La dépendance à l'alcool - Le Moniteur des Pharmacies n° 2773 du 28/03/2009 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2773 du 28/03/2009
 

Cahiers Formation du Moniteur

Ordonnance

une prescription à la loupe

Une patiente débutant une cure de sevrage

Ce que vous savez de la patiente

- Claudine P., la soixantaine, ne passe pas souvent à l'officine mais l'équipe a néanmoins repéré qu'elle souffre d'une dépendance à l'alcool. Il est arrivé que cette patiente demande un flacon d'alcool à 90°, pour lequel on peut suspecter un usage détourné.

- Aujourd'hui, Hélène, la soeur de Mme P., se présente à l'officine avec une ordonnance.

- Hélène fait immédiatement part de son soulagement : elle a convaincu sa soeur, avec l'aide du médecin généraliste, de démarrer une nouvelle cure de sevrage alcoolique.

Ce que le médecin lui a dit

- L'objectif du traitement est d'éviter l'apparition d'un syndrome de sevrage après l'arrêt brutal de la consommation d'alcool. L'alcoologue revoit Mme P. aux troisième et sixième jours du sevrage. Une infirmière doit passer tous les matins lui faire des piqûres.

- Le médecin lui a donné le nom d'une infirmière faisant partie d'un réseau de prise en charge des patients alcoolodépendants. Elle s'assurera que la patiente prend correctement le traitement prescrit.

La demande spontanée de la soeur de la patiente

- « Ma soeur m'a demandé de surtout bien lui ramener ses piqûres chauffantes qui l'avaient beaucoup aidée lors du premier sevrage. Elle souhaite également un médicament pour soulager des reflux gastriques qui l'indisposent. »

- Hélène précise qu'elle va faire des courses et qu'elle repassera le lendemain matin chercher l'ordonnance.

Détection des interactions

Il n'y a pas d'interaction significative sur cette ordonnance.

Analyse des posologies

Toutes les posologies de l'ordonnance sont correctes.

Avis pharmaceutique

Objectifs thérapeutiques

- L'ordonnance présentée a pour objectif principal d'assurer un sevrage alcoolique en ambulatoire sous l'action conjointe de plusieurs professionnels de santé : le médecin alcoologue référent, le médecin généraliste, l'infirmière et le pharmacien.

- Certains médicaments prescrits sont d'une utilité évidente, d'autres laissent le pharmacien perplexe quant à leur rôle dans ce condiv.

Etant donné qu'Hélène ne repassera chercher les médicaments de sa soeur que le lendemain, le pharmacien en profite pour effectuer une rapide recherche documentaire sur Internet dans le but d'éclaircir certains points. Il tombe rapidement sur la conférence de consensus de 1999, disponible sur le site de la Haute Autorité de santé.

Choix du prescripteur

- Le diazépam (Valium) est une benzodiazépine prescrite pour atténuer les signes du syndrome de sevrage (anxiété, irritabilité, nervosité...) et pour réduire le risque et la sévérité des convulsions. Une de ses particularités est sa longue demi-vie qui est un avantage dans la prévention des crises convulsives. Le rapport de la conférence de consensus recommande une durée de traitement à dose dégressive ne dépassant pas 7 jours, ce qui est bien le cas ici.

- La vitamine B1 ou thiamine (Bénerva) est souvent associée dans les sevrages ou lors du maintien de l'abstinence à l'alcool. Le sevrage peut en effet décompenser une carence en thiamine se manifestant par des troubles graves neurologiques ou cardiaques. Il est nécessaire d'en administrer à titre préventif 500 mg par jour per os en début de sevrage.

- La prescription d'acamprosate (Aotal) ne pose pas de problème au pharmacien. Le médicament est utile dans le maintien de l'abstinence.

- L'indication du Spasmag par voie parentérale est en revanche plus énigmatique.

- Enfin, le Gaviscon va permettre de soulager la patiente des remontées acides de l'estomac. Le logiciel informatique de la pharmacie attire l'attention du pharmacien sur le fait qu'en cas de substitution générique, tous les médicaments génériques de Gaviscon en solution buvable contiennent dans leurs excipients de l'alcool.

Intervention pharmaceutique

Le pharmacien décide de contacter le médecin alcoologue pour savoir ce que la patiente entend par « piqûre chauffante ».

- Joint au téléphone, le médecin explique qu'il s'agit d'une ancienne technique consistant en l'injection intraveineuse de magnésium hypertonique. L'efficacité de cette méthode dans le sevrage alcoolique n'a jamais été prouvée. Elle constitue surtout un accompagnement symbolique : les patients décrivent une impression de relaxation avec sensation de chaleur. Mme P. l'a ainsi réclamée au médecin alcoologue et ce dernier n'a pas vu d'inconvénients à sa prescription.

- Le pharmacien en profite pour signaler au prescripteur qu'il est préférable, dans ce cas précis, d'indiquer la mention « non substituable » au niveau du Gaviscon car les génériques de ce médicament contiennent de l'alcool (même si la dose est minime).

- Le médecin alcoologue propose au pharmacien de participer à une prochaine réunion de formation organisée par son réseau spécialisé dans le sevrage des patients alcooliques. La pluridisciplinarité est essentielle dans la prise en charge et le suivi de tels patients.

Suivi du traitement

- La durée d'un sevrage alcoolique est brève. Les benzodiazépines sont prescrites pour une durée maximale de 10 jours selon l'AMM (ici 7 jours). Ensuite, madame P. entrera dans le processus de maintien de l'abstinence à l'aide du médicament Aotal et surtout grâce à un accompagnement psychosocial (psychothérapie, rôle important de l'entourage, associations d'anciens buveurs...). L'acamprosate peut être débuté dès le premier jour du sevrage.

- Le sevrage de madame P. sera surveillé d'une part par l'infirmière qui va passer tous les matins à son domicile et, d'autre part grâce aux deux consultations prévues chez l'alcoologue.

L'alcoologue pourra alors évaluer l'état de santé de sa patiente en surveillant certains paramètres cliniques (tels que pression artérielle, rythme cardiaque, hydratation, fièvre...) ainsi que son état psychologique.

