Adjoints, préparateurs : interchangeables ? - Le Moniteur des Pharmacies n° 2639 du 02/09/2006 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2639 du 02/09/2006
 

CONTRAT D'ÉTUDES PROSPECTIVES

Actualité

L'événement

Le « contrat d'études prospectives » dans la pharmacie, annoncé depuis de longs mois, a enfin été publié. Il fait le point, sans faux semblants, sur la situation des salariés dans l'officine. Et pose des questions qui dérangent.

On allait voir ce qu'on allait voir. Depuis plusieurs mois déjà les responsables syndicaux, tant patronaux que des salariés, réservaient leurs commentaires sur la question de l'emploi et des salaires à l'officine, attendant les conclusions d'un rapport sur le sujet commandé par la Commission paritaire nationale pour l'emploi (CPNE). Grâce à lui, disaient-ils, on pourrait quantifier très précisément les besoins du secteur, redéfinir les métiers et, même, refondre la grille des salaires. De ce point de vue, le rapport fait pschitt !

« Rien dans ce rapport, qui enfonce beaucoup de portes ouvertes, ne permet de servir de base à une quelconque refonte de la grille des salaires », reconnaît Claude Japhet, président de l'UNPF. Mais ce travail, fondé sur des enquêtes de terrain, n'aura pas été vain. Il a le mérite de mettre en lumière les problèmes concrets rencontrés par les officines en termes de ressources humaines, et particulièrement les difficultés de positionnement des adjoints et des préparateurs au sein de l'officine. « Les activités comparées des adjoints et des préparateurs se recoupent nettement : ils font presque exactement le même travail, souligne le rapport. [...] L'état des lieux laisse apparaître une quasi-interchangeabilité dans les activités concrètement exercées et malgré des qualifications bien différenciées entre le préparateur et l'adjoint. » Conséquences : une « démotivation des adjoints, dont les connaissances sont sous-utilisées, et la frustration des préparateurs qui perçoivent une rémunération inférieure pour une activité assez similaire ». Tout cela n'est certes pas une révélation, mais c'est écrit pour la première fois noir sur blanc dans un rapport public. « Le rapport confond activité et métier, déplore Claude Japhet. Préparateurs et adjoints ont en partie la même activité, mais ils ne font pas le même métier. La différence tient dans la compétence, la responsabilité et dans la validation de l'activité par le pharmacien. »

Redéfinir les métiers et les salaires.

Un faux argument pour Patrick Le Métayer, secrétaire général de la branche officine de Force ouvrière. « Seul le titulaire est assuré en responsabilité civile, même l'Ordre ne demande plus aux adjoints de l'être personnellement, souligne-t-il. Il ne reste aux adjoints comme aux préparateurs que leur responsabilité pénale. Pour autant, nous ne réclamons pas une égalité de salaires. La hiérarchie dans l'officine doit rester ce qu'elle est. » « La délivrance reste sous la responsabilité de l'adjoint, conformément au Code de la santé publique, contredit Michel Le Direach, membre de la CFDT, président de la CPNE. Mais nous n'échapperons pas à une redéfinition des métiers et à une revalorisation des salaires, des préparateurs comme des adjoints. Ce CEP, que nous réclamions depuis dix ans, a le mérite sinon d'apporter des réponses, au moins de poser les questions qui dérangent. »

Et dans cette catégorie, le rapport se penche sur la problématique du contrôle effectif de la dispensation du préparateur par un pharmacien : « L'enquête de terrain a permis de démontrer que les préparateurs exercent fréquemment une activité de dispensation et de conseil au comptoir sans contrôle effectif. » Dans certains cas, « l'enquête a montré que la charge de travail rend difficile la présence systématique d'un pharmacien, que les congés et les arrêts maladie peuvent perturber le respect du quota d'adjoints, ou que, lors de pics d'activités ou de situations exceptionnelles, une personne non habilitée peut être amenée à délivrer des médicaments ».

Or, actuellement, selon les dispositions du Code de la santé publique (article L. 4241-1), le préparateur assume ces tâches sous la responsabilité et le « contrôle effectif » d'un pharmacien, le titulaire, un adjoint ou un pharmacien remplaçant. Mais cette notion est trop restrictive pour la plupart des officinaux. « Le pharmacien n'a pas besoin de s'épuiser à contrôler toutes les ordonnances. La délivrance d'une pilule contraceptive pour une patiente qui vient pour son 14e renouvellement nécessite-t-elle un contrôle effectif ? », interroge Claude Japhet. Selon le rapport, la notion de contrôle effectif mériterait d'être mieux définie dans le CSP. « Le secteur de l'officine souhaiterait essentiellement que les divs mentionnent qu'"un pharmacien doit être présent dans l'espace officinal pour assumer une responsabilité de prise en charge au cas où le préparateur ou un patient le demande", plutôt que de faire référence à un contrôle effectif. » Il serait utile également de préciser « jusqu'où va la responsabilité du préparateur dans la délivrance, son coeur de métier », et de l'expliciter dans la législation.

Les adjoints doivent se recentrer sur de nouvelles activités.

A l'opposé, l'Ordre est plus frileux quant à la compétence des préparateurs. Selon lui, l'analyse de l'ordonnance requiert des connaissances et un raisonnement méthodologique relevant de la seule expertise du pharmacien. Quant au ministère, il s'est nettement prononcé pour le maintien du div en l'état. La question est loin d'être tranchée mais le débat est désormais sur la place publique. « Ce que je retiens, c'est avant tout le malaise des adjoints qui n'ont pas d'évolution possible dans les officines », note Michel Le Direach. « Cela durera tant que l'on gardera les structures des officines telles qu'elles sont aujourd'hui où 70 % fonctionnent avec un seul titulaire ou avec un seul assistant. Il faut ouvrir le capital ! », insiste Claude Japhet.

Selon le rapport, l'introduction du système de parts en industrie, qui permet de préserver le capital officinal et laisse envisager une participation plus générale des salariés aux bénéfices, s'impose. Le rapport propose également que les adjoints se recentrent à l'avenir sur les activités qui sont en train de prendre forme : rôle éventuel de pharmacien prescripteur, de référent du médicament au sein du réseau de soins, activités de prévention, suivi des malades chroniques et de la toxicomanie, opinion pharmaceutique, cogestion du dossier médical personnel, management d'une équipe restreinte, supervision de la gestion de l'entreprise, etc. Le rapport sera-t-il suivi d'effet ? Rien n'est moins sur. « La CPNE est aujourd'hui totalement bloquée par la guerre que se livrent deux syndicats patronaux (FSPF et USPO) pour leur représentation à la CPNE, regrette Patrick Le Métayer. Je crains que cela ne dure et que le rapport passe à la trappe. »

Retrouvez le rapport sur

http://www.travail.gouv.fr/IMG/pdf/officine_-_Tome_1.pdf

A noter :

600 000 préparateurs : Les effectifs des préparateurs et des employés ne font l'objet d'aucune mesure officielle. Le rapport estime, lui, le nombre de préparateurs en officine en 2005 à 60 000 personnes environ, contre 25 300 adjoints (selon l'Ordre) et 32 700 employés (majoritairement des rayonnistes et le personnel d'entretien), soit la moitié des effectifs salariés de l'officine. C'est la première fois qu'un tel chiffre est annoncé. Jusqu'ici, tous les responsables de la profession parlaient plutôt de 30 000 préparateurs.

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