Casseurs par obligation - Le Moniteur des Pharmacies n° 2552 du 09/10/2004 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2552 du 09/10/2004
 

Actualité

Enquête

L'objectif n'est pas de faire du discount à n'importe quel prix mais c'est une réponse à l'environnement », explique Daniel Halfon, titulaire de la Pharmacie Canonne, située boulevard Sébastopol dans le IIIe arrondissement de Paris. L'environnement, c'est un Monoprix en face avec un espace parapharmacie dès l'entrée du magasin, et Tati qui compte dans ses rayons des dentifrices à 99 centimes ou des lingettes pour lunettes à 89 centimes... « L'arrivée des grandes surfaces nous a fait très peur, nous avons voulu mettre des garde-fou pour éviter qu'elles ne diffusent n'importe quoi. C'était en quelque sorte se faire hara-kiri, puisque nous leur avons donné les conditions minimales pour que la grande distribution s'implante dans la parapharmacie. » Et Daniel Halfon en sait quelque chose puisqu'il est aussi syndicaliste à l'Union des pharmaciens de la région parisienne. Il lui a donc fallu s'adapter en faisant du discount sur certains articles. « Nous avons un affichage sur une quarantaine de produits que nous achetons en grosse quantité et sur lesquels nous répercutons la réduction de prix, explique-t-il. C'est la réponse du berger à la bergère... »

Une réponse qui s'exprime largement dans l'officine : un panneau devant l'entrée indique « - 10 % sur tous les produits à partir de 30 euros d'achats », et des affichettes de discount sont placardées sur la façade. L'intérieur est au diapason : pendues au plafond, des annonces « 3 savons Cavaillès pour 6 euros 90 », « 6 tubes de Fluocaril grands modèles pour 15 euros »...

Pourtant ce pharmacien n'est pas favorable à une guerre des prix larvée. « Je comprends tout à fait qu'un pharmacien qui n'a pas cet entourage concurrentiel avec les grandes et moyennes surfaces ne casse pas ses prix. Nous sommes d'abord des pharmaciens, il n'y a aucune raison de concurrencer un confrère, la parapharmacie représente à peine un tiers du chiffre d'affaires. » Ici, pas de challenge lancé au personnel, pas de stratégie hormis celle de la communication à outrance et de la concurrence affichée avec les supermarchés voisins. « Et puis, essayons d'être optimistes, sourit Daniel Halfon, il suffit de se protéger avec des produits exclusifs à la pharmacie. Aujourd'hui les groupements ont la chance d'avoir des produits fabriqués pour eux. Jouons cette carte de la marque distributeur. »

Mauvaise réputation.

Mais la pression ne vient pas toujours des grands méchants supermarchés. Elle est parfois le fruit de leurs clients. « Cela fait six ans que nous sommes installés et que nous pratiquons une politique de prix très intéressante pour les clients. Ce qui nous a motivés, explique le titulaire de la Pharmacie Saint-Germain à Rennes, c'est l'idée que les gens se font des pharmacies situées dans les galeries commerciales. Ils pensent que les prix y sont meilleurs. Au départ, nous avions sans arrêt ce genre de réflexion. Nous avons donc décidé de pratiquer cette politique de prix sur la parapharmacie et la médication familiale. Nous n'avons pas de stratégie particulière. Nous achetons en quantité très importante et nous voyons le représentant tous les mois ou tous les deux mois. Nous référençons gamme par gamme. Dans une gamme que nous référençons, nous essayons d'avoir le volume suffisant pour être aux prix le plus bas. Le moteur c'est le prix ! Cela nécessite une certaine organisation, du travail au niveau des achats. Il faut accepter de perdre pour récupérer de la clientèle. Je pense que, très rapidement, ceux qui ne feront pas cette politique de prix auront des problèmes. Ils perdront des marchés... »

La reconquête.

Le même vent de reconquête souffle dans les rues de Lille. Rue Colbert, rien ne différencie a priori les trois officines situées au coeur du quartier Vauban. Si ce n'est, au croisement avec la rue Nationale, au n° 269, la vitrine de la Pharmacie Colbert. « J'ai des périodes plus ou moins agressives, explique Jean-René Delobelle, titulaire depuis douze ans. J'ai toujours eu en intérieur des promotions dûment mises en valeur, mais en vitrine c'est au coup par coup. Cette politique de prix s'inscrit dans une stratégie de reconquête de clientèle. Ce sont des produits d'appel, essentiellement des cosmétiques plus attaqués que l'OTC par les grandes surfaces périphériques. Les prix, c'est un moyen de communiquer, ça fait bouger. »

Si Jean-René Delobelle reconnaît ne pas avoir une bonne réputation, il ne vend pourtant pas à perte : « Il me reste quand même quelque chose, il y a les ristournes de fin d'année et les conditions de mon groupement. » Ces offres (- 20 à - 30 % sur les prix moyens constatés) génèrent un flux de clientèle supplémentaire, de 5 à 6 %, pour un CA en croissance de plus de 10 %. « Les clients demandent le produit en promo, complètent avec des achats dans la gamme en rayon et présentent leur ordonnance... » Pour lui, le principe de base est de se démarquer de ses confrères - il est le premier à avoir ouvert en journée continue, même si aujourd'hui il ferme entre 12 h 30 et 14 h - et de contrer l'image de l'hyper « toujours moins cher » pour attirer une clientèle à 30 % de passage et plutôt motorisée. Ses « prix défi » ne sont guère appréciés. « Des confrères du centre-ville m'ont téléphoné : "Qu'est-ce qu'il te prend ? Que ces prix s'affichent en intérieur, passe encore, mais en vitrine !" » Ses confrères de la rue ne le suivent pas, même si Laurence Flament, au 102, concède avoir baissé ses prix lors de l'installation de son confrère et avoir un peu plus de « flashs prix » actuellement sur ses présentoirs qu'elle ne le souhaiterait. A la Pharmacie Catrysse, au 167, à 300 mètres des deux autres, l'adjointe interrogée craint surtout que « cette politique de supermarché ne favorise les grosses officines et n'aboutissent qu'à des regroupements au détriment du service de proximité ».

A retenir

- Usage des vitrines

Les vitrines des officines et les emplacements aménagés pour être visibles de l'extérieur ne peuvent servir à présenter que les activités dont l'exercice en pharmacie est licite. Sous réserve de la réglementation en vigueur en matière de concurrence et de publicité et des obligations légales en matière d'information sur les prix pratiqués, ces vitrines et emplacements ne sauraient être utilisés aux fins de solliciter la clientèle par des procédés et moyens contraires à la dignité de la profession (article R. 5015-58 du CSP).

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