- Entre-temps, la patiente peut également joindre à tout moment son médecin traitant informé du démarrage du protocole de sevrage.

Effets indésirables

- Benzodiazépines : somnolence excessive si surdosage. Risque de dépendance si traitement prolongé.

- Acamprosate : troubles digestifs transitoires (notamment diarrhée) et signes cutanés.

Interactions médicamenteuses

Il s'agit de détecter notamment les interactions avec les médicaments contenant de l'alcool. Certains logiciels permettent de prévenir le pharmacien en cas de présence d'éthanol dans les excipients d'un médicament par voie orale (cas des médicaments génériques de Gaviscon).

Conseils à la patiente ou à son entourage

Pendant la phase de sevrage

- Faire noter par la patiente ou par son entourage les difficultés rencontrées : agitation, comportement anormal, sueurs, tachycardie, tremblements... Selon leur importance, contacter immédiatement le médecin ou les lui signaler lors de la prochaine visite.

- Eliminer toute source pouvant contenir de l'alcool ou en dégager l'odeur : boissons alcoolisées, bouteilles d'alcool à 90°, parfums, certains médicaments...

- Encourager l'entourage à surveiller la consommation des médicaments pendant les jours du sevrage et notamment la prise du Valium. Ici ce rôle est confié à l'infirmière.

- Encourager à boire beaucoup d'eau, tisanes, jus de fruits pour lutter contre la déshydratation quasi systématique chez les patients dépendants de l'alcool : au moins deux litres par jour (mais pas d'excès, au risque de provoquer une hyperdilution).

- Dans la mesure du possible, ne pas laisser le patient seul.

- A la fin du sevrage, proposer de ramener les comprimés inutilisés de Valium à la pharmacie.

Pendant le maintien de l'abstinence

- Prévenir l'entourage de la décision de ne plus consommer de l'alcool afin d'éviter les tentations.

- Ne pas rompre les relations avec les différents intervenants de la prise en charge (médecin, psychologue, mouvements d'anciens buveurs...) pour optimiser une abstinence à long terme.

- Développer des activités de loisirs afin de ne pas retrouver les conditions pouvant amener à s'alcooliser seul chez soi.

- Ne jamais croire qu'un verre d'alcool ne fera pas de mal ! Le cas échéant, le pharmacien doit refuser la vente d'alcool à 90°.

- Le rôle du pharmacien dans cette étape est important : la patiente venant chaque mois pour la délivrance de son traitement, il doit être à l'écoute en cas de difficultés. Ne pas hésiter à prendre des nouvelles, à encourager et féliciter. Si, nécessaire, la rediriger vers le médecin traitant ou l'alcoologue.

En cas d'écart ou de rechute

- (Re)prendre contact immédiatement avec un mouvement d'anciens buveurs ou un membre du réseau de soins.

- Ne pas retenter seul un sevrage « sauvage » sans aide médicale avec des médicaments.

Plan de prise conseillé

- Valium 10 mg : prise régulièrement répartie, indépendamment des repas.

- Spasmag : par voie intraveineuse.

- Bénerva : prise indifférente par rapport aux repas.

- Aotal : de préférence en dehors des repas pour optimiser son absorption.

- Gaviscon : après les repas ou au moment des douleurs gastriques.

pathologie

La dépendance à l'alcool en 5 questions

La dépendance à l'alcool se caractérise par un désir compulsif à boire de l'alcool en quantités croissantes. L'impossibilité de satisfaire ce besoin se traduit par un syndrome de sevrage.

Qu'est-ce que l'alcoolodépendance ?

- L'alcoolodépendance est une maladie chronique hautement récidivante. Elle s'installe progressivement sur plusieurs dizaines d'années, avec souvent alternance de périodes de consommation excessive et de consommation plus modérée.

- Il s'agit d'une maladie complexe représentant la complication la plus sévère des conduites d'alcoolisation. Elle se caractérise par la perte de la maîtrise de la consommation d'alcool.

- On distingue deux types de dépendance :

- la dépendance pharmacologique ou dépendance physique, qui se caractérise par un phénomène de tolérance et par l'apparition d'un syndrome de sevrage en cas d'arrêt brutal de la consommation. Elle n'est pas constante ;

- la dépendance psychologique et comportementale, qui se traduit par une pulsion à consommer de l'alcool pour en retrouver ses effets (phénomène de craving). Le patient ne peut s'empêcher de boire tout en reconnaissant la nocivité de l'alcool.

Quels sont les signes cliniques ?

- Typiquement, il existe un tremblement plus ou moins important des extrémités, des conjonctives rouges, un visage empourpré, couperosé, oedématisé, des yeux larmoyants, une haleine alcoolisée, des sueurs.

- L'examen peut aussi mettre en évidence : hypertension artérielle, tachycardie, asthénie, anorexie, hépatomégalie, troubles digestifs avec oesophagite, nausées et vomissements matinaux (pituites), douleurs abdominales (pancréatite), crampes nocturnes affectant notamment les mollets et autres signes de polynévrites, vertiges et incoordination motrice (d'où chutes récurrentes, hématomes...).

Quels sont les signes de manque ?

- Les signes de manque sont observés lorsque les effets de l'alcool s'estompent dans l'organisme, notamment au réveil.

Troubles psychiques : anxiété, agitation, irritabilité, hyperactivité, troubles du sommeil...

Troubles neurovégétatifs : sueurs, tremblements, crampes, tachycardie, hypertension artérielle, parfois hypotension orthostatique (sujet âgé).

Troubles digestifs : nausées, vomissements.

Ces signes, souvent discrets et immédiatement calmés par la prise d'alcool, contribuent au renforcement de sa consommation.

- Chez environ 5 % des sujets alcoolodépendants, le manque ou le sevrage peut se traduire par des signes plus sévères, observés dans les 24 heures suivant la dernière prise d'alcool (parfois jusqu'à 10 jours après l'arrêt de l'alcool chez le sujet âgé).

