Antidiabétiques 14 cas pratiques - Le Moniteur des Pharmacies n° 2612 du 21/01/2006 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2612 du 21/01/2006
 

Cahier formation

Deux millions de patients sont traités par antidiabétiques oraux et près de deux cent mille par insuline en France. Outre le risque d'hypoglycémie, tous les effets iatrogènes potentiels doivent être contrôlés systématiquement. Découvrez 14 cas pratiques pour vous tester, complétées par 4 pages de pharmacologie.

CAS PRATIQUES

1 Effets indésirables : Malaise sous Amarel et Glucor

10 h 30 : madame R., 62 ans, 1 m 60, 62 kg, entre à l'officine avec un panier plein de provisions. Comme il y a du monde, elle patiente en regardant les rayons de cosmétologie. Soudain, elle s'avance vers une chaise pour s'asseoir car elle ne sent pas très bien. Le pharmacien s'approche d'elle et lui demande ce qui ne va pas. Elle n'arrive pas à répondre et elle ferme les yeux. Deux membres de l'équipe viennent la soutenir pour l'emmener dans le local d'orthopédie, à l'arrière de l'officine, dans lequel elle peut s'étendre.

Que se passe-t-il ? Comment réagir ?

Madame R. est connue comme étant une patiente diabétique. Toute manifestation anormale ou tout malaise chez une personne diabétique traitée par insuline ou par un insulinosécréteur tels sulfamides hypoglycémiants ou glinide (voir tableau p. IV) doit être a priori considéré comme une hypoglycémie. Quand la personne est consciente, il est nécessaire d'apporter du sucre rapidement assimilable puis des sucres lents.

Analyse

Il est utile de connaître le traitement antidiabétique de cette patiente, mais elle n'est pas en mesure de répondre. La consultation de l'historique médicamenteux permet de savoir qu'elle prend de l'Amarel 2 mg et du Glucor. L'Amarel (glimépiride) est un sulfamide hypoglycémiant, donc susceptible d'entraîner des hypoglycémies. Du fait de sa longue demi-vie, un surdosage en glimépiride peut entraîner une hypoglycémie prolongée (jusqu'à 72 h).

Attitude à adopter

- Faut-il donner du saccharose ?

Cette patiente est sous Glucor, un inhibiteur de l'alphaglucosidase, médicament qui réduit la digestion et l'absorption intestinale des disaccharides.

Dans ce cas, pour corriger une hypoglycémie, il est conseillé d'apporter du glucose et non du saccharose (morceaux de sucre) pour remonter rapidement la glycémie, car le Glucor retarderait la dégradation du saccharose en glucose assimilable. Bien que ce ne soit pas souvent réalisé en pratique, les patients sous Glucor ou Diastabol devraient avoir chez eux des sachets de Glucodose Ultrarapide, glucose liquide à utiliser en cas d'hypoglycémie. La dose usuelle en cas d'hypoglycémie est de 2 sachets pour un adulte.

Dans les officines, il n'y a pas toujours de Glucodose Ultrarapide en stock. Dans notre cas, il est proposé à cette patiente de croquer 3 ou 4 morceaux de sucre et de les garder un moment dans la bouche avant de les avaler. Quelques minutes plus tard, madame R. va mieux et s'assoit ; on lui conseille d'absorber rapidement des sucres lents (biscottes par exemple) pour compléter le resucrage.

- Rechercher la cause du malaise

Il est nécessaire de rechercher la cause d'un tel malaise pour éviter qu'il ne se reproduise. Après quelques questions, madame R. confie qu'en ce moment elle est anxieuse à cause de son fils et que cela lui coupe l'appétit. Ce matin, elle a pris son Glucor et son Amarel avec juste un bol de café. Puis elle est allée faire ses courses.

Ce malaise semble être dû à une prise alimentaire insuffisante après administration de sulfamide insulinosécréteur.

Un patient diabétique ne doit pas prendre de sulfamides hypoglycémiants s'il ne mange pas immédiatement après la prise (manque d'appétit, manque de temps...).

2 Effets indésirables : Troubles digestifs sous Avandamet

Monsieur A., 57 ans, 1 m 80, 91 kg, est traité par Diamicron (sulfamide hypoglycémiant), 3 comprimés par jour, depuis 4 ans. Ses derniers résultats d'hémoglobine glyquée (HbA1c = 7,1 %, 7,5 %, 7,6 %) ont conduit son médecin à compléter, il y a 10 jours, le traitement médicamenteux par Avandamet (rosiglitazone + metformine) 1 mg/500 mg, 4 comprimés par jour en 2 prises pendant 1 mois. Monsieur A. revient aujourd'hui à l'officine et vous demande un médicament contre les ballonnements. De plus, il est souvent écoeuré depuis quelques jours et voudrait du Vogalib.

Peut-on accéder à sa demande ?

Non, pas sans l'interroger. Les symptômes décrits font penser à des effets indésirables de la metformine contenue dans l'Avandamet.

Analyse

L'Avandamet contient de la rosiglitazone (1 mg) et de la metformine (500 mg). La prise de 4 comprimés par jour apporte donc 2 g de metformine, dose qui doit être atteinte progressivement et non d'emblée. Les troubles digestifs ressentis par le patient depuis quelques jours s'expliquent logiquement par une instauration trop rapide d'une posologie importante de metformine (1 g par prise).

L'Avandamet est indiqué chez le patient diabétique de type 2, en particulier en surcharge pondérale, insuffisamment équilibré par sa dose maximale tolérée de metformine seule. Dans ce cas précis, le patient n'avait pas de metformine avant la prescription d'Avandamet (confirmation par l'historique médicamenteux). Il paraît vraisemblable qu'il y ait eu lors de la prescription une confusion entre Avandia (rosiglitazone seule) et Avandamet (rosiglitazone + metformine), confusion qui n'a pas été détectée lors de la dispensation.

Attitude à adopter

- Contacter le médecin

Il est nécessaire de téléphoner au médecin pour confirmer la prescription. Effectivement, celui-ci remplace Avandamet, prescrit par erreur, par Avandia. L'arrêt de l'Avandamet et le remplacement par Avandia 2 mg (2 comprimés par jour) permettront de faire régresser les troubles rapidement.

Profiter de cet appel pour vérifier que le dosage des enzymes hépatiques a bien été réalisé avant le début du traitement par la rosiglitazone.

- Contrôle après 2 mois

Après 8 semaines de traitement, la posologie d'instauration de la rosiglitazone (4 mg/j en 2 prises) pourra être augmentée à 8 mg/j (avec Avandia 4 mg) si le contrôle glycémique n'est pas optimal.

Attention aux associations fixes d'antidiabétiques Avandamet et Glucovance ! Toutes deux contiennent de la metformine, responsable de troubles digestifs fréquents, et nécessitent une posologie progressive.

