Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l'Afssaps - Le Moniteur des Pharmacies n° 2535 du 08/05/2004 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2535 du 08/05/2004
 

Actualité

Enquête

Depuis sa création, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) est à l'origine de réelles avancées en matière de sécurité sanitaire. Pourtant, si elle possède des atouts indéniables, certaines fonctions qui lui sont dévolues sont loin d'être maîtrisées et les rouages de cette énorme machine se grippent parfois. Visite guidée.

Organigramme de l'Afssaps

Il y a dix ans, la France créait une agence de sécurité sanitaire, l'Agence du médicament. Depuis six ans, elle a été remplacée par l'Afssaps, dotée de compétences élargies (médicaments, dispositifs médicaux, réactifs, cosmétiques, etc.).

Depuis ses bureaux de Saint-Denis, dans la banlieue nord de Paris, cet établissement public, qui emploie environ mille salariés (dont 26 pharmaciens inspecteurs de santé publique, 83 personnels techniques de laboratoire, 74 scientifiques et plus de 700 contractuels en 2002), poursuit sa mission : assurer la santé et la sécurité de la population.

Quelles sont précisément les missions de l'Afssaps ? Si l'on prend l'exemple du médicament, elle veille à ce que chaque patient traité reçoive un produit pour lequel la qualité pharmaceutique et le profil de sécurité d'emploi (effets secondaires et fréquence, contre-indications, précautions d'emploi) et d'efficacité (indications et posologies recommandées) sont démontrés et validés.

Pour l'ensemble de ces critères, les médicaments sont soumis à des procédures de déclaration et/ou d'autorisation. L'Agence examine les déclarations et assure l'évaluation scientifique et technique des demandes d'autorisation de mise sur le marché.

Une maternité pour le médicament.

Concrètement, les dossiers déposés par les laboratoires pharmaceutiques comportent les résultats des études entreprises afin de démontrer la qualité, l'efficacité et la sécurité de la spécialité pharmaceutique (rapport bénéfice/risque). Leur point de chute à l'Afssaps : le département de l'évaluation qui dépouille les dossiers, regarde quelles sont leurs particularités techniques et scientifiques et sollicite l'avis d'experts sur des points particuliers. L'Agence a développé un système d'évaluation qui s'appuie de façon très importante sur l'expertise externe. Les experts extérieurs sont des médecins, des pharmaciens, des spécialistes techniques, tous issus de l'hôpital, de l'enseignement, de la recherche. Ils sont réunis dans des groupes de travail au sein de la commission d'AMM (autorisation de mise sur le marché). Mais si l'Agence demande l'avis des experts sur des questions précises, elle garde le pouvoir de décision quant à l'évaluation. Ce système repose sur des équilibres complexes. C'est en effet la rencontre de plusieurs mondes - industrie pharmaceutique, expertises internes (technique, scientifique et administrative) au sein de l'Agence, experts externes -, chacun avec ses traditions et sa façon de voir le médicament...

L'obtention de l'AMM constitue en quelque sorte l'acte de naissance du médicament. Mais avant, il y a la « grossesse » vécue par le dossier du médicament qui emprunte différents circuits selon la procédure suivie (voir page 22). Délai moyen pour l'évaluation des nouvelles demandes d'AMM en procédure nationale : 213 jours en moyenne (au lieu des 120 jours réglementaires mentionnés dans le Code de la santé publique...). Un passage obligé avant l'arrivée de la spécialité sur les étagères des officines. Si, en France, l'Afssaps octroie les AMM nationales (dont les AMM par reconnaissance mutuelle), l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments (AEEM) délivre des autorisations valables dans toute l'Europe. L'Afssaps travaille avec l'AEEM dans le cadre de la procédure centralisée pour laquelle le recours aux systèmes d'évaluation scientifique nationaux est indispensable. Au niveau européen, l'Afssaps collabore également à la pharmacovigilance, l'inspection et aux différents groupes de travail. En 2002, 10 % des décisions prises par l'Afssaps étaient des refus.

Le pharmacien au coeur de la vigilance

Une fois mis sur le marché, le médicament se trouve en situation réelle d'utilisation. Lui donner accès dans les meilleures conditions implique nécessairement de le surveiller. C'est notamment l'objet de la pharmacovigilance qui permet de retrouver les effets indésirables graves et inattendus. La France dispose d'un système national constitué de l'ensemble des professionnels de santé qui ont une obligation de déclarer les effets indésirables. Les centres régionaux de pharmacovigilance assurent la remontée des informations vers ses unités de pharmacovigilance chargées d'évaluer et d'exploiter les données recueillies, dans un but de prévention.