- Le delirium tremens correspond à un état d'agitation psychomotrice : le patient est hagard, victime de tremblements intenses et de signes neurovégétatifs (hypertension, tachycardie, sueurs profuses, diarrhées, vomissements, signes de déshydratation avec hypernatrémie). Il existe un délire hallucinatoire. Le pronostic vital peut être engagé (décès par collapsus cardiorespiratoire ou suicide).

- Le délire alcoolique subaigu est proche du delirium tremens mais moins sévère. Il peut se prolonger plusieurs semaines.

- Une épilepsie de sevrage (crise comitiale) peut être observée (crise généralisée de type grand mal).

Comment se fait le diagnostic ?

- Le diagnostic est fondé sur les données de l'entretien avec le patient et sur l'examen clinique. Il est important de distinguer entre usage abusif d'alcool et véritable alcoolodépendance : la notion de sevrage thérapeutique n'intervient que face à un patient dépendant.

- Des échelles peuvent aider à faire cette distinction comme le test AUDIT (Alcohol Use Disorders Identification Test). Recommandé par l'OMS, il ne fait pas l'objet d'un consensus en France.

- Parfois, la dépendance est révélée à l'occasion d'une situation d'urgence : troubles du comportement, accident somatique aigu, accident de la circulation, syndrome de sevrage...

Eléments à rechercher

- Signes de dépendance physique : antécédents de syndrome de sevrage, existence de signes mineurs de sevrage le matin : tremblements, nausées, anxiété, besoin de boire dès le matin.

- Difficulté à maîtriser sa consommation, tendance à augmenter les doses pour retrouver les effets de l'alcool (phénomène de tolérance).

- Troubles comportementaux avec retentissements sur la vie quotidienne, troubles anxieux et dépressifs.

Marqueurs biologiques

GammaGT, volume globulaire moyen (VGM) et transferrine désialysée ou CDT (variante de la transferrine dont la concentration plasmatique est plus élevée chez les buveurs excessifs) sont des indicateurs de mésusage. Ils ne distinguent pas les sujets alcoolodépendants des consommateurs excessifs non dépendants. Ils peuvent être normaux chez des patients ayant une alcoolodépendance sévère.

Quelles sont les complications ?

Les atteintes résultent à la fois de l'alcoolisation, des carences alimentaires l'accompagnant et de facteurs de susceptibilité génétique.

Appareil digestif

Risque de cirrhose, stéatose, hépatite alcoolique, pancréatite. Cirrhose et stéatose (accumulation de triglycérides dans les cellules du foie) sont par ailleurs à l'origine d'ostéoporose, d'ostéomalacie, d'un déficit en facteurs de la coagulation sanguine...

Système cardiovasculaire

Risque d'hypertension artérielle, de troubles du rythme cardiaque et d'accidents vasculaires cérébraux.

Troubles neurologiques

- Ils concernent environ 10 % des sujets : encéphalopathie alcoolique par déficit en vitamine B1 (encéphalopathie de Gayet-Wernicke) compliquée en l'absence de traitement par un syndrome de Korsakoff, démence alcoolique...

- Une carence en vitamine B1 et la toxicité directe de l'alcool sont à l'origine de neuropathies périphériques : crampes, sensations douloureuses, paralysie, atrophie musculaire. Des névrites optiques peuvent être cause d'une diminution de la vision voire de cécité.

- Des illusions sensorielles ainsi que des délires sont souvent rapportés lors d'une alcoolisation chronique comme au moment du sevrage.

Troubles métaboliques

Les modifications décrites chez l'alcoolique impliquent tous les métabolismes. Elles peuvent être directes (action de l'alcool sur le foie : acidose lactique, hypoglycémie) ou induites indirectement par des maladies (hépatite, pancréatite...).

Cancers

Une consommation excessive d'alcool favorise le développement des cancers aérodigestifs supérieurs (notamment an cas de tabagisme associé), hépatiques, colorectaux et du sein.

Troubles psychiques et psychiatriques

Troubles du caractère, troubles anxieux, troubles de l'humeur... Les comportements de polyintoxication (alcool et médicaments psychoactifs, cannabis...) sont fréquents et compliquent le tableau clinique.

Grossesse

La consommation d'alcool durant la grossesse peut avoir de graves conséquences sur le foetus : malformations congénitales, retard de développement psychomoteur de l'enfant...

Les mécanismes de la dépendance à l'alcool

L'alcool stimule le système de récompense dopaminergique d'où des effets stimulants, euphorisants.

- Lors d'un usage chronique d'alcool :

- l'alcool exerce une action facilitatrice directe de la transmission dopaminergique 1 ;

- il stimule les neurones glutamatergiques excitateurs 2 et exerce une action inhibitrice sur les synapses GABAergiques 3 ce qui tend à augmenter la transmission dopaminergique ;

- il facilite la libération d'opiacés endogènes qui inhibent les neurones GABAergiques 4 et il favorise la libération d'endorphines directement actives sur les neurones dopaminergiques. 5

- Les effets de l'alcool concernent aussi d'autres types de neuromédiateurs : récepteur nicotinique de l'acétylcholine (impliquée dans la mémoire et la coordination des mouvements), récepteurs 5-HT de la sérotonine (impliquée dans le contrôle des émotions et du sommeil) et récepteur CB1 des endocannabinoïdes.

- Les mécanismes caractérisant la dépendance sont réversibles lorsque l'intoxication alcoolique cesse, mais le consommateur conserve une « cicatrice » psychologique forte de l'état de bien-être ressenti lors de la consommation de la drogue, expliquant la fréquence des rechutes.

thérapeutique

Comment prendre en charge l'alcoolodépendance ?

Un syndrome d'alcoolodépendance relève d'une intervention médicale et médicosociale intégrée dans un projet thérapeutique global.La prise en charge du sujet alcoolodépendant fait l'objet d'un consensus (ANAES 1999). Au-delà de l'aide que représente la prescription de certains médicaments, le rapport souligne l'importance de l'accompagnement psychologique et social du patient.

