Les lombalgies - Le Moniteur des Pharmacies n° 2524 du 21/02/2004 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2524 du 21/02/2004
 

Cahier formation

l'essentiel Les lombalgies, douleurs localisées au niveau des vertèbres lombaires, touchent 70 % des Français au cours de leur vie. La plupart n'ont pas d'étiologie précise. Les lombalgies aiguës, évoluant depuis moins de trois mois, guérissent spontanément dans la majorité des cas. Entre 5 % et 10 % deviennent chroniques, les facteurs favorisants étant essentiellement psychologiques et socioprofessionnels. Le traitement des épisodes aigus associe antalgiques, AINS, myorelaxants et kinésithérapie chez les sujets à haut facteur de risque de passage à la chronicité. Le repos au lit n'est pas recommandé. Le traitement des lombalgies chroniques est difficile car la part psychologique est toujours importante. La prise en charge de la douleur s'appuie sur les antalgiques et les AINS en cure courte. Kinésithérapie, exercices physiques et thérapies comportementales sont bénéfiques.

ORDONNANCE : Une jeune femme souffrant d'une lombalgie aiguë

Madame Michèle C., déléguée médicale, souffre d'une douleur violente au niveau lombaire, déclenchée brutalement le matin même en soulevant sa fille de 4 ans. Dans l'impossibilité d'aller travailler, Madame C. consulte son médecin traitant qui lui prescrit un antalgique, un anti-inflammatoire et un décontracturant.

LA PRESCRIPTION

Docteur Pierre Lopez

Généraliste

2, place du Marché

94130 Nogent-sur-Marne

Tél. : 01 41 29 75 78

94 3 99999 8

Le 20 février 2004

Mme Michèle C.

33 ans, 50 kilos

-#gt; Artotec 50 : 1 comprimé 3 fois par jour au cours des repas

-#gt; Zaldiar : 2 comprimés matin, midi et soir

-#gt; Myolastan : 1 comprimé au coucher

qsp 7 jours

LE CAS

Ce que vous savez de la patiente

- Mme Michèle C., déléguée médicale très active, passe beaucoup de temps en voiture. Elle a deux enfants de 4 et 7 ans. Elle a été soignée pour un ulcère gastrique 5 ans auparavant et a arrêté de fumer depuis. Elle prend au coucher 1 comprimé d'Imovane 7,5 mg pour des épisodes d'insomnie depuis deux semaines.

Ce dont la patiente se plaint

- Elle a ressenti une douleur brutale dans le bas du dos en soulevant sa fille de 4 ans. L'intensité de la douleur l'a empêchée d'aller travailler. C'est la première fois qu'elle souffre d'un « tour de rein » et elle est inquiète de ne pas pouvoir reprendre son travail rapidement.

Ce que le médecin lui a dit

- Son médecin l'a rassurée en lui disant qu'il s'agissait d'une lombalgie aiguë commune à type de lumbago, sans sciatique. Devant ce premier épisode de lombalgie, il n'a pas jugé nécessaire de prescrire des examens complémentaires. Il a indiqué à sa patiente que le repos au lit n'était pas utile et lui a proposé, en plus du traitement médicamenteux contre la douleur, le port d'une ceinture de soutien lombaire, mais Michèle C. a refusé, trouvant trop contraignant et inconfortable le port d'une ceinture. Le médecin a également prescrit un arrêt de travail de 5 jours, la conduite automobile étant contre-indiquée pendant le traitement.

DÉTECTION DES INTERACTIONS

Zaldiar/Myolastan/Imovane

L'interaction entre ces trois médicaments est à prendre en compte. Chacun peut induire une dépression du système nerveux central. Leur association risque d'entraîner une somnolence, une baisse de la vigilance ou une sensation ébrieuse tout au long de la journée.

ANALYSE DES POSOLOGIES

Toutes les posologies de l'ordonnance sont correctes. Il faut préciser à madame C. que les prises de Zaldiar doivent être espacées d'au moins 6 heures.

