De l'oxygène pour l'officine ! - Le Moniteur des Pharmacies n° 2712 du 19/01/2008 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2712 du 19/01/2008
 

OZILLAC

Initiatives

Et si le métier de pharmacien ne se cantonnait pas au comptoir ? C'est en tout cas l'intime conviction de Gérard Perdriaud. Rendre visite à ses patients âgés et handicapés fait partie intégrante de son exercice. Une démarche qu'il a découvert à travers le contrôle de la pose d'oxygène à domicile.

En novembre 2000 paraissaient les « Bonnes pratiques de dispensation à domicile de l'oxygène ». Elles ont rendu obligatoire la visite d'un pharmacien pour contrôler l'installation de l'oxygénothérapie à domicile pour tous les patients bénéficiant d'une source d'« oxygène médicament » (liquide ou gazeux) plus de 15 heures par jour. Pour les prestataires de MAD, qu'ils soient partenaires ou filiales des répartiteurs, le pharmacien d'officine devenait le professionnel de santé de proximité idéal pour accomplir ce service.

Et cela changea la façon d'exercer de Gérard Perdriaud. Quand la société Orkyn' lui proposa de réaliser la « visite pharmaceutique » pour sa clientèle, il accepta d'emblée. « C'est un moyen de ne pas casser le lien avec des malades que j'ai accompagnés », explique notre confrère. Il faut dire qu'il connaît particulièrement bien ses patients, installé qu'il est depuis 21 ans à Ozillac, un village de 600 habitants de Charente-Maritime. Il a su établir avec eux, au fil du temps, une relation de confiance solide.

Rassurer les patients

Pour autant, Gérard Perdriaud n'est ni spécialiste en oxygénothérapie, ni expert en insuffisance respiratoire. Côté formation, la société Orkyn' lui a expliqué - en l'espace d'une matinée à peine - le b.a.-ba et lui a remis des brochures détaillées. C'est elle qui s'occupe de toute la mise en place et du réapprovisionnement en oxygène. L'intervention du pharmacien a pour but de vérifier que tout fonctionne : contrôler le débit en oxygène, s'assurer qu'il est conforme à la prescription, observer les conditions d'hygiène... En pratique, Gérard Perdriaud joue aussi un rôle éducatif : « Les gens reçoivent un livret d'informations, mais beaucoup de personnes âgées ne peuvent plus lire correctement, ou oublient... En fait, je mets les points sur les i. Je leur rappelle les bonnes pratiques. »

Après le passage du pharmacien, les malades doivent avoir intégré les règles de sécurité : ne pas placer le dispositif à proximité de matériaux conductibles (corps gras) et d'aérosols, le stocker dans un local propre et aéré, ne pas fumer... Le titulaire vérifie aussi l'état des lunettes ou encore la présence d'une rallonge. « Beaucoup de personnes sont impressionnées par le matériel, elles sont anxieuses, notamment à cause d'une éventuelle déficience du matériel. Dans ce cas, je mets le tuyau dans un verre d'eau pour tranquilliser. Cela rassure énormément... »

Gérard Perdriaud en est conscient, sa présence est avant tout sécurisante, ce type de patients devant faire face à un lourd handicap. Ce sont pour la plupart des personnes âgées, lesquelles doivent aussi accepter leur dépendance à une machine et, souvent, leur isolement. « Les généralistes ont de moins en moins le temps de leur rendre visite. Je pense que l'avenir du pharmacien passe par la mise en avant de notre place dans le parcours médical. Nous en sommes un maillon indispensable », assène notre confrère.

De l'oxygénothérapie au MAD

Avant d'installer un système d'oxygénothérapie au domicile d'un patient, Gérard Perdriaud doit remplir une fiche de contrôle et la lui faire signer avant de la transmettre à Orkyn'. Mais, au moindre souci, il préfère de loin les relations directes. « Dans ce cas, je préviens un membre de la famille et je contacte directement le prestataire. »

La visite pharmaceutique en elle-même ne dure que 15 à 30 minutes. Mais la visite du patient au domicile ne fait en réalité que commencer. « On s'installe autour de la table et le dialogue s'installe. Chacun oublie sa position. Il n'y a plus, d'un côté, le professionnel de santé et, de l'autre, le malade. Les gens sont ravis de me revoir et les barrières du comptoir sont totalement brisées ! Ils se livrent très facilement », narre le pharmacien. La discussion peut durer des heures. «J'apporte évidemment un soutien psychologique, lequel fait aussi partie de la thérapie. Humainement, c'est très enrichissant. »

