Le reflux gastro-oesophagien - Le Moniteur des Pharmacies n° 2599 du 15/10/2005 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2599 du 15/10/2005
 

Cahier formation

l'essentiel Si un patient se plaint de brûlures rétrosternales irradiant de façon ascendante le long de l'oesophage, qu'elles sont accompagnées de régurgitations acides survenant en position allongée ou après les repas, la probabilité d'un reflux gastro-oesophagien est grande. Ces symptômes typiques ne doivent pas faire oublier d'autres manifestations cliniques comme la toux, l'enrouement, les raclements de gorge, une dyspnée asthmatiforme ou même des douleurs thoraciques pseudo-angineuses. Le traitement de référence est aujourd'hui représenté par les inhibiteurs de la pompe à protons qui ont supplanté les anti-H2. Ces antisécrétoires gastriques traitent efficacement les oesophagites modérées à sévères. Les topiques gastroduodénaux ont aussi un intérêt. Quant à la chirurgie, elle trouve sa place chez le sujet jeune, en bonne santé mais aux rechutes fréquentes.

ORDONNANCE : Un patient en surpoids souffrant de régurgitations acides

Il y a quatre semaines, Benoît R. s'est plaint de pyrosis postprandial et de régurgitations acides déclenchées par l'antéflexion et le décubitus. Un reflux gastro-oesophagien (RGO) a été diagnostiqué. Il est traité par un inhibiteur de la pompe à protons (Ogast), un prokinétique (Motilium) et un topique gastrique (Topaal).

L'ORDONNANCE

Docteur Jacques Marty

Généraliste

2, place du Marché

94130 Nogent-sur-Marne

Tél. : 01 41 29 75 78

94 3 99999 8

Le 4 octobre 2005

M. Benoît R.

38 ans, 88 kilos, 1,76 m

-#gt; Ogast 30 mg : 1 gélule par jour pendant 4 semaines.

Ensuite, une gélule d'Ogast à la demande en cas de récidive.

qsp 4 semaines.

-#gt; Motilium 10 mg : 1 comprimé matin, midi et soir avant les repas pendant un mois. A renouveler une fois.

-#gt; Topaal : 2 comprimés à croquer après chaque repas matin, midi et soir, qsp un mois. A renouveler une fois.

LE CAS

Ce que vous savez du patient

- M. R, analyste financier, 38 ans, 88 kg, 1,76 m, a une vie professionnelle stressante. Il n'a pas d'antécédents particuliers mais achète régulièrement Maalox en comprimés. Récemment, ces comprimés n'ont plus suffi à le soulager. Devant la survenue de régurgitations douloureuses, il a consulté son médecin généraliste sur les conseils de l'équipe officinale. M. R a ensuite suivi un traitement par Ogast, pendant 4 semaines. Il se présente pour renouveler l'ordonnance.

Ce dont le patient se plaint

- Quatre semaines après avoir débuté le traitement, M. R. constate une nette amélioration de ses symptômes. Néanmoins, il préfère renouveler l'ordonnance car il dit avoir encore parfois des douleurs, lors de ses déplacements professionnels.

Ce que le médecin lui a dit

- Le médecin a prescrit un bilan biologique de contrôle : NFS, plaquettes, glycémie, bilan hépatique et lipidique qui s'est avéré normal. Il souhaitait également une fibroscopie, mais Benoît R. a refusé, préférant l'effectuer après le renouvellement du traitement s'il n'est pas guéri.

M. R. doit de toute façon reconsulter pour faire le point après les huit semaines de traitement.

DÉTECTION DES INTERACTIONS

Aucune interaction n'est significative dans cette ordonnance.

ANALYSE DES POSOLOGIES

Les posologies de l'ordonnance sont correctes, mais celle d'Ogast peut se discuter. En l'absence d'oesophagite sévère, il est recommandé d'utiliser un inhibiteur de la pompe à protons (IPP) à demi-dose, le cas échéant 15 mg de lansoprazole. Par ailleurs, seul le dosage à 15 mg possède l'autorisation de mise sur le marché pour une administration à la demande. Il faut donc délivrer Ogast 15 mg lors du renouvellement, en expliquant pourquoi à Benoît R.

Le prescripteur aurait pu augmenter la posologie quotidienne de Motilium jusqu'à la dose maximale de 80 mg par jour.

AVIS PHARMACEUTIQUE

-#gt; Selon l'intensité et la gravité des symptômes du RGO, la neutralisation du contenu acide par tamponnement (antiacides), la protection de la muqueuse oesophagienne (alginates), la stimulation de la motricité oesogastrique (prokinétiques) et l'inhibition de la sécrétion gastrique acide, notamment par les inhibiteurs de la pompe à protons, sont mises en place seules ou en association, à la demande ou au long cours.

-#gt; Le traitement de M. R. est conforme à une stratégie mise en place pour traiter un RGO avec une oesophagite sans gravité. L'oesophagite est probable (pas d'amélioration avec Maalox seul en automédication, mais amélioration avec le lansoprazole). Elle n'a pas été confirmée par une fibroscopie oesogastroduodénale. Cependant, selon la conférence de consensus de prise en charge du RGO de l'adulte, cet examen endoscopique n'est pas nécessaire d'emblée, en l'absence de symptômes d'alerte chez un patient de moins de 50 ans.

La non-amélioration des symptômes (ce qui n'est pas le cas ici) imposerait des examens complémentaires, notamment une endoscopie pour confirmer a posteriori le diagnostic et mettre en évidence une éventuelle complication (oesophagite sévère, endobrachyoesophage...).

-#gt; La prescription d'Ogast a été probabiliste. Cet IPP H+K+ATPase (enzyme responsable du transport des ions H+ produits par la cellule pariétale vers la lumière gastrique) inhibe l'effecteur terminal de la sécrétion acide gastrique. Bien toléré, efficace, il est utilisé pour ses propriétés antisécrétoires et cicatrisantes.

-#gt; Motilium 10 mg est prescrit pour corriger les anomalies de la motricité gastrique. Il vise à assurer une meilleure vidange de l'estomac par une augmentation de la motricité, il renforce le tonus du sphincter inférieur de l'oesophage et diminue ainsi le RGO en s'opposant au reflux des solides et liquides vers l'oesophage.