AVIS PHARMACEUTIQUE

Madame C. souffre d'un épisode de lombalgie aiguë. Le traitement est purement symptomatique. Compte tenu de l'intensité de la douleur décrite par la patiente et de l'examen clinique, le médecin a choisi d'associer un médicament anti-inflammatoire, le diclofénac, à deux antalgiques, l'un morphinique (le tramadol), l'autre non morphinique (le paracétamol), et à une benzodiazépine myorelaxante (le tétrazépam).

Cette association a un seul objectif : soulager les symptômes de façon suffisante pour permettre une reprise rapide des activités de la patiente.

Coprescription d'un protecteur gastrique

L'association d'un protecteur gastrique à un AINS n'est pas systématique. D'après les « Références médicales opposables » (n° 4), il n'y a pas lieu d'associer un antiulcéreux à un AINS à dose anti-inflammatoire sans avoir évalué le risque digestif individuel. Le misoprostol, l'oméprazole et le lansoprazole bénéficient d'une AMM dans cette indication. Les antécédents de madame C. (ulcère gastrique 5 ans auparavant) justifient le choix de prescrire un protecteur gastrique (le misoprostol) sous forme d'association fixe avec le diclofénac (Artotec). Même si l'AMM d'Artotec ne mentionne pas explicitement d'indication dans les lombalgies, tous les AINS sont susceptibles d'améliorer les symptômes d'une lombalgie aiguë, et le choix d'un médicament « deux en un » permet d'améliorer l'observance.

Contraception indispensable

-#gt; Le misoprostol étant potentiellement foetotoxique (propriétés foetotoxiques chez l'animal), il faut s'assurer que madame C. n'est pas enceinte ou susceptible de le devenir pendant le traitement. Après enquête, il s'avère que madame C. suit un traitement contraceptif par Jasmine qui ne figure pas dans son historique médicamenteux, car certaines de ses ordonnances sont délivrées dans une pharmacie proche de son lieu de travail.

Arrêt de l'Imovane

Il paraît judicieux de proposer à la patiente de suspendre la prise d'Imovane (hypnotique) pendant la durée du traitement par le myorelaxant afin d'éviter une accumulation de psychotropes aux propriétés sédatives. En effet, le tétrazépam (Myolastan) est une benzodiazépine et a donc, en plus de son action myorelaxante, des propriétés sédatives communes à toutes les benzodiazépines.

INITIATION DU TRAITEMENT

D'après l'interrogatoire et l'examen clinique, le médecin a diagnostiqué une lombalgie aiguë bénigne, sans élément de gravité (aucun symptôme n'oriente vers une fracture, une infection ou une tumeur). Dans ce cas, aucune exploration clinique ou paraclinique complémentaire n'est nécessaire d'emblée.

Le traitement doit être de courte durée. En effet, la plupart des épisodes de lombalgies bénignes cèdent en quelques jours, même si les récidives peuvent être fréquentes.

La patiente doit être prévenue du risque d'étourdissement, de sensations vertigineuses, de nausées et de constipation lié au tramadol. Il existe également un risque accru de somnolence pendant le traitement et de danger potentiel de la conduite de véhicules. Michèle C. confirme qu'elle n'utilisera pas sa voiture pendant sa semaine d'arrêt.

Pendant le traitement par Myolastan et Zaldiar, madame C. doit éviter l'alcool et les médicaments en contenant. L'alcool pourrait en effet majorer les effets sédatifs des benzodiazépines et des analgésiques morphiniques.

Le médecin indique aussi à sa patiente que le repos strict au lit n'est pas nécessaire. Il est prouvé en effet qu'une reprise progressive des activités normales est plus efficace qu'un repos prolongé au lit.

Déconseiller la prise d'Imovane

Pendant la durée du traitement par Myolastan, la prise d'Imovane peut être suspendue pour éviter un effet sédatif trop marqué.