Economiquement, ça l'est nettement moins. A priori. Le tarif forfaitaire d'un « contrôle » s'élève à 22,87 euros. La prestation est rémunérée par Orkyn'. « C'est un service que j'offre à mes clients et ils m'en sont reconnaissants », affirme Gérard Perdriaud. Il fait l'effort de se déplacer mais sa visite va bien au-delà de l'oxygène. « Le but est aussi d'aider des personnes handicapées à avoir un meilleur confort de vie », poursuit-il. Cela répond aussi aux besoins d'aménagement du domicile. « Souvent, les malades n'osent pas exposer leurs problèmes à leur médecin. En discutant avec eux, en s'immisçant un moment dans leur vie quotidienne, on s'aperçoit vraiment de leur handicap. Ne serait-ce qu'au niveau de la toilette. Les gens se rendent compte que notre expertise ne se cantonne pas au médicament. »

Devenir expert en HAD

Notre confrère n'est pas avare en conseils pratiques. Il peut par exemple expliquer en détail à une épouse d'un patient la technique de massage pour activer la circulation et éviter les nécroses, conseiller des coussins antiescarres... Il peut aussi indiquer les bons gestes pour passer du fauteuil à la baignoire sans risquer de chutes. « J'ai la chance d'avoir une femme qui est infirmière en milieu hospitalier. Mais je regrette de ne jamais avoir fait de formation spécifique à l'HAD », confie-t-il. Il n'empêche, Gérard Perdriaud connaît bien l'équipement des malades handicapés à domicile. S'il effectue les visites des patients sous oxygène (3 à 5 par an), il se déplace également dans d'autres foyers (une fois par mois en moyenne) dans le cadre des activités du réseau gérontologique local. « Dans nos campagnes, l'hospitalisation à domicile est très développée. Pour des raisons économiques et sentimentales de la part des familles, mais aussi par manque de structures adaptées. »

Chaque fois que cela est possible, les patients âgés sont donc intégrés au réseau. A cette occasion, médecin, infirmières, personnel technique et assistante sociale sont réunis au domicile de la personne. « On me convoque s'il s'agit d'un des mes clients », précise le pharmacien. Sa mission ? Faire, en présence de la famille du malade, le bilan des besoins en termes de matériel médical. Une fois les problèmes de coût réglés, il peut par la suite s'occuper de la livraison. Ainsi, Gérard Perdriaud peut développer petit à petit son activité MAD. Avec toujours le même objectif : améliorer le bien-être de patients qu'il a longtemps servis alors qu'ils étaient encore ingambes. « On ne sait pas toujours dans quel état et dans quelles conditions on va les trouver. »

Depuis 7 ans qu'il découvre ainsi leur vie intime, Gérard Perdriaud dit en avoir « vu de toutes les couleurs » : habitations vétustes, déchéance physique... Mais qu'importe. « Quand je repars, je me sens toujours bien car j'ai remonté le moral à quelqu'un. C'est stimulant de savoir qu'on est capable d'apporter un rayon de soleil. »

Envie d'essayer ?

Les avantages

- Entretenir une relation de confiance avec les malades.

- Développer son expertise au-delà des frontières du comptoir.

- Profiter des visites pharmaceutiques pour développer une activité MAD.

- Gagner la reconnaissance des patients et de leur entourage.

- Fidéliser les familles des malades.

- Avoir la satisfaction de s'être rendu utile.

Les inconvénients

- Les visites au domicile demandent du temps, pendant lequel il faut pouvoir se faire remplacer. Une situation qui ne se gère pas facilement dans le cadre d'une équipe restreinte.

- La découverte de conditions de vie parfois difficiles ou le contact direct avec le handicap peuvent être lourds à assumer. Il faut être fort psychologiquement.

- La rémunération de la visite pharmaceutique n'est pas motivante.

Les conseils de Gérard Perdriaud

- « Ne pas compter son temps. Les patients attendent plus qu'un simple contrôle de leur appareillage. »

- « Il est Inutile de se proposer volontaire pour une visite pharmaceutique si on n'a pas le sens du contact humain. »

- « Savoir oublier sa casquette de pharmacien pour la troquer contre celle d'un confident. »

- « Bien expliquer les mesures de sécurité. Ne pas hésiter à répéter les mêmes messages afin qu'ils soient bien intégrés. »

- « Ne pas hésiter à proposer du matériel médical d'après le constat des véritables besoins. Les patients sont très reconnaissants de se sentir pris en charge à bon escient. »

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