-#gt; Topaal est une association d'alginate et d'antiacide. Les alginates flottent au-dessus du contenu gastrique. Ils forment une barrière s'opposant au reflux et possèdent un pH alcalin. Ils apportent souvent un soulagement rapide des symptômes (en 6 à 14 minutes et pendant 2 à 4 heures) mais n'ont pas d'action curative ou préventive sur d'éventuelles lésions d'oesophagite. L'efficacité symptomatique reste limitée et ne concerne que les formes modérées de RGO.

INITIATION DU TRAITEMENT

L'objectif essentiel est de soulager les symptômes. Le traitement vise à diminuer la fréquence et la durée des épisodes de reflux (amélioration de la clairance oesophagienne, lutte contre les propriétés irritantes du suc gastrique, prévention de la récidive, de l'aggravation des symptômes et de leurs complications).

L'oesophagite apparaît lorsque les défenses de la muqueuse sont inefficaces contre les effets agressifs de la pepsine ou de la bile refluant dans l'oesophage.

- Bilan préthérapeutique

-#gt; Il repose sur des explorations morphologiques (endoscopie, radiographie) et fonctionnelles : pH-métrie oesophagienne de 24 heures (en cas de symptômes atypiques et/ou de muqueuse normale à l'endoscopie), avec ou sans manométrie oesophagienne (cas d'oesophagite sévère pour déceler les troubles de motricité de l'oesophage, l'achalasie du cardia).

-#gt; Le bilan biologique permet de contrôler l'état général du patient et d'éliminer une éventuelle anémie ferriprive (oesophagite ulcérée).

Pour M. R, le diagnostic n'a pas été confirmé (fibroscopie oesogastroduodénale refusée). Cependant, les symptômes typiques à caractère postural et postprandial (pyrosis, régurgitations acides...), son âge (moins de 50 ans), l'absence de signes d'alarme (dysphagie, hémorragie digestive, anémie ferriprive, amaigrissement) et les résultats biologiques normaux ont permis au médecin de poser un diagnostic de RGO avec une oesophagite légère probable sans examen complémentaire.

VALIDATION DU CHOIX DES MÉDICAMENTS

-#gt; Ogast (lansoprazole)

- Antisécrétoire gastrique, inhibiteur de la pompe à protons.

- A 15 mg : traitement symptomatique du RGO associé ou non à une oesophagite, traitement d'entretien et prévention des récidives des oesophagites par RGO et traitement à la demande après 4 à 6 semaines de traitement.

- A 30 mg : oesophagites érosives ou ulcératives symptomatiques par RGO.

- Dans le cadre d'une oesophagite, la dose requise est de

30 mg par jour pendant 4 semaines avec une éventuelle seconde période de 4 semaines à la même posologie. Ensuite, le traitement au moment des périodes symptomatiques requiert 15 mg par jour.

-#gt; Motilium (dompéridone)

- Antagoniste dopaminergique aux propriétés prokinétiques.

- Indiqué notamment dans le soulagement des symptômes de nausées et vomissements, dans les sensations de distension épigastrique, de gênes au niveau supérieur de l'abdomen ou de régurgitations acides.

- La dose recommandée est de 1 à 2 comprimés à 10 mg, 3 à 4 fois par jour.

-#gt; Topaal (acide alginique, hydroxyde d'aluminium, carbonate de magnésium et silice hydratée)

- Topique gastrique couvrant la muqueuse.

- Indiqué dans le traitement symptomatique des troubles de l'acidité pathogène dans les cas de RGO, hernies hiatales, pyrosis, oesophagites.

- La posologie est de 2 comprimés 3 fois par jour.

SUIVI DU TRAITEMENT

Après quatre semaines de prise quotidienne, le traitement doit encore être poursuivi pendant quatre autres semaines, à la demande.

Pour Benoît R., le contrôle clinique à la fin de ce renouvellement de traitement déterminera la nature des examens complémentaires à effectuer.

En effet, après les 4 dernières semaines de traitement, si les symptômes disparaissent le traitement doit être arrêté. Mais, en cas de réponse thérapeutique insuffisante, c'est-à-dire de récidive, les examens complémentaires doivent être effectués, notamment une fibroscopie.

CONSEILS AU PATIENT

Les explications de base

-#gt; Les éventuelles complications de cette affection sans gravité peuvent être évitées si le traitement est bien suivi.

-#gt; Attention aux médicaments qui altèrent la muqueuse oesophagienne ! Préférer la prise de paracétamol en cas de douleurs.

-#gt; Insister sur la nécessité de reconsulter dans 4 semaines si les symptômes persistent.

-#gt; Expliquer cette notion de « traitement à la demande » : le patient gère lui-même la prise de 15 mg quotidienne ou non, à adapter à l'intensité des symptômes et au moment de leur survenue.

-#gt; Signaler tout symptôme inhabituel au médecin.

PLAN DE PRISE CONSEILLÉ -#gt; Ogast 15 mg : prendre la gélule de préférence le matin avec un verre d'eau, sans l'ouvrir, ni la broyer ou la croquer. Aucun moment de prise privilégié n'est préconisé. -#gt; Motilium 10 mg : à avaler un quart d'heure avant les repas. -#gt; Topaal : croquer les comprimés avant de les avaler, toujours après les repas car les alginates doivent flotter sur le bol alimentaire. A distance des autres médicaments (deux heures). La dernière prise doit avoir lieu de préférence le soir au coucher.

Les mesures posturales

-#gt; Eviter l'antéflexion, le décubitus postprandial précoce, la compression abdominale (port de vêtements serrés, ceinture...).

-#gt; Surélever la tête du lit de 15 à 20 cm (efficacité modeste).

Les mesures hygiénodiététiques

-#gt; L'alimentation fait appel au bon sens, peu d'essais contrôlés ayant testé l'effet des aliments sur le RGO. Le patient doit identifier les aliments favorisant ou déclenchant une brûlure et les éviter. Les graisses, le café, la menthe, le chocolat sont souvent incriminés.

-#gt; Fractionner son alimentation avec des repas plus nombreux mais de plus petit volume.

-#gt; Diminuer la consommation de tabac et d'alcool.

-#gt; Perdre du poids avec un régime pauvre en graisses. L'intérêt est double : amaigrissement et amélioration de la vidange gastrique.

-#gt; Canaliser le stress (activité sportive, relaxation...).

Peu d'effets indésirables...

