La maladie de Hodgkin - Le Moniteur des Pharmacies n° 2571 du 26/02/2005 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2571 du 26/02/2005
 

Cahier formation

l'essentiel La maladie de Hodgkin est une maladie maligne du système lymphatique qui atteint surtout l'adulte jeune. L'apparition de ganglions cervicaux ou sus-claviculaires est parfois décelée par le patient lui-même. Les signes généraux (fièvre, sueurs nocturnes, amaigrissement...) sont plus rares. Le diagnostic formel nécessite la biopsie d'un ganglion suspect. Le pronostic, autrefois très sombre, est désormais très favorable. Le traitement associe le plus souvent une chimiothérapie de 3 à 6 mois suivie d'une radiothérapie comportant une vingtaine de séances d'irradiation réparties sur un mois. La polychimiothérapie MOPP (Méchloréthamine, Oncovin, Procarbazine, Prednisone) autrefois utilisée a laissé la place au protocole ABVD (Adriamycine, Bléomycine, Velbé, Déticène), de moindre toxicité. Les complications à long terme sont toujours fréquentes : complications cardiovasculaires, stérilité, insuffisance thyroïdienne, cancers secondaires.

ORDONNANCE

Une maladie de Hodgkin diagnos tiquée chez une jeune femme

Léa M., 23 ans, souffrant d'une maladie de Hodgkin récemment diagnostiquée débute une chimiothérapie en hôpital de jour. Pour lutter contre les effets indésirables chimio-induits, elle vient chercher à l'officine le traitement d'accompagnement qui lui a été prescrit par l'hématologue.

LA PRESCRIPTION

Docteur Ernest Nipal

Hématologue

Centre hospitalier

94130 Nogent-sur-Marne

Tél. : 01 41 29 75 78

94 3 99999 8

-#gt; Neulasta 6 mg : 1 injection sous-cutanée 24 h après la fin de la chimiothérapie. 2 boîtes.

-#gt; Efferalgan codéiné : 1 à 2 comprimés toutes les 6 h, maximum 6/jour en cas de douleur

-#gt; Zyloric 300 mg : 1 comprimé matin et soir

qsp 1 mois

LE CAS

Ce que vous savez de la patiente

- Léa M., 23 ans, 1 m 68, 63 kg, étudiante, est une de vos patientes habituelles. Une maladie de Hodgkin a été suspectée il y a 2 mois devant un ganglion cervical persistant, et confirmée par biopsie.

- Suite au bilan pratiqué par l'hématologue, Léa a débuté une chimiothérapie ABVD (Adriamycine, Bléomycine, Velbé, Déticène) au début du mois. Elle n'a pas d'autre traitement en cours.

Ce dont la patiente se plaint

- Elle appréhende les effets toxiques induits par la cure de chimiothérapie, notamment l'alopécie.

Ce que le médecin hématologue lui a dit

- A la vue des analyses pratiquées avant la deuxième injection de cytotoxiques, le médecin lui a prescrit un traitement pour lutter contre les effets indésirables.

- Léa doit faire pratiquer une nouvelle analyse de sang (NFS) la veille de sa prochaine cure, et présenter les résultats à l'équipe hospitalière avant la prochaine injection.

- Elle doit contacter rapidement le médecin en cas de fièvre ou de tout symptôme inhabituel.

DÉTECTION DES INTERACTIONS

Cette ordonnance ne comporte pas d'interaction répertoriée cliniquement significative.

ANALYSE DES POSOLOGIES

Toutes les posologies de l'ordonnance sont correctes, notamment celle de Zyloric (600 mg/jour) qui est justifiée. En effet, si la posologie usuelle est de 100 à 300 mg/jour, elle peut s'élever jusqu'à 10 mg/kg/jour chez l'adulte dans le cas des hyperuricémies secondaires aux hémopathies malignes et à leur traitement par cytotoxique.

AVIS PHARMACEUTIQUE

Syndrome lymphoprolifératif malin, la maladie de Hodgkin est généralement évoquée devant l'apparition de ganglions cervicaux ou sus-claviculaires persistants. Suite à une première consultation chez son médecin généraliste, Léa a été adressée à l'hématologue pour pratiquer un bilan complet. La biopsie ganglionnaire a confirmé la maladie de Hodgkin, mais la patiente n'a pas précisé au pharmacien le stade de sa maladie. Elle a débuté une chimiothérapie ABVD (Adriamycine, Bléomycine, Velbé, Déticène). Ce protocole, réalisé en hospitalisation de jour, consiste en 3 cycles réalisés toutes les 4 semaines. Chaque cycle comporte l'injection de cytotoxiques à J1 et J15. La chimiothérapie sera suivie d'une radiothérapie.

Parallèlement, le médecin a prescrit un traitement en ambulatoire qui vise à améliorer la tolérance à la chimiothérapie. En effet, les séances de polychimiothérapie entraînent parfois une neutropénie et une uricémie.

- Neulasta

Neulasta est un facteur de croissance hématopoïétique qui a pour but de corriger la neutropénie induite par les cytotoxiques et de diminuer les risques de complications infectieuses dues à l'hypoplasie médullaire. Sa prescription n'est pas systématique avec le protocole de chimiothérapie ABVD suivi par Léa, ce protocole n'entraînant pas de neutropénie fébrile importante. On ne connaît pas le condiv exact qui a incité le médecin hématologue à prescrire ce facteur de croissance.

Neulasta est la forme pégylée de Neupogen, médicament hospitalier (filgrastim). Cette pégylation ne modifie ni la tolérance ni l'efficacité du produit, mais améliore le confort de vie du patient puisque Neulasta nécessite une seule injection contre une dizaine en moyenne pour Neupogen.

Neulasta est délivrable en ville mais nécessite une prescription initiale hospitalière (PIH) trimestrielle.

La seringue doit être conservée au réfrigérateur. L'injection doit être pratiquée 24 h après la chimiothérapie. L'auto-injection est possible en respectant rigoureusement les règles d'asepsie.

- Efferalgan Codéine

L'effet secondaire le plus fréquent (#gt; 10 % dans les études cliniques) lié à l'administration de Neulasta est la survenue de douleurs ostéoarticulaires d'intensité légère à modérée. L'objectif de la prescription d'Efferalgan Codéine, antalgique de palier II de l'OMS, est de soulager ces éventuelles douleurs osseuses causées par Neulasta. Il peut être pris à la demande, en fonction des douleurs.

