La révolution pharmaceutique - Le Moniteur des Pharmacies n° 2552 du 09/10/2004 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2552 du 09/10/2004
 

REFORME DE L'ASSURANCE MALADIE EN ALLEMAGNE

Actualité

L'événement

Honoraires pharmaceutiques, TFR, déremboursements, vente sur Internet... Pour lutter contre la réforme drastique du gouvernement, la pharmacie allemande joue la carte OTC et se regroupe. Des mutations toujours observées à la loupe par nos gouvernants.

Notre visite du salon Expopharm, qui s'est tenu du 30 septembre au 3 octobre à Munich, nous a permis de prendre toute la mesure de la réforme vécue par nos confrères d'outre-Rhin. Avec notamment la création de la première franchise d'officine et le développement de pharmaciens référents (voir encadré ci-dessous).

L'officine allemande est en effet aujourd'hui à l'an I de sa révolution, orchestrée par la réforme de la santé qui, outre l'introduction d'honoraires (1) remplaçant la marge, autorise désormais la vente par Internet et la multipropriété. Les officinaux doivent suivre ces évolutions tout en sachant que, tôt ou tard, le marché sera totalement libéralisé : la multipropriété, jusqu'à présent limitée à quatre officines par diplôme, est le dernier verrou avant l'arrivée des chaînes de laboratoires, de grossistes et de... droguistes déjà sur le marché.

Cap sur l'OTC.

Les 21 305 titulaires ne disposent que de quelques années, voire quelques mois d'avance sur ces futurs concurrents pour s'adapter aux nouveaux canaux de distribution. Fortement organisés, les officinaux ont néanmoins réitéré, lors de leur dernier congrès, leur intention de préserver leur indépendance. Leur atout principal se décline en trois lettres : OTC. Seuls ces produits non remboursables sont, selon eux, capables d'assurer leur assise financière et de les distinguer de leurs futurs concurrents auprès du grand public. Jusque fin 2003, les linéaires des pharmacies se déclinaient en trois catégories : les médicaments remboursés (80 %, voire plus, du CA), les OTC, dont 93 % sous appellation « vendus exclusivement en pharmacie », remboursés s'ils étaient prescrits, enfin, les 7 % restants (OTC mais aussi para) étaient vendus tant en officine qu'en GMS ou en droguerie. En déremboursant tous les OTC au 1er janvier (2) et en libéralisant les prix de cette catégorie de médicaments, le législateur a renversé les règles du jeu. Ceci d'autant plus que, depuis cette année, les patients doivent s'acquitter de 10 Euro(s) par trimestre pour toute visite chez le médecin.

Inquiets pour leurs honoraires et face à des modèles de coopération entre caisses d'assurance maladie et laboratoires ou répartiteurs pour approvisionner des malades chroniques, les officinaux misent sur l'OTC. Si le début de l'année ne l'a pas vu exploser - les patients avaient anticipé en décembre dernier sur la nouvelle législation en faisant des réserves -, le marché semble aujourd'hui en pleine progression avec toutefois une relative stabilité des prix. Créée en janvier par les professionnels de santé, l'« ordonnance verte » est utilisée par 38 % des praticiens (4 % des prescriptions). « Pense-bête » à l'usage du patient, cette ordonnance sans valeur contractuelle permet de transmettre à l'officine les conseils OTC du médecin, cette prescription n'étant pas remboursée.

Parallèlement, l'industrie redouble de séduction à l'égard de l'officine dont le CA devra bientôt reposer à... 50 % sur le médicament non remboursable ! Hermann S. Keller, président du DAV, syndicat allemand des pharmaciens, veut croire à cette position de force. Il est farouchement décidé à la préserver. Car la prochaine avanie du législateur pourrait être de lever complètement pour les OTC, l'appellation « produit vendu exclusivement en pharmacie ».

(1) Actuellement le forfait est fixé à 8,20 Euro(s)par ligne prescrite, moins 2 Euro(s) reversés aux caisses sous forme de « rabais ».