3 Effets indésirables : Diarrhée sous metformine

Monsieur M., 64 ans, est diabétique depuis 9 ans. Il est très scrupuleux dans la prise de ses médicaments. Par ailleurs, il fait de l'exercice physique quatre fois par semaine et connaît assez bien les mesures diététiques à suivre. Son traitement depuis un an comporte deux comprimés de gliclazide 80 Gé et trois comprimés de Glucophage 850 par jour. Il prend aussi du Tareg, du Lasilix, de l'Atarax, de l'Omix LP et du Noctran. La semaine dernière, le prescripteur a ajouté pour 3 mois Carbolevure (1 gélule par jour à midi). En effet, monsieur M. s'était plaint de diarrhées et de douleurs abdominales. Il revient à l'officine car il n'y a pas d'amélioration ; en plus de l'inconfort, ces diarrhées l'inquiètent. Il voudrait quelque chose de plus efficace que Carbolevure.

Comment répondre à son inquiétude ?

Un traitement contre les diarrhées ne peut se concevoir que ponctuellement. La durée des troubles chez ce monsieur doit faire envisager un effet indésirable médicamenteux.

Analyse

Monsieur M. est sous metformine (Glucophage), molécule occasionnant souvent des troubles digestifs (plus de 10 % des patients). Ils comportent nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhées. Ces troubles apparaissent souvent à l'instauration du traitement puis régressent spontanément. La prise de la metformine au cours ou à la fin des repas réduit les nausées et vomissements. Chez certains patients, des diarrhées aqueuses apparaissent après quelques mois de traitement et peuvent entraîner une perte de poids importante. Un traitement correcteur (Carbolevure ou lopéramide) peut être proposé sur un temps court. A l'arrêt de l'antidiarrhéique, la réapparition des troubles du transit doit faire envisager la suppression de la metformine. La responsabilité de l'antidiabétique est alors confirmée par la régression des diarrhées.

Attitude à adopter

- Rechercher les causes

Il est nécessaire de vérifier les causes possibles ou aggravantes de ces diarrhées (autre médicament, infection intestinale, alimentation trop riche en fibres...).

- Traitement antidiarrhéique

Dans le cas de ce patient, on peut lui proposer ponctuellement du lopéramide car il est important de stopper les diarrhées non seulement pour son confort, mais aussi pour ne pas majorer l'hypokaliémie engendrée par le Lasilix. Le lopéramide sera pris pendant 48 à 72 h au maximum.

En cas de reprise des diarrhées après arrêt du lopéramide, il faut revoir le médecin et réévaluer le traitement antidiabétique car il est fort possible que la metformine soit en cause.

Plus de 10 % des patients sous metformine souffrent de troubles digestifs, en particulier de diarrhée. Du lopéramide peut être proposé pendant 72 heures. En cas de persistance ou de reprise de la diarrhée, le traitement antidiabétique doit être réévalué.

4 Effets indésirables : Céphalées et tremblements sous Actos

Monsieur D., 81 ans, 1 m 58, 70 kg, diabétique et hypertendu depuis l'âge de 47 ans, vient régulièrement à l'officine. Il est traité par Amarel 2 mg (1 comprimé à midi) depuis 6 mois. Sa dernière valeur d'HbA1c est de 7,5 %. Il est venu chercher hier soir sa nouvelle ordonnance avec Bipreterax, Ginkor Fort et Actos 30 mg (1 comprimé le matin) à la place d'Amarel. Ce monsieur repasse l'après-midi suivant à l'officine et vous raconte ce qui s'est passé le matin. Deux heures après la première prise d'Actos, il s'est senti mal (vertiges, céphalées, « tempes qui tapent », tremblements et sueurs), comme s'il avait de la fièvre. Il a mesuré sa glycémie à 11 h (137 mg/dl) et une heure après le repas (viande, courgettes) : 147 mg/dl. Deux heures après le repas, les signes ont régressé.

Que faire à l'officine ?

En décrivant les désagréments ressentis après la prise de ses médicaments, ce patient attend du pharmacien la conduite à tenir pour la poursuite de son traitement. Un contact avec le prescripteur est indispensable pour répondre à cette demande.

Analyse

Les signes décrits et le délai de survenue de ces signes après la prise d'Actos font penser à un effet indésirable de la molécule, seul changement opéré dans le traitement habituel du patient.

Effectivement, les céphalées sont notées dans les effets indésirables peu fréquents de l'Actos. En revanche, les vertiges, les sueurs et les tremblements ne semblent pas décrits.

Attitude à adopter

Le pharmacien téléphone au prescripteur pour lui décrire ce qui s'est passé. Ce dernier pense qu'il vaut mieux arrêter Actos et reprendre Amarel, ce qui est expliqué au patient.

Le pharmacien remplit une fiche de pharmacovigilance (http://www.sante.

gouv.fr/cerfa/efindes/abvitot.pdf) et l'adresse au centre régional de pharmacovigilance.

Le pharmacien a l'obligation de déclarer tout effet indésirable grave ou inattendu au centre régional de pharmacovigilance.

5 Effets indésirables : Comportement inhabituel d'un patient diabétique

Monsieur S., 30 ans, diabétique de type 1, est connu à l'officine depuis plusieurs années. Il est d'un naturel affable et calme. Il est 11 h 30, la pharmacie est pleine de monde, c'est la sortie des classes. Aujourd'hui, il montre des signes d'impatience, s'énerve et essaie de se faire servir avant tout le monde. Ce comportement attire l'attention de l'équipe car il est inhabituel chez lui.

Que se passe-t-il ?

Monsieur S. semble être en hypoglycémie.

Analyse

Les signes d'une hypoglycémie sont multiples et variables selon les individus. Le patient peut manifester de la nervosité, une certaine agitation, de l'agressivité ou même un comportement incohérent (voir page 3).

Attitude à adopter

Le pharmacien redoute un malaise et oriente le patient discrètement à l'arrière de l'officine pour qu'il s'assoit et reste au calme. Ce monsieur est sûr de faire une hypoglycémie et vous demande du sucre. Vous lui proposez du sucre en morceaux et du jus d'orange. Après 7 à 8 minutes, monsieur S. se sent mieux. Il sort de sa poche son lecteur de glycémie et pratique un test glycémique : 58 mg/dl. Il souhaite regagner son domicile afin de continuer son « resucrage » avec des sucres lents. Il repassera prendre ses médicaments plus tard.

Un changement soudain de comportement d'un patient diabétique de type I doit faire suspecter un déséquilibre de sa glycémie.

6 Effets indésirables : Prise de poids sous glitazone

Madame B. , 47 ans, est diabétique depuis quelques années. Elle prenait un comprimé de Stagid trois fois par jour et trois comprimés de Diamicron LM le matin. Il y a 4 mois, le médecin a remplacé le Diamicron par Actos 30 qu'elle prend actuellement à la dose de un comprimé par jour. Madame B. vient à l'officine chercher un laxatif et vous fait part de son souci concernant son poids : sans changer ses habitudes alimentaires, elle a pris 4 kilos en quelques mois (de 88 à 92 kg, pour 1 m 75) et cela la gêne énormément car elle s'essouffle. Bien sûr, elle sait bien qu'elle ne fait pas assez d'exercice, mais elle se demande tout de même ce qu'il se passe.