- Zyloric

La prescription d'un hypo-uricémiant n'est systématique lors des cures de chimiothérapie que lorsque la masse tumorale est importante. En effet, la lyse cellulaire induite par les cytotoxiques provoque un relargage des acides nucléiques qui se traduit par une augmentation de l'uricémie. L'allopurinol est alors indiqué en traitement préventif de cette hyperuricémie iatrogène. Dans la maladie de Hodgkin, la masse tumorale est généralement peu importante, et la prescription d'un hypo-uricémiant n'est pas systématique.

VALIDATION DU CHOIX DES MÉDICAMENTS

Neulasta 6 mg (pegfilgrastim)

- Cytokine, facteur de croissance de la lignée granulocytaire (G-CSF).

- Indiquée dans la réduction de la durée des neutropénies et de l'incidence des neutropénies fébriles chez les patients traités par une chimiothérapie cytotoxique pour une pathologie maligne, à l'exception des leucémies myéloïdes chroniques et des syndromes myélodysplasiques.

- La posologie est de 1 dose de 6 mg (soit une seringue préremplie) pour chaque cycle de chimiothérapie, en administration sous-cutanée 24 heures après la fin de la chimiothérapie cytotoxique.

-#gt; Efferalgan Codéine (paracétamol, codéine)

- Association d'un antalgique périphérique, antipyrétique (paracétamol) et d'un analgésique opioïde (codéine).

- Indiqué dans le traitement symptomatique des douleurs d'intensité modérée à intense ne répondant pas à l'utilisation d'antalgiques périphériques administrés seuls.

- La posologie recommandée est de 1 ou 2 comprimés, à renouveler si besoin au bout de 6 heures, sans dépasser 6 comprimés par jour.

-#gt; Zyloric 300 mg (allopurinol)

- Inhibiteur de la synthèse de l'acide urique, hypo-uricémiant.

- Indiqué notamment dans le traitement des hyperuricémies d'origine iatrogène.

- Chez l'adulte, dans les hyperuricémies secondaires aux hémopathies malignes et à leur traitement cytotoxique, la posologie moyenne peut s'élever jusqu'à 10 mg/kg/jour.

INITIATION DU TRAITEMENT

-#gt; L'initiation de la chimiothérapie implique un bilan préthérapeutique : - Bilan clinique avec contrôle des fonctions cardiaque, pulmonaire et élimination de tout syndrome infectieux ainsi que la vérification de l'absence de grossesse. - Bilan biologique avec contrôle des fonctions hépatique (bilirubinémie #lt; 20 µmol/l ; transaminases #lt; 3 N) et rénale (créatininémie #lt; 140 µmol/l). - Bilan hématologique, qui sera à renouveler en ville à la veille de chaque perfusion de cytotoxiques. -#gt; L'élimination de l'allopurinol est majoritairement urinaire ce qui nécessite un contrôle de la fonction rénale en vue d'une éventuelle adaptation posologique.

SUIVI DU TRAITEMENT

-#gt; Le contrôle clinique sera mensuel ou toutes les 2 semaines au début du traitement.

Le suivi est orienté selon trois axes :

- L'efficacité de la chimiothérapie et du traitement de soutien.

- L'adhésion au schéma thérapeutique prescrit.

- La tolérance au traitement.

La surveillance clinique sera celle des fonctions cardiaque (cardiotoxicité de la doxorubicine...), respiratoire (signes d'une éventuelle infection) et digestive (vomissements, constipation...).

-#gt; La surveillance biologique est à la fois hématopoïétique (surveillance de la NFS, en particulier de la neutropénie) et métabolique (uricémie et uraturie).

CONSEILS À LA PATIENTE

Injection de Neulasta

Neulasta doit être conservé au réfrigérateur. L'injection peut être pratiquée par la patiente à condition de respecter certaines règles.

-#gt; Sortir la seringue du réfrigérateur 30 minutes avant l'injection.

-#gt; Vérifier que le liquide est incolore et limpide, ne pas agiter la seringue.

-#gt; Se laver les mains et désinfecter le site d'injection à l'aide d'un tampon alcoolisé (haut des cuisses ou abdomen, sauf région autour du nombril).

-#gt; Chasser les éventuelles bulles d'air en appuyant doucement sur le piston, aiguille en l'air.

-#gt; Pincer la peau entre le pouce et l'index et introduire l'aiguille à 45°.

-#gt; Vérifier qu'aucun vaisseau n'a été atteint en aspirant doucement, puis injecter le liquide en maintenant la peau pincée.

-#gt; Retirer l'aiguille et relâcher la peau.

-#gt; Jeter la seringue usagée dans un récipient adapté.

Gérer l'alopécie

Avec ce type de chimiothérapie, l'alopécie est systématique mais reste souvent partielle. Une prévention par casque réfrigérant peut être proposée (à l'hôpital) à la patiente. La repousse des cheveux est rapide après l'arrêt du traitement.

Attention aux effets indésirables !

-#gt; Bien respecter le calendrier des examens cliniques et biologiques.

-#gt; Contacter le médecin en cas de rash, prurit, signes d'infection (fièvre) ou autre symptôme inhabituel (dyspnée, douleur...).

Règles hygiénodiététiques

-#gt; Compte tenu de la fréquence des phénomènes de constipation liés aux chimiothérapies, recommander les règles hygiénodiététiques habituelles : alimentation riche en fibres, hydratation correcte... En cas d'échec, conseiller un laxatif tel que du lactulose.

-#gt; Ne pas consommer d'alcool lors des prises d'Efferalgan Codéine : majoration de l'effet sédatif.

-#gt; Afin de prévenir d'éventuelles cristalluries, assurer un apport hydrique suffisant (1,5 à 2 litres par jour) pour maintenir une bonne diurèse (élimination rénale de l'allopurinol et de son métabolite actif).

-#gt; Maintenir une bonne hygiène buccodentaire pour éviter les stomatites, favorisées par la chimiothérapie. Vérifier que la patiente ne fume pas car le tabac est un facteur d'aggravation des pathologies buccales.

Vie quotidienne

-#gt; Eviter toute automédication.

-#gt; Signaler la prise du traitement lors de toute autre consultation.

-#gt; Prévenir l'exposition au soleil (la vinblastine est photosensibilisante).

-#gt; Prévoir une contraception pendant toute la durée du traitement.

