Achat des murs professionnels : Le crédit-bail immobilier en six questions - Le Moniteur des Pharmacies n° 2639 du 02/09/2006 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2639 du 02/09/2006
 

FINANCES

Entreprise

Le crédit-bail ne sert pas qu'à financer les équipements de l'officine. Cette forme de location avec option d'achat peut également être utilisé pour l'achat des murs. Une possibilité méconnue dont des experts vous font découvrir l'attrait.

1.Qu'est-ce qu'un crédit-bail immobilier ?

Luc Fialletout, directeur général adjoint d'Interfimo, nous livre son principe : « Une opération de crédit-bail immobilier consiste à faire acquérir des murs (et éventuellement un terrain) par une société financière (le crédit-bailleur) qui les loue à un "preneur", bénéficiaire d'une option d'achat à une date et à un prix convenus (la valeur résiduelle). Le preneur est soit le pharmacien en nom propre, soit une société d'exploitation (SNC, SEL...), soit une SCI contrôlée par le pharmacien utilisateur de l'immeuble. L'objectif du crédit-bailleur est de rémunérer et de récupérer les capitaux investis dans l'immeuble et les frais d'acquisition. Il facture au preneur un loyer qui recouvre le remboursement progressif de son investissement et des intérêts sur le capital restant dû. La valeur résiduelle correspond au capital restant dû, soit au terme normal du contrat (elle est alors symbolique), soit avant terme lorsqu'il est possible d'interrompre le contrat. »

C'est une technique de financement à part entière. « Le contrat de crédit-bail immobilier est défini comme une opération de location longue durée assortie d'une promesse de vente au profit du pharmacien », complète Christian Bergot, expert-comptable du cabinet Conseils et Auditeurs Associés.

2. Comment fonctionne-t-il ?

« Comme dans le cas d'un crédit, explique Luc Fialletout, la répartition au sein des loyers entre remboursement du capital et intérêts peut être aménagée afin que les échéances soient identiques tout au long du contrat (les remboursements en capital sont progressifs) ou que les remboursements en capital soient constants (les échéances sont dégressives). Les loyers sont fiscalement déductibles, sauf la fraction remboursant le capital investi dans l'achat éventuel d'un terrain - qui sera reportée sur les dernières échéances. »

3. Quels sont ses avantages ?

« Ce contrat allie souplesse d'utilisation et performance fiscale, résume Christian Bergot, qui relève plusieurs points appréciables : Les loyers de crédit-bail sont intégralement déductibles du résultat imposable du crédit-preneur, sauf pour la partie de l'amortissement du terrain. Un financement en crédit-bail immobilier pour une période comprise entre 7 et 12 ans permet d'accélérer l'amortissement du bien immobilier par le crédit-preneur. L'attrait pour le crédit-bail réside enfin dans le financement à 100 % des investissements immobiliers en comparaison avec le crédit classique impliquant un autofinancement d'au moins 20 %. »

Les contrats de crédit-bail courant généralement sur une durée de 10 à 15 ans, « la déductibilité des loyers est avantageuse par rapport à la situation d'un acquéreur direct qui déduirait aussi les intérêts d'un crédit traditionnel, mais non ses remboursements en capital », fait encore observer Luc Fialletout (certes, il pourrait amortir l'immeuble, mais sur des durées beaucoup plus longues, de 30 à 40 ans).

En crédit-bail, il y a donc adéquation entre les charges financières et les déductions fiscales, grâce à un « suramortissement » durant la phase de location. « Cet avantage fiscal temporaire sera cependant neutralisé lors de la levée d'option, pondère Christian Bergot. Il doit en effet être relativisé car le suramortissement est réintégré en bénéfice imposable l'année de la levée d'option d'achat (hormis les opérations visant des locaux industriels et commerciaux situés dans certaines zones défavorisées). »

De fait, l'intérêt financier de l'opération doit être étudié au cas par cas, en fonction de la situation du crédit-preneur. « L'opération est neutre (voire avantageuse après inflation) pour une SEL, par exemple, assujettie à un taux unique d'IS (15 % ou 33,33 %) ; mais elle risque d'être pénalisante pour un contribuable BIC imposé aux taux progressifs de l'impôt sur le revenu, explique Luc Fialletout. Car ce "rattrapage" sur une seule année sera imposé à un taux sans doute supérieur à ceux auxquels étaient déduits les loyers. »