(2) Hormis dans le cadre de certaines maladies chroniques (cardiovasculaires, par exemple).

De nouveaux modes d'exercice pour faire face

Au coeur d'une réforme qui a vu les caisses économiser 1,67 MdEuro(s) sur le médicament de janvier à juillet, les officinaux amorcent de nouveaux modes d'exercice.

- La franchise : Avie, la première franchise d'officines, a été lancée le 30 septembre. 25 officines se sont d'emblée affiliées à cette société appartenant pour 50 % à l'importateur de médicaments sarrois Kohlpharma. « Nous anticipons sur la levée de l'interdiction des chaînes et permettons aux pharmaciens de consolider leur position », explique Joachim Zinke, directeur général d'Avie, qui table sur un réseau de 500 officines d'ici à fin 2006.

- Le pharmacien référent : en passe de faire des émules, la caisse d'assurance maladie Barmer est la première à avoir qualifié deux tiers des pharmacies pour des contrats référents. D'une durée d'un an renouvelable, ce contrat assure des avantages aux assurés tels des rabais sur l'OTC, la livraison à domicile, des check-up santé, etc.

- Les groupements : premier pas vers la filialisation ou simplement groupements d'intérêts pour le marketing ou les achats, plus de 6 000 officines sont désormais affiliées à une quinzaine de groupements, certains dépassant en effectifs les syndicats professionnels régionaux.

Générique : le tarif de responsabilité concentre le marché

Si la montée en puissance des OTC profite aux génériques outre-Rhin, la mise en place d'un montant de remboursement par groupe thérapeutique (assimilable à notre TFR) conduit à un alignement des prix. Trois questions au Dr Andreas Jaecker, directeur économique de la Fédération des fabricants de génériques.

« Le Moniteur » : Depuis le 1er janvier 2004 et l'entrée en vigueur de la réglementation « aut-idem », tout pharmacien peut délivrer (sauf mention spéciale du prescripteur) le générique de son choix. Cette mesure conforte-t-elle le générique* ?

Andreas Jaecker : Cette réglementation nous est plus bénéfique que la précédente qui permettait au pharmacien de délivrer dans le tiers inférieur de la liste des prix (remise à jour tous les trois mois). Désormais, pour chaque groupe thérapeutique un montant fixe de remboursement est défini. Cependant, bien que la Fédération des fabricants novateurs nous reproche d'en profiter pour augmenter nos prix, nous ne pouvons échapper aux mécanismes du marché et à l'alignement de nos concurrents, fabricants de produits princeps.

On pensait que la législation allait renforcer le rôle des génériques, mais l'alignement des prix n'est-il pas contre-productif ?

Aussi contradictoire que cela puisse paraître, la nouvelle réglementation menace effectivement le générique qui, rappelons-le, permet 5,7 MdEuro(s) d'économies aux caisses par an. Il est clair que les pharmaciens ne peuvent tout avoir en stock et qu'ils s'approvisionnent donc auprès des plus grands fabricants, capables de leur octroyer les meilleures conditions. Du coup, alors qu'en 2003 les trois premiers génériqueurs [Hexal, Ratiopharm et Stada, NdlR] détenaient 41,4 % du marché, leur part représente aujourd'hui 51,2 % ! Pour certains produits actifs comme carvédilol, ramipril ou amlodipine par exemple, les parts de marché des trois grands atteignent respectivement 78,8 %, 80,4 % et 78,4 % ! Or, il faut souligner que c'est la concurrence qui contribue essentiellement à faire baisser le prix d'un générique.

Alors quid de l'avenir des petits génériqueurs ?

Tandis que les grands fabricants de génériques enregistrent une croissance à deux chiffres, les petits subissent des pertes du même ordre. Par ailleurs, le rabais de 16 % accordé aux pharmaciens par les fournisseurs concerne désormais aussi les génériqueurs, ce qui met en péril les plus petits d'entre eux.

Propos recueillis par Marie Luginsland

* 50 % en volume et 30 % en chiffre d'affaires du marché du médicament.

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