Par Lilia Chorfa-Bakir-Khodja, Céline Barboussat, Matthieu Artès, et le Pr Jean Calop, service de pharmacie clinique, CEEPPPO, CHU de Grenoble, et le Dr R. Gressin, service d'hématologie, CHU de Grenoble

Neulasta : l'auto-injection sous-cutanée (haut des cuisses ou abdomen, sauf la région autour du nombril) doit être effectuée en respectant les règles d'asepsie. Retrait de Neulasta du réfrigérateur 30 minutes avant de faire l'injection (vérifier la

limpidité). Ne pas administrer s'il y a présence de particules.

-#gt; Efferalgan Codéine : prendre les comprimés dissous dans un peu d'eau. Espacer les prises de 6 heures (au maximum 6 comprimés par jour).

-#gt; Zyloric : prendre avec un grand verre d'eau après les repas afin d'améliorer la tolérance digestive.

PATHOLOGIE

Qu'est-ce que la maladie de Hodgkin ?

La maladie de Hodgkin est une maladie maligne du système lymphatique (lymphome) qui touche surtout l'adulte jeune, l'adolescent et le grand enfant. Elle se traduit par la présence de cellules caractéristiques, dites de Sternberg, entraînant une augmentation du volume des ganglions.

ÉPIDÉMIOLOGIE

En France, en 2000, on estimait à 1 360 le nombre de nouveaux cas de maladie de Hodgkin par an, ce qui situait ce cancer au 18e rang de fréquence chez l'homme et au 22e rang chez la femme.

Avec 220 décès par an, la maladie de Hodgkin représentait, toujours en 2000, 0,1 % des décès par cancer, avec une plus forte proportion chez l'homme.

- Age

L'âge médian de survenue est de 27 ans. Chez l'homme, il existe deux pics d'incidence (à 30 et à 80 ans), alors que chez la femme l'incidence maximale est atteinte vers 25 ans.

Chez l'enfant, l'incidence augmente avec l'âge. On recense 5 % à 10 % des cas chez le jeune de moins de quinze ans, mais la maladie est très rare chez l'enfant de moins de deux ans. La prédominance masculine notée avant la puberté tend ensuite à diminuer, et on constate alors une atteinte similaire chez les garçons et les filles.

- Evolution

L'incidence de la maladie de Hodgkin semble diminuer depuis ces vingt dernières années. Toutefois, l'évolution de la classification sur des formes voisines de la maladie pourrait contribuer à expliquer cette baisse. La mortalité a baissé de moitié entre 1980 et 2000 (448 décès contre 220). Cette amélioration est due à une meilleure classification de l'atteinte du patient au moment du diagnostic, qui facilite la mise en oeuvre de stratégies thérapeutiques plus adaptées.

PHYSIO-PATHOLOGIE

La maladie de Hodgkin se caractérise par la prolifération de cellules d'origine lymphoïde qui évoluent en cellules tumorales, appelées cellules de Sternberg (ou Reed-Sternberg). Ce sont des cellules géantes à cytoplasme basophile et à gros noyau multilobé, qui peuvent être caractérisées par des techniques immunohistochimiques. On retrouve sur ces cellules les marqueurs d'activation CD30, CD25 et CD15, alors que le CD20 est inconstant et le CD45 absent.

Ces cellules tumorales sont retrouvées dans le tissu lymphatique en proportion variable avec les cellules lymphocytaires, déterminant ainsi plusieurs types histologiques de la maladie. Leur présence déclenche dans l'organisme des réactions immunitaires et inflammatoires. L'atteinte, initialement limitée à un ou plusieurs ganglions d'un même territoire, se propage ensuite par voie lymphatique aux ganglions des territoires contigus, ainsi qu'à la rate, au foie et à la moelle osseuse. Une dissémination par voie sanguine peut ensuite étendre l'atteinte à d'autres organes non lymphoïdes.

SIGNES CLINIQUES

CHAÎNES GANGLIONNAIRES

La maladie de Hodgkin entraîne localement l'apparition de ganglions, et plus rarement des signes généraux.

- Ganglions

Leur localisation, le plus souvent cervicale ou sus-claviculaire, peut être remarquée par le patient lui-même ou lors d'un examen médical systématique. La découverte initiale de ganglions sous le bras ou dans le pli de l'aine est plus rare. Les ganglions deviennent suspects lorsqu'ils persistent au-delà d'un épisode infectieux et avec une tendance à s'étendre. Ils sont gros (supérieur à 1 cm de diamètre), durs et indolores.

- Signes généraux

Ils ne sont pas toujours associés à une présence ganglionnaire. Le patient peut manifester de la fièvre sans cause infectieuse, des sueurs nocturnes, une fatigue générale accompagnée d'une perte de poids (#gt; 10 % du poids dans les six derniers mois), un prurit (déclenché par l'ingestion d'alcool). Aucun de ces symptômes n'est spécifique mais leur persistance doit orienter vers une consultation.

- Signes de compression

Ils sont exceptionnels. La compression liée au ganglion atteint peut provoquer un gonflement et une coloration violacée du visage et du cou, des difficultés respiratoires.

ÉTIOLOGIES

Les facteurs étiologiques retenus à ce jour restent encore hypothétiques.

- Agents infectieux

-#gt; Les antécédents de mononucléose infectieuse, dont l'agent responsable est le virus Epstein-Barr (EBV), augmenteraient de 2 à 13 fois le risque d'apparition de la maladie de Hodgkin. Le génome d'EBV est en effet retrouvé dans 20 à 80 % des cellules de Sternberg, caractéristiques de la maladie de Hodgkin.

-#gt; Le virus HHV 6 (human herpes virus) a été isolé chez des patients atteints de syndrome lymphoprolifératif mais la relation avec la maladie de Hodgkin est incertaine.

-#gt; Le VIH pourrait lui aussi jouer un rôle puisque le risque de maladie de Hodgkin est de cinq à huit fois supérieur chez les sujets séropositifs.

- Autres facteurs

Des facteurs génétiques pourraient entrer en jeu. On note l'existence de cas familiaux dans 1 % des cas et le risque de maladie de Hodgkin serait supérieur chez les jumeaux homozygotes (moins de 5 % des cas).

DIAGNOSTIC

La maladie de Hodgkin est souvent évoquée devant des ganglions suspects, mais elle ne peut être confirmée qu'à l'aide d'examens d'imagerie médicale et histologique.