4. Quels sont ses inconvénients ?

« Un financement par crédit-bail conduit à inscrire irrévocablement l'immeuble dans le patrimoine professionnel de l'utilisateur, lorsqu'il en devient propriétaire au terme du contrat ; pour un pharmacien titulaire par exemple, cela présente l'inconvénient de décaler, de la durée du contrat, le délai de quinze ans à partir duquel les plus-values professionnelles à long terme ne sont plus imposables », signale Luc Fialletout.

Pour contourner ce problème, certains sont tentés de recourir à une société civile immobilière comme contractante du crédit-bail pour éviter l'inscription professionnelle des locaux. « C'est souvent une mauvaise solution... Dans un premier temps, le crédit-bail est consenti à une "SCI intermédiaire privée", au régime fiscal de l'impôt sur le revenu, qui sous-loue les locaux à la pharmacie ; à la fin du contrat, la SCI devient propriétaire en acquittant la valeur résiduelle, puis les loue directement à la pharmacie. Or le fisc estime que les recettes de la SCI changent de nature lorsqu'elle devient propriétaire de l'immeuble et en tire prédiv pour taxer en "plus-value à court terme" (au taux marginal de l'impôt sur le revenu) la différence entre la valeur vénale de l'immeuble et son prix de revient (la valeur résiduelle et les suramortissements réintégrés). Même si cette imposition peut être reportée à la vente des parts de la SCI ou de l'immeuble, elle pénalise lourdement ce montage. »

Pour éviter cet inconvénient, Luc Fialletout suggère de créer une société intermédiaire permettant de dissocier la structure d'exploitation et la structure immobilière. Cette solution reste utilisable en crédit-bail, mais sous le régime de l'IS afin d'éviter le changement de nature des recettes à la levée d'option. Mais le pharmacien ne peut gagner sur tous les tableaux : cette option IS ne permet plus de profiter de l'exonération des plus-values à long terme accordée aux BIC par la loi de finances rectificative pour 2005.

5. Comment financer un terrain en crédit-bail ?

« Plusieurs cas peuvent être envisagés, présente Christian Bergot. Le pharmacien choisit le terrain et définit librement les caractéristiques de l'immeuble à construire. Il choisit librement ses prestataires. Un contrat de délégation de maîtrise d'ouvrage est signé à cet effet. Le crédit-bailleur se substitue au crédit-preneur et finance le terrain et la construction du bâtiment. La mise en loyer du contrat de crédit-bail est effectuée à l'achèvement de l'immeuble. Le financement peut aussi porter sur l'acquisition d'un immeuble en l'état futur d'achèvement ou d'un immeuble existant. Si l'immeuble comporte des travaux de rénovation, ceux-ci peuvent être pris en charge par le crédit-bailleur. Le financement d'extensions futures comme l'agrandissement d'une officine est aussi possible. »

6. Que choisir ?

Le pharmacien a le choix entre deux solutions pour financer ses murs professionnels :

soit l'immeuble est destiné à rester la propriété de ses utilisateurs (directement ou par le biais d'une société à l'IS) : le crédit-bail est alors une solution de financement attractive, à comparer au cas par cas avec le crédit, en actualisant les coûts et les déductions fiscales des deux techniques ;

soit il s'agit d'un immeuble destiné à rester dans le patrimoine privé du pharmacien, et mieux vaut le financer classiquement par un crédit sous couvert d'une SCI familiale à l'IR, surtout si sa valeur est susceptible de s'apprécier dans le temps.

A retenir

La technique du crédit-bail immobilier permet à l'entreprise d'investir sans immobiliser de capitaux.

Il est possible d'aménager le rythme des loyers de crédit-bail.

Le crédit-bail permet des déductions fiscales constantes, en adéquation avec les loyers.

La solution est attractive, sauf si l'immeuble doit rester dans votre patrimoine privé.

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