Les médicaments classe par classe - Le Moniteur des Pharmacies n° 2614 du 04/02/2006 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2614 du 04/02/2006
 

Cahier spécial

Les 17 nouvelles molécules de 2005

Cancérologie

Anagrélide

Xagrid - Shire France

L'anagrélide est un inhibiteur de l'AMPc-phosphodiestérase III. Il inhibe sélectivement la lignée plaquettaire. Les gélules de Xagrid sont indiquées en cas de thrombocytémie essentielle, avec comme facteur de risque une numération plaquettaire supérieure à 1 000 G/l, des antécédents thrombohémorragiques ou plus de 60 ans.

Il s'agit d'un traitement de seconde intention en cas d'efficacité insuffisante ou d'intolérance au traitement de référence, l'hydroxyurée (Hydréa). L'objectif thérapeutique est de réduire le nombre élevé de plaquettes. La posologie recommandée est de 1 mg par jour en deux prises per os. Au bout d'une semaine, un ajustement posologique par palier de 0,5 mg par jour sur une semaine est mené afin de trouver la posologie minimale efficace la mieux adaptée à chaque patient, sans dépasser 5 mg par jour en deux prises. La valeur cible à atteindre est un nombre de plaquettes inférieur à 600 G/l, la diminution étant généralement observée dans les 2 à 3 semaines après le début du traitement.

Les contre-indications à son utilisation sont l'insuffisance hépatique et l'insuffisance rénale sévères. Les effets indésirables les plus fréquents de Xagrid sont engendrés par le mécanisme pharmacologique du médicament et consistent en des céphalées, des palpitations, une rétention hydrique, des nausées ainsi que des diarrhées.

Sa place dans la classe : En l'absence d'études comparatives, Xagrid n'apporte qu'une amélioration du service médical rendu mineure (niveau IV) par rapport au traitement de référence Hydréa, sachant que d'autres alternatives thérapeutiques existent déjà, comme l'interféron alfa, le busulfan ou le radiophosphore.

Bevacizumab

Avastin - Roche

Le bevacizumab est un anticorps monoclonal anti-VEGF. Le VEGF est le facteur de croissance endothélial vasculaire. C'est le premier médicament antiangiogénique. Avastin inhibe la liaison du VEGF à ses récepteurs situés à la surface des cellules endothéliales. S'ensuivent une réduction de la vascularisation et une inhibition de la croissance tumorale. Avastin est indiqué en première intention dans le cancer colorectal métastatique, en association au protocole de chimiothérapie 5-FU + acide folinique plus ou moins irinotécan (Campto). La posologie classiquement utilisée est de 5 mg/kg en intraveineuse tous les 14 jours. Le traitement est poursuivi jusqu'à ce que la maladie se remette à progresser. Des métastases cérébrales et la grossesse contre-indiquent son emploi. Les effets indésirables les plus fréquents sont des diarrhées, une leucopénie, une hypertension artérielle, un risque de perforation digestive ainsi que des épistaxis.

Sa place dans la classe : Depuis 1990, les protocoles FOLFOX (5-FU + acide folinique + oxaliplatine) et FOLFIRI (5-FU + acide folinique + irinotécan) ont amené un gain d'efficacité important par rapport au schéma antérieur 5-FU + acide folinique. Avastin induit un allongement de la survie globale de 5 mois, un taux de réponse objective ainsi qu'un temps de survie sans progression plus important. Mais le temps jusqu'à détérioration de la qualité de vie reste comparable. L'ASMR d'Avastin est importante (niveau II).

Erlotinib

Tarceva - Roche

L'erlotinib est le seul inhibiteur de la tyrosine-kinase du récepteur au facteur de croissance épidermique (EGFR). De son action résulte l'inhibition de la phosphorylation intracellulaire qui entraîne une stase puis une mort cellulaire. Tarceva est indiqué en monothérapie dans le traitement du cancer bronchique non à petites cellules, dans les formes localement avancées ou métastatiques, après échec de deux lignes de chimiothérapie dont une ligne à base de platine.

Trois dosages existent : des comprimés à 25, 100 et 150 mg. La posologie classiquement recommandée est de 150 mg par jour en prise unique, une heure avant ou deux heures après un repas, avec un verre d'eau. Une réduction de dose est nécessaire en cas d'administration concomitante d'inhibiteurs enzymatiques du CYP3A4.

Les effets indésirables les plus fréquents sont nombreux : asthénie, augmentation du risque infectieux, diarrhées, nausées et vomissements, stomatites, hémorragies digestives, dyspnée, toux, fibrose pulmonaire ou pneumopathie interstitielle diffuse, prurit, éruption et sécheresse cutanée, ainsi que des conjonctivites et des kératopathies.