D'où vient cette prise de poids ?

Une prise de poids sans avoir changé ses habitudes alimentaires fait penser à un problème médicamenteux, avec ou sans rétention hydrosodée.

Analyse

Madame B. a débuté récemment un traitement par Actos. La prise rapide de 4 kilos sans avoir changé ses habitudes alimentaires oriente vers un effet indésirable de l'Actos. En effet, les glitazones peuvent entraîner une rétention hydrique avec des oedèmes (6 à 9 % des patients) et/ou une prise de poids avec une augmentation de la masse grasse (4 à 9 % des patients), surtout en association avec un sulfamide hypoglycémiant. Ces effets sont dose-dépendants. Dans le cas présent, l'essoufflement ressenti par la patiente doit alerter compte tenu du risque d'insuffisance cardiaque favorisé par l'Actos.

Attitude à adopter

Il faut vérifier auprès de la patiente l'existence ou non d'oedème des membres inférieurs. On peut consulter également l'historique médicamenteux, à la recherche de l'association d'un AINS (y compris l'ibuprofène éventuellement en automédication) susceptible d'aggraver une rétention hydrosodée. Même en l'absence d'oedème, cette prise de poids est vraisemblablement liée à Actos.

Après explication à la patiente, on lui propose de contacter son médecin pour étudier la conduite à tenir : arrêt de l'Actos et prise de rendez-vous pour vérifier l'état cardiaque de la patiente. En parallèle, on doit s'assurer des connaissances diététiques de la patiente, en lui demandant par exemple de décrire ce qu'elle a mangé la veille. Par ailleurs, l'exercice physique est indispensable ; il entraîne une diminution de la graisse abdominale, participe à l'amélioration de la sensibilité à l'insuline et à la réduction de l'hyperglycémie. On demande à la patiente les résultats de ses examens biologiques (en particulier HbA1c). Si les valeurs sont supérieures à 7 %, il serait préférable d'envisager un traitement avec de l'insuline. Il est important d'évoquer un tel changement avec la patiente en mentionnant qu'il pourra lui être proposé par le médecin.

Une prise de poids rapide chez un diabétique peut être due à la prise de glitazone (Actos, Avandia, Avandamet) et nécessiter une modification du traitement antidiabétique.

1 Interactions médicamenteuses : Metformine et Télébrix

Monsieur R. doit subir une urographie intraveineuse. Il vient chercher ses médicaments et présente une ordonnance de Télébrix. La consultation de l'historique médicamenteux montre que ce patient diabétique est actuellement traité par Novonorm 0,5 mg, Novonorm 1 mg, Glucophage 1000, trimétazidine et Lexomil.

Peut-on dispenser le Télébrix ?

Oui, mais avec des aménagements dans le traitement du patient.

Analyse

Ce patient est actuellement sous metformine (Glucophage), molécule qui provoque une hyperproduction de lactates par l'intestin.

En cas d'insuffisance rénale, l'accumulation de metformine peut provoquer une acidose lactique, (taux de lactates multiplié par 5 ou 6). Syndrome grave, parfois létal, l'acidose lactique se manifeste par une dyspnée, des douleurs abdominales, une hypothermie.

Tout facteur de risque d'insuffisance rénale est donc un facteur de risque d'acidose lactique. Or le Télébrix, comme tout produit de contraste iodé, est susceptible d'entraîner une insuffisance rénale aiguë.

Attitude à adopter

Il faut expliquer au patient qu'en raison de son examen urographique il doit suspendre la prise de metformine avant ou au moment de l'examen, et surtout de ne la reprendre que 48 heures après. La reprise différée de la metformine est impérative pour éviter les conséquences d'une éventuelle insuffisance rénale aiguë engendrée par le Télébrix.

La suspension du traitement par metformine pendant 2 à 4 jours n'est aucunement préjudiciable.

Il est essentiel de poursuivre l'arrêt de la metformine 48 heures après l'injection de produit de contraste iodé.

2 Interactions médicamenteuses : Sulfamide hypoglycémiant et dextropropoxyphène

Madame B., 74 ans, 1 m 59, 55 kg, prend de l'Hémi-Daonil (3 comprimés par jour) depuis 6 ans. Globalement, son diabète est équilibré puisque son hémoglobine glyquée reste inférieure à 7 %. Lors de sa dernière visite, le médecin lui a prescrit de l'acébutolol 200 mg pour sa tension qui reste trop élevée (14/9) et du Propofan (2 à 6 par jour en cas de douleur) pour soulager ses lombalgies. Madame B. vient à l'officine pour le premier renouvellement de cette nouvelle ordonnance et en profite pour vous demander une boîte de Sargenor car elle manque de tonus.

Peut-on accéder à sa demande ?

Oui, mais pas sans poser quelques questions. Il faut essayer de savoir pourquoi madame B., d'habitude très énergique, manque de tonus. Que ressent-elle exactement ? A quels moments de la journée ? Depuis combien de temps ? A-t-elle d'autres signes : perte d'appétit, perte d'intérêt pour certaines activités, problèmes de sommeil ?

En fait, cette patiente dit ressentir des « coups de pompe » en fin de matinée ou de journée. Depuis une quinzaine de jours, elle se sent parfois somnolente. Elle pense que l'hiver ne lui réussit pas bien. Elle dort normalement, n'a pas de perte d'appétit et n'a rien changé dans son alimentation.

Analyse

Les éléments donnés par la patiente évoquent deux étiologies possibles : baisse de la glycémie ou initiation trop rapide d'un bêtabloquant.

- Baisse de la glycémie

Si la fatigue est due à une baisse de la glycémie, elle peut avoir deux origines.

- Une hypoglycémie résultant de l'effet insulinosécréteur du sulfamide hypoglycémiant (Hémi-Daonil) non compensé par une prise alimentaire suffisante ou déséquilibrée en hydrates de carbone.

- Ou addition à l'effet insulinosécréteur du sulfamide de l'effet hypoglycémiant propre au dextropropoxyphène contenu dans le Propofan.

Dans le cas de cette patiente, certains signes révélateurs d'une hypoglycémie (tremblements, palpitations, tachycardie) ont pu être masqués par le bêtabloquant.

- Initiation du bêtabloquant

L'asthénie peut également être due à la prise du bêtabloquant qui n'a pas été initialisé à doses progressives. En début de traitement, cet effet indésirable est fréquemment rapporté et s'explique par la réduction du débit cardiaque et de la fréquence cardiaque ainsi que par un effet central. La fatigue disparaît en général à la poursuite du traitement.

La patiente interrogée déclare prendre depuis quelque temps six comprimés de Propofan par jour, ses douleurs étant intenses. L'hypothèse de l'interaction sulfamide/dextropropoxyphène est donc plausible, mais on ne peut écarter l'association de deux effets, baisse de la glycémie et asthénie suite à la prise du bêtabloquant.