-#gt; Avec Ogast, ils sont en général transitoires et rares, plutôt en début de traitement : nausées, vomissements, douleurs abdominales, constipation, gynécomastie et céphalées.

-#gt; Avec Motilium : rares troubles gastro-intestinaux, gynécomastie et galactorrhée.

L'apparition d'effets indésirables extrapyramidaux reste exceptionnelle. Elle est majorée par les posologies élevées.

-#gt; Avec Topaal : risque de déplétion phosphorée (liée à l'hydroxyde d'aluminium) en traitement prolongé.

... mais des complications à reconnaître

Elles signent la gravité.

-#gt; Altération de l'état général (amaigrissement inexpliqué).

-#gt; Dysphagie.

-#gt; Hémorragie digestive.

Par L. BakirKhodja-Chorfa, A. Barrak et Pr J. Calop, CEEPPPO, département de pharmacie, CHU de Grenoble

PATHOLOGIE : Qu'est-ce que le reflux gastro-oesophagien ?

Le reflux gastro-oesophagien correspond au passage du contenu gastrique vers l'oesop hage. Son impact sur la qualité de vie peut être important.

ÉPIDÉMIOLOGIE

L'un des symptômes typiques du reflux gastro-oesophagien (RGO), le pyrosis, concerne 30 à 45 % des adultes pour un épisode au moins mensuel et 5 à 10 % pour un épisode journalier. L'oesophagite, qui résulte de l'action du liquide gastrique sur la muqueuse oesophagienne, est observée chez 2 % des sujets en population générale et chez 30 à 50 % des patients présentant des symptômes de reflux. Chez 5 à 10 % des patients subissant une endoscopie, on découvre un endobrachyoesophage, principale complication à craindre. Les autres complications (sténose peptique, hémorragie) sont plus rares : 1 à 3 % des cas d'oesophagite.

ÉTIOLOGIES ET PHYSIOPATHOLOGIE

Le RGO résulte du passage d'une partie du contenu gastrique dans l'oesophage. On retrouve souvent une défaillance de la barrière antireflux constituée par le sphincter inférieur de l'oesophage, au niveau de la jonction oesogastrique.

-#gt; Les anomalies du péristaltisme oesophagien peuvent aussi entraîner une diminution de la clairance oesophagienne qui expose plus longtemps la muqueuse oesophagienne à l'action du liquide de reflux. Ces anomalies s'observent lors de certaines pathologies systémiques (sclérodermie, polymyosite) ou purement oesophagiennes (achalasie de l'oesophage). Elles peuvent aussi exister en dehors de tout condiv pathologique clairement identifié.

-#gt; La présence d'une hernie hiatale favorise aussi le reflux gastro-oesophagien. Idem lorsque existe un ralentissement de la vidange gastrique ou encore que la relaxation gastrique postprandiale se prolonge.

-#gt; In fine, le contact du liquide de reflux avec la muqueuse oesophagienne est à l'origine des symptômes digestifs observés, ainsi que des lésions d'oesophagite.

La sévérité de ces manifestations dépend notamment de la composition du liquide de reflux, plus ou moins acide, et de la résistance de la muqueuse oesophagienne aux agressions acides.

Il n'y a aucun parallélisme entre la sévérité des lésions oesophagiennes et l'intensité des signes cliniques.

-#gt; La présence d'acide dans l'oesophage peut également induire une bronchoconstriction réflexe, responsable de symptômes respiratoires. Si le liquide de reflux parvient au niveau laryngé, on peut observer des symptômes ORL consécutifs à l'irritation laryngée.

FACTEURS DE RISQUE

Le tabagisme, l'éthylisme, le surpoids et l'obésité sont cités parmi les facteurs de risque de RGO ; le café, les boissons gazeuses ou les repas riches en graisse aussi.

Certains médicaments (bronchodilatateurs, atropiniques) sont susceptibles de favoriser le reflux.

SIGNES CLINIQUES

-#gt; Les symptômes typiques de RGO sont le pyrosis, brûlure rétrosternale qui irradie de façon ascendante le long de l'oesophage jusque dans la gorge et les régurgitations acides. Le signe du lacet, qui correspond au déclenchement postural des symptômes (exactement comme lorsqu'on se penche pour attacher son lacet de chaussure), est couramment recherché.

-#gt; Des symptômes atypiques peuvent être d'ordre digestif (douleurs épigastriques, nausées, éructations, hoquet) ou survenir en dehors de la sphère digestive.

La toux chronique peut être la seule manifestation d'un RGO, comme l'asthme ou la bronchite asthmatiforme. Il peut exister un enrouement, des brûlures pharyngées, une gêne pharyngée avec sensation de « boule dans la gorge », des otalgies.

-#gt; Le RGO peut enfin se traduire par des douleurs thoraciques pseudo-angineuses, au mécanisme physiopathologique non clairement élucidé.

-#gt; Chez l'enfant, le RGO a été associé à la survenue de laryngites à répétition, de sinusites et de fausses-routes.

-#gt; Les symptômes d'alarme sont l'amaigrissement, la dysphagie, l'hémorragie digestive et l'anémie.

DIAGNOSTIC

Endoscopie digestive haute

-#gt; En l'absence de signes d'alarme et avant l'âge de 50 ans, aucune exploration complémentaire n'est nécessaire pour le diagnostic de RGO lorsque la symptomatologie est typique.

-#gt; En revanche, une endoscopie digestive haute doit être réalisée lorsque les symptômes de RGO sont associés à des signes d'alarme, en cas de signes atypiques, de résistance au traitement, de récidive à l'arrêt du traitement, ou si le patient a plus de 50 ans. En présence de signes atypiques, il convient tout d'abord d'éliminer une pathologie extradigestive avant d'en venir à la fibroscopie oesogastroduodénale.

-#gt; L'examen recherche la présence de lésions d'oesophagite qui affirment le diagnostic de RGO. La normalité de l'examen endoscopique ne permet donc pas d'exclure pour autant un RGO. Le second objectif de l'endoscopie est d'éliminer les autres pathologies oesogastroduodénales, particulièrement celles d'origine néoplasique. Pour cette raison, cette exploration est recommandée à titre systématique chez tout sujet de plus de 50 ans présentant une symptomatologie oesophagienne.

pH-métrie des 24 heures

-#gt; Les variations de pH du bas oesophage durant 24 heures sont enregistrées au moyen d'une électrode introduite par voie nasale et reliée à un boîtier externe portable. Celui-ci inclut un enregistreur et un marqueur d'événements, ce qui permet au patient d'indiquer le moment où surviennent les symptômes.