Sa place dans la classe : La médiane globale de survie est améliorée de 42,5 % sous Tarceva. En pratique, le nombre de patients en vie 12 mois après le début du traitement était de 31,5 % versus 21,5 % pour le groupe placebo. L'amélioration du service médical rendu par l'erlotinib n'est pas connue. Dans cette indication, l'arsenal thérapeutique était jusqu'à présent peu actif en termes d'amélioration de la survie mais avec un tableau d'effets indésirables conséquent.

Palifermin

Kepivance - Amgen

Le palifermin est le premier facteur de croissance recombinant humain des kératinocytes. Il se lie aux récepteurs de surface des cellules épithéliales, ce qui stimule la prolifération et la régulation positive des mécanismes cytoprotecteurs. Kepivance s'adresse aux adultes atteints d'hémopathie maligne et recevant un traitement myélosuppresseur en amont d'une greffe de moelle osseuse, et développant comme effet indésirable une mucite buccale sévère. L'objectif thérapeutique vise à réduire l'incidence, la durée et la sévérité de cette mucite. Le schéma thérapeutique s'organise en six administrations de 60 µg/kg en intraveineuse, trois en amont de la myélosuppression et trois en aval. Kepivance ne doit pas être administré dans les 24 heures précédant ou suivant la perfusion de la chimiothérapie, au risque de voir la sévérité et la durée de la mucite augmenter. Les effets indésirables les plus fréquents sont une altération du goût avec épaississement et coloration de la bouche, des oedèmes, des douleurs articulaires avec de la fièvre et un prurit.

Sa place dans la classe : Kepivance inaugure une nouvelle classe thérapeutique. Son profil de tolérance est particulièrement intéressant au regard de l'indication. En revanche, le schéma thérapeutique nécessite une bonne formation des équipes soignantes afin que ce traitement n'ait pas l'effet inverse de celui recherché. L'amélioration du service médical rendu par Kepivance n'est pas connue.

Porfimère sodique

Photobarr - Axcan Pharma

Le porfimère sodique est un agent photosensibilisant dont l'activité pharmacologique n'est déclenchée qu'après une photoactivation sous une lumière de longueur d'onde de 630 nm (laser). Les lésions cellulaires provoquées par le porfimère résultent de la propagation de radicaux libres. En effet, l'absorption de lumière par le porfimère entraîne la formation d'une porphyrine excitée, à l'origine de la formation de radicaux libres superoxydes et hydroxyles.

Photobarr est indiqué dans le traitement photodynamique des tumeurs, et notamment dans les dysplasies de haut grade, chez les sujets présentant un endobrachyoesophage (métaplasie de la muqueuse du bas oesophage) ou un oesophage de Barrett associé.

Photobarr s'injecte à la dose de 2 mg/kg en intraveineuse. Cette injection est suivie d'une irradiation laser 40 à 50 heures après,voire d'une seconde irradiation entre la 96e et la 120e heure.

Les effets indésirables les plus fréquents sont des sténoses oesophagiennes, une déshydratation, une dysphagie, des nausées, des vomissements, une constipation, de la fièvre et des réactions de photosensibilité. Les contre-indications à son utilisation sont les cas de porphyries, d'insuffisance rénale ou hépatique sévère, de varices oesophagiennes ou gastriques, d'ulcères de l'oesophage, de fistule trachéo- ou broncho-oesophagienne, ou encore d'érosion suspectée des gros vaisseaux sanguins.

Sa place dans la classe : Photobarr est un médicament orphelin, indiqué en première intention dans une pathologie où il n'existe pas d'alternative thérapeutique médicamenteuse. La population cible est celle des patients souffrant de dysplasie de haut grade et présentant un risque opératoire important du fait de l'âge ou d'une pathologie associée. Son ASMR est jugée importante (niveau II).

Cardiologie

Eplérénone

Inspra - Pfizer

L'éplérénone est un diurétique, antagoniste de l'aldostérone sur les récepteurs aux minéralocorticoïdes. L'étude « Ephesus » (« Eplerenone postacute myocardial infarction heart failure efficacy and survival study ») a prouvé que la prescription d'éplérénone en complément des traitements standard (IEC ou sartans, bêtabloquants et diurétiques) réduit le risque de morbimortalité cardiovasculaire. La réduction du risque absolu sur les critères de mortalité, toutes causes confondues, est de 2,3 %. Cette efficacité clinique concerne essentiellement les patients âgés de moins de 75 ans. Au-delà de cet âge, les bénéfices du traitement restent incertains.

L'éplérénone est bien tolérée. La survenue d'une hyperkaliémie par inhibition de la fuite potassique induite physiologiquement par l'aldostérone s'observe chez 3 à 4 % des patients. Inspra peut aussi induire la survenue d'étourdissements, d'une hypotension, de diarrhées, de nausées et d'anomalies de la fonction rénale.

