Roselyne Bachelot n'a pas su rassurer - Le Moniteur des Pharmacies n° 2697 du 20/10/2007 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2697 du 20/10/2007
 

L'ÉVÉNEMENT

Actualité

Ce samedi 13 octobre à Saint-Malo, les pharmaciens présents au 60e Congrès national des pharmaciens ont eu l'honneur de recevoir leur consoeur Roselyne Bachelot. Vigoureusement interpellée, la ministre de la Santé s'est bien entendu déclarée aux côtés des pharmaciens, notamment face à Bruxelles. Reste que son discours est loin d'être rassurant.

Attendant au pied de l'estrade de pouvoir monter faire son discours, lors du 60e Congrès national des pharmaciens, organisé les 13 et 14 octobre par la FSPF, l'UTIP et l'APR, la ministre de la Santé s'est vu projeter un film rétrospectif énumérant tous les coups portés à l'officine ces derniers mois. De marbre, Roselyne Bachelot n'a pas ensuite répondu aux inquiétudes de ses confrères. Au contraire. Si la ministre assure bien entendu être à leurs côtés sur le dossier européen, si elle les a remerciés pour leur rôle dans le générique, elle a surtout réaffirmé sa volonté de voir le médicament non remboursable passer devant le comptoir... Ce qui n'a pas répondu aux réticences du président de la FSPF sur l'OTC. « N'est-il pas paradoxal d'avoir créé, pour les traitements relevant de la solidarité, un parcours de soins [...] en évitant nomadisme et redondance et, dans le même temps, d'organiser ce même nomadisme, générateur de non-qualité pour une simple raison de concurrence élevée, au rang de dogme ?, a lancé Pierre Leportier, président de la FSPF, à l'attention de la ministre. Ajoutant que régler « le problème des prix fabricants artificiellement élevés » et de lisibilité des prix rendrait la question du libre accès sans objet. Peine perdue, semble-t-il. La ministre a asséné les mêmes arguments qu'il y a un mois : « Il conviendra de mieux intégrer les exigences de transparence et de concurrence dans le service pharmaceutique. »

« Justifier les situations de monopole »

Un dogme largement dénoncé par Yves Trouillet, président de l'Association de pharmacie rurale (APR), dans son discours à l'attention de la ministre : « On dérégule pour créer l'anarchie, [...] on détruit par principe. Mais quelles garanties offre le libéralisme ?, a-t-il lancé à la ministre. Citez-moi un seul pays où cela a marché au profit des malades, où il n'y ait pas de pénuries, d'attente, ni de passe-droits... Il n'y en a pas... »

« Vexation », « Insulte ». Que ce soit dans la bouche du président de l'APR ou de la FSPF, les représentants professionnels ont par ailleurs voulu signifier à la ministre l'impact des propos du président de la République auprès d'une profession qui a répondu présent sur tous les fronts : génériques, SESAM-Vitale, campagnes de prévention, adaptation informatique, sorties de la réserve hospitalière, permanence des soins, comme l'a énuméré Pierre Leportier.

A cela, répond la ministre, « il faudra être convaincant pour justifier des situations de monopole qui, dans leur principe, peuvent pour certains représenter des formes de privilège mais qui pourtant peuvent être légitimés au regard des bénéfices globaux que la société peut en tirer ».

Mais parlait-elle de convaincre Bruxelles ou l'Elysée ? « La balance reste en faveur du maintien du monopole », a-t-elle ajouté. On est loin d'une prise de position intangible comme en période préélectorale.

Si la profession a un monopole, il s'agit avant tout d'un monopole de compétence, certes. Or l'application de l'obligation de formation pharmaceutique n'est toujours pas effective faute de mise en place par les pouvoirs publics des conseils qui devront la gérer, plus d'un an après la sortie des décrets, a déploré Philippe Gaertner. Le président de l'UTIP estime que « le temps n'est plus à la discussion de la virgule du div », concernant un dossier qui pourrait pourtant être une arme de défense de la profession garante de qualité face à ses détracteurs.