Attitude à adopter

Il faut expliquer à la patiente que l'antalgique peut entraîner une diminution de sa glycémie et que le Sargenor ne semble pas indiqué dans ce cas. Il est possible également que l'acébutolol la fatigue (c'est normal en début de traitement), mais il ne faut surtout pas arrêter le médicament pour autant. On peut lui proposer, premièrement de remplacer le Propofan par du paracétamol simple, à 1 g par prise si les douleurs sont intenses ; de voir au bout de quelques jours si cette fatigue persiste et de revenir à la pharmacie ; deuxièmement, comme elle habite à côté de l'officine, de passer vérifier sa glycémie si elle le souhaite.

Evolution du cas

Deux semaines plus tard, madame B. repasse à l'officine. Avec le paracétamol, elle se sent moins fatiguée et ses douleurs sont correctement calmées.

Au-delà des interactions médicamenteuses stricto sensu, penser aux cumuls d'effets indésirables possibles de plusieurs médicaments.

3 Interactions médicamenteuses : Novonorm et Lipur

On a découvert il y a quelques années le diabète de monsieur B., 58 ans, 1 m 74, 89 kg, lors d'un examen de routine alors qu'il était sous traitement antihypertenseur depuis 3 ans. Sa prescription comportait Novonorm 1 mg (1-0-1), Novonorm 0,5 mg (0-1-0), Glucor 50 mg

(1-1-1), metformine 850 (1-1-1) et Zestoretic (1-0-0).

Il y a un mois, ses analyses ont montré des valeurs élevées du cholestérol et des triglycérides. Le médecin a donc ajouté au traitement du Lipur (0-0-2).

Monsieur B. est un bon vivant, pas vraiment conscient des complications potentielles de son diabète, et il ne semble pas suivre à la lettre les recommandations diététiques qui lui ont été rappelées à maintes reprises. Très convivial, il rencontre régulièrement ses anciens collègues de travail au restaurant du quartier et ne craint pas la boisson...

Samedi 18 h : madame B. entre dans l'officine et vous explique que son mari est dans sa voiture garée à 20 m, qu'il ne peut pas venir car il n'est pas bien du tout : il tremble, se sent très fatigué et ne répond pas à ses questions. Il a été au restaurant à midi. Le cabinet médical est fermé, elle vous demande ce qu'elle doit faire.

Que faire à l'officine ?

D'après la description de Mme B, il est fort probable que son mari soit en état d'hypoglycémie. Le pharmacien va voir M. B. dans la voiture pour juger de son état et décider de la conduite à tenir.

Analyse

Deux éléments méritent d'être étudiés.

- Inhibition enzymatique

Ce patient est actuellement sous répaglinide et gemfibrozil. Cette association est contre-indiquée. Des cas d'hypoglycémies ont été rapportés, vraisemblablement par interaction pharmacocinétique. Le gemfibrozil est inhibiteur d'un cytochrome P450 impliqué dans le métabolisme du répaglinide, augmentant ainsi la demi-vie de la molécule et donc son effet hypoglycémiant.

- Hypoglycémie alcoolique

Monsieur B. ayant déjeuné au restaurant, a-t-il bu de l'alcool en quantité trop importante ? L'alcool éthylique favorise l'apparition d'hypoglycémie parfois plusieurs heures après son ingestion. Par ailleurs, il peut inhiber les réactions de compensation.

Les deux hypothèses peuvent coexister.

Attitude à adopter

- « Resucrage » du patient

M. B. est très somnolent mais pas inconscient. Le pharmacien lui propose dans la voiture un « resucrage » avec quelques morceaux de sucre, préférable à un liquide afin d'éviter les fausses routes en cas de lipothymie (il est alors facile de les enlever de la bouche). De retour chez elle, Mme B. complétera le « resucrage » avec des sucres lents.

- Contact avec le prescripteur

Le lundi, il sera nécessaire de contacter le prescripteur pour lui exposer l'incident, tout en insistant sur l'interaction entre répaglinide et gemfibrozil. Il serait plus logique d'utiliser chez ce patient une statine pour réduire les valeurs du cholestérol, même si l'effet sur les triglycérides est modeste.

- Education du patient

Cet épisode sera l'occasion de refaire le point avec le patient sur les règles de diététique et sur la restriction de l'alcool, seul moyen réellement efficace pour réduire les triglycérides.

Une hypoglycémie inhabituelle chez un patient diabétique impose de vérifier son traitement à la recherche d'interactions médicamenteuses. En plus des alertes intégrées dans les logiciels, le site http://www.theriaque.org permet grâce à sa rubrique « Interactions » d'analyser une ordonnance même complexe.

1 Profils particuliers : Diabète chez un insuffisant cardiaque

Vous connaissez depuis longtemps monsieur F., 57 ans, qui vient renouveler tous les mois son traitement : Actos 30, Diamicron, Coversyl, Ikorel, Trinipatch.

Aujourd'hui, en le voyant entrer dans l'officine, vous lui trouvez l'air fatigué.

Au comptoir il vous tend une nouvelle ordonnance : Kredex, Coversyl, Lasilix, Trinipatch, Diamicron, Insuline Lantus et matériel pour contrôle glycémique.

Monsieur F. a été hospitalisé 10 jours. Il vous dit qu'il est inquiet parce que son diabète s'est aggravé et qu'on l'a mis sous insuline.

Pourtant il respectait bien tous les conseils qu'on lui avait donnés. Il vous demande ce que vous en pensez.

Le diabète de monsieur F. s'est-il aggravé ?

Non, ce n'est pas parce qu'un patient est mis sous insuline que son diabète s'est nécessairement aggravé.

Analyse

Le passage à l'insuline d'un patient diabétique de type 2 est nécessaire dans certains cas.

- Incapacité à contrôler l'hyperglycémie avec un traitement par antidiabétiques oraux. Les critères couramment retenus sont : HbA1c #gt; 8 % malgré une bithérapie par voie orale à posologie maximale, ou HbA1c #gt; 7 % avec amaigrissement.

- Profil physiologique particulier (grossesse) ou contre-indications aux antidiabétiques oraux. Les principales contre-indications sont l'insuffisance hépatique ou rénale pour les sulfamides hypoglycémiants et la metformine, et l'insuffisance cardiaque pour les glitazones.

Ici, le diabète de monsieur F. était contrôlé par Diamicron et Actos. Son hospitalisation a vraisemblablement été motivée par un problème cardiaque nécessitant l'instauration d'un traitement d'insuffisance cardiaque (ajout de Kredex et furosémide). L'Actos (pioglitazone) est contre-indiqué en cas d'insuffisance cardiaque car les glitazones peuvent provoquer une rétention hydrique susceptible d'aggraver la pathologie ; par ailleurs, la rétention sodée est plus fréquente en cas d'insuffisance cardiaque. Le prescripteur a donc jugé nécessaire d'introduire dans le traitement une injection de Lantus le soir (analogue d'insuline d'action prolongée), avec le maintien du sulfamide hypoglycémiant dans la journée. Ce protocole (insuline en « bed-time ») est fréquemment utilisé et permet de contrôler la glycémie au cours de la nuit et au petit matin.