Sa place dans la classe : L'éplérénone dérive structurellement de la spironolactone (Aldactone) qui bénéficie d'une extension d'indication dans l'insuffisance cardiaque chronique sévère. Elle en partage les propriétés thérapeutiques mais bénéficie d'un profil de tolérance amélioré. La transposabilité des résultats de l'étude « Ephesus » à la pratique clinique n'est pas assurée : l'éplérénone apporte une amélioration du service médical rendu modérée (III) chez les insuffisants cardiaques après un infarctus du myocarde récent. Une étude de suivi des patients traités par éplérénone est demandée.

Ezétimibe

Ezetrol - MSD-Chibret

La découverte de la structure de la protéine spécifiquement impliquée dans la résorption intestinale du cholestérol (protéine NPC1L1) a permis de développer par modélisation moléculaire des inhibiteurs spécifiques de cette résorption. L'ézétimibe inaugure cette classe thérapeutique. Il inhibe l'absorption du cholestérol entérique en agissant sur les entérocytes de la bordure en brosse de la paroi de l'intestin grêle, en respectant totalement l'absorption des autres stérols.

Ezetrol bénéficie d'une tolérance satisfaisante, qu'il soit administré seul ou associé à une statine. L'incidence globale des effets indésirables est comparable à celle d'un placebo. Céphalées, douleurs abdominales et diarrhées, fatigue, myalgies demeurent habituellement légères et transitoires.

L'association de l'ézétimibe à une statine permet d'inhiber le cycle du cholestérol à deux niveaux : la réduction du LDL-cholestérol est ainsi augmentée de 25 % par rapport à celle observée avec une statine seule et à posologie usuelle.

Sa place dans la classe : L'ézétimibe présente avant tout un intérêt pour les hypercholestérolémies graves (origine génétique). Ezetrol offre une possibilité thérapeutique supplémentaire pour parvenir aux objectifs thérapeutiques de plus en plus ambitieux en matière de réduction des taux de cholestérol. Il bénéficie d'une ASMR modeste (III) par rapport à la colestyramine chez les patients ayant une hypercholestérolémie primaire non contrôlée par une statine seule, ou chez lesquels la statine est inappropriée ou mal tolérée. Il a également une ASMR III, en association avec une statine, en cas d'hypercholestérolémie familiale homozygote par rapport à la colestyramine. Il bénéficie d'une ASMR importante (niveau II) en cas de sitostérolémie homozygote.

Dermatologie

Efalizumab

Raptiva - Serono France

L'éfalizumab est un anticorps monoclonal spécifiquement dirigé contre la sous-unité CD11a d'une protéine de surface des lymphocytes T, la protéine d'adhésion LFA1. Celle-ci est indispensable aux étapes fondant la séquence immunopathologique morbide du psoriasis : sensibilisation du lymphocyte, migration du lymphocyte sensibilisé vers le derme, réactivation du lymphocyte dans le derme et l'épiderme, libération de cytokines pathogènes.

Comme avec tous les anticorps monoclonaux, l'administration d'éfalizumab peut induire un syndrome pseudo-grippal dans les 48 heures suivant l'injection. L'incidence des événements indésirables graves lors du traitement a été comparable à celle d'un placebo administré dans les mêmes conditions : cellulite, fibrillation auriculaire, affections coronariennes, gastroentérites, pneumonies, carcinomes cutanés, etc. Une perte réversible de l'audition semble survenir plus fréquemment chez les sujets bénéficiaires du traitement. Lors des essais cliniques, ces symptômes ont entraîné un arrêt du traitement chez moins de 5 % des patients à 12 semaines.

Raptiva constitue une réponse thérapeutique de dernière ligne - pour un cycle de traitement limité à douze semaines (poursuivi chez les seuls sujets répondeurs) - dans le traitement du psoriasis chronique en plaques, modéré à sévère, et en cas d'intolérance ou de contre-indication à d'autres traitements systémiques (ciclosporine, méthotrexate, puvathérapie). Il peut constituer, dans ces circonstances particulières, une alternative à l'usage de l'étanercept (Enbrel).

Sa place dans la classe : Il n'existe pas de donnée comparative directe en termes d'efficacité de Raptiva par rapport aux traitements systémiques de référence : les immunomodulateurs tels la ciclosporine ou le méthotrexate, les rétinoïdes tels l'acitrétine (Soriatane) et l'étanercept. Les données concernant l'impact de Raptiva sur la qualité de vie des patients demeurent encore très limitées, notamment en cas d'insuffisance rénale ou hépatique. L'éfalizumab améliore le service médical rendu de façon mineure (ASMR IV) en termes d'efficacité.