Consultation de suspicion

C'est la première consultation, motivée par l'un des signes précédemment cités. Trois éléments vont orienter le diagnostic.

- Bilan biologique

Il doit rechercher la présence d'un syndrome inflammatoire (augmentation de la vitesse de sédimentation, de la protéine C réactive et du fibrinogène). L'hémogramme révèle parfois une polynucléose neutrophile, une anémie, en général d'origine inflammatoire, et une lymphopénie. Le bilan de la fonction hépatique mesure les phosphatases alcalines (élevées en cas d'atteinte du foie).

- Interrogatoire

Il recherche l'existence de signes généraux (fièvre, fatigue...).

- Ponction ganglionnaire

Une microgoutte de suc est prélevée au niveau du ou des ganglions suspects. L'examen cytologique met en évidence un frottis polymorphe (lymphocytes mûrs et centroblastes) et éventuellement des cellules de Sternberg. La ponction ne suffit pas à poser le diagnostic. En effet, les cellules de Sternberg sont quasi pathognomoniques de la maladie de Hodgkin, mais peuvent exceptionnellement être trouvées dans certains lymphomes non hodgkiniens.

Consultation de confirmation

Devant la suspicion de maladie de Hodgkin, le diagnostic formel s'appuie sur l'étude histologique de la biopsie d'un ganglion suspect, complétée, entre autres, par des examens d'imagerie médicale.

- Biopsie ganglionnaire

C'est l'examen fondamental pour vérifier la présence des cellules tumorales de Sternberg. Elle fournit une vision architecturale du ganglion, spécifique de la maladie de Hodgkin, et débouche sur une classification histologique en quatre stades, fonction de la proportion relative des cellules de Sternberg et des lymphocytes, d'une éventuelle déplétion lymphocytaire, de la présence ou non de fibrose et de granulomes éosinophiles. L'analyse histochimique peut aider au diagnostic (les cellules de Sternberg sont CD30+ et habituellement CD15+).

- Radiographie thoracique et scanner thoracoabdominal

Ils établissent le bilan d'extension tumorale. Ils permettent de visualiser les ganglions sus- et sous-diaphragmatiques, de mesurer la taille du foie et de la rate.

- Clichés osseux

Les clichés osseux et/ou une scintigraphie ou une imagerie par résonance magnétique sont utiles pour rechercher une localisation osseuse en cas de douleur.

- Biopsie de la moelle osseuse

La biopsie de la moelle osseuse se pratique au niveau de l'épine postérosupérieure de l'os iliaque et doit être systématiquement réalisée pour rechercher un envahissement médullaire.

Examens complémentaires

Ils permettent selon les cas de préciser le bilan de l'extension tumorale ou de suivre la réponse au traitement.

- La tomographie par émissions de positons (petscan) : il s'agit d'une méthode récente et en cours d'évaluation qui permet de visualiser le métabolisme au sein des organes. Une hyperactivité métabolique révèle une activité de la maladie dans la zone concernée.

- L'imagerie par résonance magnétique nucléaire : cet examen permet d'obtenir une vue transversale de l'organisme et s'avère parfois nécessaire en complément du scanner. Une atteinte osseuse et/ou de la moelle épinière peut ainsi être identifiée.

- La scintigraphie au gallium : elle est en général réservée à la surveillance de la réponse au traitement et peu utilisée au cours du bilan initial, bien qu'elle permette d'identifier des ganglions thoraciques ayant échappé au scanner.

- La scintigraphie au technétium : cet examen est destiné à la recherche d'une atteinte osseuse devant une forme étendue de la maladie.

- L'échographie et le scanner abdominopelvien : ces examens sont réalisés ensemble et explorent les ganglions situés sous le diaphragme ainsi que la rate et le foie. Ils sont aussi utilisés lors du suivi thérapeutique.

Classification pronostique

La classification de Ann Arbor prend en compte quatre critères pour le malade :

-#gt; L'extension anatomique de la maladie en quatre stades. Lors du diagnostic, 21 % des patients sont au stade I, 43 % au stade II, 23 % au stade III et 13 % au stade IV.

-#gt; L'existence ou non de signes cliniques d'évolutivité (A : absence de signe, ou B : présence d'au moins un signe clinique), ces signes étant plus fréquents dans les stades avancés.

-#gt; L'existence ou non d'un syndrome inflammatoire (A : absence, ou B : présence).

-#gt; L'extension aux organes proches (atteinte viscérale au contact d'un ganglion).

Cette classification complétée par la classification histologique permet d'établir la stratégie thérapeutique.

PRONOSTIC

Avant l'apparition des premiers traitements dans les années 60, le pronostic étant souvent fatal. Il est aujourd'hui favorable dans la majorité des cas, grâce à l'évolution des stratégies thérapeutiques. Tous stades confondus, 92 % des patients traités entre 1981 et 1993 sont en vie après une période de 10 ans et 79 % n'ont pas eu de rechute dans cet intervalle.

Les malades diagnostiqués aux stades I, II ou III ont bien sûr plus de chances de guérison que ceux ayant été découverts au stade IV. Les principaux facteurs de mauvais pronostic de la maladie sont le stade avancé de la maladie, la présence de signes généraux, la taille élevée des ganglions et du nombre de territoires atteints, le nombre élevé de viscères atteints, l'atteinte de la moelle osseuse, l'âge au-dessus de 40 ans, le sexe masculin et une atteinte inguinale.

On parle de rémission pendant les cinq premières années qui suivent le traitement, puis de guérison au-delà de ce délai.

Après traitement, la surveillance dure plusieurs années et consiste à rechercher une éventuelle récidive, bien que celle-ci soit rare. Un examen clinique, la recherche d'un syndrome inflammatoire, une échographie ou un scanner pour observer les ganglions profonds sont réalisés tous les trois mois la première année, puis tous les six mois pendant quatre ans, et enfin une fois par an pendant cinq ans. Les possibles atteintes thyroïdienne, cardiaque ou pulmonaire secondaires au traitement sont aussi surveillées.

COMPLICATIONS DU TRAITEMENT

Les complications sont surtout celles du traitement par radiothérapie et chimiothérapie, et sont en partie fonction du protocole reçu et des zones irradiées.