Attitude à adopter

- Rassurer le patient

Il faut expliquer à monsieur F. que son diabète ne s'est pas aggravé mais que son nouveau traitement pour le coeur n'est pas compatible avec certains de ses anciens médicaments. L'insuline apportera un meilleur contrôle de sa glycémie. - Expliquer le contrôle glycémique

Bien insister sur les modalités d'injection de l'insuline et d'autosurveillance glycémique qui lui ont été décrites à l'hôpital.

- Les conseils complémentaires

Par ailleurs, il faut détailler la dispensation des médicaments de l'insuffisance cardiaque, les mesures diététiques, les médicaments à ne pas associer (AINS, médicaments hypokaliémiants) et la surveillance régulière des signes de décompensation par le patient (prise de poids et apparition d'oedèmes, essoufflement).

Le passage à l'insuline est loin d'être anodin pour un patient diabétique mais n'est pas forcément synonyme d'aggravation.

2 Profils particuliers : Diabète chez l'enfant

Lundi après-midi : madame L, très angoissée, vient chercher une ordonnance de Lexomil. Enquête faite, elle vous explique que son petit garçon âgé de 6 ans, Benjamin, a fait dans la soirée un grave malaise hypoglycémique avec convulsions. Son diabète a été découvert il y a 6 mois.

Elle est très angoissée car elle se demande ce qui a pu causer ce malaise et si elle est responsable de cette hypoglycémie. Elle soupçonne le fait d'avoir donné à Benjamin du Motilium car il avait des nausées.

A quoi est dû ce malaise ?

Il faut essayer de déculpabiliser cette maman et l'interroger pour découvrir la raison du malaise.

Analyse

Le Motilium n'a aucune incidence dans la survenue du malaise. Ce médicament prokinétique n'a pas d'interaction en pratique et n'a pas ce type d'effet indésirable.

Attitude à adopter

Envisager avec la maman toutes les causes possibles de l'hypoglycémie : changement d'alimentation, exercice physique non prévu (activité sportive ou jeu dans la cour de récréation), changement de doses d'insuline...

L'adaptation des doses d'insuline chez l'enfant est particulièrement difficile et délicate et la survenue d'hypoglycémie difficilement explicable et prévisible. Il est possible qu'une sécrétion endogène d'insuline persiste, entraînant en retour une hypoglycémie.

Chez l'enfant, la dose d'insuline doit être soigneusement adaptée à l'activité physique qui peut varier considérablement d'un jour à l'autre et d'un moment à l'autre de la journée (sport, jeux...).

3 Profils particuliers : Un diabétique partant dans un pays chaud

Un patient de 68 ans vous demande de lui préparer une trousse d'urgence car il part en Andalousie au mois de juin. Son épouse est inquiète à cause de son traitement et aimerait que vous marquiez toutes les recommandations par écrit.

Ce monsieur diabétique de type 2 est traité par Diamicron LM (3 par jour), Triatec 5 (1 par jour) et metformine 1000 (2 par jour).

Quels conseils donner ?

En tant que patient diabétique, ce monsieur nécessite des conseils spécifiques.

Analyse

Les températures risquant d'être élevées au cours du séjour, il faut se renseigner sur les conditions de déplacement et d'hébergement afin d'évaluer le risque de déshydratation. En effet, une déshydratation va s'accompagner d'une déplétion hydrosodée pouvant aboutir, du fait de la prise d'un inhibiteur de l'enzyme de conversion (IEC), à une chute brutale de la tension artérielle et à une insuffisance rénale fonctionnelle. Ceci entraînerait des risques de surdosage en sulfamide hypoglycémiant et metformine, avec survenue d'une hypoglycémie potentiellement sévère et d'une acidose lactique.

Attitude à adopter

Il est conseillé au patient d'aller consulter son médecin avant son départ pour évaluer les risques et diminuer éventuellement les posologies de ses médicaments. La trousse de secours sera réalisée dans un deuxième temps.

Les diabétiques de type 2 ne se sentent en général pas malades. Il faut les sensibiliser au risque d'hypoglycémie lié à toute situation particulière (voyage, chaleur, stress...).

4 Profils particuliers : Diabète et ramadan

Monsieur V., 72 ans, est diabétique depuis plus de 15 ans. Malgré un traitement avec Novonorm 1 mg (3 par jour), metformine 850 (3 par jour) et Diastabol 50 (3 par jour), le diabète de monsieur V. est difficile à équilibrer. Il a beaucoup de peine à suivre les conseils hygiénodiététiques qui lui ont été rappelés à maintes reprises. Par ailleurs, le ramadan va débuter dans 2 jours et, pour lui, il est impensable de ne pas respecter le jeûne car il dit ne pas se sentir malade.

Quels conseils importants rappeler à cette personne ?

Le jeûne du ramadan s'adresse aux adultes et adolescents bien portants. En revanche, les musulmans ayant un problème de santé sont dispensés de le respecter.

Analyse

Pendant le ramadan, le jeûne se pratique du lever au coucher du soleil (sans manger, ni boire, ni fumer). Pour les patients diabétiques, la pratique du jeûne est fortement déconseillée car elle augmente les risques d'hypoglycémie pendant la journée et les hyperglycémies sévères avec une alimentation trop riche la nuit.

Un consensus médical (Fondation Hassan-II) proscrit le jeûne chez le diabétique âgé, traité par insuline, mal équilibré, compliqué ou polymédiqué. Malgré ces recommandations, certains patients diabétiques jeûnent au risque de déséquilibrer leur maladie.

Attitude à adopter

Malgré les mises en garde, monsieur V. va respecter le jeûne du ramadan. Il faut donc lui rappeler quelques conseils pour que cette période à risque se déroule dans les meilleures conditions possibles.

- Faire si possible trois petits repas la nuit : le premier à la rupture du jeûne, le deuxième 3 h après et le dernier, le matin à l'aube ; ceci est toutefois difficile à réaliser lorsque le mois du ramadan se déroule en été, la période autorisée pour rompre le jeûne étant très courte.

- Eviter les sucreries et boissons sucrées à la rupture du jeûne.

- Boire régulièrement pendant la nuit.

- Surtout ne pas arrêter le traitement. Vu la répartition des repas, il est logique de ne prendre que deux prises médicamenteuses : Novonorm et Glucor avant le premier repas et le dernier repas, metformine au cours du premier et du dernier repas. Il est préférable de téléphoner au prescripteur pour discuter de la modification du nombre des prises.

- Surveiller plusieurs fois par jour la glycémie pendant la journée.

Il est à noter que la période du ramadan change chaque année et que les conseils doivent être adaptés à la saison. Dans tous les cas, il paraîtrait plus prudent que le patient se dispense du jeûne du ramadan. -

En période de ramadan, la plupart des traitements doivent être réévalués en fonction de la période de jeûne (antidiabétiques, diurétiques, traitements à prendre 3 fois par jour...).