LES NOUVEAUX PRINCIPES ACTIFS APPARUS EN FRANCE CES DIX DERNIÈRES ANNÉES

Endocrinologie

Insuline détémir

Levemir - Novo Nordisk

L'insuline détémir est un analogue de l'insuline humaine d'action basale. Elle s'obtient en supprimant un acide aminé terminal (la thréonine en position B30) et en greffant un acide gras à longue chaîne, l'acide myristique (sur la lysine B29). Levemir se présente sous la forme d'une solution limpide, neutre et incolore. L'insuline détémir se lie fortement mais réversiblement à l'albumine, aussi bien dans le torrent circulatoire qu'en sous-cutané, en raison de l'affinité de l'acide myristique pour l'albumine. Il s'établit un équilibre entre la forme libre et la forme liée de l'hormone, seule la forme libre pouvant franchir la paroi capillaire pour gagner la circulation sanguine. L'insuline détémir peut constituer un traitement de base à raison de une ou deux injections par jour. Elle peut aussi être associée à une insuline d'action courte ou rapide administrée lors des repas, notamment chez le patient diabétique de type 2.

Sa place dans la classe : Le profil cinétique de l'insuline détémir n'a pas la même origine que celui de l'insuline glargine (Lantus). L'insuline glargine est injectée sous la forme d'une solution acide qui précipite au contact des liquides neutres sous-cutanés, d'où une libération retardée et prolongée. Levemir réalise un réservoir sous-cutané liquide car il ne précipite pas après injection, ce qui contribue à limiter l'incidence des variations cinétiques intra-individuelles. Cet analogue d'insuline humaine autorise un contrôle glycémique comparable à celui obtenu avec l'insuline humaine de type NPH, diminue le risque d'hypoglycémie nocturne chez les diabétiques de type 1. Son administration est associée à une prise de poids plus faible que sous insuline NPH. Levemir partage le niveau d'ASMR de Lantus (modeste).

Hémostase

Bivalirudine

Angiox - Nycomed

Anticoagulant, la bivalirudine est un inhibiteur direct et spécifique de la thrombine. Elle est indiqué chez les patients subissant une intervention coronaire percutanée en tant que traitement préventif précoce des complications thrombotiques. Angiox s'utilise en bolus intraveineux à la posologie de 0,75 mg/kg, suivi d'une perfusion de 1,75 mg/kg/h. La perfusion doit être maintenue pendant toute la durée de l'intervention et jusqu'à 4 heures après si la situation clinique le nécessite. En cas d'insuffisance rénale (clairance à la créatinine comprise entre 30 et 60 ml/min), le débit de perfusion est abaissé à 1,4 mg/kg/h. Angiox peut être ajouté à un traitement antiagrégant plaquettaire par anti-GPIIb/IIIa : le tirofiban (Agrastat), l'eptifibatide (Integrilin) et l'abciximab (Réopro), tous à l'hôpital.

Le suivi biologique passe par le temps de coagulation activée (TCA) dont la valeur cible cinq minutes après le bolus est de 365 +/-100 secondes. Si le TCA est inférieur à 225 secondes, un second bolus de 0,3 mg/kg est alors administré. Angiox est contre-indiqué en cas d'insuffisance rénale sévère ou relevant de dialyse. Ses effets indésirables les plus fréquents sont des saignements mineurs et des nausées. Il semble que l'incidence des thrombopénies soit plus faible que sous héparine non fractionnée. La bivalirudine n'a pas d'antidote.

Sa place dans la classe : La bivalirudine appartient à la même classe que la désirudine (Revasc) et la lépirudine (Refludan), réservées à l'usage hospitalier. Angiox constitue une alternative thérapeutique à l'héparine non fractionnée, associée ou non à un anti-GPIIb/IIIa. Chez le sujet ayant un antécédent de thrombopénie induite par l'héparine et ayant une intervention coronaire percutanée, l'amélioration du service médical rendu par Angiox est importante (ASMR II). Dans toutes les autres situations, il n'apporte aucune amélioration par rapport au traitement conventionnel.

Ximélagatran

Exanta - AstraZeneca

Le ximélagatran a été spécifiquement conçu pour interagir avec le site actif de la thrombine après transformation in vivo et libération du principe actif dont il est la prodrogue : le mélagatran.