- A court terme

Il peut s'agir de stérilité, le plus souvent chez l'homme (le don de sperme est proposé avant le début du traitement), d'une insuffisance thyroïdienne secondaire à l'irradiation cervicale, d'une hypersensibilité aux infections liée au déficit immunitaire (il existe une lymphopénie secondaire à l'irradiation des zones ganglionnaires et une baisse des fonctions des lymphocytes restants), d'une fibrose pulmonaire responsable de dyspnée et de troubles de la croissance chez l'enfant.

- A long terme

Dix ans ou plus après la fin du traitement, on constate l'apparition de myélodysplasies secondaires et de leucémies dont l'incidence totale peut atteindre 10 % à 10 ans. D'autres types de cancers secondaires au traitement ont aussi été observés avec une fréquence non négligeable.

Par ailleurs, l'atteinte des cellules endothéliales (couche interne des vaisseaux) secondaire à l'irradiation du médiastin peut entraîner des complications vasculaires sous forme de microthromboses pouvant aller jusqu'à l'infarctus du myocarde.

Par Laurence Viel, pharmacienne, en collaboration avec le Dr Jaqueline Roussi, hématologue

Diagnostic différentiel. Le diagnostic différentiel repose sur la recherche étiologique des adénopathies, qui peut révéler une pathologie infectieuse ou tumorale, et sur la mise en évidence des cellules de Sternberg qui distingue la maladie de Hodgkin des lymphomes non hodgkiniens.

Les cellules de Sternberg peuvent exceptionnellement être retrouvées dans certains lymphomes non hodgkiniens, mais la structure ganglionnaire révélée par la biopsie permet de distinguer la maladie de Hodgkin des autres lymphomes.

Attitude médicale lors de la découverte d'adénopathies :

-#gt; Devant un ganglion isolé : l'examen clinique doit rechercher une pathologie infectieuse ou tumorale dans le territoire drainé par le ganglion suspect. L'atteinte d'un ganglion axillaire oriente l'examen au niveau du sein ou du bras, alors qu'un ganglion inguinal suspect orientera l'examen au niveau du membre inférieur, de la fesse, de la sphère gynécologique ou du canal anal.

-#gt; Devant une polyadénopathie : une sérologie virale doit rechercher le HIV, l'EBV (mononucléose infectieuse) ou la toxoplasmose.

THÉRAPEUTIQUE

Comment traiter la maladie de Hodgkin ?

La maladie de Hodgkin est devenue l'un des cancers qui se traitent avec le plus de succès. Le traitement actuel vise à être d'emblée et définitivement curateur. Il repose sur deux moyens principaux : la radiothérapie et la chimiothérapie. Les compli cations iatrogènes peuvent être mortelles.

TRAITEMENT MÉDICAMENTEUX

Tous les protocoles de traitement utilisent une association de plusieurs cytotoxiques (quatre à six).

-#gt; Le protocole MOPP (Méchloréthamine, Oncovin, Procarbazine et Prednisone), administré de façon cyclique sur 6 mois, fut le premier utilisé (1964). Il permet d'obtenir un taux de rémission complète de 80 %, mais sa toxicité importante (hématologique, stérilité...) a fait chercher des alternatives.

-#gt; Le protocole ABVD (Adriamycine, Bléomycine, Velbé et Déticène) ou l'hybride MOPP/ABVD sont les alternatives utilisées dorénavant. Les résultats obtenus avec l'ABVD sont supérieurs ou égaux à ceux du MOPP, mais avec une absence de leucémies et de stérilité, déconseillant à ce jour l'utilisation exclusive du MOPP.

Les médicaments cytotoxiques

- Agents alkylants

-#gt; Chlorméthine (Caryolysine)

Aussi appelée méchloréthamine, la chlorméthine est un agent alkylant de la famille des moutardes azotées, agissant par formation d'ion éthylammonium très réactif avec l'azote de la guanine de l'ADN. A cause de sa toxicité veineuse et de son potentiel mutagène, elle n'est quasiment plus utilisée que dans le protocole MOPP, ou en application cutanée dans le traitement des lymphomes cutanés épidermotropes ou de certains psoriasis.

- Dérivés de l'hydrazine

-#gt; Procarbazine (Natulan)

Développé initialement comme antidépresseur de type IMAO, son mode d'action cytotoxique demeure incertain. Il passe vraisemblablement par la formation de radicaux libres toxiques pour l'ADN. Il n'est jamais utilisé en monothérapie du fait de la survenue de résistances.

-#gt; Dacarbazine (Déticène)

La dacarbazine est métabolisée par les enzymes hépatiques en un composé chimiquement instable, libérateur d'ions méthyldiazonium méthylant les acides nucléiques. Un des métabolites inhibe également l'incorporation des nucléosides puriques dans l'ADN. La dacarbazine agit à différentes phases du cycle cellulaire.

- Intercalants

-#gt; Adriamycine (Adriblastine)

L'adriamycine ou doxorubicine est le chef de file des anthracyclines, médicaments antibiotiques proches des tétracyclines. Le mécanisme d'action le plus classiquement évoqué la concernant est l'intercalation entre deux paires de base de l'ADN, grâce à une structure polyaromatique plane. Ceci a pour conséquence de rendre impossible l'intervention de la topo-isomérase II. On retrouve également une libération de radicaux libres, responsable de la toxicité cardiaque des anthracyclines. Cette toxicité peut s'exprimer en aigu quelques minutes après l'injection du médicament, sous forme d'anomalies électriques de la repolarisation à l'ECG, ou de trouble du rythme. Mais elle peut s'exprimer aussi en chronique par l'accumulation de dose (#gt; 550 mg/m2) entraînant une myocardiopathie congestive.

-#gt; Bléomycine (Bléomycine)

C'est un agent antibiotique du groupe des glycopeptides, capable de s'intercaler entre les bases de l'ADN grâce à son résidu bithiazolé. Le mécanisme d'action comporte aussi une libération de radicaux libres utilisant l'oxygène et l'ion ferreux pour entraîner la cassure de l'ADN. La bléomycine peut être utilisée par voie IM ou IV. Elle ne présente pas, dans son profil de tolérance, de toxicité hépatique, neurologique ou hématologique. Son effet indésirable majeur s'exprime au niveau pulmonaire, par atteinte de l'endothélium des capillaires et des pneumocytes.