Médicaments d'aide au sevrage

Benzodiazépines

- Indication : les benzodiazépines (BZD) sont utilisées à la fois pour réduire la gravité du syndrome de sevrage et pour diminuer l'incidence des crises convulsives et des delirium tremens.

- Utilisation : leur administration dans le traitement du sevrage alcoolique ne doit pas excéder 8 à 10 jours pour éviter d'entraîner une dépendance.

- Effets indésirables : les benzodiazépines sont en général bien tolérées. Elles peuvent toutefois donner lieu à des sensations ébrieuses, des céphalées, un prurit, une insuffisance respiratoire, une amnésie antérograde, une dépendance et une tolérance si leur prescription est inutilement prolongée.

Carbamates et barbituriques

- Les carbamates sont voisins des benzodiazépines, mais leur index thérapeutique est bien moins favorable. Ils sont dépourvus d'action antiépileptique et exposent, en cas d'intoxication aiguë, à un risque létal important.

Leur utilisation devrait devenir exceptionnelle. Le méprobamate (Equanil) est indiqué en seconde intention lorsque le rapport bénéfice/risque des BZD est défavorable.

- Les barbituriques, exposant à un risque important de dépression respiratoire et de toxicomanie, n'ont plus de place dans le sevrage du sujet alcoolodépendant.

Antipsychotiques

Les antipsychotiques peuvent être administrés comme sédatifs dans les états d'agitation, y compris ceux induits par le sevrage : le tiapride (Tiapridal) bénéficie d'une AMM dans ce sens. Toutefois, dans le sevrage alcoolique, son efficacité est moindre que celle des BZD. Il expose potentiellement à des effets indésirables neurologiques et endocriniens. Il entraîne un allongement de l'intervalle QT.

Autres molécules

- La carbamazépine (Tégrétol, hors AMM) prévient les crises épileptiques, mais expose à une iatrogénie parfois sévère (troubles hématologiques, hépatiques, cardiovasculaires et dermatologiques).

- Valproate de sodium (Dépakine, Micropakine), vigabatrine (Sabril), topiramate (Epitomax), gabapentine (Neurontin) sont parfois prescrits par certains spécialistes (hors AMM) à la place des BZD.

- La clonidine est utilisée hors AMM en cas de dépendance conjointe héroïne/alcool.

Bêtabloquants

- Les bêtabloquants non cardiosélectifs sont prescrits hors AMM. Aténolol (Ténormine) ou propranolol (Avlocardyl) réduisent certaines manifestations du sevrage (tremblements, tachycardie, hypertension artérielle...). L'Avlocardyl est aussi indiqué dans la prévention des hémorragies digestives par rupture des varices oesophagiennes chez les patients atteints de cirrhose.

- Dépourvus d'effets psychoactifs et sans action sur l'agitation, les convulsions ou les hallucinations et délires, ils ne doivent pas être administrés isolément.

Sulfate de magnésium

- Les injections de sulfate de magnésium sont utilisées (hors AMM) pour restaurer une magnésémie normale en cas de déplétion massive et/ou d'hypokaliémie (le magnésium est un cofacteur de l'absorption du potassium), fréquents chez le sujet alcoolodépendant.

- Par ailleurs, il a été beaucoup utilisé dans les cures de désintoxication (et l'est parfois encore) pour son effet « chauffant » (impression ressentie par les patients).

Médicaments du maintien de l'abstinence

Acamprosate

- L'acamprosate (Aotal) limite les effets du manque et facilite ainsi le maintien de l'abstinence. Son administration ne se conçoit qu'avec un accompagnement psychologique et, si nécessaire, social.

- Il est généralement bien toléré. Les effets indésirables dominants sont une diarrhée transitoire, un prurit, un érythème maculopapuleux.

Naltrexone

- La naltrexone est prescrite dans l'aide au maintien de l'abstinence chez les ex-héroïnomanes sous le nom de Nalorex. Chez la personne alcoolodépendante, elle limite l'envie de boire (Revia, Naltrexone Mylan).

- Les effets indésirables les plus fréquents sont des douleurs abdominales, nausées, vomissements, des arthralgies et myalgies, des céphalées, une insomnie, une anxiété.

Disulfirame

- Le disulfirame (Espéral) induit, environ dix minutes après une prise d'alcool (même en faible quantité), une accumulation d'acétaldéhyde provoquant une réaction physiologique désagréable : apparition d'une rougeur faciale (brutale vasodilatation), de céphalées, de sueurs abondantes, de nausées voire des vomissements, d'une tachycardie et d'une hypotension.

- Ces symptômes durent entre une demi-heure et plusieurs heures. Une consommation d'alcool jusqu'à deux semaines après l'arrêt de la prise du disulfirame peut entraîner ces effets.

Parfois, des conséquences iatrogènes plus sévères ont été observées : troubles du rythme cardiaque, angor, infarctus, voire mort subite.

- Le disulfirame peut induire une somnolence en début de traitement, des troubles gastro-intestinaux, un arrière-goût métallique dans la bouche et une mauvaise haleine. Des cas d'hépatites fulminantes ont été observés. Le disulfirame expose aussi à des troubles neuropsychiques (perte de mémoire, confusion...).

- Pour les patients sous AVK, contrôle renforcé de l'INR.

Mise en place du sevrage

- L'absence de demande et de motivation du patient et/ou l'impossibilité de mettre en oeuvre un projet cohérent et durable de suivi constituent une non-indication au sevrage. Hors urgence ou contrainte (patients incarcérés), le protocole du sevrage doit être programmé et élaboré dans un condiv d'« alliance thérapeutique ».

- Deux approches sont possibles :

- Le sevrage ambulatoire (à domicile) maintient des activités sociales et professionnelles normales. Il n'est compatible qu'avec un syndrome de sevrage modéré et requiert une participation active des proches.

Ce type de sevrage est contre-indiqué dans certains cas : patient isolé, syndrome de sevrage cliniquement sévère témoignant d'une forte alcoolodépendance, pathologies somatiques graves, antécédents de delirium tremens, polytoxicomanie, patient peu motivé ou soumis à des facteurs d'entraînement importants.