1 Contre-indications : Demande d'automédication

Madame N., 59 ans, est diabétique de type 2, traitée par Amarel et metformine.

Vous la connaissez depuis 6 mois environ. Elle vient à l'officine et vous demande si des comprimés d'Intralgis seraient efficaces pour ses douleurs du genou ; elle a de l'arthrose et, depuis 48 h, elle souffre du genou droit, surtout le soir.

Pouvez-vous accéder à sa demande ?

La demande d'antalgique est justifiée mais la molécule demandée (ibuprofène) ne doit pas être banalisée. Sur prescription, Mme N. a eu récemment à deux reprises une prescription de Bi-Profénid pour 10 jours.

Analyse

- Action des AINS sur le rein

L'ibuprofène agit comme tout AINS en inhibant la biosynthèse des prostaglandines.

Au niveau rénal, les prostaglandines sont vasodilatatrices et permettent de maintenir le débit de filtration glomérulaire lorsque la perfusion rénale est diminuée. Dans ce cas, un AINS peut provoquer une insuffisance rénale fonctionnelle (ischémie rénale avec chute du débit de filtration glomérulaire).

- Risque de l'insuffisance rénale

Une telle éventualité pourrait avoir des conséquences graves chez cette patiente traitée par deux antidiabétiques oraux : risque d'hypoglycémie par surdosage en sulfamide hypoglycémiant et risque d'acidose lactique avec la metformine. De plus, en raison des complications rénales potentielles, les AINS devraient être évités chez des patients diabétiques fréquemment atteints de néphropathie.

- Niveau de contre-indication

Les associations AINS/sulfamides hypoglycémiants et AINS/metformine ne sont pas contre indiquées mais ne sont pas conseillées ; elles peuvent se justifier dans certains cas, seulement sur prescription médicale. En revanche, une demande d'AINS chez un diabétique ne devrait pas être validée en automédication.

Attitude à adopter

A l'officine, on ne peut pas juger de l'état rénal de la patiente et la dispensation d'un AINS potentiellement néphrotoxique n'est pas justifiée. Proposer à Mme N. du paracétamol à 1 g par prise.

La délivrance d'ibuprofène chez un patient diabétique âgé nécessite un avis médical.

PHARMACOLOGIE ANTIDIABÉTIQUES

Régulation physiologique de la glycémie

Le maintien de la glycémie fait intervenir essentiellement une hormone sécrétée par le pancréas : l'insuline.

Dégradation des glucides

Les hydrates de carbone provenant de l'alimentation ne sont pas directement assimilables. Leur hydrolyse en glucose 1. est assurée au niveau intestinal par l'alphaglucosidase. Le glucose ainsi formé passe de manière passive ou grâce à un transporteur dans la circulation générale.

Au niveau du pancréas

Lorsque la glycémie augmente (apports alimentaires), le glucose excédentaire pénètre dans les cellules bêta des îlots de Langerhans 2.. L'entrée de glucose dans ces cellules pancréatiques déclenche la sécrétion d'insuline (augmentation de la transcription du gène) et l'exocytose de vésicules contenant l'insuline, entraînant donc une augmentation du taux d'insuline circulante 3..

Au niveau des cellules-cibles

L'insuline circulante se fixe sur des récepteurs des cellules-cibles 4. et favorise l'entrée du glucose circulant dans ces cellules. A ce niveau, le glucose est soit utilisé (production d'énergie), soit stocké (sous forme de glycogène), soit transformé en acides gras. Au final, la glycémie, donc le taux de glucose sanguin, baisse.

Les diabètes et leur traitement

- Diabète de type 1

Dans le diabète de type 1, les patients présentent une sécrétion endogène d'insuline très réduite voire inexistante. Dès le diagnostic de la pathologie, l'insuline par voie injectable est le seul traitement utilisé.

- Diabète de type 2

Dans le diabète de type 2, il y a anomalie qualitative et/ou quantitative de la sécrétion d'insuline par les cellules bêta de Langerhans. La diminution du taux d'insuline circulante provoque une baisse du transport, de l'oxydation et du stockage du glucose dans les cellules-cibles, et par la suite une hyperglycémie. S'y associe une résistance à l'insuline des tissus périphériques (foie, muscles, tissu adipeux).

Après échec ou insuffisance d'un traitement hygiénodiététique, un traitement pharmacologique est entrepris avec un ou plusieurs médicaments possédant des mécanismes d'action différents et complémentaires.

- En amont : diminution des entrées de glucose dans la circulation sanguine en ralentissant la transformation des polysaccharides de l'alimentation en glucose au niveau intestinal.

- Au niveau du pancréas : augmentation de la sécrétion d'insuline.

- Au niveau des cellules-cibles : diminution de l'insulinorésistance.

Caractéristiques des antidiabétiques

insuline

Elle est utilisée systématiquement dans le diabète de type 1. Dans le diabète de type 2, le passage à l'insuline devient nécessaire quand les antidiabétiques oraux ne suffisent pas pour maintenir un taux d'hémoglobine glyquée satisfaisant. L'hémoglobine glyquée HbA1c, reflet de la glycémie sur deux mois, représente l'élément de surveillance du diabète. Son élévation au-dessus de 7 % traduit un mauvais contrôle glycémique. Dans ce cas, l'insuline peut être associée aux antidiabétiques oraux.

- Mécanisme d'action

L'insuline est injectée par voie sous-cutanée et supplée à l'insuline physiologique déficiente. En cas de dosage mal adapté aux circonstances (prise alimentaire insuffisante, exercice physique...), elle peut entraîner une hypoglycémie. Il est conseillé de déplacer à chaque administration le lieu d'injection de quelques centimètres dans une même région pour éviter les lipodystrophies dues à l'effet lipolytique de l'insuline.

- Pharmacocinétique

Toutes les insulines n'ont pas la même cinétique d'action. Les insulines rapides ont un délai d'action de 30 minutes et une durée d'action de 6 heures environ. Les insulines lentes n'agissent qu'au bout de 60 à 120 minutes mais leur action persiste 24 heures.

INSULINOSÉCRÉTEURS : Sulfamides hypoglycémiants (Diamicron, Amarel, Daonil, Glutril, Glucidoral...)

Les insulinosécréteurs favorisent l'entrée du glucose dans les cellules. Consommés sans apports alimentaires suffisants, ils entraînent un risque d'hypoglycémie grave.

Les sulfamides hypoglycémiants stimulent la sécrétion d'insuline, potentialisent l'effet insulinosécréteur du glucose et améliorent la sensibilité des tissus périphériques à l'insuline. Ils réduisent la glycémie à jeun et la glycémie postprandiale.

- Mécanisme d'action

La liaison du sulfamide hypoglycémiant à un récepteur de la membrane plasmique de la cellule bêta entraîne la fermeture de canaux potassiques ATP-dépendants, ce qui inhibe l'efflux de potassium. La dépolarisation produite déclenche l'ouverture des canaux calcium voltage-dépendants. L'entrée massive de Ca2+ dans la cellule provoque la sécrétion d'insuline.

