Vaccin rime avec demain - Le Moniteur des Pharmacies n° 2652 du 25/11/2006 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2652 du 25/11/2006
 

RECHERCHE - VACCINATION

Cahier spécial

L'annuel

Les chercheurs ne sont finalement pas si éloignés des dompteurs. Pas après pas, tels des dresseurs de fauves, ils apprivoisent le système immunitaire et découvrent de nouvelles stratégies vaccinales. Mais sur la piste aux étoiles, l'exercice reste périlleux.

A peine la folie fiévreuse de la grippe aviaire était-elle retombée que le virus du chikungunya fit parler de lui. Les menaces infectieuses sont aussi inattendues que redoutables. Si la vaccination marque des points, elle bute encore sur les « parades » de certains virus. Il a ainsi fallu 25 ans de recherche sur le VIH pour qu'un vaccin arrive enfin. Et encore, il est en essai de phase III et seulement en Thaïlande (voir p. 74).

Cinq laboratoires (GSK, Sanofi Pasteur, Wyeth, Merck et Novartis) se partagent ce juteux marché. Avec 8 milliards d'euros en 2005, il enregistre une croissance de 10 à 15 %.

Pas de recherche sans collaborations

« Il est difficile de pénétrer ce marché en raison des infrastructures et du très haut niveau de connaissance qu'impose la fabrication d'un vaccin », explique Philippe Monteyne, vice-président en charge du développement mondial des vaccins chez GSK Biologicals. Les vaccins ont représenté 5 % des ventes du groupe en 2005 (environ 2 MdEuro(s)). Le leader européen a misé sur les adjuvants qui potentialisent la réponse immunitaire. Son portefeuille en comprend une vingtaine. En juin 2005, il a acquis la société américaine Corixa qui a mis au point le monophosphoryl lipid A, présent dans un grand nombre de vaccins GSK Biologicals. « Les vaccins de demain doivent répondre à trois exigences : offrir une couverture vaccinale de longue durée, ajuster la concentration minimale efficace d'antigène pour produire plus de doses et combattre des maladies infectieuses à ce jour imparables », détaille Philippe Monteyne.

La formulation orale du vaccin contre le Rotavirus destiné aux enfants et l'utilisation d'une technologie originale pour le vaccin contre le Papillomavirus, la VLP (virus-like particle), qui consiste à reconstituer une capside virale dénuée d'effets pathogènes, sont deux innovations technologiques opérées par le laboratoire britannique. « La moitié de nos investissements de recherche porte sur des collaborations. C'est un cas unique chez un producteur de vaccins », fait remarquer Philippe Monteyne.

L'attrait des biotechs sur les gros labos

La vaccination est l'exemple emblématique d'une interactivité efficace entre les recherches académiques et industrielles. A preuve, la progression du géant français Sanofi Pasteur, à qui profitent ses liens avec les chercheurs pasteuriens. Ses ventes de vaccins atteignaient 1,7 MdEuro(s)(+ 20 %) à fin septembre. « Je vois deux explications à ce phénomène. Tout d'abord, l'essor de la médecine de prévention. Nous faisons le constat de l'impact de la vaccination sur la santé publique. Ensuite, il y a une prise de conscience autour des maladies émergentes. Les autorités de santé se rendent compte de l'importance de la vaccination », avance Marie-Josée Quentin-Millet, directrice de la recherche-développement de Sanofi Pasteur sur le site de Marcy-l'Etoile (Rhône).

Le laboratoire n'a pas lésiné sur les accords avec des sociétés de biotechnologies. En septembre dernier, il annonçait son premier essai clinique sur un vaccin de nouvelle génération contre la grippe saisonnière, issu d'une technologie inédite de culture cellulaire, la PER.C6, acquise sous licence auprès de la société hollandaise de biotechnologie Crucell NV. Objectif : réduire la dépendance vis-à-vis de l'approvisionnement en oeufs, couramment utilisés comme systèmes d'expression des antigènes. Cette technologie augmente donc les capacités de production. Ce qui est essentiel car, selon les prévisions de la société de conseil stratégique Alcimed, le marché du vaccin devrait enregistrer une croissance de 10 % par an jusqu'en 2010. Un faisceau d'éléments conduit à cette observation : l'arrivée de nouveaux vaccins et le vieillissement de la population, entraînant une augmentation de la consommation des virus antigrippaux...