- Le sevrage en institution permet de surveiller le patient et de le soustraire à un environnement non coopératif. Il est pertinent en cas d'échec de sevrages ambulatoires précédents, de complications sévères à des tentatives de sevrage antérieures, de codépendance (benzodiazépines, opiacés) ou chez les sujets en situation de grande précarité sociale.

- Un accident de sevrage (crise comitiale, delirium tremens) impose toujours une hospitalisation et un traitement spécifique.

Modalités

- Le traitement médicamenteux de première intention repose sur la prescription d'une benzodiazépine par voie orale.

C'est un traitement incontournable pour prévenir les crises convulsives et limiter l'agitation, l'anxiété. Il porte la fréquence des accidents de manque de 10 à 2 %.

- Le choix se porte généralement sur des molécules à demi-vie prolongée (diazépam...), prévenant mieux les crises comitiales.

En cas d'insuffisance hépatique ou chez le patient âgé, les molécules à demi-vie brève (oxazépam...) peuvent être préférées car mieux tolérées au plan hépatique. Toutefois elles protègent moins bien de la comitialité et exposent à un risque d'abus accru.

- Les recommandations de la conférence de consensus précisent que la prescription ne doit pas excéder 7 jours (sauf codépendance aux anxiolytiques accompagnant l'alcoolodépendance ou complications somatiques ou psychiatriques). L'AMM stipule 8 à 10 jours.

Schémas posologiques

- Arrêt total de l'alcool à J1.

- En ambulatoire, le diazépam (Valium) 10 mg est habituellement prescrit de la façon suivante :

- 1 comprimé toutes les 6 h de J1 à J3 puis réduction progressive de la posologie sur 4 à 7 jours ;

- ou 6 comprimés le premier jour, répartis sur la journée, puis réduction d'un comprimé/jour jusqu'à arrêt en 7 jours (risque de somnolence excessive et de surdosage le premier jour) ;

- on peut aussi privilégier, en cas d'agitation sévère, l'administration de 20 mg de diazépam toutes les heures ou toutes les 2 heures pendant le premier jour, puis attendre l'élimination totale de cette dose de charge, là aussi au prix d'un risque de surdosage.

- Une réévaluation du patient est souhaitable au moins une ou deux fois dans la semaine. La prescription d'un arrêt de travail de 7 jours est souvent nécessaire.

Autres traitements

Lorsque le sevrage s'accompagne d'une agitation importante, insuffisamment calmée par une BZD, voire d'hallucinations, il est possible d'administrer un antipsychotique sédatif (tiapride à posologie forte : jusqu'à 1,8 g/jour).

Aucun autre type de traitement ne fait aujourd'hui l'objet de recommandations ou d'indications en France dans le traitement du syndrome de sevrage alcoolique.

Traitements associés

- Hydratation : le traitement médicamenteux est accompagné d'une hydratation suffisante, soit au minimum 2 litres par jour per os chez le patient conscient pendant 3 à 4 jours (perfusions chez le malade inconscient).

- Vitaminothérapie :

- Une carence en vitamine B1 (thiamine) est fréquente en cas d'alcoolodépendance (négligence alimentaire, mauvaise absorption entérique). Il est recommandé d'administrer, en prévention, de la vitamine B1 par voie orale à tout patient en sevrage : généralement 500 mg/jour pendant 10 à 20 jours. Face à des signes cliniques de carence, elle est administrée en perfusion intraveineuse pendant une semaine suivie d'un relais per os pendant plusieurs semaines.

- La vitamine B6 (pyridoxine) peut aussi donner lieu à une administration prophylactique contre les crises d'épilepsie. L'association de vitamine B1 et B6 permet de prévenir la survenue d'une encéphalopathie de Gayet-Wernicke. Toutefois, la prescription de vitamine B6 ne doit pas être prolongée (risque de neuropathie périphérique). Il est conseillé d'y associer de la vitamine PP (nicotinamide) comme cofacteur (Nicobion).

- L'apport d'acide folique peut être discuté en cas de carence et particulièrement chez la femme enceinte pour réduire le risque de malformation foetale.

Accidents de sevrage

- La survenue d'un delirium tremens implique l'administration d'une BZD (diazépam ou midazolam) par voie veineuse. Le risque de dépression respiratoire impose un suivi dans un hôpital disposant de moyens de réanimation et en veillant à pouvoir injecter en urgence, si besoin, un antidote des BZD (flumazénil). Un antipsychotique injectable (halopéridol) peut être prescrit. Le tiapride en injectable a également une indication dans le delirium tremens.

- Une poussée hypertensive majeure peut être traitée par la clonidine injectable (Catapressan à l'hôpital), mais après correction de l'hypovolémie. Le recours aux bêtabloquants n'est pas recommandé dans cette indication.

- Le traitement d'une crise comitiale n'est mis en oeuvre qu'après élimination de toute autre étiologie que le sevrage alcoolique et seulement après survenue d'une seconde crise (la première ne justifiant pas de traitement spécifique) : injection intraveineuse de diazépam ou de clonazépam sous couvert de moyens de réanimation respiratoire adéquats.

Maintien de l'abstinence

- L'administration d'acamprosate ou de naltrexone n'est pas systématique mais aide certains patients au maintien de l'abstinence.

- Lorsqu'il est mis en place, le traitement par acamprosate est initié dès le début du sevrage (à J1) alors que la naltrexone est débutée juste après la phase de sevrage. Une reprise épisodique de l'alcoolisation ne contre-indique pas le maintien du traitement.

- Aucun des deux médicaments n'a démontré de supériorité sur l'autre. La prescription de naltrexone est limitée par l'AMM à trois mois. La durée recommandée d'utilisation de l'acamprosate est de un an.

- Certains préconisent l'association des deux traitements (sur une courte durée pour la naltrexone).

- Le disulfirame ne fait plus partie du traitement de première intention. Il est réservé à des traitements ponctuels dans des situations ciblées.

- Il n'est pas exceptionnel de devoir prescrire un traitement antidépresseur ou normothymique.