Réalisé en ambulatoire après arrêt des antisécrétoires (7 jours pour les inhibiteurs de la pompe à protons, 48 heures pour les anti-H2), cet examen note le nombre total d'épisodes de reflux sur les 24 heures, quantifie l'exposition acide de l'oesophage par le pourcentage de temps durant lequel le pH est inférieur à 4, et vérifie que certains signes atypiques signalés par le sujet sont bien corrélés au reflux. La pH-métrie des 24 heures est indiquée chez les patients ayant des symptômes atypiques et une muqueuse oesophagienne normale en endoscopie, en cas de RGO résistant au traitement antisécrétoire, ou chez certains patients avant une intervention chirurgicale antireflux.

-#gt; Une technique proche de la pH-métrie permet d'étudier le reflux duodénogastro-oesophagien : la présence de bilirubine au niveau du bas oesophage témoigne alors de l'existence d'un reflux biliaire, souvent associé au reflux acide.

Autres méthodes

-#gt; Le transit oesogastroduodénal, inutile pour le diagnostic du RGO, garde une indication en cas de sténose peptique pour explorer la partie de l'oesophage située en aval de la sténose.

-#gt; La manométrie oesophagienne (exploration de la motricité oesophagienne au moyen d'une sonde) n'a pas d'intérêt diagnostique mais se discute si un geste chirurgical est envisagé.

ÉVOLUTION ET COMPLICATIONS

Le RGO évolue de façon chronique. En l'absence de traitement, certaines oesophagites sévères peuvent se compliquer.

La sténose peptique

Elle se manifeste par une dysphagie, inaugurale ou faisant suite à un long passé de reflux gastro-oesophagien. Elle justifie parfois le recours à une ou plusieurs dilatations endoscopiques.

L'endobrachyoesophage

-#gt; L'endobrachyoesophage correspond à l'apparition au niveau de l'oesophage distal d'un épithélium métaplasique glandulaire, qui remplace l'épithélium malpighien.

Lorsque la métaplasie est de type « intestinal » (l'épithélium oesophagien normal se transforme en muqueuse de type intestinal), des lésions dysplasiques puis malignes peuvent apparaître. La métaplasie intestinale multiplie par 30 à 40 le risque d'adénocarcinome.

-#gt; La surveillance endoscopique régulière avec biopsies étagées est fondamentale chez les sujets porteurs d'endobrachyoesophage.

Par le Dr Pascale Naudin-Rousselle, en collaboration avec le Pr Denis Sautereau, service de gastroentérologie, CHRU de Limoges

THÉRAPEUTIQUE : Comment traiter le reflux gastro- oesophagien ?

Le reflux gastro-oesophagien peut altérer la qualité de vie, même en l'absence de lésions graves d'oesophagite. Il est donc important de le contrôler à court terme à l'aide de topiques ou d'antisécrétoires et, surtout, à long terme, ce qui peut justifier un traitement d'entretien, voire une intervention chirurgicale.

MÉDICAMENTS

En amont du traitement médicamenteux, il a toujours été acquis que les règles hygiénodiététiques constituaient la base thérapeutique du reflux gastro-oesophagien (RGO). Or, si leur efficacité sur la réduction de l'exposition acide de l'oesophage est démontrée au travers d'études physiologiques à court terme, ce n'est pas le cas en clinique sur le long terme. Ainsi, s'il paraît raisonnable d'arrêter le tabac ou d'éviter les repas trop riches en graisse, l'impact de ces mesures sur le reflux lui-même est sans doute modeste, si tant est qu'il existe.

En revanche, il semble un peu plus pertinent de surélever la tête de son lit de 15 à 20 cm et d'éviter de s'allonger dans les trois heures suivant un repas, surtout lorsque les régurgitations sont sévères ou que les symptômes sont nocturnes.

Parmi les médicaments, certains sont très efficaces mais aucun ne permet de guérir définitivement la maladie et donc de prévenir les récidives à l'arrêt du traitement. La prise en charge symptomatique sur le long terme peut se pratiquer soit par un traitement « intermittent » ou « à la demande », soit par un traitement continu.

Les topiques

Ils exercent leur effet localement et sont fréquemment utilisés en automédication.

- Les antiacides

Ces mélanges de sels de magnésium et d'aluminium agissent en neutralisant le degré acide des sécrétions gastriques par leur effet tampon et par neutralisation de l'acide chlorhydrique. Ils sont dépourvus d'effet alcalinisant au niveau systémique. Leur efficacité clinique n'est pas toujours probante et ils sont dénués d'effets sur les lésions d'oesophagites. En revanche, leur durée d'action brève (30 à 60 minutes) facilite une utilisation « à la demande », lors des épisodes symptomatiques des formes légères à modérées de RGO. Ils sont administrés 90 minutes après le début de chaque repas et si besoin au coucher (soit 3 à 4 prises par jour), avec éventuellement des prises supplémentaires en fonction des douleurs, mais sans dépasser 6 prises quotidiennes.

Le principal inconvénient des antiacides est de diminuer l'absorption d'un certain nombre de médicaments pris concomitamment par voie orale. Un intervalle de 2 heures ou plus doit donc être respecté entre leurs prises respectives. Dans la mesure du possible, le médicament résorbable sera pris en premier.

- Les alginates

Les alginates forment un gel visqueux, surnageant au niveau du contenu gastrique avec un effet de barrière physique protégeant ainsi l'oesophage lors des reflux. Pour que le médicament soit actif, son absorption doit avoir lieu après le repas. L'efficacité est démontrée sur les symptômes, mais pas sur les lésions d'oesophagites. Cependant, l'association alginate + antiacide (Gaviscon), administrée à la demande sur 6 mois, permet un contrôle de la pathologie chez la majorité des patients souffrant d'oesophagite de faible grade. Tout comme les antiacides, les alginates sont plutôt prescrits « à la demande », pour soulager les symptômes des reflux intermittents.

Les prokinétiques

Le RGO étant une pathologie motrice, il semble logique de proposer un prokinétique comme traitement. Néanmoins, aucun médicament ne permet de réduire le nombre de relaxations transitoires du sphincter inférieur de l'oesophage.