VALIDATION DU CHOIX DES MÉDICAMENTS

-#gt; Artotec 50 mg/0,2 mg (diclofénac/misoprostol)

- Association d'un anti-inflammatoire non stéroïdien (diclofénac) et d'un analogue de prostaglandine protecteur gastrique (misoprostol).

- Indiqué dans le traitement symptomatique des affections rhumatismales chez les patients à risque, notamment ayant des antécédents d'ulcère gastroduodénal.

- La posologie est de 1 comprimé gastrorésistant 2 à 3 fois

par jour.

- En cas d'utilisation chez la femme en période d'activité génitale, s'assurer de l'absence de grossesse en cours et de la prise d'une contraception orale efficace.

-#gt; Zaldiar 37,5 mg/325 mg (tramadol/paracétamol)

- Association d'un analgésique morphinique mineur de niveau II selon la classification de l'OMS (tramadol) et d'un analgésique non opioïde de niveau I (paracétamol).

- Indiqué dans le traitement des douleurs modérées à intenses.

- La posologie moyenne est de 1 à 2 comprimés toutes les 6 heures, sans dépasser 8 comprimés par jour.

-#gt; Myolastan 50 mg (tétrazépam)

- Myorelaxant appartenant à la classe des benzodiazépines.

- Indiqué dans le traitement d'appoint des contractures musculaires douloureuses en rhumatologie.

- La posologie classique est de 50 mg le soir au coucher. Elle peut être augmentée progressivement jusqu'à 100 mg/jour en 2 à 3 prises avec une prise plus importante le soir au coucher, ou en prise unique vespérale.

SUIVI DU TRAITEMENT

-#gt; Il faut insister sur le fait que les récidives de lombalgies aiguës sont possibles après guérison. Madame C. ne doit pas reprendre d'elle-même le traitement initialement prescrit. En effet, le risque de dépendance lié au tramadol et au tétrazépam s'accroît en cas de traitement prolongé.

-#gt; Si les douleurs persistent plus de deux semaines, des manipulations vertébrales peuvent avoir un effet antalgique à court terme. L'effet des traitements physiques (massages, ultrasons, stimulation électrique), de la neurostimulation transcutanée et de l'acupuncture n'ont pas réellement fait les preuves de leur efficacité, mais peuvent aider certains patients.

-#gt; Enfin, si les douleurs persistent après un mois d'évolution, madame C. devra reconsulter son médecin pour réaliser un nouvel examen clinique, complété éventuellement par des examens radiologiques.

CONSEILS À LA PATIENTE

Le traitement médicamenteux

Certains effets indésirables du traitement peuvent être prévenus par des conseils hygiénodiététiques simples.

-#gt; Une alimentation riche en fibres et une hydratation suffisante permettent de limiter l'apparition d'une constipation sous tramadol.

-#gt; Le risque de douleurs gastriques provoquées par l'Artotec est atténué si ce médicament est pris au milieu du repas.

-#gt; Eviter l'alcool sous toutes ses formes pour ne pas majorer l'effet sédatif du traitement.

-#gt; Prendre le comprimé de Myolastan au moment du coucher et non au dîner.

A la maison

-#gt; Préférer un matelas de fermeté moyenne. Choisir un oreiller souple, ni trop épais ni trop mou. Dormir sur le dos avec les jambes légèrement fléchies ou en chien de fusil, tout en essayant de garder le dos droit.

-#gt; Apprendre à s'asseoir : les pressions au niveau des disques sont très augmentées en position assise. Il faut s'asseoir le bassin calé au fond d'un siège dur avec un dossier droit. Pour se relever, prendre appui sur les accoudoirs ou sur les cuisses.

-#gt; Devant une table ou un lavabo, ne pas se pencher sans y prendre appui d'une main.

-#gt; Ne pas se pencher en avant pour ramasser un objet par terre, mais se placer à côté, plier les genoux en gardant le dos droit, prendre l'objet et se relever le dos bien droit.

-#gt; Porter les paquets avec les deux mains. Ne pas soulever ni porter d'objets lourds (et tout particulièrement les enfants !).