- L'intérêt d'une psychothérapie est reconnu.

Rechutes

- Les rechutes sont fréquentes. Qu'il s'agisse d'un simple écart, d'une consommation sur plusieurs jours ou d'une dépendance nouvelle, il importe de ne pas les occulter, de ne pas culpabiliser le malade et, au contraire, de l'inviter à en parler pour en reconnaître les causes et pouvoir développer des stratégies d'évitement (de situations stressantes, de lieux où on boit de l'alcool...).

- Une durée prolongée de prise en charge après le sevrage améliore sensiblement le taux d'abstinence (supérieur à 80 % si le suivi est de un an, inférieur à 55 % chez les patients suivis moins de six mois).

- En cas de rechute de faible ou moyenne gravité (écart, reconsommation), un nouveau sevrage ambulatoire peut être mis en place.

Perspectives thérapeutiques

- Une forme injectable à libération prolongée de naltrexone (en cours de développement), garantissant une meilleure observance, a montré une efficacité dans le maintien de l'abstinence à 6 mois.

- Le topiramate (Epitomax) réduit, par une action indirecte, la libération de dopamine au niveau mésocorticolimbique. Une étude a montré son intérêt pour réduire la consommation d'alcool.

Où agissent les médicaments d'aide à l'abstinence ?

- Acamprosate : son mécanisme d'action est mal connu. C'est un antagoniste des récepteurs au glutamate (ce dernier exerce une action excitatrice sur les neurones dopaminergiques) et un agoniste des récepteurs GABAergiques (le GABA a une action inhibitrice sur les neurones dopaminergiques). Il tend donc à restaurer chez le patient dépendant à l'alcool des conditions de modulation des circuits dopaminergiques proches de celles observées chez le sujet ne consommant pas cette drogue.

- Naltrexone : son mode d'action est également mal connu. Cet antagoniste opiacé bloque les opiorécepteurs. Il s'oppose ainsi au renforcement positif induit par les opioïdes endogènes (endorphines) produits lors de la consommation chronique d'alcool.

- Disulfirame : l'alcool est métabolisé au niveau hépatique en acétaldéhyde. Le disulfirame inhibe l'acétaldéhyde-déshydrogénase, enzyme qui transforme l'acétaldéhyde en acide acétique. L'acétaldéhyde engendre des réactions désagréables connues comme « effet antabuse » : rougissement de la peau, nausées et vomissements, tachycardie, sensation d'oppression thoracique...

conseils aux patients

Repérer les consommations à risque

- L'OMS a défini des seuils au-delà desquels il existe un risque de dépendance ou d'accoutumance : consommation régulière de 2 verres par jour chez la femme, 3 verres par jour chez l'homme, ou consommation occasionnelle de 4 verres ou plus de temps en temps. Lorsque ces limites sont dépassées, il faut mettre en garde et encourager à réduire la consommation.

- Par ailleurs, il existe des situations à risque au cours desquelles l'alcool est complètement prohibé : grossesse, allaitement, travail sur machine, conduite automobile...

Encourager le dialogue

- Lors de la prise de conscience d'une dépendance à l'alcool, encourager le patient à en parler à son médecin ou lui conseiller de prendre rendez-vous d'emblée avec un médecin alcoologue.

- Prévenir les proches de la décision d'arrêter la consommation d'alcool afin de bénéficier de leur soutien.

- Sauf condiv dépressif, il peut être envisageable d'arrêter simultanément le tabac : on peut associer une substitution nicotinique à un sevrage classique de l'alcool. Il est préférable toutefois de demander l'avis du médecin.

- Expliquer que tout professionnel de santé, médecin ou pharmacien, est tenu au secret professionnel. Le patient peut parler sans crainte.

L'étape du sevrage

- La consommation d'alcool doit être stoppée dès le premier jour du sevrage et de manière définitive.

- Les médicaments ont pour but d'éviter les réactions de l'organisme consécutives à l'arrêt brutal d'alcool.

Un arrêt de travail est souvent prescrit pour faciliter cette étape.

- Le patient et l'entourage doivent connaître les signes d'alerte (sueurs, désorientations, confusion, mouvements anormaux...). En cas d'intolérance au traitement ou devant l'apparition de ces signes, contacter aussitôt l'alcoologue ou le médecin traitant afin que le patient soit rassuré et pris en charge.

- Des insomnies et des cauchemars sont également fréquents durant cette période.

- Penser à s'hydrater suffisamment : au moins 2 litres par jour.

Maintien de l'abstinence

Changer ses habitudes

- Anticiper les heures durant lesquelles l'envie de boire de l'alcool était la plus fréquente : prévoir des activités qui vont écarter l'envie de boire (lire un livre, regarder un film, marcher dans la nature...).

Si l'envie de boire est trop importante en restant seul, intégrer un groupe d'activités : échecs, jeux de cartes, groupes de randonnées...

- Eviter de se retrouver avec ses anciens amis buveurs qui n'ont pas fait le choix de s'arrêter de boire. Favoriser les fréquentations d'amis ou des membres de la famille qui sont prêts à encourager la démarche et à prodiguer des encouragements.

- Prendre soin de soi et se faire plaisir.

- Attention aux boissons dites « sans alcool » type boisson anisée, ou succédané de bière : elles peuvent contenir jusqu'à près de 1 % d'alcool et peuvent favoriser une reprise de l'alcoolisation ! Privilégier l'eau tout d'abord, mais aussi les tisanes ou les jus de fruits. Eviter les sodas caféinés, le thé ou le café.

- De nombreux médicaments contiennent de l'alcool (sirops, gouttes buvables, ampoules, bains de bouche) : demander au médecin ou au pharmacien de vérifier systématiquement la composition de ces formes pour ne pas être de nouveau exposé à l'alcool.

- Gare aux odeurs alcoolisées comme les parfums, les after-shave, certains antiseptiques, qui peuvent réveiller des souvenirs.

Moyens médicamenteux

- Préciser qu'il n'y a pas de traitement miracle mais que certains médicaments peuvent aider le patient en complément de l'approche psychosociale.

