L'OTC est pour demain - Le Moniteur des Pharmacies n° 2698 du 27/10/2007 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2698 du 27/10/2007
 

L'ÉVÉNEMENT

Actualité

Des antitussifs, des collyres ou des pansements gastriques en libre accès. De la science-fiction ? Plus en 2008. Mi-décembre, les modalités du passage devant le comptoir de médicaments non remboursables seront précisées par décret. Polémique.

Roselyne Bachelot tient parole. A toute vitesse même. La ministre de la santé fait déjà plancher le petit monde de la pharmacie sur la mise à disposition de médicaments sans ordonnance devant le comptoir. Pour « une plus grande transparence et un exercice de la concurrence plus performant ». C'est bien connu, il n'y a pas de concurrence entre officines ! « Le principe est désormais acté pour 2008 par le gouvernement. Il reste à en définir les modalités, se félicite Magali Flachaire, porte-parole de l'AFIPA, qui défend les intérêts des fabricants. C'est une mesure que l'on préconise depuis longtemps pour doper le marché. »

Pas même d'expérimentation

Une séance de travail a réuni le 19 octobre, au ministère de la Santé, syndicats, groupements, Ordre, industriels, Afssaps, CEPS, CNAMTS et DGS, en présence d'Alain Coulomb, ancien directeur de la Haute Autorité de santé, et du Pr Alain Baumelou, président du groupe de travail de l'Afssaps sur l'automédication, tous deux divs d'un rapport sur l'automédication. La ministre s'est montrée claire : les décrets modifiant le Code de la santé devront être finalisés pour la mi-décembre. Les médicaments concernés seraient donc autorisés à franchir le comptoir dès 2008, sans aucune expérimentation préalable, contrairement à ce que préconisait le rapport Coulomb.

Premier impératif : définir la liste de médicaments qui franchiront le comptoir. Le boulot de l'Afssaps. A en croire Roselyne Bachelot, seul du non-remboursable devrait être en libre accès. Feront exception des produits à risque de mésusage comme ceux contenant de la codéine. Des milliers de produits contre les problèmes de peau, les pathologies respiratoires, gastriques, gynécologiques ou ophtalmologiques sont passés en revue. L'USPO attend des industriels le délistage de molécules récentes et innovantes. Jean-Pierre Lamothe, vice-président de la FSPF, se demande plutôt quels médicaments y seront les moins dangereux pour la santé. L'ordre des pharmaciens n'est pas moins furieux face au projet ministériel et refuse de cautionner un discours tendant à dire que « tout ce qui n'est prescrit n'est pas dangereux ».

Un nouvel espace à inventer

Une autre préoccupation se fait jour : quelle place consacrer à l'OTC sans transformer l'officine en « foire à tout du médicament », pour reprendre l'expression de Lucien Bennatan, président du groupement Pharma Référence ? « Cette mesure mérite d'être encadrée pour ne pas dévaloriser le rôle du pharmacien », affirme le secrétaire général de l'USPO, qui participe au groupe de travail « Agencement ». Il préconise « un espace dédié afin de ne pas faire d'amalgame avec les compléments alimentaires ». Mieux, il estime crucial de mettre en garde les patients contre l'achat impulsif : « Il faudra prévoir une signalétique particulière précisant qu'il s'agit de l'espace conseil du pharmacien », martèle-t-il. Pour autant, le rôle de conseil ne risque-t-il pas de se réduire considérablement ? « Au contraire, répond Lucien Bennatan. Le libre accès des produits suscitera des interrogations. Le pharmacien y répondra. » Surtout, pour lui, ce passage à l'OTC « devrait diminuer les produits de para dans les rayons, ce qui renforcera l'image de professionnel de santé auprès des patients ».

Des arguments qui sont loin de convaincre l'Ordre. Celui-ci s'inquiète pour la santé du patient comme pour le monopole officinal. Jean-Luc Audhoui, membre du Conseil national, rappelle que les Français consomment déjà trop. « Les études marketing montrent que lorsqu'un médicament passe devant le comptoir ses ventes augmentent de près de 40 % », commente de son côté Jean-Pierre Lamothe, qui ne comprend pas le double discours du gouvernement : parcours de soins et nomadisme. Et l'idée d'une signalétique le fait bondir : « Une pharmacie dans la pharmacie ? Je crois rêver ! » Avant de souligner que, parfois, « selon le Code de la santé, il est de son devoir de refuser de vendre »... Le professionnel de santé se retrouvera-t-il pris au piège ?

Question d'importance alors que le « plan Bachelot » est pour... demain. Cette précipitation et le flou qui l'accompagne font donc réagir l'Ordre, les syndicats ou encore le Collectif des groupements. Pascal Louis, son président, s'était montré favorable au passage de certains produits devant le comptoir. Il freine désormais des quatre fers et « déplore cet affolement » qu'il impute notamment à une « importante pression de la commission Attali et à la stratégie libérale des gouvernants actuels ».

Explosion redoutée des prix

Côté prix, Christian Saout, président du Collectif interassociatif sur la santé, redoute une forte hausse tarifaire et « demande la mise en place d'un observatoire des prix des médicaments vendus dans ce cadre ». Xavier Bertrand avait proposé en son temps un accord sur une modération des prix comme préalable à l'OTC. Selon Claude Japhet, président de l'UNPF, l'idée reste d'actualité et des discussions sont en cours avec les industriels. Il demande d'ailleurs que les prix restent « accessibles ».

Pierre Leportier, président de la FSPF, préférerait, lui, une harmonisation des prix fabricants. L'Assurance maladie devrait y trouver son compte. Les industriels de l'automédication aussi... Jean-Pierre Lamothe se dit d'ailleurs « intimement convaincu que ce projet résulte de promesses du gouvernement aux industriels pour augmenter le volume des ventes après les baisses de prix fixées il y a trois ans ». Selon lui, la collectivité paiera au bout du compte, en raison des effets iatrogènes liés au libre accès.

Au patient de ne pas tomber dans un consumérisme effréné. Au pharmacien de tenir pleinement son rôle de conseil. Dans le cas contraire, il s'agira d'un tapis rouge pour la grande distribution.

Prévoyez-vous de fermer votre officine le 30 mai prochain en signe de protestation ?


Décryptage

NOS FORMATIONS

1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.

Les médicaments à délivrance particulière

Pour délivrer en toute sécurité

Le Pack

Moniteur Expert

Vous avez des questions ?
Des experts vous répondent !