En voiture

Incliner vers l'arrière le dossier du siège de voiture. Dans les virages, plaquer le haut du dos contre le dossier pour que les bras y prennent appui, ce qui soulage les vertèbres lombaires. Rappeler qu'en cas de long trajet, il faut s'arrêter au minimum toutes les deux heures.

En cas de douleur

-#gt; Se mettre sur le dos, les genoux contre la poitrine, de préférence sur un plan dur. Si possible, prendre un bain chaud et y ajouter quelques gouttes d'huiles essentielles de cyprès ou de marjolaine.

-#gt; Réinsister sur les bienfaits d'une ceinture de soutien lombaire, qui réduit l'impact fonctionnel des symptômes chez les patients dont l'activité professionnelle impose la station assise prolongée. Ne pas hésiter à faire essayer la ceinture, pour faciliter son adoption par la patiente.

Par Nicolas Mimoun et Vivien Veyrat, pharmaciens, chargés d'enseignement à la faculté de pharmacie de Paris XI

PATHOLOGIE : Qu'est-ce qu'une lombalgie ?

La lombalgie est une pathologie extrÍmement frÈquente. La plupart d'entre elles sont d'origine non spÈcifique. L'Èpisode lombalgique aigu s'amÈliore en gÈnÈral rapidement mais le risque de rÈcidive et de passage ý la chronicitÈ concerne 5 ý 10 % des lombalgies.

ÉPIDÉMIOLOGIE

La lombalgie a une prévalence élevée. Elle est la deuxième cause de consultation et la pathologie la plus fréquente avant 45 ans. Environ 70 % des Français ont souffert ou souffriront d'une lombalgie. En constante augmentation depuis une vingtaine d'années, elle représente un véritable problème de santé publique dans les pays industrialisés. Si les lombalgies sont fréquentes, beaucoup plus rares sont celles qui deviennent chroniques (environ 5 à 10 %).

Les lombalgies figurent au troisième rang des motifs d'invalidité. Elles induisent des coûts médicaux directs très élevés, auxquels s'ajoutent les coûts des arrêts de travail, des hospitalisations, des gestes chirurgicaux, des invalidités, ainsi que les coûts des conséquences sociales, économiques et psychologiques individuelles.

Chez l'enfant et l'adolescent, les lombalgies sont fréquentes avec une incidence moyenne de 15 %. Leur prévalence (estimée entre 30 et 50 %) s'élève avec l'âge à partir de 11 ou 12 ans.

LA COLONNE VERTÉBRALE

ÉTIOLOGIES

La lombalgie est un symptôme. Il s'agit d'une douleur localisée dans le bas du dos. La recherche étiologique permet de classer les lombalgies en deux catégories.

Lombalgies spécifiques

Encore appelées secondaires ou symptomatiques, les lombalgies spécifiques ont une cause connue et un traitement ciblé. Elles ne représentent que 5 % des cas. Les principales causes sont posttraumatiques (fractures, notamment en cas d'ostéoporose), infectieuses (bacille tuberculeux, staphylocoque, streptocoque), congénitales, inflammatoires (spondylarthrite ankylosante...), tumorales (myélome, lymphome, métastases, tumeur bénigne comme l'ostéome ostéoïde), métaboliques ou mécaniques.

Les lombalgies spécifiques peuvent également avoir pour origine une maladie viscérale touchant les reins, les voies urinaires, l'aorte (anévrisme)...

Lombalgies non spécifiques

Les lombalgies non spécifiques ou communes, dont la cause reste non précisée, sont de loin les plus fréquentes.

Les douleurs lombaires peuvent être liées à l'arthrose vertébrale débutante ou évoluée.

Les facteurs mécaniques de risque de lombalgies peuvent avoir pour origine un surmenage intensif, entraînant une fragilisation progressive du rachis. A ces facteurs s'associent souvent des facteurs sociaux, économiques et psychologiques. Il est reconnu que le risque de lombalgie est plus élevé dans les professions physiquement et psychologiquement exigeantes.