La fonction de veille sanitaire qu'exerce l'Agence fait appel à la vigilance mais aussi au contrôle de la qualité des produits fabriqués. Elle constitue le point de départ des alertes sanitaires dont la gestion est effectuée par le département des alertes. C'est dans ce service que sont traités les défauts de qualité des médicaments signalés par les établissements de santé, les laboratoires, les officines etc.

A quoi servent précisément les alertes ? D'une part à informer du retrait d'un produit présentant un risque pour la santé ou un défaut de fabrication, d'autre part à retirer immédiatement du marché ou de la dispensation le produit ou les lots incriminés.

En tant que professionnel du médicament, le pharmacien constitue l'une des cibles majeures des messages d'alerte. Le circuit officinal utilise la procédure « grossiste-répartiteur » : bordereau spécifique de couleur rouge orangée joint à la livraison. Une procédure mise en place en collaboration avec l'ordre national des pharmaciens. Un numéro d'arrivée et un code sont attribués aux lettres d'alerte, permettant ainsi à chaque destinataire de s'assurer qu'il a bien reçu la totalité des messages le concernant puis de les archiver. « Ce système est efficace et permet aux pharmaciens d'être informés en temps et en heure. C'est simple, pratique, incontournable », commente Bernard Capdeville, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France.

Un répertoire des spécialités en ligne.

L'ensemble des décisions de retrait du marché est consultable sur le site* Internet de l'Afssaps. Diverses informations utiles à la pratique officinale quotidienne sont également disponibles : ruptures de stocks, mises au point sur des thèmes ciblés de santé publique (THS, antivitamines K...), recommandations de bonne pratique et références médicales qui font le point sur l'état des connaissances en matière de soins et de prescriptions.

Autres outils d'aide mis en ligne : le « Répertoire des spécialités pharmaceutiques » et celui des génériques. Un bémol cependant : pour l'instant, le « Répertoire des spécialités pharmaceutiques » concerne uniquement les AMM accordées depuis le 1er janvier 2002.

Par ailleurs, un résumé des informations officielles (résumé des caractéristiques du produit) est associé à seulement mille des huit mille médicaments commercialisés en France. Côté génériques, « il est très compliqué d'avoir des informations avant la publication au Journal officiel selon un format de fichier informatique directement utilisable », signale Claude Japhet, président de l'Union nationale des pharmacies de France.

Des failles dans l'accès à l'information.

Y aurait-il des failles dans la mise à disposition des informations ? Selon Claude Japhet, « l'accès n'est pas facilité et l'on se perd souvent dans les méandres du système avant de trouver ce que l'on cherche. C'est dommage car le site Internet constitue une mine pour les officinaux. La faille, c'est qu'il faut du temps. L'outil devrait être mieux adapté à la pratique, mieux ciblé (pharmaciens, médecins, etc.), avec une meilleure coordination en matière de diffusion de nouvelles informations ».

En outre, on peut déplorer certains manques : aucun rapport d'évaluation sur les nouveaux médicaments autorisés (contrairement aux obligations législatives), peu ou pas de données de pharmacovigilance. « Des informations concernant l'arrivée de nouveaux produits, avant leur commercialisation, seraient des plus utiles aux pharmaciens », insiste Claude Japhet.

Plus de transparence : voilà bien ce que les professionnels de santé attendent de l'Afssaps. Car pour assurer pleinement sa mission de santé publique, celle-ci doit obligatoirement rendre publiques les informations qu'elle détient. Ce devoir de transparence a été clairement précisé dans le nouveau règlement et la nouvelle directive qui vont définir le cadre du médicament en Europe pour les prochaines années.

*http://www.afssaps.sante.fr.

Questions à Jean Marimbert, directeur général de l'Afssaps

Quelles sont les grandes priorités de l'Afssaps pour 2004 ?

