Réévaluation ou dévalorisation ? - Le Moniteur des Pharmacies n° 2647 du 21/10/2006 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2647 du 21/10/2006
 

SMR INSUFFISANTS

Actualité

L'événement

La HAS a annoncé jeudi le résultat de la réévaluation de 133 spécialités avec, dans la plupart des cas, un SMR insuffisant à la clé. En attendant l'annonce du ministre sur leur sort en matière de remboursement, le sujet a vite tourné à la dévalorisation dans la presse grand public. Préparez-vous à argumenter...

La presse grand public s'est fait l'écho toute la semaine du classement des vasodilatateurs - entre autres - en service médical rendu (SMR) insuffisant. 145 médicaments concernés a-t-on pu lire. Première inexactitude : ce préambule à une troisième vague de déremboursements touche 133 spécialités mais, surtout, il eût été préférable de parler de quarante molécules. Seconde inexactitude : l'adjectif inefficace a bien entendu, comme d'habitude, été asséné un peu partout pour qualifier ces produits à SMR insuffisant. Un abus de langage problématique, estiment le ministère et la HAS. Mais Xavier Bertrand ne déclarait-il pas lui-même, il y a tout juste un an (pour justifier la deuxième vague de déremboursements), que « tout le monde conviendra qu'il vaut mieux rembourser un médicament efficace qu'inefficace ». Si le politique montrait l'exemple...

L'efficacité n'est pas LE critère...

Dans ce condiv, que dire à l'assuré dont le produit fétiche est soudain qualifié d'inefficace et probablement en passe d'être déremboursé ? D'abord, que cinq critères scientifiques différents peuvent concourir à attribuer un SMR insuffisant. Certes, efficacité et effets secondaires en sont un. Mais il en existe quatre autres (voir ci-dessous) et la pondération de ces critères n'est pas fixe. Autrement dit, la HAS pourra par exemple donner un SMR insuffisant parce que la pathologie qu'il soigne est bénigne, sans trop faire entrer les quatre autres critères en ligne de compte. Inversement, un produit destiné à traiter une pathologie gravissime, même peu efficace, pourra bénéficier d'un fort niveau de SMR s'il n'y a pas d'alternative thérapeutique.

Autre élément à avancer auprès des patients : l'argument économique bien entendu (voir ci-contre) - qui n'est pas forcément illégitime. Mais encore faudrait-il que les gouvernants le disent clairement aux Français. Le Haut Comité pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM) stipule lui-même, dans son dernier rapport, que si l'on se désengage d'un certain nombre de prises en charge, « une telle démarche devra s'accompagner d'une véritable information des patients sur la nature des produits d'automédication et d'une meilleure communication sur les critères de remboursement d'un médicament ». On en est encore loin. Concernant la politique d'automédication promise dans notre pays, Xavier Bertrand avait annoncé des propositions pour cette rentrée... Le HCAAM a prôné la création d'un « SMR d'automédication », se désolant de l'assimilation de produits à SMR insuffisant, virtuellement déremboursables, à des produits inefficaces. Sera-t-il suivi ?

Les déremboursements après les présidentielles ?

Quant à l'avenir de ces 133 « spécialités » en termes de (dé)remboursement, en théorie, un produit à SMR insuffisant n'est pas pris en charge par la Sécu (selon un décret de 1999). Mais la proximité de l'élection présidentielle et quelques sondes lancées ça et là laissent penser que les vasodilatateurs, notamment, pourraient connaître un régime transitoire, comme les veinotoniques cette année : passage à un taux de 15 % durant quelque temps, puis déremboursement. La HAS tendrait presque une perche au politique en suggérant que le déremboursement des médicaments (vasodilatateurs) indiqués dans les troubles cognitifs du sujet âgé pourrait être mis en oeuvre « de manière progressive ». Car ils concernent des personnes âgées pour lesquelles la prise de ce produit est devenue un « rituel », et « il faut laisser du temps aux prescripteurs et aux patients pour comprendre que ces produits ne sont pas performants », indique Gilles Bouvenot. Le président de la Commission de la transparence précisant, non sans ironie, que tous les efforts ont été faits pour leur trouver un intérêt scientifique dans cette indication. En vain. Leur succès s'assimilerait ici à un bel effet placebo, suggère-t-il. Alors que les méfaits de la polymédication, eux, sont scientifiquement avérés...

