→ Nouvelle forme quadrisécable snap-tab de Previscan : le comprimé se coupe facilement en quatre d’une seule pression du pouce au centre.

THROMBOSE SURALE

Thrombose concernant les veines tibiales antérieures, postérieures et péronières et les veines musculaires, telles que les veines jumelles ou soléaires.

THROMBOSE PROXIMALE

Thrombose concernant les veines poplitées et suprapoplitées.

Vigilance

→ Certaines contre-indications aux traitements de la TVP doivent être connues du pharmacien :

– Contention veineuse : artériopathie des membres inférieurs, neuropathies et troubles de la sensibilité périphérique.

– HNF et HBPM : antécédents de TIH de type II, lésion organique susceptible de saigner.

– HBPM : insuffisance rénale (IR) avec clairance de la créatinine < 30 ml/min.

– Fondaparinux : saignements évolutifs, IR avec clairance de la créatinine < 30 ml/min.

– AVK : insuffisance hépatique sévère.

– Pradaxa : lésion organique susceptible de saigner, IR avec clairance de la créatinine < 30 ml/min et insuffisance hépatique ou maladie du foie.

– Xarelto : atteinte hépatique, grossesse et allaitement.

→ En cas de TVP survenant pendant la grossesse, une HBPM ou une héparine non fractionnée sont à prescrire compte tenu du risque de malformation associé aux AVK.

→ Pendant l’allaitement, seul Previscan est contre-indiqué.

HÉMOPTYSIE

Expectoration de sang provenant des voies aériennes.

HÉMATÉMÈSE

Rejet de sang généralement rouge par la bouche au cours d’un effort de vomissement qui traduit une hémorragie digestive haute.

PSOAS

Muscle fléchisseur de la cuisse sur le tronc.

Point de vue

« Xarelto et Pradaxa pourraient remplacer à terme les AVK »

Les médicaments type Xarelto ou Pradaxa vont-ils remplacer à terme les AVK ?

Oui, je pense, s’il n’y a pas de mauvaise surprise en termes d’effets indésirables ou de toxicité. Ce sont des médicaments récents et aujourd’hui nous n’avons pas le recul nécessaire.

Ces molécules conservent un risque hémorragique. Cependant, ce sont des produits au moins aussi efficaces que les AVK et plus faciles à manier dans la vie quotidienne (absence de suivi biologique, marge thérapeutique large…).

Quel est le rôle des Cliniques des anticoagulants (CAC) ?

Ces cliniques participent à la surveillance du traitement par AVK de certains patients sortant d’une hospitalisation ou sous la demande de leur médecin traitant. Aidée d’un logiciel, la CAC analyse les résultats d’INR envoyés par les laboratoires d’analyses médicales, et détermine la posologie de l’AVK et la date du prochain contrôle biologique en fonction des caractéristiques du patient.

Le médecin traitant reste responsable du patient et ces informations lui sont communiquées.

Des séances collectives d’éducation des patients avec distribution de documents sont réalisées régulièrement par des infirmières. De plus, une permanence téléphonique répond aux questions des patients comme des professionnels de santé (pharmaciens…) même le week-end.

Pr JEAN-FRANÇOIS BERGMANN

Professeur de thérapeutique à l’université Paris VII

Chef de service en médecine interne à l’hôpital Lariboisière à Paris

Témoignage

JULIE, 26 ANS, CUISINIÈRE ET SERVEUSE

« Un matin, je me suis réveillée en ayant mal au mollet. Le lendemain, je ne pouvais plus poser le pied par terre. On a d’abord pensé à une douleur musculaire ou articulaire. Il a fallu 2 semaines avant que je passe un Doppler en urgence et que l’on diagnostique une phlébite. Le médecin spécialiste m’a fait une piqûre tout de suite et m’a prescrit des anticoagulants et des bas de contention. A ce moment-là, je fumais et je prenais la pilule. J’ai été obligée d’arrêter et de me faire poser un stérilet. J’ai été redirigée vers un généraliste, mais qui n’a pas prescrit de contrôle de l’INR. Quelques semaines plus tard un contrôle en urgence a montré que j’avais un INR à 6 ! Heureusement je n’ai pas eu d’hémorragies. Je n’ai pas pu marcher correctement pendant un mois et je garde quelques séquelles comme des absences de sensation au niveau de la jambe et du pied. Les bas de contention m’ont aidée mais ils sont difficiles à enfiler et me gênent parfois au bout du pied. »

Question de patients « ? Est-ce que je peux prendre l’avion ? »

Pendant le traitement par anticoagulant, le patient est protégé. Après l’arrêt du traitement, les avis sont partagés. Certains estiment qu’il faut réaliser une injection d’HBPM ou d’Arixtra 1 heure avant le décollage (aller et retour), d’autres non. Dans tous les cas, le patient doit porter une compression veineuse de classe II ou III durant le vol, réaliser des mouvements de flexion et d’extension des pieds toutes les 30 min, porter des vêtements amples, marcher à intervalle régulier dans la cabine et boire abondamment.

Question de patients « J’ai entendu parler de dispositifs d’autosurveillance de l’INR, qu’en est-il ? »

Il en existe deux marques : Coaguchek et INRatio. Ils permettent une meilleure autonomie des patients (voyage…) et de vérifier régulièrement l’INR lorsque certains facteurs perturbatants interviennent (médicaments, alimentation, stress…). Leur utilisation, sous réserve d’une éducation adaptée, diminuerait le risque de complications. Ils ne font l’objet d’un remboursement que chez l’enfant de moins de 18 ans.

En savoir plus

AVK control’ www.avkcontrol.com/

Site Internet d’une association de patients qui publie de nombreuses informations sur les traitements, des recommandations et des témoignages. Une rubrique questions-réponses animée par la Clinique des anticoagulants d’Ile-de-France est enrichie régulièrement.

Afssaps : Dossier AVK www.afssaps.fr

Ce dossier contient des informations destinées aux patients et aux professionnels de santé. Un premier chapitre fait un état des lieux de la prévention de l’iatrogénie due aux AVK. De nombreuses informations et outils d’éducation sont mis à disposition des internautes (carnet, affiches, questions/réponses…).

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