Le stress est également tenu pour responsable de problèmes de dos. La composante fonctionnelle est très importante et très fréquente dans les formes chroniques.

PHYSIO-PATHOLOGIE

Dans les lombalgies non spécifiques, de nombreux mécanismes physiopathologiques ont été évoqués mais restent hypothétiques dans l'explication de la douleur chez un malade donné. Le plus souvent la lombalgie provient d'un problème mécanique suite à la détérioration douloureuse d'un ou plusieurs éléments de la colonne vertébrale (vertèbres, disques, ligaments, articulations).

-#gt; Au niveau des vertèbres, il peut y avoir fracture, fracture-tassement (l'ostéoporose en est la cause principale), glissement d'une vertèbre par rapport à l'autre.

-#gt; Au niveau des disques, s'il existe une discopathie (ramollissement du disque), il peut y avoir pincement, discarthrose, entorse discale, hernie discale.

-#gt; Au niveau des articulations : arthrose.

Tous ces éléments peuvent être la cause ou la conséquence d'une déformation de la colonne vertébrale.

SIGNES CLINIQUES

Selon la durée de la douleur et non son intensité, on peut distinguer deux formes de lombalgies : aiguës ou chroniques.

Lombalgies aiguës

-#gt; Les lombalgies aiguës évoluent depuis moins de 3 mois. La plupart guérissent rapidement en quelques jours (40 à 70 % en moins d'une semaine).

-#gt; Parmi les lombalgies aiguës non spécifiques, la plus fréquente est le lumbago, lié à la détérioration débutante du disque intervertébral. Il se caractérise par une installation brutale chez un sujet jeune, souvent à la suite d'un effort (parfois violent et inhabituel, parfois insignifiant et banal), d'une douleur forte au moindre mouvement, d'un blocage, d'une attitude antalgique, avec disparition rapide en quelques jours. Il peut être très spectaculaire, responsable d'une incapacité majeure, mais n'est pas grave.

-#gt; Chez un sujet plus âgé les lumbagos sont rares. Il faut penser à d'autres causes de lombalgies aiguës, comme les tassements vertébraux (ostéoporose) ou une poussée congestive d'arthrose lombaire.

Lombalgies chroniques

-#gt; Les lombalgies sont dites chroniques lorsque la douleur persiste depuis plus de 3 mois. Entre 5 et 10 % des patients évoluent vers la chronicité.

-#gt; Les lombalgies communes chroniques surviennent le plus souvent chez des patients ayant des antécédents de lumbago ou de lombosciatique à répétition, de moins en moins facilement réversibles. Au bout d'un certain temps une douleur lombaire permanente persiste entre des épisodes aigus. Ces épisodes aigus sont de plus en plus espacés au fur et à mesure que la douleur permanente s'aggrave.

-#gt; Elles peuvent aussi inaugurer le tableau, sans facteur déclenchant précis et s'aggravant progressivement. Dans plus de 50 % des cas de lombalgie chronique aucune étiologie précise n'est retrouvée.

DIAGNOSTIC

La démarche diagnostique doit permettre de différencier une lombalgie non spécifique d'une lombalgie spécifique, symptomatique d'une autre affection, plus sévère.

Interrogatoire

L'interrogatoire est très important et doit permettre d'orienter le diagnostic, en s'intéressant aux critères suivants.

- Age et antécédents lombaires

Certaines pathologies spécifiques sont plus fréquentes à partir d'un certain âge (50 ans pour les néoplasies, 70 ans pour les fractures) et doivent être suspectées en particulier en l'absence d'antécédents de lombalgies.

- Siège de la douleur

Elle peut être lombaire basse, médiane ou latéralisée près du rachis lombaire, ou plus inquiétante, diffuse, lombaire haute, très latéralisée ou située très bas.