- L'acamprosate (Aotal) peut être pris dès le premier jour du sevrage. Prévenir que les effets indésirables (diarrhée notamment) sont généralement passagers et disparaissent en quelques jours sans traitement médicamenteux correcteur.

- La naltrexone (Revia) est débutée après le sevrage. Une posologie progressive en début de traitement (1/2 cp/jour) pourrait diminuer la fréquence des nausées.

Toujours signaler le traitement par Revia aux médecins, dentistes ou pharmaciens afin d'éviter des interactions avec certains médicaments contre la douleur (dérivés morphiniques).

Contacter les associations

- Les associations permettent de ne pas se sentir isolé, de s'identifier à d'autres participants. Elles offrent un soutien important aux patients, les aident à construire un projet.

- Lors d'une première prise de contact, se faire accompagner éventuellement par un ami ou par un membre de sa famille pour faciliter la démarche.

En cas de rechute

- Ne pas avoir une attitude culpabilisante et ne pas décourager le patient.

- Si l'abstinence a été supérieure à un mois, généralement un nouveau sevrage ambulatoire est entrepris.

Si l'abstinence a été inférieure à un mois ou au-delà de deux tentatives infructueuses, mieux vaut faire appel à un alcoologue.

documentez-vous

Association

Alcooliques anonymes France

http://www.alcooliques-anonymes.fr

L'association organise toutes les semaines, dans différentes régions et villes de France, des réunions d'informations et de discussions dont certaines sont accessibles à toute personne, alcoolique ou non (les lieux et les horaires sont consultables sur le site). Le site officiel renvoie vers des sites régionaux permettant de connaître en détail l'activité de l'association dans sa région. L'onglet « Questions-réponses » soulève les questions les plus fréquemment posées sur l'alcool, l'alcoolisme. L'association s'intéresse aussi aux jeunes et les aide à déceler, via une série de questions, si l'alcool représente un danger pour eux. Une permanence téléphonique est accessible 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 : 08 20 32 68 83.

Site internet

http://www.automesure.com

Ce site propose d'effectuer en ligne le test Audit qui évalue le degré de dépendance ou l'absence de dépendance à l'alcool. On y trouve les notions d'usage à risque, d'usage nocif, les repères pour une consommation « normale » d'alcool, ainsi qu'une table de correspondance des verres d'alcool (en degré d'alcool). Des liens renvoient à certains documents : « Consommation des jeunes en France » (INPES, 2008), « Mémento des principaux chiffres sur l'alcool » (Institut de recherche scientifique sur les boissons, 2008).

Documents

Conférence de consensus « Objectifs, indications et modalités de sevrage du patient alcoolodépendant »

La conférence de consensus sur le sevrage du patient alcoolodépendant date de 1999 mais est toujours d'actualité. Téléchargeable sur le site de la Haute Autorité de santé (http://www.has-sante.fr), elle fait notamment le point sur les indications et contre-indications du sevrage, les modalités pratiques, les traitements à proposer devant un accident de sevrage...

Dr Joëlle Divay Psychiatre alcoologue Centre de cure ambulatoire en alcoologie (CCAA) 1, rue Nationale 78 300 Poissy Tél. : 01 41 55 43 33 78 1 99999 8

23 mars 2009

Madame Claudine P.,

63 kg, 65 ans

Valium 10 mg : 1 cp 4 fois/jour pendant 2 jours puis 1 cp 3 fois/jour à J3 puis 1 cp 2 fois/jour à J4 et J5 puis 1 cp/j à J6, 1/2 cp à J7 puis arrêt.

Bénerva 250 mg : 2 cp/jour pendant 10 jours.

Spasmag : 1 injection le matin par IDE en IV pendant 7 jours.

Aotal : 2 cp 3 fois par jour pendant 1 mois.

Gaviscon : 2 cuillères à café 3 fois par jour en cas de brûlures d'estomac. 1 flacon.

Les médicaments prescrits

Valium (diazépam)

Benzodiazépine à demi-vie longue indiquée notamment dans la prévention et le traitement du delirium tremens et des autres manifestations du sevrage alcoolique.

- Posologie dans cette indication : 40 mg par jour en plusieurs prises puis diminution progressive des doses pendant une durée de 10 jours au maximum.

Spasmag injectable (sulfate de magnésium)

Sels de magnésium à 1,2 g/ampoule IV indiqués, entre autres, dans le traitement curatif des torsades de pointes ou des hypokaliémies aiguës associées à une hypomagnésémie.

- Posologie : entre 2 et 8 g par jour selon l'indication et le mode d'administration.

Bénerva (thiamine ou vitamine B1)

Indiqué par voie orale en cas de carence en vitamine B1 (béribéri) et en traitement de l'encéphalopathie de Gayet-Wernicke (en relais de la forme injectable).

- Posologie : 1 à 2 comprimés par jour.

Aotal (acamprosate)

Analogue structurel de la taurine et de l'acide gamma-aminobutyrique (GABA) indiqué dans le maintien de l'abstinence chez le patient alcoolodépendant.

- Posologie : 4 comprimés par jour (patient de moins de 60 kg) à 6 comprimés par jour (patient de plus de 60 kg).

Gaviscon (alginate et bicarbonate de sodium)

Indiqué dans le traitement symptomatique du reflux gastro-oesophagien.

- Posologie : 2 cuillères à café 3 fois par jour après les 3 principaux repas et éventuellement au coucher. Cette posologie peut être doublée.

CONTACTER LE MÉDECIN

Le pharmacien demande des précisions sur les « piqûres chauffantes » réclamées par la patiente.

LES CHIFFRES

- Morbidité - 1,5 million de personnes alcoolodépendantes en France.

- 7 % des patients hospitalisés, toutes causes confondues, sont alcoolodépendants.

- 1,3 à 1,4 million d'hospitalisations liées à l'alcool par an.

- 1 000 naissances par an d'enfants affectés par une forme sévère de syndrome d'alcoolisation foetale.

