Médicament ou pas ? - Le Moniteur des Pharmacies n° 2595 du 17/09/2005 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2595 du 17/09/2005
 

Actualité

Enquête

Fièvre, paludisme, douleurs rhumatismales ou menstruelles, constipation... 5 000 ans avant Jésus-Christ, les Chinois utilisaient déjà le cannabis comme un médicament. Pourtant, cette plante a aujourd'hui, bien du mal à s'affirmer dans les pharmacopées en raison du manque d'études statistiquement validées prouvant son intérêt.

On ne fume pas un médicament. » Si Patrick Beauverie reconnaît qu'il faut faire preuve de compassion pour les consommateurs en fin de vie, atteints par le sida, qui trouvent un réel confort dans sa consommation, il estime qu'il est impossible pour autant de dire que le cannabis est un médicament. Bien que de nombreux patients louent son intérêt pour l'amélioration de leur pathologie (glaucome, asthme, syndromes inflammatoires, cardiologie...), ses détracteurs brandissent le manque d'études scientifiquement valides et la possibilité de recourir à des médicaments industriels et contrôlés dans toutes ces indications. Ils évoquent également l'impossibilité d'obtenir des effets reproductibles avec l'utilisation d'une plante aussi riche en produits pharmacologiquement actifs présents à des taux et des proportions variables. Viennent ensuite les dangers liés au mode de consommation (goudrons) et l'existence de médicaments parfaitement légaux à base de THC pur ou de cannabinoïdes de synthèse (dronabinol, nabilone, lévonantradol...).

Un antiémétique reconnu.

Le retour du cannabis dans la Pharmacopée semble donc encore loin, d'autant que les indications variées pour lesquelles il est suggéré sont largement controversées. Si son activité antiémétique est reconnue en postchimiothérapie ou postradiothérapie, elle est à relativiser depuis l'arrivée des sétrons. Les cannabinoïdes ne semblent pas plus être une solution miracle pour l'anorexie. S'ils augmentent l'appétit en usage ponctuel, l'effet disparaît voire s'inverse en cas d'usage prolongé. Ils sont cependant potentiellement utiles chez les patients cachectiques en raison d'une affection néoplasique ou d'une affection VIH à un stade avancé.

Dans le traitement de la douleur, leur action, bien que reconnue, reste voisine de celle de la codéine et donc inférieure à celle de la morphine. Cependant, des études laissent présager d'un usage favorable dans certaines douleurs chroniques (lésions rachidiennes, sclérose en plaques, polyarthrite...). Le traitement de pathologies neurologiques ne semble pas beaucoup plus probant. Si les études tendent à suggérer l'efficacité des cannabinoïdes dans la spasticité, la rigidité musculaire, les tremblements et la douleur de la sclérose en plaques, leur rôle neuroprotecteur n'est pas avéré dans le traitement des maladies neurodégénératives centrales (maladie de Parkinson...). Enfin, l'étude de l'intérêt théorique des cannabinoïdes dans le traitement de l'épilepsie est encore à un stade peu avancé. Ceux qui souhaitent se traiter par le cannabis risquent donc de cultiver encore longtemps leurs pieds clandestinement. L'arrivée sur le marché canadien, le 20 juin dernier, du Sativex (GW Pharmaceuticals/Bayer Health Care) pourrait éventuellement changer la donne. Ce médicament antidouleur sous forme de spray a en effet pour particularité d'être un extrait complet de cannabis incluant notamment du THC et du CBD (cannabidiol), et devrait, à terme, être disponible en Europe.

REMERCIEMENTS À DENIS RICHARD POUR SON AIDE PRÉCIEUSE

Les différentes formes de prises et leurs effets

- Fumé : plusieurs techniques pour fumer existent, les plus toxiques étant le chillum indien et le « trois feuilles », car, pour améliorer la combustion, beaucoup d'usagers y ajoutent du tabac. Pour fumer le cannabis pur et sans tabac, il vaut mieux envisager des petites pipes comme les sepsis marocains ou encore les pipes à eau, afin de filtrer et de refroidir la fumée.

- Inhalé : une décoction avec la méthode de la serviette sur la tête est possible. Les vaporisateurs utilisés en phytothérapie atteignent une température supérieure à 200 °C, température à laquelle la combustion du cannabis génère des goudrons. Désormais il existe sur le marché différents types de vaporisateurs spécialement adaptés à l'usage du cannabis et dont la température varie entre 150 et 200° C. Le cannabis étant brûlé avec la vapeur d'eau, il produit une fumée, sorte de vapeur d'huiles essentielles, sans goudrons. Dans ces deux cas, les cannabinoïdes passent des poumons dans le sang puis atteignent le cerveau en moins d'une minute, et à une dose maximale, quinze minutes après l'inhalation. C'est alors que se produit le pic d'effets psychologiques et physiologiques. C'est un processus très rapide qui dure deux à trois heures. A dose égale, un fumeur expérimenté aura un dosage de THC plus élevé dans le sang qu'un novice.

- Ingéré : au-delà du space cake (gâteau au cannabis), de nombreux livres de cuisine spécialisés proposent des recettes variées pour tous les goûts. Dans ces conditions, le cannabis est plus lent à procurer les premiers effets puisqu'il passe par le système digestif (30 à 90 minutes). Il est assimilé par l'intestin puis métabolisé par le foie. Il procure des taux de THC sanguins deux à trois fois plus faibles que lorsque le cannabis est fumé. Il faut encore attendre deux à trois heures avant d'atteindre le niveau d'effet maximal. Les effets du cannabis ingéré durent plus longtemps, de 4 à 8 heures voire plus, car, grâce à la digestion, les cannabinoïdes sont stockés dans les graisses puis se rediffusent lentement dans le sang.

(Sources : Act Up Paris, « Protocole 28 », 10.05/03.)

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