- Poisons du fuseau

-#gt; Vincristine (Oncovin) et vinblastine (Velbé)

Les poisons du fuseau agissent par fixation sur la tubuline en inhibant l'assemblage des microtubules, ce qui entraîne la dissolution du fuseau mitotique. La cellule est alors bloquée en métaphase. Deux principes actifs, alcaloïdes de la pervenche, sont utilisés dans cette indication : la vincristine pour le MOPP et la vinblastine pour l'ABVD. L'effet indésirable caractéristique de cette classe est l'atteinte neurologique par action sur la fonction microtubulaire des axones. Elle va se traduire cliniquement par une paresthésie, une abolition des reflex ostéotendineux et un ralentissement intestinal. Ces neuropathies sont surtout le fait de la vincristine, d'où une limite maximale à 2 mg par injection.

Tous sont alopéciants.

Le cycle de chimiothérapie

Le protocole ABVD est administré à raison de une cure tous les 28 jours, chaque cure comprenant deux injections de chacun des 4 cytotoxiques à J1 et J15. Les produits sont administrés par voie intraveineuse, le plus souvent dans une chambre implantable mise en place sous anesthésie locale. La posologie est déterminée individuellement en fonction de la surface corporelle du patient.

TRAITEMENT NON MÉDICAMENTEUX

La radiothérapie

La radiothérapie a été utilisée dès 1902, mais les rechutes étaient nombreuses dans les territoires irradiés et adjacents. Les progrès sont venus de la mise en oeuvre d'irradiations segmentaires traitant en même temps toutes les aires soit au-dessus, soit au-dessous du diaphragme. Les champs d'irradiation tiennent compte du mode de propagation lymphatique, de proche en proche, particulier au processus hodgkinien qui rend obligatoire le traitement des chaînes ganglionnaires adjacentes aux lésions. C'est le principe des « grands champs », prenant en totalité les zones à irradier et protégeant les parenchymes sensibles (poumons, larynx, reins) par des blocs de plomb découpés sur mesure.

- Zones irradiées

-#gt; En sus-diaphragmatique, l'irradiation en mantelet inclut dans sa forme complète les deux régions cervico-sus-claviculaires, les deux régions axillaires, le médiastin et les hiles pulmonaires.

-#gt; En sous-diaphragmatique, l'irradiation dite en « Y renversé » vise la région lombaire, les chaînes iliaques et inguinales. Il est habituel d'y associer une barre splénique concernant la rate et le hile splénique. L'irradiation peut être limitée à la barre verticale du Y et à la loge splénique, épargnant ainsi les ovaires et la moelle hématopoïétique du bassin.

- Doses curatives

Les doses curatives sont chez l'adulte de 40 grays (Gy) délivrés en 4 semaines, soit 4 ou 5 séances à 2 ou 2,5 Gy par semaine.

Contre-indications

- Chlorméthine, adriamycine, dacarbazine : grossesse et allaitement.

- Procarbazine : insuffisance rénale ou hépatique sévère, grossesse et allaitement.

- Bléomycine : grossesse et allaitement, insuffisance respiratoire sévère.

- Vincristine : neuropathie périphérique sévère, allaitement.

- Vinblastine : grossesse et allaitement.

Pour toutes les chimiothérapies cytotoxiques, la poursuite du traitement doit être discutée en présence d'une neutropénie ou d'une infection.

Chez l'enfant, les doses seront limitées à 25 ou 30 Gy si la rémission a été complète par chimiothérapie et si le volume tumoral est petit.

La splénectomie

La splénectomie, ou ablation de la rate, fut longtemps proposée de façon quasi systématique, essentiellement dans un but d'évaluation de la maladie à l'étage abdominal (bilan anatomopathologique).

Aujourd'hui, cet acte n'est pas discutable dans les formes sous-diaphragmatiques pures où le diagnostic de la maladie l'impose. Dans les autres cas, il est rarement indispensable à titre diagnostique ou thérapeutique. L'intervention augmente les risques de lésions du grêle radio- ou chimio-inductibles et celui des infections, notamment pneumococciques ; la vaccination préopératoire doit être pratiquée.

Greffe de cellules-souches périphériques

La greffe de cellules-souches est une technique permettant d'augmenter considérablement les doses de médicaments administrées habituellement en chimiothérapie. On prélève d'abord une partie des cellules-souches du patient et on les congèle. Le patient reçoit ensuite un traitement par chimiothérapie à forte dose, qui détruit les cellules cancéreuses mais affecte la moelle osseuse. Les cellules-souches saines sont alors décongelées et réinjectées au patient.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

ZONES D'IRRADIATION

L'objectif thérapeutique est l'obtention d'une rémission complète, la réponse au traitement étant évaluée sur les données cliniques (disparition des signes généraux et des adénopathies) et d'imagerie. L'échec après chimio- et radiothérapie touche moins de 5 % des patients. Quant aux rechutes, elles surviennent dans 75 % des cas lors des trois premières années qui suivent la fin du traitement. 90 % d'entre elles surviennent chez des patients à grosse masse tumorale.

QUELLES SONT LES INTERACTIONS ?

Chez l'adulte

- Stade I et II

L'irradiation seule en mantelet est suffisante pour les formes de bon pronostic. Les essais ont montré une équivalence d'efficacité entre irradiation lymphoïde subtotale (sus- et sous-diaphragmatique) et l'association radio-/chimiothérapie. L'analyse des complications à long terme fera préférer l'association d'un nombre limité de cycles de chimiothérapie (3 cycles) et d'une irradiation limitée en volume et en dose. Pour les formes de pronostic défavorable, il est recommandé d'associer la radiothérapie à 3 à 6 cycles de chimiothérapie.

- Stade IIIA

Il est recommandé d'associer la radiothérapie subtotale à 3 à 6 cycles de chimiothérapie.

- Stade IIIB et IV

La chimiothérapie sur 6 à 8 cures est la pierre angulaire du traitement, mais la radiothérapie garde une place pour la prévention des rechutes ganglionnaires, en particulier en cas de rémission longue à obtenir sous chimiothérapie (#gt; 3 cycles) ou de grosse masse tumorale. Dans certaines formes, une chimiothérapie plus intensive suivie d'une autogreffe de cellules souches est nécessaire.

Cas particulier

- Chez l'enfant

La tendance est de limiter la radiothérapie en indication, en champ et en dose, compte tenu de ses répercussions, notamment sur la croissance.

- Chez la femme enceinte

Le diagnostic de maladie de Hodgkin justifie l'interruption de grossesse avant la fin du 4e mois en raison du risque embryonnaire et foetal des explorations sous-diaphragmatiques et des traitements, et du potentiel évolutif de la maladie qui semble favorisé par la grossesse. Au 7e mois, on propose un accouchement prématuré. Une monothérapie (alcaloïde de pervenche) peut être utilisée en attendant ce terme, sans risque foetal.