Des officines à la « masse critique suffisante »

« Assurer un service qui réponde aux critères actuels de qualité », c'est aussi un voeu de la ministre prononcé samedi, mais pour cela « il s'agit pour les officines d'atteindre une masse critique », a-t-elle signifié. Autrement dit, par essence, le petit ne répond pas à ces critères de qualité... D'où la nécessité de regroupements. Exactement ce que prône par ailleurs la commission Attali pour les commerces. Une deuxième couche ? « Tenir ferme sur des principes ne signifie pas renoncer aux modernisations nécessaires. Il importe en effet que les officines adoptent résolument une logique d'efficience pour démontrer leur valeur ajoutée. Elles devront ainsi sans doute se restructurer pour répondre de façon optimale aux besoins de la population. »

Le gouvernement enfonce le clou, mais la profession se montre extrêmement méfiante vis-à-vis des regroupements. « On va concentrer le réseau mais pour mieux tailler dans les marges arrière, ne nous leurrons pas ! », a commenté Jean-Pierre Lamothe, en charge des questions d'économie à la FSPF, lors d'un atelier participatif consacré à la rémunération. Permettre à un maximum d'officines « d'atteindre la taille critique », comme dit la ministre, leur assurerait une meilleure assise économique et pourrait les mettre davantage à contribution sans menacer les points de vente.

Marges arrière : un tiers du revenu à sauvegarder

Autre souci formulé : les marges arrière représentent désormais un tiers des revenus des officines (!), vu la politique de TFR et de baisses de prix. A cet égard, la suppression des marges arrière (révision de la loi Dutreil) serait catastrophique. D'où la demande syndicale, soit de les maintenir légalement sur le générique, soit de les faire repasser en « marge avant ». Et, en tout cas, de rendre licites les achats au prix fabricant, pour éviter toute mise en cause par la DGCCRF. A cet égard, Roselyne Bachelot a rappelé samedi qu'elle avait écrit à Christine Lagarde pour demander une négociation sur le sujet. Est-il raisonnable d'espérer un maintien du plafond de marges arrière à 15 % en 2008 ? A cette question, la ministre a répondu laconiquement au Moniteur qu'elle ferait « le maximum ». Le problème, c'est qu'il est clair que le pouvoir de décision s'est déplacé de l'Avenue de Ségur à la Rue de Bercy.

En attendant, la FSPF réaffirme que l'officine peut être une source de croissance via une restructuration de l'emploi (accès à la propriété des adjoints via l'association et revalorisation des autres salariés), le partage des compétences avec les médecins et les services à la personne. Avec deux requêtes précises : fixer le nombre d'adjoints obligatoire non plus en fonction du CA mais selon le nombre de prescriptions délivrées ; et sortir, un an après le PLFSS 2007, le décret d'application sur les renouvellements d'ordonnances. Espérons que la ministre aura enregistré les débats.

Les chaînes préfèrent les grosses

Christian Elsen, secrétaire général de l'Association pharmaceutique belge, a expliqué comment l'implantation de chaînes, en l'occurrence Lloyds (Celesio) en 1999, a bouleversé la donne dans son pays. Les chaînes privées ne sont passées que de 0,36 % à 2,76 % des implantations en huit ans, mais elles sont « nettement plus performantes » que le reste du marché, avec 8 à 14 % de croissance (discount, travail en EHPAD...), d'où un investissement massif dans les grosses officines au détriment des petites. Et 2 % des officines on disparu depuis 1999. Sachant qu'un moratoire sur les installations a été instauré... jusqu'en 2010. Conséquences : une accession à la propriété d'officines rentables devenue impossible aux jeunes, une augmentation de la valeur des fonds... des grosses officines, une concurrence difficile sur les prix, une stratégie de regroupement quasi indispensable...

Autre pays, autre tendance : en Allemagne, certaines officines ayant adhéré à la franchise Doc Morris ont vu leur CA doubler.

Ouverture du capital : vers la Cour de justice

« Je crains une course-poursuite entre le recours européen [contre la France] et la directive santé. » Cette remarque d'Yves Trouillet, président de l'APR, lors d'une table ronde sur l'Europe est symptomatique des craintes des représentants de la profession : la Commission ira très probablement jusqu'à la Cour européenne de justice sur le dossier français. Certes, toutes ces procédures peuvent être longues, « mais il faut mettre à profit le temps qui nous reste d'ici l'an prochain pour argumenter », insiste Véronique Le Meur-Baudry, avocate en droit européen. « Parfois un Etat membre n'est pas mécontent d'utiliser Bruxelles pour faire bouger les choses, notait Françoise Grossetête, députée européenne (UMP), interviewée pour l'occasion. Cela dit, quand quelque chose marche bien, pourquoi cela ne servirait-il pas d'exemple ? » C'est vrai, pourquoi pas...

Rémunérer la non-dispensation ?

Quinze motions ont été votées dimanche par les congressistes suite aux différents ateliers participatifs organisés la veille. A noter l'idée de négocier une « rémunération incitative à la non-dispensation » quand cela apparaît nécessaire au comptoir. Même si le staff de la FSPF estime que l'essentiel de la rémunération ne peut en aucun cas être « déconnecté de la chose vendue ».

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