La bioproduction étant devenue une étape critique, Sanofi Pasteur a également noué une collaboration avec la société de biotechnologie Acambis basée à Boston, aux Etats-Unis, pour mettre au point un dimère de virus de la dengue, le ChimeriVax-Dengue. Le vaccin est en essai de phase II.

En acquérant la société américaine Chiron en avril dernier, Novartis a créé une nouvelle division Vaccins et Diagnostics, impliquée dans le développement accéléré de nouveaux vaccins.

L'Américain Wyeth a déboursé 2 milliards de dollars pour installer la plus grande unité de bioproduction sur le site de Grange Castle en Irlande. Inaugurée en septembre 2005, l'usine fabrique déjà Prevenar. Toujours en 2005, 2 milliards d'euros ont été investis en recherche et développement. Wyeth travaille aussi sur la combinaison de vaccins : grippe, herpès génital, gonocoque et sida sont dans sa ligne de mire.

La recherche publique n'est pas en reste

En mai dernier, c'était au tour de Merck d'annoncer l'acquisition de la société GlycoFi, laquelle a mis au point une technologie de glycosylation des protéines. Comme GSK Biologicals, Merck a développé un vaccin contre le Papillomavirus, toujours avec la technologie VLP.

Enfin, Pfizer vient lui aussi de se lancer dans la course contre les maladies infectieuses en rachetant PowderMed Ltd, une société spécialisée dans les vaccins à ADN.

L'Agence nationale de la recherche a financé en 2005 15 projets de recherche (5 millions d'euros), sur les maladies infectieuses. L'accent est mis sur la grippe aviaire et le chikungunya. La recherche sur le système immunitaire n'a pas non plus connu de répit. Les connaissances accumulées ouvrent la voie à l'immunothérapie des cancers et peut-être à celle des allergies. Des vaccins plus efficaces, produits à plus large échelle avec une innocuité validée sur des essais cliniques d'ampleur inégalée : l'équation implique inévitablement une augmentation des coûts. « Le coût de production est très alourdi par le niveau de sécurité de ces produits », constate Marie-Josée Quentin-Millet.

Le vaccin en chiffres

- 5 laboratoires se partagent le marché du vaccin (GSK, Sanofi Pasteur, Wyeth, Merck et Novartis).

- 8 milliards d'euros en 2005

- + 10 à 15 % en 2005.

- + 10 % par an prévus jusqu'en 2010.

Six stratégies vaccinales à l'étude

- Vaccin vivant recombinant : les souches de micro-organismes sont rendues inoffensives par voie génétique. Les gènes impliqués dans la pathogénicité microbienne sont retirés ou inexpressifs. Leur coût de production est moindre et offre un meilleur niveau de sécurité sans aucun risque de revirulence.

- Vecteur viral : les chercheurs modifient le génome du virus ou des bactéries en y introduisant des gènes codant pour des antigènes d'autres micro-organismes. Ces vecteurs viraux pourraient porter des antigènes issus de plusieurs agents pathogènes différents. On obtiendrait ainsi des vaccins multivalents.

- Vaccin protéique : il s'agit d'injecter directement les molécules antigéniques, protéines plus ou moins complexes. Ces dernières sont obtenues en modifiant génétiquement une levure ou une cellule animale pour la rendre capable de synthétiser et sécréter la protéine immunogène souhaitée. Après purification, ces protéines sont formulées avec des adjuvants pour constituer des vaccins moléculaires (ou sous-unités).

- Vaccin conjugué : c'est un vaccin protéique plus complexe. Les antigènes ne sont pas exclusivement de nature protéique. Ils peuvent être couplés à des sucres et c'est l'ensemble qui possède le pouvoir immunogène.

- Autre vecteur : le vecteur a la mission de présenter des antigènes au système immunitaire. Le principe des enveloppes vides de virus est déjà validé. Avantage : ces coquilles vides ne risquent pas de se multiplier dans l'organisme.

- Vaccins à ADN nu : pourquoi ne pas injecter directement le gène codant pour l'antigène immunogène ? La vaccination génétique vise à introduire par injection intramusculaire (ou par d'autres techniques) le gène codant pour l'antigène vaccinal directement dans les cellules musculaires de l'organisme. L'ADN pénètre dans la cellule qui va ensuite synthétiser elle-même l'antigène. Cette méthode, simple et peu coûteuse, offre une protection durable, limitant ainsi le recours aux rappels. Reste à la valider à large échelle.

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