- Mortalité

22 000 décès par an dont : 10 000 par cancer, 8 000 par pathologies digestives, 3 000 à la suite de troubles psychiatriques, 1 000 par accident de la circulation.

Contre-indications absolues

- Benzodiazépines : insuffisance respiratoire sévère, syndrome d'apnée du sommeil, myasthénie, insuffisance hépatique sévère, aiguë ou chronique (risque de survenue d'une encéphalopathie), sauf oxazépam.

- Méprobamate : insuffisance respiratoire sévère, insuffisance hépatique sévère (risque de survenue d'une encéphalopathie).

- Tiapride : tumeur prolactinodépendante connue ou suspectée (adénome hypophysaire à prolactine, cancer du sein prolactinodépendant), phéochromocytome connu ou suspecté.

- Acamprosate : insuffisance rénale sévère.

- Disulfirame : insuffisance hépatique sévère, insuffisance rénale, insuffisance respiratoire sévère, diabète, atteintes neuropsychiques, atteinte cardiovasculaire, prise de boisson alcoolisée ou de médicament alcoolisé depuis moins de 24 heures.

- Naltrexone : insuffisance hépatique sévère ou hépatite aiguë, dépendance aux opiacés (risque d'apparition d'un syndrome de sevrage grave), sujets de plus de 60 ans.

point de vue

« Etre à l'écoute du patient et valoriser les progrès accomplis »Comment le pharmacien peut-il aider ou conseiller le patient ?

Le pharmacien a un rôle important à jouer au moment d'un sevrage en ambulatoire. En effet, il est souvent difficile de juger du degré de dépendance du patient et donc des doses de benzodiazépines à prescrire : celles-ci doivent être ajustées au cas par cas. Il ne faut donc pas hésiter à dire au patient de revoir l'alcoologue ou le médecin prescripteur pour adapter les doses en cas de somnolence excessive ou, au contraire, en cas d'agitation, de sueurs, voire d'agressivité témoignant d'une posologie insuffisante. Par la suite, conseiller au patient de passer régulièrement

à l'officine. Lui demander comment il se nourrit car les patients alcoolodépendants sont fréquemment carencés. L'inciter à avoir une alimentation équilibrée, à bien prendre les vitamines prescrites même si elles ne sont pas remboursées. Valoriser les progrès accomplis, l'encourager à participer à des groupes de paroles. Etre également à l'écoute de la famille, laquelle doit s'adapter pour que le patient puisse y reprendre sa place.Que penser du baclofène ?

Le baclofène (Liorésal), myorelaxant indiqué notamment dans la sclérose en plaques, a donné lieu a une médiatisation importante. Dans un ouvrage publié récemment, l'div, cardiologue, explique comment il est parvenu à vaincre sa dépendance à l'alcool en utilisant le baclofène à forte dose. Mais cette expérience et quelques autres sont des cas isolés. Pour l'heure, on ne dispose d'aucune étude confirmant d'une part la sécurité du médicament aux doses utilisées, d'autre part son efficacité versus placebo.

Pr Mireille Becchio,

présidente du RAVMO (Réseau addictions Val-de-Marne Ouest)

Ce qu'il faut retenir

Sevrage ambulatoire

- Prescription d'une benzodiazépine (BZD) le premier jour d'arrêt de consommation d'alcool. Objectif : limiter la gravité du syndrome de sevrage (hyperexcitabilité...) et l'incidence de crises convulsives et de delirium tremens.

Molécules utilisées : classiquement, BZD à demi-vie longue (diazépam...) ou à demi-vie courte si insuffisance hépatique (oxazépam...). Les BZD à demi-vie brève présentent un potentiel d'abus plus élevé.

Modalités : posologie dégressive sur 7 jours au maximum (conférence de consensus) pour éviter tout risque de dépendance. Réévaluation du patient pour éventuellement ajuster les doses.

- Hydratation suffisante : au moins 2 litres par jour par voie orale.

- Vitaminothérapie : vitamine B1 systématique, éventuellement vitamine B6, PP et acide folique.

Maintien de l'abstinence

- Acamprosate (Aotal) à débuter le jour du sevrage : 6 cp/jour (ou 4/jour pour les sujets de moins de 60 kg).

Durée du traitement : 1 an.

- Naltrexone (Revia) à débuter après le sevrage : 1 cp/jour. Durée du traitement limitée à 3 mois.

- Prise en charge psychosociale : psychothérapie individuelle ou de groupe, thérapie familiale ou de couple... Si besoin, accompagnement social.

Conseils

- Importance des mouvements d'entraide, du soutien de l'entourage. Valoriser les progrès. u Ne pas culpabiliser le patient en cas de rechute mais l'encourager à reprendre contact avec un médecin.

- Attention aux médicaments pouvant contenir de l'alcool comme excipient !

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

Ordonnance 1

Docteur Véronique Brillout

Généraliste

3, avenue du Parc

65499 Mauronge

Tél. : 01 41 29 96 98

65 1 88888 9

Sur rendez-vous

Le 23 mars 2009

M. Patrick R.,

55 ans

Revia 50 mg : 1 comprimé par jour

Vitamine B1-B6 Roche : 3 comprimés par jour

Codoliprane : 1 à 2 comprimés si douleur.

Ordonnance 1 : NON. La codéine contenue dans Codoliprane risque de ne pas agir à cause de l'effet antagoniste de la naltrexone sur les opioïdes (association déconseillée). Il est préférable de recourir au paracétamol seul voire à l'ibuprofène en l'absence de contre-indications digestives.

Ordonnance 2

Docteur Arlette Viala

Généraliste

25, rue de la Mairie

80166 Herblin

Tél. : 01 41 29 75 78

80 1 99999 8

Sur rendez-vous

Le 25 mars 2009

Mme Valérie M.,

48 ans

Veinamitol ampoules : 1 ampoule le matin

Hirucrème : 1 application matin et soir

qsp 3 mois

La patiente est sous Aotal.

Ordonnance 2 : NON. Chaque ampoule de Veinamitol contient 2 grammes d'alcool. En informer le médecin et proposer du Veinamitol en sachets à la place.

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