Facteurs de mauvais pronostic

Certains facteurs sont de mauvais pronostic et nécessitent un traitement plus énergique.

-#gt; Liés au patient : sexe masculin, âge supérieur à 40 ou 50 ans.

-#gt; Liés à la maladie : stade avancé, présence de signes généraux, gros volume tumoral, nombre élevé de viscères atteints, atteinte de la moelle osseuse, atteinte inguinale, LDH (lacticodéshydrogénase) élevées, anémie.

SURVEILLANCE ET COMPLICATIONS

Après arrêt du traitement, la surveillance est effectuée tous les 2 à 3 mois durant 2 ans, puis tous les 4 à 6 mois pendant 5 ans, puis tous les ans compte tenu des complications tardives possibles.

- Infections

Elles s'expliquent par la persistance d'une lymphopénie durant plusieurs années, en particulier après irradiation des aires ganglionnaires, associée à une baisse des fonctions des lymphocytes restants. La splénectomie ou l'irradiation splénique sont également de grands facteurs de risque infectieux.

- Insuffisance thyroïdienne

Elle est d'instauration progressive et extrêmement fréquente après irradiation cervicale. Ainsi, sa recherche doit être systématique par dosage de THS tous les 6 à 12 mois.

- Complications cardiovasculaires

Péricardites postradiques, insuffisance coronarienne après radiothérapie médiastinale et myocardiopathie toxique à l'adriamycine peuvent être à l'origine, 5 à 15 ans après le traitement, de blocs de branche nécessitant la pose d'un pacemaker, d'angine de poitrine ou d'infarctus du myocarde nécessitant une dilatation des coronaires ou des pontages.

- Cancers secondaires

Le taux cumulé de leucémies et myélodysplasies secondaires est de 10 % à 10 ans. Le MOPP entraîne une leucémie aiguë chez 2 % des patients, dans un délai de 2 à 8 ans. Ce risque est étendu dans l'association MOPP-radiothérapie, et abaissé à 1 % dans l'association ABVD-radiothérapie. 10 à 20 ans après traitement, et en nombre croissant avec les années, surviennent des tumeurs secondaires en bordure des champs d'irradiation, de type cancer des quadrants internes du sein chez les femmes ayant reçu une irradiation du mantelet et des creux axillaires, par exemple.

- Troubles de la croissance

Ils sont consécutifs à une radiothérapie dans le jeune âge, et peuvent être responsables de séquelles importantes de type cyphose ou thorax étroit.

- Stérilité

Les conséquences sur la fonction reproductrice dépendent de l'âge, du sexe, de l'état pubertaire, des cytotoxiques et des doses utilisées. Plus de 4 cycles de MOPP administrés avant la puberté entraînent de façon constante une stérilité chez le garçon. Quant à la radiothérapie pelvienne, elle augmente le risque, en particulier chez la femme. Une congélation du sperme doit être proposée aux adolescents et adultes jeunes. Pour les femmes, une intervention chirurgicale - pas toujours efficace - est souvent proposée, visant à la transposition iliaque des ovaires en amont des séances d'irradiation.

- Fibrose pulmonaire

Secondaire à la radiothérapie, elle est limitée aux champs d'irradiation. Elle apparaît après 1 à 6 mois et peut se manifester par une fièvre, une toux ou une dyspnée, et diminuer la fonction respiratoire.

PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES

Chez les patients réfractaires ou en rechute, la radio-immunothérapie apparaît comme une perspective thérapeutique innovante. Son principe réside dans la reconnaissance spécifique des cellules tumorales par l'anticorps qui s'y fixe, permettant l'irradiation sélective des cellules-cibles par le radio-isotope couplé à l'anticorps. L'anticorps polyclonal antiferritine couplé à l'yttrium 90 montrerait des résultats satisfaisants dans cette indication. Un autre anticorps couplé à l'yttrium, le Zevalin, indiqué dans le lymphome non hodgkinien à cellules B CD20 positif de type folliculaire, a aussi montré des résultats prometteurs dans la maladie de Hodgkin réfractaire ou récidivante.

Par Frédéric Chauvelot, pharmacien hospitalier Dr Michel Henry-Amar, interrogé par Florence Bontemps

Gestion des effets indésirables immédiats

- Les nausées et vomissements : ils sont constants, plus importants à la deuxième cure. Ils sont pris en charge de façon systématique surtout chez le sujet jeune, par administration d'un sétron par voie intraveineuse avant la cure, éventuellement relayée par une administration per os.

- L'alopécie : systématique, elle débute après la deuxième cure mais n'est que partielle. Une prévention peut être proposée par casque réfrigérant.

- Les neutropénies : elles sont rares avec ce protocole de chimiothérapie qui est peu neutropéniant, et surviennent plutôt chez le sujet âgé. La prescription d'un facteur de croissance hématopoïétique (Neupogen, Neulasta) n'est pas systématique.

- L'hyperuricémie : liée à la lyse cellulaire, elle ne survient que si la masse tumorale est importante, ce qui n'est généralement pas le cas dans la maladie de Hodgkin. La prescription d'un hypo-uricémiant n'est donc pas systématique.

- La veinite : l'inflammation des veines est fréquente, tous les produits ayant une toxicité veineuse importante. La pose d'un cathéter central (chambre implantable) permet d'éviter cet effet secondaire.

- Les aphtoses : survenant après chimiothérapie ou radiothérapie, elles sont favorisées par la baisse du système immunitaire mais restent rares dans la maladie de Hodgkin. Une bonne hygiène dentaire et la prescription d'un bain de bouche préventif (Fungizone, bicarbonate...) peuvent être utiles.

- La stérilité : elle est plus importante chez l'homme que chez la femme. On propose souvent à l'homme jeune une congélation de sperme avant la chimiothérapie.

CONSEILS AUX PATIENTS

Fatigue

C'est l'un des effets secondaires les plus fréquents. Elle est liée au cancer et/ou à la chimiothérapie.