- Pharmacocinétique

Les sulfamides hypoglycémiants se lient fortement aux protéines plasmatiques. Ils sont métabolisés au niveau hépatique et éliminés essentiellement par voie rénale. L'insuffisance hépatique ou rénale expose donc à un risque de surdosage potentiellement grave (hypoglycémie).

Répaglinide (Novonorm)

- Mécanisme d'action et pharmacocinétique

Le mécanisme d'action est très voisin de celui des sulfamides hypoglycémiants. Son action rapide et de courte durée permet d'agir plus particulièrement sur l'hyperglycémie postprandiale.

Conseils de prise des insulinosécréteurs

Les insulinosécréteurs doivent être administrés avant les repas et uniquement si un repas suit effectivement. En cas de repas léger, mieux vaut s'abstenir de prendre le médicament sous peine d'hypoglycémie potentiellement grave. En cas d'oubli de prise, ne pas prendre le comprimé plus tard en dehors des prises alimentaires et ne pas doubler la prise suivante.

L'effet hypoglycémiant des insulinosécréteurs s'atténue souvent avec le temps, par diminution de la réponse au produit ou à cause de l'évolution du diabète.

MÉDICAMENTS MODIFIANT LA RÉSISTANCE À L'INSULINE

La metformine et les glitazones n'agissent pas sur la sécrétion d'insuline. Il n'y a donc pas de risque d'hypoglycémie direct.

Metformine (Glucophage, Stagid)

- Mécanisme d'action

C'est un biguanide, sans action sur la sécrétion d'insuline. La metformine augmente la sensibilité périphérique à l'insuline et donc l'utilisation du glucose, et diminue la production hépatique de glucose. En monothérapie, elle n'entraîne pas d'hypoglycémie.

- Pharmacocinétique

La metformine est éliminée par voie rénale sous forme inchangée ; il existe donc un risque d'accumulation en cas d'insuffisance rénale.

- Conseils de prise

Pour prévenir les troubles digestifs fréquents, la prise de metformine est conseillée au cours ou en fin de repas, avec une augmentation très progressive des posologies. La persistance de diarrhées impose son arrêt.

Glitazones (Actos, Avandia, Avandamet)

L'indication des glitazones a été récemment étendue (2004-2005) : en monothérapie, chez les patients diabétiques en surpoids, en cas d'intolérance ou de contre-indication à la metformine ; en bithérapie, en association à la metformine ou aux sulfamides hypoglycémiants mais pas à l'insuline (augmentation de la rétention hydrosodée).

L'indication en trithérapie (hors AMM à ce jour) chez les patients en surpoids insuffisamment contrôlés par une bithérapie orale ne devrait être proposée qu'après avoir envisagé une alternative par l'insuline.

- Mécanisme d'action

Les glitazones sont des agonistes sélectifs de récepteurs hormonaux nucléaires PPAR-gamma (peroxisomal proliferator-activated receptor-gamma), dont on ne connaît pas encore le ligand naturel, présents dans les cellules des tissus périphériques : tissu adipeux, foie, muscles. L'activation de ces récepteurs entraîne une modification de l'expression des gènes, ce qui va permettre une amélioration de la sensibilité à l'insuline. Il n'y a pas de stimulation de sécrétion d'insuline.

- Pharmacocinétique

Malgré une élimination par voie rénale, une adaptation en cas d'insuffisance rénale n'est pas nécessaire.

- Conseils de prise

Les comprimés sont à prendre au cours des repas (1 prise par jour pour Actos, 2 prises par jour pour Avandia). Avandamet est une association de rosiglitazone et de metformine. Attention à la multiplicité des dosages lors de la dispensation !

inhibiteurs des alphaglucosidases (Glucor et Diastabol)

Les inhibiteurs des alphaglucosidases empêchent la dégradation des hydrates de carbone dans l'intestin, d'où un risque de troubles digestifs.

- Mécanisme d'action

Les inhibiteurs de l'alphaglucosidase agissent au niveau de la bordure en brosse de l'intestin. Ils interviennent par inhibition compétitive et diminuent dans la lumière intestinale la dégradation des hydrates de carbone (polysaccharides) en monosaccharides directement absorbables. La digestion et l'absorption des hydrates de carbone sont donc ralenties, ce qui diminue l'hyperglycémie postprandiale.

- Pharmacocinétique

L'acarbose est très peu absorbé par la muqueuse intestinale (biodisponibilité de l'ordre de 1 %). En revanche, le miglitol est absorbé et éliminé sous forme inchangée par voie rénale.

- Conseils de prise

Compte tenu du mode d'action, la prise doit se faire au début des repas ou dès les premières bouchées.

Quels sont les signes d'une hypoglycémie ?

- L'hypoglycémie est un effet indésirable fréquent chez les patients traités par l'insuline ou par un médicament insulinosécréteur : sulfamide hypoglycémiant ou répaglinide.

- Les signes cliniques d'une hypoglycémie sont variables selon les individus et chez un même individu, selon les épisodes.

-#gt; Signes adrénergiques (décharge d'adrénaline en réponse à l'hypoglycémie) : - sueurs diffuses, mains moites, pâleur, - faim impérieuse, - signes cardiaques : tachycardie, palpitations, - tremblements.

-#gt; Signes liés à une neuroglucopénie : - asthénie brutale, - troubles de l'attention, désorientation, propos incohérents, - troubles caractériels : anxiété, nervosité, irritabilité, agressivité voire violence, - troubles sensoriels : diplopie, hallucinations visuelles, olfactives, - troubles neurologiques : vertiges, céphalées, difficultés d'élocution, paresthésies buccales, - étourdissements, sensation d'ébriété pouvant faire penser à une consommation excessive d'alcool.

-#gt; En cas d'hypoglycémie sévère : - convulsions, - coma hypoglycémique, profond, calme.

-#gt; En cas d'hypoglycémies sévères et répétées : - troubles psychiatriques, mnésiques, démence, - troubles neurologiques avec hémiplégies.

- Les signes adrénergiques précèdent les autres manifestations si l'hypoglycémie est d'installation lente. La stimulation adrénergique permet la mobilisation du glucose endogène. Les bêtabloquants (même sous forme de collyre) peuvent masquer certains signes tels que les tremblements et la tachycardie ; ils n'ont pas d'effet sur les autres signes. Par ailleurs, la prise de bêtabloquant peut prolonger un malaise hypoglycémique du fait du blocage du système sympathique, particulièrement avec les molécules non cardiosélectives (propranolol par exemple).

Situations à risque de survenue d'hypoglycémie

-#gt; Injection d'insuline rapide ou prise de médicaments insulinosécréteurs (sulfamides ou répaglinide) sans prise alimentaire suffisante.

-#gt; Doublement des doses (après oubli d'une prise par exemple) ou augmentation de posologies.