Exanta s'administre dans la prévention des événements thromboemboliques veineux en chirurgie orthopédique majeure programmée (prothèse de hanche ou de genou), à raison de un comprimé deux fois par jour pendant 8 à 11 jours au maximum. Il est employé en relais de l'administration postopératoire du mélagatran injectable (Mélagatran AstraZeneca, commercialisé à l'hôpital en même temps que les comprimés). Mélagatran AstraZeneca s'injecte une fois 4 heures après l'intervention, puis deux fois par jour, ensuite Exanta s'administre à raison de deux comprimés par jour une fois que le patient peut prendre le traitement par voie orale . Au terme de 11 jours de traitement par mélagatran, le relais est pris par un anticoagulant oral (antivitamine K). L'efficacité du traitement mélagatran/ximélagatran n'est pas inférieure à celle de l'énoxaparine. Le profil de tolérance des deux traitements est comparable à court terme. Exanta se caractérise par une posologie unique et l'absence d'ajustement de la dose au cours du temps et de surveillance systématisée de l'hémostase ; une surveillance clinique peut suffire : recherche de signes d'hémorragie ou d'anémie. Son action est rapide, réversible et indépendante des apports alimentaires, de l'absorption d'alcool ou de la prise d'autres médicaments.

Sa place dans la classe : Le ximélagatran est le premier inhibiteur direct, compétitif et réversible de la thrombine actif par voie orale. Cet antithrombotique innove donc dans un arsenal comprenant les héparines de bas poids moléculaire (Clivarine, Fragmine, Fraxiparine, Innohep, Lovenox) dotées d'une action indirecte et non spécifique, sans effet sur la thrombine liée à la fibrine, ainsi que le fondaparinux (Arixtra). Danaparoïde (Orgaran, à l'hôpital) et désirudine (Revasc, à l'hôpital) ont un mécanisme d'action différent mais une cible thérapeutique analogue.

Mélagatran AstraZeneca et Exanta n'améliorent pas le service médical rendu (V) par rapport à Lovenox.

Imagerie médicale, radiologie

Mebrofénine-technetium (99mTc)

Cholediam - Intsel Chimos

La mébrofénine-technétium (99mTc) est un produit radiopharmaceutique à usage diagnostique. Administré par voie intraveineuse, il se lie aux protéines plasmatiques, est transporté jusqu'au foie où il est capté par transport actif dans les hépatocytes au même titre que la bilirubine. Sa période dans le foie est de 25 à 30 minutes. Ensuite il est excrété dans la bile ou lié à des sels biliaires. Ainsi, les voies biliaires peuvent être visualisées 5 à 20 minutes après l'injection, et la vésicule biliaire après 10 à 40 minutes. Aux doses et activités utilisées, la mébrofénine-technétium (99mTc) ne semble pas exercer d'effet pharmacodynamique.

Cholediam est indiqué dans l'exploration des fonctions hépatiques et biliaires par scintigraphie, et dans l'exploration du transit hépatobiliaire. Chez l'adulte, l'activité recommandée est de 150 à 300 MBq. Chez l'enfant, l'activité est adaptée en fonction du poids, sachant que chez l'enfant de moins d'un an une activité minimale de 20 MBq est nécessaire pour obtenir des images de qualité satisfaisante. Le patient doit être à jeun depuis au moins 6 heures, sachant que des cholécystokinines ou un repas riche en graisse peut être utilisé pour provoquer la contraction de la vésicule biliaire. L'effet indésirable le plus fréquent sous Cholediam est un trouble de l'état général de type bouffée vasomotrice, surtout lorsque le produit est injecté rapidement.

Sa place dans la classe : Ce produit radiopharmaceutique à usage diagnostique ne présente pas de risque de toxicité puisqu'il est utilisé à une quantité très inférieure à sa dose létale. Son profil de tolérance est excellent. L'ASMR de Cholediam n'est pas connue.

LA PART DE L'HÔPITAL SUR DIX ANS

Immunologie

Evérolimus

Certican - Novartis Pharma

L'évérolimus est un immunosuppresseur, dérivé actif par voie orale de la rapamycine, un macrolide produit par un Streptomyces. L'évérolimus inhibe le signal de prolifération cellulaire. Il se fixe sur une immunophiline intracellulaire, la FK-binding protein 12 (FKBP 12) : ce complexe inhibe l'activité de la FRAP (FKBP rapamycin associated protein) ou mTOR (« mammalian target of rapamycin »), une kinase impliquée dans l'activation des cyclines dont dépend le passage de la cellule de la phase G1 à la phase S. En inhibant l'activité de la FRAP, l'évérolimus bloque in vitro l'activité d'une autre kinase (p70 S6), ce qui entraîne une inhibition sélective de la transcription d'ARNm et de la traduction de nouvelles particules ribosomiales.

Comme les inhibiteurs de la calcineurine (Néoral, Prograf, Sandimmun) et l'évérolimus agissent par l'inhibition d'étapes successives dans la réponse immune à médiation cellulaire, leur association est synergique dans la prévention des rejets de greffe. Elle permet notamment de réduire l'exposition à la ciclosporine, d'où un meilleur respect de la fonction rénale chez les transplantés rénaux et cardiaques.