- Benzamides

Le cisapride n'étant plus indiqué chez l'adulte dans le RGO, le seul représentant de la classe est le métoclopramide (Anausin, Primpéran, Prokinyl LP). Ses propriétés prokinétiques sont dues à l'augmentation de la libération d'acétylcholine par les neurones intrinsèques du tube digestif. On observe ainsi une augmentation de la vitesse et de l'amplitude des ondes oesophagiennes, de la vidange gastrique, ainsi que du tonus du sphincter inférieur de l'oesophage. Les limites d'utilisation résident essentiellement dans des effets indésirables centraux de type somnolence ou symptômes extrapyramidaux.

- Dompéridone

La dompéridone (Motilium, Péridys) est un antidopaminergique périphérique qui ne passe pas la barrière hématoencéphalique. Les résultats d'études sur son efficacité dans le traitement du RGO sont contradictoires et ses effets sur la motricité oesophagienne sont controversés. L'utilité de ce médicament dans cette indication est probablement assez modeste.

- Béthanéchol

Le béthanéchol, médicament cholinergique, augmente le tonus du sphincter inférieur de l'oesophage et l'amplitude des contractions oesophagiennes.

Ce médicament est disponible uniquement dans les pharmacies à usage intérieur, sous forme de préparation hospitalière de comprimés à 1 mg produit par la Pharmacie centrale des hôpitaux de Paris.

Les limites à son utilisation résident dans ses nombreux effets indésirables.

Les antisécrétoires gastriques

Les antisécrétoires gastriques occupent une place majeure dans la prise en charge thérapeutique du RGO, objectivée par une corrélation étroite entre la durée de l'exposition acide de l'oesophage et la sévérité des lésions d'oesophagite.

- Anti-H2

Les antagonistes des récepteurs H2 à l'histamine inhibent la sécrétion acide par fixation compétitive aux récepteurs H2 de la cellule pariétale gastrique. Ils sont efficaces sur les symptômes du reflux et sur les lésions d'oesophagite, mais le taux de cicatrisation après 6 à 8 semaines de traitement à dose standard est de l'ordre de 50 %. La cicatrisation est d'autant plus difficile à obtenir que l'oesophagite est initialement sévère. En outre, le traitement d'entretien à demi-dose est inefficace en prévention des rechutes. Ceci s'explique en partie par un phénomène de tolérance pharmacologique (perte d'efficacité dans le temps) et par une inhibition de la sécrétion acide postprandiale insuffisante. Il est alors possible d'augmenter les posologies, mais l'observance devient moins bonne. Si leur place s'est grandement réduite du fait de l'efficacité des inhibiteurs de la pompe à protons, leur bonne tolérance et leur sécurité d'emploi en font un traitement de choix en cas de reflux peu sévère avec une symptomatologie pouvant être soulagée « à la demande ».

- Inhibiteurs de la pompe à protons

Les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) agissent en bloquant la pompe H+/K+ATPase de manière irréversible.

Ils présentent une nette supériorité thérapeutique par rapport aux anti-H2, notamment dans le traitement des oesophagites modérément sévères et sévères, pour lesquelles le taux de cicatrisation est deux fois plus important, avec un délai de cicatrisation et une disparition des symptômes plus rapides que sous anti-H2. Autre avantage, l'efficacité des inhibiteurs de la pompe à protons est maintenue dans le temps, ce qui est intéressant pour le traitement d'entretien du RGO.

Pour les patients présentant un reflux modéré, non compliqué d'oesophagite et ne nécessitant pas de traitement continu, leur prescription est laissée à la libre appréciation du médecin.

OÙ AGISSENT LES PRINCIPAUX MÉDICAMENTS ? - Les antisécrétoires se subdivisent en deux familles. -#gt; Les anti-H2 inhibent l'action prosécrétoire induite par l'histamine sur les cellules pariétales. Une diminution rapide de l'excrétion d'ions H+ en découle. -#gt; Les inhibiteurs de la pompe à protons bloquent la pompe H+/K+ATPase de la cellule pariétale gastrique pendant plus de 24 heures. - Les topiques gastroduodénaux se divisent en deux classes. -#gt; Les antiacides neutralisent de façon transitoire les ions H+. -#gt; Les alginates forment un gel surnageant protégeant l'oesophage lors des reflux.

TRAITEMENT CHIRURGICAL

L'objectif du traitement chirurgical antireflux est de rétablir une barrière efficace et de supprimer une éventuelle hernie hiatale.

Le geste de référence est la fundoplicature, consistant à réaliser un manchon autour du bas oesophage par la grosse tubérosité de l'estomac. Cette fundoplicature peut être totale sur 360° ou partielle sur 180 ou 270°.

Cette chirurgie peut être réalisée en ouvert ou par coelioscopie.

La technique par laparotomie offre de très bons résultats avec un contrôle satisfaisant des symptômes dans 80 à 90 % des cas.

La mortalité postopératoire est très faible (0,1 à 0,8 %) et la fréquence des dysphagies persistantes de 1 à 8 %. La coelioscopie offre un meilleur confort postopératoire, évite le sondage gastrique, permet la reprise précoce d'une alimentation légère et une sortie le lendemain de l'intervention. En revanche, elle demande une grande expérience chirurgicale.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

L'objectif thérapeutique est de soulager les symptômes, de cicatriser les lésions et de prévenir les rechutes.

-#gt; Ainsi, en cas de symptômes évocateurs et peu invalidants ou très intermittents, les règles hygiénodiététiques et la prise d'alginates et/ou d'antiacides permettent de soulager les symptômes chez la plupart des patients.

-#gt; Toutefois, chez l'adulte jeune sans signe d'alarme de type dysphagie, anémie ou amaigrissement, il est possible d'envisager la prise empirique sans endoscopie préalable d'anti-H2 ou d'IPP en cure courte.

-#gt; En revanche, chez le sujet de plus de 50 ans ou présentant des signes d'alarme, on pratiquera une endoscopie afin d'éliminer une éventuelle néoplasie et d'évaluer la sévérité de l'oesophagite, élément déterminant de la réponse au traitement. En cas d'endoscopie normale ou d'oesophagite peu sévère, deux stratégies sont possibles : une démarche progressive alginates/antiacides (anti-H2 et IPP sont réservés aux non-répondeurs) ou IPP d'emblée.

