Un diplôme pour les belles âmes - Le Moniteur des Pharmacies n° 2569 du 12/02/2005 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2569 du 12/02/2005
 

PHARMACIE ET AIDE HUMANITAIRE

Carrières

Il y a un mois, un tsunami dévastait l'Asie du Sud. De nombreuses associations se sont rendues sur place, notamment pharmaceutiques. L'occasion pour faire le point sur un métier passionnant mais difficile.

A l'heure où PSF fête ses vingt ans, les ONG pharmaceutiques ont toujours besoin de pharmaciens pour accomplir leurs missions. PHI fait appel à des bénévoles et PSF-CI rémunère actuellement 50 expatriés sur le terrain dont 31 pharmaciens. Leur rôle est d'assurer la logistique et la distribution des médicaments sur place et former les professionnels de santé locaux. « Beaucoup sont amenés à faire de la gestion, certains font même le métier d'administrateur », confie Ghislaine Soulier, responsable de la communication pour PSF-CI. Car le visage de l'humanitaire a changé. « Désormais, il faut plutôt parler d'aide au développement car nous nous positionnons sur des actions pérennes. On est loin de l'image du sac de riz qu'on apporte sur l'épaule... », décrit Carine Bruneton, pharmacienne, directrice générale de ReMeD.

Aujourd'hui, l'humanitaire se professionnalise. Il existe des cadres bien précis pour le médicament qui provient de plus en plus souvent de centrales d'achats de médicaments essentiels génériques. Les listes pour chaque pays sont établies par l'OMS. Autant dire qu'il est important de bien connaître tous les maillons de la logistique et les procédures réglementaires aux douanes.

Formation préalable recommandée.

Les ONG travaillent en harmonie avec les autorités sanitaires locales. Et l'argent de l'humanitaire est très surveillé. « Nous devons rendre des comptes aux bailleurs de fonds, qui nous financent à 80 % », confirme-t-on à PSF-CI. Mais les études de pharmacie ne préparent pas à la distribution de médicaments dans les pays en voie de développement. Une formation préalable en santé publique ou en pharmacie humanitaire est donc vivement recommandée. Dans ce domaine, les enseignements ne sont pas très nombreux. Citons le DU de santé publique, « Santé et pays en développement » à la faculté de médecine de Nancy(1), le mastère de santé publique à l'université de Bordeaux-II(2) et surtout le DU « Pharmacie et aide humanitaire » à la faculté de pharmacie de Caen(3), unique formation spécifiquement dédiée aux pharmaciens. En septembre, durant trois semaines, y sont transmises les bases de la pharmacie et de la politique de santé humanitaire. Le dernier module, très important, prend la forme d'un stage de trois à six mois sur le terrain organisé par l'association Pharmacie et aide humanitaire (PAH). « Nous sommes en contact avec différentes ONG et nous sommes énormément sollicités. A tel point que nous n'arrivons pas à satisfaire les demandes », confie Jean Jacques Bléas, responsable du DU « Pharmacie et aide humanitaire ».

Expérience de terrain indispensable.

PAH a pour objectif de fournir des cadres pharmaciens opérationnels pour la bonne gestion du médicament. Ses missions restent la plupart du temps bénévoles mais permettent de faire ses premières armes. Une composante loin d'être négligeable dans un milieu où l'expérience prime pour évoluer. « Les bailleurs de fonds sont très exigeants sur la connaissance du terrain de nos expatriés », reconnaît Ghislaine Soulier.

A PSF, le recrutement commence par un entretien après réception du CV. A niveau de compétences égales, la sélection se fait selon le profil psychologique de la personne. « Il faut non seulement être motivé, mais il faut aussi pouvoir affronter la misère et les conditions précaires sur le long terme, car nos missions durent au minimum six mois. Nous évaluons également la capacité de réadaptation au retour. Cette étape est la plus dure moralement. Beaucoup n'acceptent plus de côtoyer l'opulence », poursuit Ghislaine Soulier. La condition physique est aussi à prendre en compte pour résister à la chaleur des pays d'Afrique ou au froid du Tadjikistan par exemple.

Enrichissement surtout personnel.

Si le travail dans l'humanitaire se montre humainement très riche, la rémunération n'est pas toujours à la hdiv de l'enrichissement personnel. Chez PSF, les volontaires reçoivent des indemnités mensuelles allant de 600 à 1 100 euros en fonction de l'expérience (plus des indemnités journalières pour couvrir les frais sur le terrain). Les salariés (au bout de deux ans de mission) perçoivent entre 1 500 et 1 800 euros par mois.

Mais peut-on vraiment faire carrière dans l'humanitaire pharmaceutique ? « C'est un petit créneau, mais il arrive que les ONG recrutent directement des personnes en mission. Certains pharmaciens sont devenus conseillers pour les ambassades à l'étranger », rapporte Jean-Jacques Bléas. Cependant, la plupart des véritables carrières se terminent en France, au siège des ONG ou des centrales d'achat, comme la CHMP à Clermont-Ferrand. Tel est le cas de Valérie Solbes, pharmacienne responsable à Médecins du monde : « Je veille sur la qualité du circuit du médicament, de la sélection des fournisseurs à la réception sur le terrain, mais je m'occupe également de la gestion des risques via un centre de soins méthadone et les missions de l'association dans les raves. »

Les débouchés pour les pharmaciens se révèlent logiquement plus limités que pour les médecins, mais le grand chantier de la bonne distribution des antirétroviraux réserve encore de belles opportunités.

(1) http://www.sante-pub.u-nancy.fr/esp/DU.html, tél. : 03 83 59 25 00.

(2) http://www.isped.u-bordeaux2.fr, tél. : 05 57 57 45 25.

(3) http://www.pharmacie.unicaen.fr : 8000/~site/index.html, tél. : 02 31 56 60 08.

« Je ne suis pas rémunéré mais ce que je fais me semble nécessaire »

Etienne Guillard termine une mission aux Gonaïves, à Haïti, après les inondations de septembre dernier. Il raconte : « Je suis parti en mission pour la Croix-Rouge haïtienne, juste après mon DU "Pharmacie et aide humanitaire". Dès mon arrivée, je me suis occupé de la distribution des médicaments et de la gestion des stocks dans une clinique d'urgence. Ce qui impliquait aussi des explications aux malades et des actes infirmiers. La plupart des gens sont très touchés par notre engagement. La structure a été remplacée par un hôpital de campagne dont je gère actuellement l'approvisionnement. Parallèlement, j'ai dû remettre en état un dépôt périphérique de médicaments essentiels génériques (sous l'égide de l'OMS). Imaginez monter une pharmacie dans un garage après une crue ! Les médicaments viennent de partout et sont placés à même le sol, dans des conteneurs, avec deux cents personnes à servir par jour... Aujourd'hui, ma mission se termine et je pars sur un autre projet en Equateur, axé sur l'ethnopharmacie et la médecine traditionnelle. Je ne suis pas rémunéré, ou très peu, mais pour l'instant je pense continuer parce que ce que je fais me plaît et me semble nécessaire. »

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