Sa place dans la classe : La polarité de l'évérolimus est augmentée par rapport au sirolimus (Rapamune), ce qui améliore sa solubilité et sa stabilité. L'action de l'évérolimus diffère de celle des inhibiteurs de la calcineurine (ciclosporine, tacrolimus) qui bloquent la synthèse de l'interleukine 2 par les lymphocytes T auxiliaires. Il diffère aussi de celui du mycophénolate (Cellcept, Myfortic), un inhibiteur non compétitif et réversible de l'inosine monophosphate-déshydrogénase.

Chez les adultes recevant une allogreffe rénale et présentant un risque immunologique faible à modéré, Certican ne présente pas d'amélioration du service médical rendu par rapport au mycophénolate mofétil. Chez les adultes présentant un risque immunologique faible à modéré bénéficiaires d'une allogreffe cardiaque, Certican représente une ASMR mineure (niveau IV) en termes d'efficacité potentielle dans la prévention du rejet chronique par rapport à l'azathioprine (Imurel). Certican peut constituer une alternative au mycophénolate ou au sirolimus en association à d'autres immunosuppresseurs dans l'allogreffe rénale, et à l'azathioprine, voire au mycophénolate, dans l'allogreffe cardiaque.

Infectiologie

Tipranavir

Aptivus - Boehringer Ingelheim

Le tipranavir est un inhibiteur de la protéase du VIH-1. Il bloque sélectivement la synthèse des précurseurs polyprotéiques viraux dans les cellules infectées, conduisant à la formation de particules virales immatures non infectieuses. Aptivus est indiqué en association à de faibles doses de ritonavir et à d'autres médicaments antirétroviraux dans le traitement de l'infection par le VIH chez les adultes lourdement prétraités et ayant des virus multirésistants aux inhibiteurs de la protéase.

Cette alternative thérapeutique n'est retenue qu'après avoir pris en compte les résultats des tests de résistance génotypique et phénotypique ainsi que les antécédents thérapeutiques du patient. La posologie recommandée est de 500 mg deux fois par jour au cours des repas, en association à 200 mg deux fois par jour de ritonavir qui potentialise la pharmacocinétique d'Aptivus.

Les contre-indications à son utilisation sont l'insuffisance hépatique et les traitements concomitants de médicaments à marge thérapeutique étroite métabolisés par le cytochrome P450 3A4, ou par le millepertuis.

Les effets indésirables les plus courants sont des céphalées, des saignements, des diarrhées, des nausées et vomissements, des douleurs abdominales, des éruptions cutanées, une élévation des triglycérides et une fatigue.

Sa place dans la classe : L'association tipranavir-ritonavir montre une supériorité d'efficacité par rapport aux autres associations intégrant une antiprotéase telles que amprénavir-ritonavir, saquinavir-ritonavir, indivanir-ritonavir ou lopinavir-ritonavir, en termes de pourcentage de patients ayant atteint une décroissance de la charge virale d'au moins 1 log au bout de 16 semaines. L'amélioration du service médical rendu d'Aptivus n'est pas connue.

Métabolisme et nutrition

Cinacalcet

Mimpara - Amgen

Le cinacalcet inaugure la classe des agents antiparathyroïdiens ou calcimimétiques. Mimpara abaisse directement le taux de parathormone en augmentant la sensibilité du récepteur sensible au calcium extracellulaire. Le médicament est indiqué dans le traitement de l'hyperparathyroïdie secondaire chez les patients dialysés atteints d'insuffisance rénale chronique terminale, seul ou en association aux traitements conventionnels type chélateurs du phosphate ou analogues de la vitamine D. Le traitement, présenté en comprimés dosés à 30, 60 ou 90 mg, s'instaure progressivement : il débute à la dose de 30 mg une fois par jour jusqu'à un maximum de 180 mg une fois par jour. La posologie est adaptée toutes les 2 à 4 semaines, l'objectif ciblé étant un taux de parathormone de 150 à 300 pg/ml. Mimpara s'administre au cours des repas ou peu de temps après un repas.

Mimpara est aussi indiqué dans le traitement de l'hypercalcémie chez les sujets atteints de cancer de la parathyroïde. La posologie est là aussi d'instauration progressive, débutant à 30 mg deux fois par jour, avec un maximum de 90 mg quatre fois par jour. La posologie est adaptée toutes les 2 à 4 semaines, avec pour objectif cible une calcémie inférieure ou égale à la limite supérieure de la normale. Les effets indésirables les plus fréquents de Mimpara se traduisent par des troubles digestifs de type nausées, diarrhées et vomissements, effets légers à modérés et transitoires.