Nausées et vomissements

La prescription de médicaments antiémétisants de type Zophren, Kytril ou Navoban est systématique avec le protocole ABVD, le plus courant des protocoles de chimiothérapie utilisé dans la maladie de Hodgkin. En effet, cette pathologie touche préférentiellement le sujet jeune, plus sensible aux nausées et vomissements chimio-induits. L'administration du sétron peut se faire par voie orale ou rectale, mais de préférence parentérale, 30 minutes avant la perfusion d'Adriblastine. Outre le traitement préventif des nausées, il est conseillé de fractionner les repas et de manger de petites quantités à chaque fois, de manger lentement et de se reposer après chaque repas. Déconseiller les repas

trop odorants, contenant par exemple des oignons ou de l'ail. Boire suffisamment pendant le traitement afin d'éviter tout phénomène de déshydratation en cas de vomissement.

Constipation

Elle est fréquente au cours du traitement. Si une constipation s'installe, il faut augmenter les apports en fruits crus, légumes et fibres, et éviter de rester trop longtemps alité. De l'huile de paraffine ou des laxatifs osmotiques sucrés (lactulose) peuvent être conseillés.

Alopécie et casque réfrigérant

Le protocole ABVD est une chimiothérapie alopéciante mais, le traitement ne comprenant en moyenne que quatre cures dans la maladie de Hodgkin, la chute des cheveux ne devrait pas être totale. Les premières chutes de cheveux s'observent généralement à partir de la deuxième cure, et il est possible de les prévenir en utilisant un casque réfrigéré lors de l'administration de la chimiothérapie. Ce casque est à disposition dans l'unité recevant le patient pour son traitement : lui conseiller d'en discuter avec son médecin ou avec l'infirmière de l'unité.

Conseiller au patient de se couper les cheveux avant de commencer la première cure, puis régulièrement au cours du traitement afin que la chute de cheveux soit plus discrète, et que l'utilisation du casque réfrigéré soit plus efficace. Déconseiller l'utilisation de toute teinture qui fragilise le cheveu.

Mucites et aphtes

Très souvent les mucites sont dues à la radiothérapie lorsqu'elle touche le territoire des glandes salivaires. Lors du traitement de la maladie de Hodgkin, l'irradiation en mantelet ne touche pas les glandes salivaires,

protégées par les blocs de plomb découpés sur mesure. Il est toutefois conseillé d'avoir une hygiène buccale optimale, avec un brossage des dents trois fois par jour. Des bains de bouche préventifs ou curatifs sont parfois prescrits.

L'AVIS DU SPÉCIALISTE

Aujourd'hui, la tendance est à une irradiation très localisée

Les complications du traitement de la maladie de Hodgkin sont-elles aujourd'hui toujours aussi graves ?

On a globalement diminué la fréquence des complications graves. Par exemple, en limitant la dose de radiothérapie délivrée sur le médiastin inférieur, on a diminué l'irradiation du coeur et ce faisant la toxicité cardiaque. Aujourd'hui, la tendance est à une irradiation très localisée en « timbres-poste », en se limitant à 1 cm autour du ganglion atteint. Cependant, des effets secondaires vraiment handicapants persistent, d'autant que la pathologie atteint préférentiellement des adultes jeunes. L'association bléomycine-irradiation du médiastin induit fréquemment une diminution de la fonction respiratoire, gênante pour les jeunes qui veulent faire du sport. L'irradiation des tissus musculotendineux entraîne longtemps après une sclérose musculaire qui s'accentue avec l'âge : certains patients guéris ont une atrophie telle qu'ils peuvent à peine relever le cou. La stérilité touche encore maintenant 60 % des hommes et 40 % des femmes traités par chimiothérapie. Comme pour toute pathologie grave, il existe un « prix » à payer par le patient pour guérir. Une solution serait de l'associer au choix du traitement, qu'il est prêt à accepter, compte tenu, à efficacité équivalente, des effets secondaires immédiats attendus et des risques à long terme.

Et le risque de cancer secondaire ?

Les malades qui développent un lymphome de Hodgkin ont une immunosuppression naturelle qui participe vraisemblablement à la survenue de la maladie. Il ont donc un risque inné de développer ultérieurement un autre cancer dont les caractéristiques et l'évolution sont identiques à ceux d'un cancer de novo. De plus, il est démontré que la radiothérapie augmente le risque de second cancer solide.

Stérilité et contraception

Les femmes en âge de procréer doivent suivre une contraception pendant toute la durée de traitement. Chez les hommes jeunes, une congélation de sperme peut être proposée avant le traitement.

Aspect psychologique

Des problèmes psychologiques liés à l'annonce de la maladie et aux effets secondaires du traitement sont fréquents. Il faut rassurer les patients sur le pronostic de la maladie, qui s'est amélioré en quelques années. Des psychologues ou des psychiatres peuvent souvent être consultés tout au long du traitement au sein même de l'équipe soignante.

Signes d'alerte

Certains signes doivent alerter le patient : fièvre supérieure à 38,5 °C, urines teintées de sang, selles noires, vomissements sanglants, aphtes empêchant toute alimentation, diarrhée importante, essoufflement nouvellement apparu. Tous motivent une consultation en urgence.

Par Frédéric Chauvelot, pharmacien hospitalier. Et Nathalie Calop, pharmacienne

POUR EN SAVOIR PLUS

ASSOCIATIONS

Union nationale leucémie espoir

http://www.leucemie-unle.org

L'association UNLE, fondée il y a dix ans, est consacrée à toutes les maladies du sang et de la moelle : leucémies, lymphomes, myélomes... Son site apporte une information pointue sur la maladie de Hodgkin, détaillant aussi bien le diagnostic que le traitement et le pronostic. Un article complémentaire est consacré aux complications tardives du traitement, qui demeurent la préoccupation principale des hématologues. Car le challenge actuel est bien de diminuer la toxicité tardive de la chimiothérapie et de la radiothérapie sans pour autant diminuer le taux de survie.

INTERNET

Guide d'aide aux malades

http://www.chu-stlouis.fr/hematoonco/service/ guideaideauxmalades.htm

Edité par l'hôpital Saint-Louis de Paris, ce guide d'aide aux malades explique et dédramatise la chimiothérapie. Modalités d'administration des médicaments, y compris pose d'un cathéter central ou d'une chambre implantable, et effets indésirables de la chimiothérapie sont présentés en termes clairs. Des conseils de prévention des effets secondaires et la liste des signes devant amener le patient à consulter en urgence complètent ce guide. Quinze pages destinées aux patients de l'hôpital, mais qui peuvent être une bonne source d'informations pour tous les patients traités par chimiothérapie pour une hémopathie lymphoïde.

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