J'accorde beaucoup d'importance au rôle d'information de l'Afssaps, notamment sur le bon usage des médicaments. L'Agence doit continuer à investir, développer la production d'outils d'information par rapport au travail d'évaluation des dossiers d'AMM. Nous poursuivons le développement de nos grandes catégories de produits : lettres aux prescripteurs, mises au point sur des aspects de santé publique, recommandations de bonne pratique, rapports de synthèse en français sur la base de ceux pratiqués pour les médicaments à procédure centralisée au niveau communautaire, bulletins de vigilance, etc. Parmi les nouveaux outils qui pourraient sortir rapidement figurent les recommandations de bonne pratique consacrées à l'antibiothérapie par voie locale en ophtalmologie, en dermatologie, en ORL. Deux mises au point sont également prévues : « l'ostéoporose chez la femme ménopausée et l'emploi des THS », et « médicaments et conduite automobile ». A la demande de la DGS, l'Agence a réuni un groupe de travail sur le thème « médicaments et canicule ». Le résultat de cette réflexion sera disponible avant l'été. La refonte des bonnes pratiques de pharmacovigilance est aussi au programme. Par ailleurs, la mise à jour du « Répertoire des spécialités » constitue l'un des chantiers prioritaires pour 2004. La première étape consiste à rattraper trois ans, de 1999 à début 2002.

Un autre axe majeur de travail concerne le régime des essais cliniques. Nous avons transposé en droit français la directive européenne relative aux essais et mis en place un système d'autorisation des essais pour les médicaments et tous les produits de santé. Ce nouveau cadre réglementaire confère à l'Agence des responsabilités et des contraintes de délai nouvelles (il faut 60 jours pour autoriser un essai). Il implique l'évaluation des rapports annuels de sécurité et le suivi des effets indésirables, la transmission des données à l'Agence européenne. Il s'agit d'un enjeu très important, notamment en matière d'attractivité territoriale, c'est-à-dire une compétitivité entre Etats pour offrir le meilleur rapport sécurité sanitaire/délai.

Des remaniements sont-ils prévus en matière d'alertes sanitaires ?

La canicule de l'été dernier a révélé des problèmes qui ont suscité, au sein du monde de la santé publique, une réflexion sur la gestion des alertes vue sous l'angle épidémiologique. Cela ne doit pas, a priori, percuter le fonctionnement des vigilances techniques de l'Agence. Il est extrêmement important que ces vigilances continuent à fonctionner de façon fluide, sur leur mode propre. Rien ne doit porter préjudice à la réactivité et la rapidité de la remontée des vigilances. Les signalements doivent pouvoir déboucher sans retard sur une prise de décision de portée nationale.

D'une manière générale, deux types de réflexion se développent sur la gestion des alertes sanitaires : l'une axée sur la coordination régionale de l'alerte, l'autre sur une approche cohérente de la gestion des risques au sein des structures de soin. Cependant ces deux courants n'ont pas de raison de s'opposer aux vigilances techniques qui ne sont pas remises en cause dans leur fonctionnement.

Circuit du dossier d'AMM en France

1 Dépôt du dossier à l'Afssaps par un laboratoire

2 Examen du dossier et recevabilité à l'Afssaps

3 Transmission aux groupes de travail, relevé d'avis, proposition de décision

4 Avis de la commission d'AMM

5 Octroi de l'AMM

Circuit du dossier d'AMM en Europe*

1 Dépôt du dossier à l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments (AEEM)

2 Examen du dossier et recevabilité

3 Choix de 2 pays comme rapporteurs pour donner leur avis

4 Arrivée du dossier en France si la France est rapporteur ou corapporteur

5 Transmission aux groupes de travail qui prononcent leur avis, rédaction d'un rapport

6 Proposition aux Etats membres qui se réunissent au sein de l'AEEM pour élaborer une recommandation commune

7 Octroi de l'AMM européenne

Remarque : la procédure de reconnaissance mutuelle est obligatoire pour les médicaments sollicitant une AMM dans au moins deux Etats membres. Ces derniers sont choisis par le demandeur. Les AMM sont ensuite délivrées par les autorités compétentes des pays concernés.

* Obligatoirement suivi pour les produits dits de biotechnologies et peut s'appliquer aux produits innovants.

A savoir

Le dispositif national de sécurité sanitaire

Le dispositif de veille et de sécurité sanitaire français a pour mission d'anticiper, de surveiller, d'alerter, d'agir et d'évaluer pour garantir la protection de la santé publique. L'Afssaps a pris place dans ce système en 1998, au côté d'autres institutions, comme l'Institut national de veille sanitaire, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'Etablissement français du sang.

Le manque à gagner lié à la perte des produits de contraste vous inquiète-t-il ?


Décryptage

NOS FORMATIONS

1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.

Les médicaments à délivrance particulière

Pour délivrer en toute sécurité

Le Pack

Moniteur Expert

Vous avez des questions ?
Des experts vous répondent !