-#gt; Ensuite, la prise en charge symptomatique sur le long terme peut se pratiquer soit par un traitement intermittent ou « à la demande », soit par un traitement continu, soit par la chirurgie.

Le traitement intermittent ou « à la demande » s'adresse aux patients présentant des symptômes espacés, ou évoluant par poussées peu fréquentes.

-#gt; Si les symptômes récidivent immédiatement à l'arrêt du traitement, il convient d'envisager un traitement continu d'entretien généralement par IPP à demi-dose. Il s'agit vraisemblablement de la meilleure option à proposer aux sujets âgés ou à risque chirurgical élevé.

-#gt; La chirurgie trouve sa place chez le patient jeune et en bonne santé, mais rechutant fréquemment. Elle peut sembler préférable à un traitement médical à vie. L'indication chirurgicale est rarement absolue, laissant beaucoup de place au choix personnel du patient.

QUELLES SONT LES PRINCIPALES INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES ?

CAS PARTICULIER DU NOURRISSON

Chez le nourrisson, la prise en charge médicale du RGO associe à la fois, tout comme chez l'adulte, un bon positionnement, des règles hygiénodiététiques et un traitement médicamenteux.

-#gt; La meilleure position antireflux est le décubitus dorsal surélevé à 30-40° dans un harnais en cas de RGO sévère. Cette position a l'avantage de diminuer la fréquence des reflux, de favoriser la vidange gastrique, de ne pas perturber le sommeil du nourrisson et d'éviter les torticolis et scolioses rencontrés avec des orthostatismes plus francs. La position surélevée ventrale est fortement déconseillée devant les données épidémiologiques sur la mort subite du nourrisson et la position en position semi-assise devrait être abandonnée du fait de l'hyperpression abdominale secondaire au « tassement » du nourrisson.

-#gt; Les mesures hygiénodiététiques sont simples : elles consistent à diminuer le volume des repas par fractionnement et à les épaissir en ajoutant Gélopectose, Gumilk...

-#gt; Quant au traitement médicamenteux, l'ensemble de l'arsenal thérapeutique est utilisable, sachant que les antisécrétoires ne se conçoivent qu'en cas d'oesophagite peptique authentifiée par endoscopie et pour de courtes périodes de 1 à 2 mois au maximum.

PRISE EN CHARGE INITIALE CHEZ L'ADULTE

-#gt; Cette prise en charge thérapeutique doit théoriquement être poursuivie jusqu'à l'âge de la marche (12-18 mois), mais un relâchement est souvent observé avant d'atteindre cet âge. Toutefois, il est préférable de proposer un traitement modulable - dont l'utilité est régulièrement discutée en fonction de l'âge, de l'évolution des signes et de la courbe de croissance staturopondérale - plutôt qu'un traitement sans modulation mal suivi.

-#gt; En revanche, la persistance du RGO une fois la marche acquise impose un bilan complet pour adapter le traitement médical et envisager le traitement chirurgical, dont l'objectif est soit de replacer l'oesophage terminal dans l'abdomen, soit de rétrécir l'orifice oesophagien du diaphragme, soit de reconstruire un dispositif valvulaire par des techniques identiques aux techniques pour adultes.

STRATÉGIE À LONG TERME CHEZ L'ADULTE

PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES

Le traitement endoscopique, qu'il soit réalisé par radiofréquence, par un polymère injecté - pour créer un bourrelet autour du cardia - ou par fundoplicature endoscopique est décevant dans la mesure où il ne protège pas l'oesophage de l'exposition acide.

Des études sont en cours sur un geste invasif très lourd qui consiste à « agrafer » l'ensemble de la paroi gastrique autour de l'oesophage.

Par Frédéric Chauvelot, pharmacien hospitalier

L'AVIS DU SPÉCIALISTE : « Le passage en OTC des inhibiteurs de la pompe à protons ne serait pas choquant »

Pr Marc-André Bigard, chef du service d'hépatogastro- entérologie, CHU de Nancy

Tous les patients peuvent-ils bénéficier du traitement à la demande par inhibiteurs de la pompe à protons ?

Non. Ce traitement ne s'adresse pas à ceux souffrant d'oesophagite, en particulier si elle est sévère. L'AMM de ces médicaments est ambivalente dans la mesure où, souvent, aucune endoscopie n'a été réalisée avant, mais les patients doivent avoir un état général correct et ne pas être âgés. Ils doivent aussi avoir été parfaitement soulagés par la prise d'IPP pendant un mois et leur symptomatologie doit être épisodique.

Le traitement à la demande supplante-t-il le traitement intermittent ?

La prescription d'un traitement intermittent était une conduite thérapeutique classique il y a quelques années. Fréquemment, des patients voient leur état empirer à certaines périodes de l'année. Le traitement intermittent consiste alors à prescrire quatre à six semaines de suite un IPP, à arrêter puis à recommencer si besoin. Cette durée de quatre à six semaines est souvent excessive car les symptômes sont soulagés en quelques jours seulement. Le traitement à la demande est donc plus moderne.

Avec un traitement à la demande, n'est-il pas tentant d'aller au-delà de la posologie recommandée de une prise par jour ?

C'est au professionnel de santé de jouer son rôle d'éducateur. Recourir à deux ou trois prises par jour n'est, dans ce cas précis, pas plus efficace que la dose unique, même si la tolérance reste satisfaisante. D'ailleurs, tous les essais cliniques montrent que la prise à la demande a lieu un jour sur trois ou quatre en moyenne. S'il est nécessaire de prendre un IPP un jour sur deux, on peut s'interroger sur l'opportunité d'un traitement continu.

Le traitement à la demande n'est-il pas la dernière étape avant le passage en vente libre ? Y seriez-vous opposé ?

Absolument pas, cela ne me choquerait pas du tout. C'est d'ailleurs déjà le cas aux Etats-Unis. Ce traitement est efficace et sûr. Dans le cas de RGO non compliqué avec des symptômes intermittents, il répond à la définition même de l'automédication, c'est-à-dire un traitement de courte durée pour une maladie facilement reconnaissable par les patients. D'autant que les inhibiteurs de la pompe à protons ne masquent pas les symptômes d'un cancer.

