La responsabilité civile professionnelle - Le Moniteur des Pharmacies n° 2536 du 15/05/2004 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2536 du 15/05/2004
 

Actualité

Enquête

D'abord, la loi Kouchner fait dorénavant obligation de s'assurer à l'égard de sa responsabilité civile professionnelle. Le cas de défaut d'assurance est rare. Toutefois Pierre Leroux, de la MADP, en a rencontré quelques-uns. « C'est le symbole de la méconnaissance par les pharmaciens des risques encourus au titre de leur responsabilité civile professionnelle, explique-t-il. Aujourd'hui, un titulaire qui débute est à peu près sûr de se voir chercher sa responsabilité professionnelle une ou deux fois dans sa carrière ».

Le choix de porter soi-même ce risque de responsabilité civile professionnelle, de s'auto-assurer en quelque sorte, n'existe plus. C'est heureux, la recherche de la responsabilité du pharmacien étant de plus en plus fréquente. Car la loi Kouchner renforce la notion de conseil et le statut de spécialiste du médicament du pharmacien, avec son pendant : la responsabilité pour manque de conseil.

Mais le facteur clé de la mise en cause professionnelle du pharmacien c'est son activité et son évolution. L'activité d'abord, avec le Code de la santé publique, qui prévoit que l'exécution de la prescription soit supervisée par un pharmacien diplômé, alors même qu'il est parfois difficile de remplir à la lettre cette obligation. L'évolution aussi : avec la mise en avant des génériques, le pharmacien se fait prescripteur ; avec le développement du maintien à domicile, il assure le portage de médicaments ; avec les maisons de retraite, il peut être amené à déconditionner-reconditionner les médicaments. Autant d'exemples de diversification de l'activité qui représentent autant de nouveaux risques pour les pharmaciens, à couvrir auprès de leur assureur. Sans parler d'éventuelles velléités de distribution sur Internet, qui sont heureusement étroitement encadrées.

Indemnisation à autrui mais pas à n'importe quel prix.

Le principal sinistre auquel s'expose le pharmacien, et qui entraîne la mise en cause de sa responsabilité, est l'erreur de délivrance avec des conséquences médicales. Dans le cadre où l'erreur n'entraîne l'indemnisation que d'une seule victime, les sept contrats que nous avons passés au crible proposent des indemnisations suffisantes. Toutefois, dans le cas d'une erreur de délivrance répétée, entraînant les réclamations de plusieurs victimes, et donc autant de sinistres à indemniser par l'assureur, une limite de garantie par année d'assurance est présente dans deux des contrats examinés. Qu'est-ce que cela signifie concrètement ? Qu'au-delà d'un certain montant, l'assureur se désengage et que c'est au professionnel, seul, de faire face. Pour Frédéric Guillon, directeur du cabinet de courtage Forum Assurances, qui assure quelque 400 officines avec son contrat Pharm'As, « ce mécanisme n'est pas tolérable car il constitue un transfert de risque majeur sur la tête de l'assuré ».

Assuré pour quelles activités ?

En assurance de responsabilité, sont couvertes les responsabilités encourues en tant qu'occupant et les responsabilités liées à l'activité professionnelle. Tous les assureurs couvrent à la fois la responsabilité « exploitation » et la responsabilité du fait des « produits », mais sans prévoir nécessairement des plafonds de garantie différents. Deux assureurs (Médicale et AGF) ne couvrent pas les conséquences de la « faute inexcusable » et deux assureurs (MMA et MAAF) ne couvrent pas les « dommages immatériels purs » (non consécutifs à des dommages matériels garantis). L'avantage des quatre contrats « pharmacie » est de couvrir des activités bien ciblées, spécifiques aux officines, telles que la délivrance de médicaments avec ou sans ordonnance, la préparation et la vente de produits « maison » (avec parfois un plein de garantie plus réduit), les soins d'urgence, les conseils aux clients, etc. Mais encore faut-il que cette énumération ne soit pas limitative, ce qui implique que la liste des activités soit précédée du terme « notamment ». L'absence d'un simple mot pouvant avoir des conséquences financières majeures, il convient de bien lire son contrat.

Une limite dans le temps.

Autre aspect important de l'assurance de responsabilité : la définition de la garantie dans le temps. Cette notion a fortement évolué depuis deux ans. Il s'agit en fait de la durée pendant laquelle la couverture de l'assureur est accordée à l'assuré. Cette garantie est bien sûr accordée pour toute la durée de vie du contrat mais aussi, avant même sa souscription, lorsque la réclamation de la victime porte sur un dommage non connu de l'assuré et ayant été réalisé avant la prise d'effet du contrat : c'est la « reprise du passé inconnu ». Enfin, cette garantie est accordée par la loi après la résiliation du contrat - c'est la « garantie subséquente » - pour un minimum de cinq ans. Ce mécanisme représente la clause en « base réclamation » et constitue une nouveauté dans le paysage réglementaire français de l'assurance.

Au niveau de la garantie dans le temps, certains contrats ont déjà pris en compte la loi du 31 décembre 2002 dite loi About. Tous les contrats sont en « base réclamation », avec une « garantie subséquente » en cas de cessation d'activité ou de décès portée à 10 ans chez trois assureurs (Médicale, Covéa et MADP). La « garantie subséquente », on l'a vu, c'est la prise en charge par l'assureur des conséquences d'un fait dommageable intervenu lors de la durée de vie du contrat alors même que la réclamation de la victime survient après sa résiliation. Elle est limitée à cinq ans à la MAAF. Si elle n'est que de deux ans aux MMA dans l'exemplaire papier du contrat que nous avons consulté, sachez qu'elle est soumise au minimum légal (« subséquente » de cinq ans). Seul Axa a opté pour une clause en « base réclamation » assortie d'une garantie subséquente illimitée. Auparavant, la clause en « base fait dommageable » constituait la clause traditionnelle d'assurance de responsabilité civile professionnelle. Elle prévoit que c'est à l'assureur - qui offre sa garantie au moment du fait générateur - d'indemniser la victime et non à l'assureur qui couvre l'assuré au moment où la réclamation est formulée par la victime.

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