Sa place dans la classe : Mimpara est un traitement de seconde intention. Il s'emploie après l'échec des traitements disponibles actuellement (chélateurs du phosphate, vitamine D, parathyroïdectomie). L'ASMR de Mimpara est modérée (III) dans l'hyperparathyroïdie secondaire. Elle est importante (II) dans l'hypercalcémie des patients atteints d'un cancer de la parathyroïde.

Neurologie

Pramipexole

Sifrol - Boehringer Ingelheim

Le pramipexole est un agoniste dopaminergique non ergoté indiqué dans le traitement symptomatologique de la maladie de Parkinson en monothérapie ou associé à la dopathérapie pour en potentialiser l'action et réduire le handicap.

La non-infériorité du pramipexole par rapport à la bromocriptine a été démontrée à 12 semaines. Administré en monothérapie à un stade précoce de la maladie, il réduit d'environ 25 % à 2 ans l'apparition des complications motrices par rapport aux patients traités par lévodopa, mais au détriment d'une moindre réduction du handicap moteur et d'effets indésirables plus nombreux. Cet effet perdure probablement après 4 années de traitement, avec une amplitude indirectement comparable à ce qui est observé avec les autres agonistes dopaminergiques.

Les effets indésirables du traitement sont des effets de classe, rapportés par plus de 5 % des patients traités : accès soudains de sommeil, hallucinations, oedèmes, anomalies tendineuses. Ces manifestations sont plus fréquentes que chez les patients sous lévodopa seule. Au terme de quatre ans de prise, la survenue d'effets indésirables constitue la cause la plus fréquente d'arrêt de traitement : des effets iatrogènes neurologiques sont rapportés par environ 85 % des patients sous pramipexole comme sous lévodopa.

Sa place dans la classe : Le pramipexole constitue une alternative à des molécules tels la bromocriptine (Bromo-Kin, Parlodel), le ropinirole (Requip), le pergolide (Célance), le lisuride (Dopergine) et le piribédil (Trivastal) dont il partage l'action pharmacologique. Il demeure impossible de conclure sur l'effet neuroprotecteur intrinsèque du pramipexole ni sur l'impact de la molécule en termes de ralentissement de la progression de la maladie, des arguments en faveur de la molécule avancés par certains spécialistes. Sifrol n'apporte pas d'amélioration du service médical rendu (ASMR V) par rapport à la bromocriptine, ni par rapport aux autres agonistes dopaminergiques.

Prégabaline

Lyrica - Pfizer

La prégabaline, un analogue de l'acide gamma-aminobutyrique, agit après fixation sur une protéine auxiliaire associée aux canaux calciques voltage-dépendants connue pour jouer un rôle de modulateur sur ce canal et être surexprimée lors des manifestations d'allodynie (douleurs neuropathiques provoquées par des stimuli normalement non douloureux : le contact d'un vêtement par exemple). Elle réduit l'influx calcique au niveau des terminaisons nerveuses présynaptiques et, secondairement, par la diminution de l'exocytose de plusieurs neurotransmetteurs (glutamate, noradrénaline, substance P impliquée dans la sensation douloureuse). Elle n'a pas d'affinité pour les récepteurs au GABA et n'a donc pas d'action gabaergique, ni pour les récepteurs aux benzodiazépines.

La prégabaline est rapidement absorbée (biodisponibilité supérieure à 90 % et indépendante de la dose, contrairement à la gabapentine), avec un Tmax à une heure, une demi-vie de 6 heures, indépendante de la dose. Elle ne donne lieu à aucune interaction cinétique.

Lyrica bénéficie d'une double indication : le traitement des douleurs neuropathiques périphériques chez l'adulte (notamment dans les douleurs associées au diabète et les douleurs postzostériennes) et le traitement des crises épileptiques partielles avec ou sans généralisation secondaire, en association.

Comme antalgique, la prégabaline ne s'est pas toujours révélée plus convaincante qu'un placebo aux posologies les plus faibles. Les doses plus élevées sont plus efficaces, mais au prix, là aussi, d'une incidence plus élevée des effets indésirables. L'efficacité du traitement dans l'épilepsie est comparable à celle des molécules concurrentes. La dose de 600 mg par jour s'est révélée la plus efficace mais elle donne lieu à une fréquence élevée d'effets indésirables, avec 18 à 26 % d'arrêt de traitement pour somnolence ou étourdissements. La prégabaline s'utilise après échec de deux monothérapies.

Sa place dans la classe : La structure de la prégabaline est proche de celle de la gabapentine (Neurontin) dont elle partage le mode d'action. Son profil pharmacocinétique, simple, la distingue de nombreux anticonvulsivants qui donnent lieu à de nombreuses interactions. Sa dualité d'action thérapeutique rappelle celle d'autres anticonvulsivants, comme bien sûr la gabapentine mais aussi la carbamazépine (Tégrétol) ou la phénytoïne (Di-Hydan).