-#gt; Activité physique inadaptée et intensive, sans adaptation des doses d'insuline ou de l'alimentation.

-#gt; Associations médicamenteuses avec d'autres médicaments hypoglycémiants.

-#gt; Interactions médicamenteuses avec des inhibiteurs enzymatiques (certains azolés) ou des médicaments exposant à une insuffisance rénale fonctionnelle.

-#gt; Déshydratation exposant à une insuffisance rénale fonctionnelle.

Les patients doivent être informés des risques d'hypoglycémie, des premiers signes annonciateurs (voir p. 3) et de la conduite à tenir en fonction de la gravité (voir p. 10).

Médicaments modifiant la glycémie

Certains médicaments non utilisés dans le cadre du diabète modifient la glycémie. Ils peuvent entraîner ou aggraver une hypoglycémie chez le patient diabétique ou, à l'inverse, diminuer l'effet du traitement antidiabétique.

-#gt; Médicaments diminuant la glycémie

- Dextropropoxyphène, tramadol : principalement chez les patients âgés, en cas d'insuffisance rénale.

- Inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) : après introduction d'un IEC chez le patient traité par sulfamide hypoglycémiant, il est nécessaire de renforcer la surveillance de la glycémie. Les IEC restent les antihypertenseurs de choix chez les diabétiques du fait de leur efficacité sur la prévention de la néphropathie du diabétique.

- Quinine : en cas d'utilisation contre le paludisme, informer le patient.

- Certains antiarythmiques : cibenzoline, disopyramide, hydroquinidine, quinidine, dans des circonstances particulières : personne âgée, insuffisance rénale, doses élevées.

- Alcool éthylique : en quantité modérée, l'alcool peut favoriser une hypoglycémie chez le patient diabétique, parfois plusieurs heures après son ingestion. Il peut masquer les signes d'hypoglycémie et modifier les mécanismes de compensation.

L'ingestion massive d'alcool (intoxication aiguë) peut à elle seule entraîner une hypoglycémie.

-#gt; Médicaments augmentant la glycémie

L'association chez le diabétique d'un médicament augmentant la glycémie est préjudiciable à long terme (complications cardiovasculaires) si le traitement antidiabétique n'est pas ajusté pour rétablir l'équilibre glycémique. En traitement aigu, il est rare qu'un médicament hyperglycémiant entraîne des conséquences sévères (coma hyperglycémique).

- Corticoïdes au long cours : l'hyperglycémie est fréquente.

- Antiprotéases du VIH : fréquemment à l'origine de l'apparition d'un diabète (5 % des patients) ou de l'aggravation d'un diabète existant.

- Hormones thyroïdiennes : le traitement antidiabétique doit être adapté lors de l'instauration du traitement ou des changements de posologie.

- Immunosuppresseurs (ciclosporine, tacrolimus) : le traitement antidiabétique doit être adapté.

S'il existe une alternative, il serait logique de ne pas prescrire un médicament modifiant la glycémie chez un malade diabétique équilibré. Dans le cas contraire, les patients doivent être informés des modifications potentielles de la glycémie à l'introduction du traitement mais aussi lors de son arrêt.

Références médicales opposables et antidiabétiques

Différentes RMO encadrent la prescription des antidiabétiques. Elles permettent d'adapter la stratégie thérapeutique au profil du patient.

-#gt; Il n'y a pas lieu d'associer deux sulfamides hypoglycémiants.

-#gt; Il n'y a pas lieu de prescrire un biguanide ou un sulfamide hypoglycémiant :

- sans avoir d'abord vérifié la fonction rénale,

- sans surveillance de la créatininémie.

-#gt; Il n'y a pas lieu de prescrire un biguanide en cas :

- d'insuffisance rénale,

- d'insuffisance cardiaque, respiratoire ou hépatique,

- d'infarctus du myocarde récent,

- de risque d'ischémie tissulaire aiguë.

-#gt; Il n'y a pas lieu, chez les sujets de plus de 65 ans, d'utiliser des sulfamides hypoglycémiants de demi-vie longue (carbutamide) et des sulfamides hypoglycémiants dans une forme à libération prolongée (glipizide à libération prolongée).

-#gt; Il n'y a pas lieu, chez les sujets de plus de 65 ans, de commencer un traitement par sulfamide hypoglycémiant sans utiliser des doses initiales réduites.

Prise en charge d'un malaise hypoglycémique

-#gt; Les patients doivent être informés des premiers symptômes d'une hypoglycémie (voir page 3), des situations à risque (voir page 4), des risques potentiels et de la conduite à tenir en cas de malaise. Un défaut d'information, la non-reconnaissance ou l'absence de signes annonciateurs d'une hypoglycémie peuvent avoir des conséquences graves (malaises, chutes, séquelles cérébrales voire coma).

-#gt; Cas du malade conscient

- « Resucrage » rapide avec 10 à 15 g de saccharose (= 3 à 4 morceaux de sucre) ou un sachet de Glucodose si le patient a un traitement avec un inhibiteur des alphaglucosidases (Glucor ou Diastabol).

- Le malaise passé, prise de boisson sucrée (jus de fruits).

- Compléter le « resucrage » avec des sucres lents (biscottes par exemple).

-#gt; Cas du malade inconscient (apport de sucre par voie orale impossible)

- Appel du SAMU.

- En attendant, mettre le patient en position latérale de sécurité.

- Sur avis médical, injecter en SC ou IM 1 mg de glucagon* (GlucaGen Kit** 1 mg/ml).

- Quand le patient revient à lui (dans les 10 minutes), « resucrage » par voie orale avec du saccharose, puis des sucres lents.

- En cas de réponse insuffisante, prise en charge médicale avec injection IV de glucose à 30 %.

La surveillance du patient doit être prolongée pendant 24 ou 48 h pour éviter que l'hypoglycémie ne récidive après récupération.

* Le glucagon est un polypeptide produit dans le pancréas. Il augmente la glycémie en activant la glycogénolyse hépatique. La posologie adulte et enfant de plus de 25 kg est de 1 mg par voie SC ou IM, et de 0,5 mg chez l'enfant de moins de 25 kg (il n'existe pas de surdosage potentiel en glucagon).

** Tous les diabétiques de type 1 traités par insuline devraient avoir chez eux un GlucaGen Kit. A l'officine, ne pas oublier de temps en temps de demander au patient de vérifier la date de péremption du produit. Les diabétiques de type 2 ayant une seule injection d'insuline par jour ne nécessitent pas d'avoir du glucagon à portée de main.

LES CHIFFRES DE LA GLYCÉMIE

- Valeurs normales de la glycémie à jeun : 0,70 à 0,90 g/l ou 3,85 à 5,5 mmol/l

- Valeurs normales de l'hémoglobine glyquée HbA1c : 4 à 6 %.

Le diabète de type 2 est défini par une glycémie à jeun (après au moins 8 h de jeûne) 3 1,26 g/l (7 mmol/l) vérifiée à deux reprises. Objectif optimal pour l'HbA1c : æ 6,5 %.

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