Il faut seulement quelques garde-fous, comme le fait de ne pas les conseiller à des patients qui se mettent brusquement à souffrir de l'estomac à 70 ans ! L'industrie pharmaceutique réfléchit à cette hypothèse, mais compte tenu du modèle économique français, je ne suis pas certain que le marché soit mature.

Pr Marc-André Bigard, interrogé par Laurent Lefort

CONSEILS AUX PATIENTS

Reconnaître les symptômes

-#gt; Le tableau est évocateur lorsqu'un patient se plaint de brûlures ascendantes ressenties profondément dans le thorax (rétrosternales) et de régurgitations acides survenant en position allongée ou après les repas.

-#gt; Certains signes extradigestifs peuvent aussi témoigner d'un RGO sous-jacent : on retrouve une toux quinteuse chronique dans 44 % des RGO. Elle a la particularité de survenir après les repas ou lors du passage en décubitus. L'enrouement et les raclements de gorge sont encore plus fréquents. Les atteintes ORL du RGO s'expliquent par la toxicité directe de l'acide gastrique sur la muqueuse et par la stimulation du nerf vagal par ce même acide.

-#gt; Plus rarement, le RGO peut entraîner une dyspnée asthmatiforme ou aggraver un asthme préexistant.

Quand la consultation est nécessaire

Des symptômes ponctuels peuvent faire l'objet d'une automédication avec des antiacides, des alginates ou des anti-H2 faiblement dosés.

Une consultation médicale est cependant nécessaire si le patient a plus de 50 ans, si les troubles surviennent au moins une fois par semaine ou s'il existe des signes de gravité tels qu'un amaigrissement, une dysphagie ou une anémie.

Détailler les mesures hygiénodiététiques

-#gt; Surélever la tête du lit : c'est la seule modification des habitudes de vie qui a une efficacité démontrée - mais modeste - sur le RGO. L'ajout d'un oreiller supplémentaire ne suffit pas car la surélévation doit correspondre à 15 à 20 cm, elle est atteinte en disposant des blocs de bois sous les pieds du lit ou un solide morceau de mousse sous le matelas.

Les autres mesures hygiénodiététiques ne sont pas inutiles puisqu'elles améliorent la qualité de vie des patients et semblent intéressantes dans un condiv de prévention des récidives.

-#gt; Surveiller l'alimentation

- Eviter les aliments qui ralentissent la vidange gastrique, à commencer par l'alcool et les graisses. D'où l'importance de mettre en garde les patients au moment des repas de fêtes; le mariage du champagne et du foie gras n'améliore pas la symptomatologie du RGO !

- Limiter la consommation de mets acides (agrumes, tomates...), de plats épicés et de boissons gazeuses.

- Le chocolat, le café et la menthe peuvent aggraver un RGO.

- Privilégier les repas légers ; mieux vaut manger plus souvent mais en quantité limitée.

- Agir sur les autres facteurs favorisants individuels.

- Le stress et le tabac pourraient également favoriser le RGO.

- Lutter contre le surpoids car la graisse abdominale « appuie » sur le cardia, engendrant ainsi une remontée du liquide gastrique.

De même, il est recommandé d'éviter les vêtements et les ceintures trop serrés au niveau de l'abdomen.

- Patienter au moins trois heures après les repas avant de se coucher.

Evoquer les interactions médicamenteuses

- Les antiacides (y compris les alginates) diminuent l'absorption digestive des médicaments administrés simultanément. Ce qui peut avoir de fâcheuses répercussions, notamment en cas de traitement antibiotique et antirétroviral. Il est donc recommandé de prendre les antiacides à plus de deux heures des autres médicaments et à plus de quatre heures des fluoroquinolones.

- Les inhibiteurs de la pompe à protons diminuent l'absorption du kétoconazole et de l'itraconazole (interaction à prendre en compte).

A propos du traitement à la demande

Instauré depuis longtemps par les malades eux-mêmes, il entre désormais dans l'indication officielle de plusieurs médicaments du RGO. Décidé en concertation avec le médecin, il permet de réduire de façon importante les prises quotidiennes (en moyenne par trois).

Informer sur les examens complémentaires

-#gt; L'endoscopie (ou encore fibroscopie gastrique) n'est pas systématique. Elle est conseillée à partir de 50 ans en raison du risque de complications à cet âge (ulcérations ou rétrécissement de l'oesophage). Rassurer le patient à propos de l'examen, non douloureux grâce au dépôt de gel anesthésique sur le trajet de la sonde optique. Un tranquillisant est en général administré pour détendre le patient.

-#gt; La pH-métrie oesophagienne (pose d'une sonde pendant 24 heures dans l'oesophage) n'est utile qu'en cas de symptômes atypiques ou en l'absence d'oesophagite à l'endoscopie.

Par Myriam Loriol, pharmacienne

POUR EN SAVOIR PLUS

ASSOCIATIONS

Société nationale française de gastroentérologie

CHU Trousseau, 37044 Tours CEDEX 01 - tél. : 02 47 48 23 01 - fax : 02 47 48 23 02 - http://www.snfge.org

Congrès, publications, conférences de consensus, information des professionnels et du public sur les pathologies digestives : la Société nationale française de gastroentérologie est incontournable. Son site propose un dossier très complet sur le reflux gastro-oesophagien, étayé par de nombreuses infographies et des explications et points de vue de spécialistes. 5 000 documents sont en accès totalement libre. Une partie privative reste cependant réservée aux membres de la SNFGE.

Haute Autorité de santé

2, avenue du Stade-de-France, 93218 La Plaine-Saint-Denis Cedex - tél. : 01 55 93 70 00 - fax : 01 55 93 74 00 - http://www.anaes.fr

La Haute Autorité de santé est chargée entre autres d'évaluer l'utilité médicale de l'ensemble des actes, prestations et produits de santé pris en charge par l'assurance maladie, et de promouvoir les bonnes pratiques et le bon usage des soins auprès des professionnels de santé et du grand public. Elle reprend les missions de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, laquelle a organisé avec la SNFGE une conférence de consensus sur le reflux gastro-oesophagien de l'adulte : « Diagnostic et traitement ». Datant de 1999, elle offre une réponse à cinq questions : comment diagnostiquer un RGO ? ; comment évaluer la sévérité d'un RGO et quels sont les objectifs thérapeutiques ? ; quels sont les résultats des traitements médicaux ? ; quels sont les résultats des traitements chirurgicaux ? quelles stratégies thérapeutiques ?

