Relations commerciales : Les ressorts de la seconde réforme - Le Moniteur des Pharmacies n° 2576 du 02/04/2005 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2576 du 02/04/2005
 

ÉCONOMIE

Entreprise

Un projet de loi - qui retentira sur l'officine - est en préparation tendant à clarifier et à mieux encadrer la coopération commerciale. En attendant, les syndicats professionnels et le Comité économique des produits de santé négocient sur les marges arrière du générique. Explications.

La réforme de la loi Galland qui régit les relations entre fournisseurs et distributeurs est bel et bien en route. Le groupe de travail Chatel (du nom du député président de la mission d'information sur les relations commerciales à l'Assemblée nationale) vient de rendre son rapport d'étape qui devrait donner l'architecture du projet de loi sur les relations commerciales. Ce projet de loi doit être accueilli avec la plus grande attention par les pharmaciens car ce qui sera valable pour l'épicerie sera aussi valable pour l'officine. D'autant que les montants de contrats de coopération commerciale entre pharmaciens et laboratoires de génériques sont actuellement montrés du doigt. Or, l'un des objectifs affichés de cette réforme est de réduire les marges arrière et mettre fin aux fausses coopérations commerciales.

Le prix « triple net ».

Entre autres, la réforme doit aménager le seuil de revente à perte (SRP) en dessous duquel il est interdit de descendre. L'actuel SRP, ou prix « simple net », correspond au prix de vente du fournisseur diminué des remises consenties par ce dernier au distributeur. C'est le prix sur facture. Il pourrait être remplacé par le « double net » ou le « triple net ». Le « double net » intègre les ristournes conditionnelles (liées à un objectif de vente et attribuées en fin d'année), tandis que le « triple net » prend également en compte le montant total de la coopération commerciale.

« La solution du "trois fois net", qui était celle prônée par Nicolas Sarkozy dans ses différents avant-projets de loi d'octobre et novembre 2004, pourrait en définitive être reprise par Christian Jacob dans son projet de loi », rapporte Jean-Christophe Grall, avocat spécialisé dans le droit de la concurrence (MG Avocats-Meffre #amp; Grall), au vu des recommandations de la mission Chatel, mais sans préjuger d'une solution qui serait moins radicale et qui consisterait à basculer sur facture toute rémunération de coopération commerciale qui excéderait 20 %, ce qui aurait dès lors un impact sur le seuil de revente à perte des produits facturés.

Avantage du « trois fois net » : c'est la solution la plus proche de la réalité commerciale et la plus simple pour ouvrir la voie de la baisse des prix. Inconvénient : un risque évident de guerre des prix dans le cas où la coopération commerciale est élevée, ce qui risque de fragiliser davantage les petits distributeurs et commerces de proximité.

Le rapport d'étape envisage d'encadrer cette solution, d'une part en légalisant la coopération commerciale et en la définissant strictement, d'autre part par des dispositions complémentaires limitant les effets potentiellement dévastateurs du « trois fois net ». Selon la société Euler Sfac, les distributeurs perdraient en moyenne un point de marge d'ici à 2006. « Il s'agirait d'atténuer les effets du "trois fois net", en instituant un seuil dit de prédation consistant à majorer le seuil de revente à perte résultant de ce "trois fois net" d'un coefficient de 1,10 », explique Jean-Christophe Grall.

Exemple : une facture faisant ressortir un « trois fois net » de 100 serait ipso facto majorée de 10 %, induisant un SRP non pas figé à 100 euros mais qui s'établirait ainsi à 110 euros, seuil en dessous duquel le distributeur ne pourrait pas revendre ses produits, sauf exception.

L'abaissement du seuil de revente à perte.

Le « trois fois net » est en balance avec une autre solution privilégiée par le rapport : l'abaissement du SRP par transfert progressif des marges arrières. Le transfert du montant des accords de coopération commerciale dans le calcul du SRP se ferait progressivement sur quelques années selon deux modalités possibles :

- basculer au-delà de 20 % de marges arrière la première année, puis de 15 % la deuxième année puis de 10 % la troisième ;

- ou basculer en pourcentage de la marge arrière actuelle, un tiers la première année, un deuxième tiers la deuxième année jusqu'à environ 90 %.

« Cette réforme principale du SRP, quelle que soit la solution retenue, impliquerait une modification des règles de facturation telles que nous les connaissons aujourd'hui, souligne Jean-Christophe Grall. Ces modifications s'accompagneraient d'une réforme en profondeur de la coopération commerciale qui devrait être limitée exclusivement aux vraies prestations de services qui sont détachables de l'acte d'achat/vente. »

Le projet de loi devrait suivre également le rapport Canivet, remis en son temps à Nicolas Sarkozy, sur un aspect important de la coopération commerciale : la preuve de la réalité du service reposerait exclusivement sur le distributeur qui devrait donc démontrer que le service a effectivement été rendu. Sur les conditions générales de vente, il indique que « la réglementation actuelle issue de l'article L. 441-6 du Code de commerce ne devrait pas fondamentalement être modifiée, sauf à légaliser la notion de conditions dérogatoires ou particulières de vente et ainsi à institutionnaliser cet espace de négociation qui, dans les faits, existe déjà mais n'a pas connu un franc succès. »

Le durcissement des sanctions.

Autre point important envisagé dans le rapport : les futurs contrôles et sanctions susceptibles d'être infligées. La mission recommande une meilleure graduation des sanctions. Devant l'absence de mise en oeuvre du droit applicable en la matière, il paraît préférable, selon elle, « de développer des sanctions administratives et civiles réellement applicables, sans supprimer toute dissuasion pénale, mais de limiter cette dernière aux situations de récidive et aux cas extrêmes ».

Pour accroître l'efficacité des sanctions, les amendes seraient proportionnelles aux bénéfices réalisés par les contrevenants, et toujours supérieures à ce bénéfice. « La DGCCRF souhaite, avec l'appui d'un certain nombre d'organisations professionnelles, que les contrôles soient renforcés et que les sanctions soient rapides et donc efficaces, précise encore Jean-Christophe Grall. On devrait donc voir apparaître - ou réapparaître - certaines sanctions administratives qui pourraient être infligées directement par les services de la DGCCRF. »

Revente à perte : 5 pistes

Comment mieux encadrer le seuil de revente à perte (SRP) :

1. Double net.

2. Triple net.

3. Application d'un coef. de diminution du prix net facturé.

4. Triple net augmenté d'un coef. de marge (SRP = triple net x 1,1).

5. Abaissement du SRP par transfert au-delà d'un taux de marges arrière.

Ces deux dernières sont privilégiées.

A retenir

- Le « triple net » consiste à mentionner sur la facture les réductions de prix acquises (dont remises et ristournes inconditionnelles, ristournes conditionnelles dont la condition est satisfaite à la date d'émission de la facture), les ristournes conditionnelles non encore acquises (ristourne d'objectif, ristourne de progression), la rémunération versée au titre de la coopération commerciale.

- Coopération commerciale : une meilleure définition dans la loi, une contractualisation précise des services de coopération.

- la preuve de la réalité du service reposerait exclusivement sur le distributeur.

- Sanctions : une meilleure graduation et une mise en place de sanctions administratives.

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