De plus, la HAS a introduit des nuances quant aux SMR attribués : un même produit aura un SMR supérieur dans une indication (voir ci-dessous) et insuffisant pour toutes ses autres indications. Une subtilité qui, si elle se traduit par des différences de prise en charge pour un même produit, demandera un minimum de courage aux prescripteurs (mention « NR » sur l'ordonnance), sans quoi le pharmacien devra « déminer » au comptoir. En cas de taux différents selon les indications, le médecin devra-t-il noter le taux ou l'indication sur l'ordonnance ? La HAS n'apporte pas de réponse. Ce sera étudié après la décision du ministre (élaboration de fiches d'aide aux professionnels de santé). En filigrane, l'idéal serait que, rapidement, il n'y ait plus guère de prescriptions dans certaines indications.

A retenir

40 molécules rÉÉvaluées

33 héritent d'un SMR insuffisant, 6 d'un SMR supérieur dans certaines indications.

Semantique

La confusion « SMR insuffisant = produit inefficace » sévit toujours. La HAS compte sur la pédagogie des professionnels auprès des malades...

déremboursés ? Le sort de ces produits pourrait être annoncé par Xavier Bertrand la semaine prochaine. Un taux transitoire de 15 % pour les vasodilatateurs est évoqué.

CINQ CRITÈRES SCIENTIFIQUES

Il n'y a aucune pondération fixe entre ces cinq critères qui servent à la HAS pour attribuer un SMR à un médicament. L'un peut donc primer sur tous les autres.

1) l'efficacité et des effets indésirables du médicament,

2) sa place dans la stratégie thérapeutique au regard notamment des autres thérapies disponibles,

3) la gravité de la pathologie à laquelle il est destiné,

4) le caractère préventif, curatif ou symptomatique du traitement médicamenteux,

5) son intérêt pour la santé publique.

Trois critères économiques

Il est évident qu'après l'avis de la HAS, la décision du politique de dérembourser se fonde aussi sur le poids des dépenses d'assurance maladie, au regard de trois critères :

1) le poids des prélèvements obligatoires dans l'économie et l'accroissement de l'endettement si l'on veut, du coup, épargner les prélèvements...

2) l'éventuelle priorité à donner, à budget limité, à des prises en charge « plus pertinentes » (pathologies lourdes...),

3) la nécessité de limiter l'augmentation du ticket modérateur et par conséquent le poids financier supporté par les complémentaires (et, in fine, par leurs cotisants).

Les principes actifs concernés

33 molécules (89 spécialités) se voient attribuer un SMR insuffisant (leur déremboursement est recommandé) :

- surtout des vasodilatateurs : Iskédyl, Sermion, Tanakan, Torental...

- des produits contre les affections ORL : Pneumorel, Surbronc...

- antidiarrhéiques : Ercéfuryl (pas d'effet avéré dans la diarrhée infectieuse)...

- c'est aussi le cas de la Persantine (sauf voie injectable), du Praxinor...

6 molécules (50 spécialités) se voient attribuer un SMR supérieur, mais dans certaines indications seulement (le maintien du remboursement est recommandé uniquement dans ces indications) ! :

- trimétazidine (Vastarel...) pour l'angine de poitrine et les vertiges (SMR modéré), buflomédil à 150 et 300 mg (Fonzylane...) et naftidrofuryl (Praxilène...) dans l'artérite oblitérante des membres inférieurs (SMR faible), piracétam (Nootropyl...) dans les myoclonies (SMR faible) ou piribédil 20 et 50 mg (Trivastal..., SMR important dans la maladie de Parkinson).

Enfin, trois antibiotiques gardent un SMR supérieur, tout en ayant « perdu leur place dans la stratégie thérapeutique » :

- Colimycine (SMR important), Nibiol (SMR faible) et Terramycine (SMR important). Argument : ils pourraient retrouver leur importance en cas d'évolution des résistances bactériennes.

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