Lyrica n'apporte pas d'amélioration du service médical rendu (ASMR V) par rapport à Neurontin et aux autres antiépileptiques. De même, il n'apporte pas d'ASMR par rapport aux traitements habituellement utilisés dans le traitement des douleurs neuropathiques périphériques.

Pas de Pilule d'or « Prescrire »

Pour la septième année consécutive, la Pilule d'or n'a pas été décernée en 2005. La revue Prescrire distingue cependant quatre médicaments à l'occasion de son palmarès annuel.

Tout d'abord, Varivax. Ce vaccin contre la varicelle du laboratoire Sanofi Pasteur MSD est le seul médicament inscrit au tableau d'honneur. Varivax permet de protéger contre la varicelle des sujets à risque, notamment les adultes non immunisés, les immunodéprimés.

Trois autres spécialités sont citées. Alimta (pemetrexed, laboratoire Lilly), cytotoxique, est récompensé pour son indication dans le traitement du mésothéliome pleural non résécable, en association avec du cisplatine. Herceptin (trastuzumab, laboratoire Roche) est quant à lui indiqué chez les femmes atteintes d'un cancer du sein métastasé, en première ligne et en association avec le docétaxel. Ces patientes doivent surexprimer la protéine HER-2. Enfin, Prescrire récompense Wilzin, médicament orphelin composé d'acétate de zinc (laboratoire Orphan). Il permet de compenser la surcharge en cuivre chez les patients souffrant de la maladie de Wilson.

V.P

Claire Sevin Pharmacienne à Clamart, membre du comité scientifique du Moniteur

« Parmi les nouvelles molécules arrivées à l'officine, je ne connais pas du tout ni Certican, ni Lyrica. Je n'ai pas délivré Exanta, Inspra, Raptiva ou Sifrol, mais j'ai pris connaissance de la documentation que j'ai eu sur ces médicaments. J'ai en particulier retenu qu'Exanta et Inspra pouvaient être délivrés dans le cadre d'urgences. Levemir n'est pas encore très prescrit, à la différence d'Ezétrol qui, de plus, semble bien toléré.

Concernant les sorties de la réserve hospitalière, je connais la plupart des spécialités même si je ne les ai pas encore délivrées : Abilify, Aranesp, Biltricide, Bondronat, Emtriva, Eprex, Faslodex (je m'étonne d'ailleurs que ce médicament n'ait pas de statut particulier !), Fuzeon, Hepsera, Pulmozyme, Reyataz, Trizivir et Xeloda. Neorecormon est très prescrit dans deux indications : l'insuffisance rénale chronique et en aplasie postchimiothérapie ; étant donné le nombre de dosages et de présentations disponibles, c'est un peu compliqué de s'y retrouver pour commander le produit auprès du grossiste ou directement au laboratoire. Quant à Nimotop, un de mes patients le prend depuis plus de 10 ans et il est ravi de le trouver en ville. Je ne connais pas Litak. En fait, je m'efforce de connaître un maximum de produits nouveaux en gardant en mémoire d'abord le nom, puis la pathologie concernée, et ensuite la dangerosité, la posologie et un éventuel protocole particulier de délivrance. »

Propos recueillis par Véronique Pungier

Geneviève Chamba Professeur de pharmacologie, Pharmakeion, membre du comité scientifique du Moniteur

« Exanta est intéressant en termes de mécanisme d'action. Ses avantages par rapport aux HBPM, c'est l'absence de thrombopénie et son administration par voie orale (un plus pour les patients) ; cependant le risque hémorragique est voisin. Ezétrol est une nouvelle approche en termes de mécanisme d'action pour lutter contre le cholestérol. Son efficacité est inférieure à celle des statines. Il ne faudrait pas en pratique de ville voir rajouter ce médicament à tous les hypercholestérolémiques sans vérifier qu'ils font un régime et qu'ils sont observants, d'autant plus que l'on n'a pas de données sur l'intérêt à long terme, ni pour la prévention cardiovasculaire, ni pour la tolérance. Inspra est aussi une molécule possiblement intéressante mais nécessite plus d'étude et de recul. Levemir est un analogue d'insuline lente, d'action différente de Lantus. Ces analogues sont un plus pour les patients en remplacement des suspensions d'insuline qui présentent l'inconvénient de fluctuations d'activité dues au mauvais mélange et à l'hétérogénéité du produit injecté. A terme, il n'y aura sûrement plus que les analogues qui sont des solutions et ne présentent pas ces inconvénients. Enfin, Sifrol, nouvel agoniste dopaminergique, présente apparemment une tolérance meilleure que celles d'autres molécules de la même classe, mais ce n'est pas une avancée majeure. »

Propos recueillis par Véronique Pungier

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