Diagnostic différentiel

Chacune des manifestations atypiques du reflux gastro-oesophagien nécessite d'éliminer une cause spécifique (respiratoire, cardiovasculaire ou ORL) avant d'étayer le diagnostic par des examens complémentaires.

Ainsi, les douleurs thoraciques d'origine oesophagienne peuvent en imposer pour une étiologie coronarienne : constrictives, survenant parfois à l'effort, irradiant vers les épaules et le bras gauche, elles peuvent même être calmées par la trinitrine !

La fibroscopie oesogastroduodénale en pratique

- La fibroscopie oesogastroduodénale a mauvaise réputation auprès des patients, qui la redoutent. C'est en fait un examen indolore mais qui reste désagréable.

Le sujet doit impérativement observer un jeûne strict et ne pas fumer dans les six heures qui précèdent.

- Trois types d'anesthésie sont proposés.

- L'anesthésie locale du pharynx et des voies nasales est très utilisée.

- L'anesthésie générale, préférée par certains patients, implique une hospitalisation dès la veille.

- La troisième méthode, qui ne concerne que peu de cas, est la sédation intraveineuse (injection de midazolam), au cours de laquelle le patient reste vigile. Ce procédé doit être encadré pour veiller à l'absence de troubles respiratoires. Il peut se faire en hospitalisation de jour.

- Le malade est installé en décubitus latéral gauche, avec une protection destinée à recevoir la salive. Il avale lorsque l'endoscope arrive au niveau du pharynx. Il doit ensuite respirer régulièrement et cesser de déglutir.

- On peut aussi employer un endoscope de petit calibre. L'examen est mieux toléré et facilement réalisé par le nez avec une simple anesthésie locale (nasogastroscopie). Ce type de matériel est actuellement en expansion en France.

- En l'absence de complications, l'exploration dure une dizaine de minutes.

Un délai de 2 heures est nécessaire avant la reprise de l'alimentation. Il convient de conseiller au patient de repartir accompagné.

Effets indésirables les plus fréquents

- Aluminium : encéphalopathie à forte posologie ou lors de traitement prolongé chez les patients insuffisants rénaux en dialyse.

- Hydroxyde d'aluminium : déplétion phosphorée par captage des phosphates alimentaires.

- Phosphate d'aluminium : constipation.

- Sels de magnésium : effet laxatif voire diarrhées par rétention hydrique.

- Métoclopramide : somnolence, troubles extrapyramidaux, troubles endocriniens.

- Béthanéchol : prurit, éruption cutanée, hypersudation, diarrhées, douleurs abdominales, flatulence, anorexie, rhinite, bronchospasme.

- Anti-H2 : céphalées, constipation, diarrhées, nausées, myalgies.

- Inhibiteurs de la pompe à protons : nausées, vomissements, flatulences, céphalées, vertiges, généralement transitoires en début de traitement.

Attention à l'intervalle de deux heures entre les prises !

Certains médicaments nécessitent un intervalle de deux heures entre la prise d'un antiacide ou d'un alginate et leur prise per os.

Parmi eux : AINS, antihistaminiques H2, bêtabloquants, fer, digitaliques, chloroquine, corticoïdes, salicylés, biphosphonates, diurétiques de l'anse, éthambutol, fluoroquinolones, fluorure de sodium, inhibiteurs de la pompe à protons, isoniazide, kétoconazole, lincosamides, nitrofuranes, pénicillamine, phénothiazines, phosphore, tétracyclines.

Principales contre-indications

- Antiacides : insuffisance rénale sévère.

- Métoclopramide : dyskinésies dues aux neuroleptiques, phéochromocytome, hémorragie, obstruction ou perforation gastro-intestinale.

- Dompéridone : tumeurs hypophysaires à prolactine (prolactinome).

- Béthanéchol : HTA, bradycardie, pathologie coronarienne, hyperthyroïdie, ulcère gastroduodénal, maladie de Parkinson, épilepsie, asthme, syndrome de malabsorption glucose/galactose, déficit en lactase.

- Anti-H2 : phénylcétonurie pour les comprimés effervescents, en raison de la présence d'aspartam.

Les traitements conseil existent

Certains anti-H2 et alginates réservés au conseil sont dédiés au traitement symptomatique du RGO (brûlures d'estomac, pyrosis, aigreurs).

- Les antihistaminiques H2

La famotidine (Pepcidac) se prend soit au moment de la crise douloureuse, soit avant le repas, soit au coucher à raison de un comprimé. La posologie quotidienne peut être portée à deux par jour sans dépasser 2 semaines de traitement.

La cimétidine (Stomédine) a des modalités de prise identiques. La posologie n'excède pas 400 mg/jour et la durée de traitement 5 jours.

- Les alginates

Gavisconell, en comprimés à croquer ou en solution, renferme de l'alginate de sodium.

Topalkan se présente sous forme de comprimés à base d'alginate, de silice, d'hydroxyde d'aluminium et de carbonate de magnésium.

Les conseils à donner chez l'enfant

La fréquence du RGO augmente chez les nourrissons. L'hydrolyse des protéines dans les laits hypoallergéniques entraîne une moindre floculation dans l'estomac et donc un reflux postprandial. Cependant, le reflux reste un phénomène physiologique chez le bébé dont l'alimentation est uniquement liquide et qui reste allongé la majeure partie du temps. Les régurgitations physiologiques sont diurnes et surviennent en postprandial immédiat ou dans l'heure qui suit le biberon.

Avant de proposer un traitement, des mesures de diététique et d'hygiène s'imposent.

- Chez les « voraces » : faire des pauses au cours de l'administration des biberons.

- Utiliser des tétines adaptées pour éviter aux nourrissons d'avaler de l'air.

- Eviter les biberons trop volumineux, mieux vaut fractionner les repas.

- Opter pour un lait antirégurgitation préépaissi.

- Supprimer le traditionnel jus d'orange qui majore les contractions de l'oesophage.

- Le proclive avec surélévation du lit n'a pas d'intérêt chez le nourrisson dans les formes bénignes.

- Si les remontées sont fréquentes, diurnes et nocturnes, si elles s'accompagnent de signes associés (infections ORL ou respiratoires à répétition, douleurs au moment de la prise des biberons, perte de poids, malaise du nourrisson), il s'agit d'un RGO compliqué qui doit être pris en charge par un médecin.

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