- Rythme de la douleur

Une douleur d'origine mécanique est maximale la nuit et augmente au fur et à mesure de l'activité. A l'inverse, une douleur de type inflammatoire est maximale dans la seconde moitié de la nuit et s'atténue lentement avec l'activité.

- Mode de début des douleurs

Cet élément important permet de distinguer les lombalgies communes, qui débutent souvent de façon brutale à la suite d'un facteur déclenchant, et les douleurs dont on ne peut préciser la date parce qu'elles surviennent de façon insidieuse et progressive sans facteur déclenchant et qui sont plus inquiétantes.

- Evolution de la douleur

Elle peut être d'emblée maximale et s'atténuer progressivement ou au contraire s'aggraver au fur et à mesure de l'évolution.

- Influences des efforts mécaniques

Les efforts, le port de charge, la station debout, la station assise prolongée, la toux, la défécation peuvent majorer la douleur. Seules les douleurs des lombalgies mécaniques sont soulagées par le repos en position allongée.

- Etat psychologique

Dans les lombalgies chroniques, il existe une forte intrication des facteurs psychologiques (éventuel état anxieux ou dépressif sous-jacent), physiques, sociaux et professionnels.

Signes d'alerte

L'ensemble de l'interrogatoire permet de dégager les éléments qui doivent alerter et éventuellement orienter vers une cause précise :

- en faveur d'une fracture : traumatisme, ostéoporose, âge #gt; 60 ans, prise de corticoïdes ;

- en faveur d'une néoplasie : âge #gt; 50 ans, perte de poids, antécédent tumoral... ;

- en faveur d'une infection : fièvre, douleur nocturne, immunodépression... ;

- en faveur d'une pathologie inflammatoire : début progressif avant 40 ans, raideur matinale...

Examen physique

Il recherche un trouble de la statique rachidienne, un trouble de la mobilité du rachis lombaire en flexion, en inclinaison latérale, en extension, en rotation plus rarement, des contractures musculaires paravertébrales et des points douloureux à la palpation du rachis, un trouble de la mobilité des articulations coxofémorales, des signes de souffrance des articulations sacro-iliaques.

Examens complémentaires

Ils ne sont prescrits que si l'examen clinique a montré des signes d'appel d'une étiologie précise. A l'inverse, si l'examen clinique ne permet pas d'orienter vers une cause spécifique, aucun examen complémentaire n'est demandé pendant les 8 premières semaines d'une lombalgie aiguë commune. Ce délai sera raccourci en l'absence d'évolution favorable.

- Examens sanguins

Numération-formule sanguine, vitesse de sédimentation, protéine C réactive, à la recherche d'une surinfection et/ou d'une inflammation.

- Examens radiologiques

-#gt; Radiographies standard

Les radios du rachis lombaire permettent de voir la statique rachidienne et les anomalies morphologiques congénitales ou acquises, de reconnaître la plupart des lombalgies symptomatiques et enfin d'évaluer la dégénérescence discale (arthrose, pincement). Les lésions de dégénérescence radiologique ne sont pas parallèles aux douleurs ressenties. En effet, après 40 ans ces signes radiologiques sont presque toujours présents avec ou sans douleur du rachis associée.

-#gt; Scintigraphie osseuse

Elle est surtout indiquée si la clinique est atypique, si une lésion tumorale ou infectieuse est suspectée.

-#gt; Tomodensitométrie

Cet examen simple et rapide permet d'examiner les parois, la taille et le contenu du canal rachidien. Il objective les hernies discales et les problèmes discoradiculaires. -#gt; IRM

La résonance magnétique nucléaire permet d'étudier la structure des disques, de faire le diagnostic de hernie discale et de ses conséquences au niveau des racines des nerfs. Elle permet le diagnostic étiologique des lombalgies secondaires. C'est le meilleur examen sur un rachis opéré pour différencier une récidive de hernie et une fibrose postopératoire.

-#gt; Saccoradiculographie

Examen radiologique de l'enveloppe méningée, des racines nerveuses et de la moelle après injection de produit de contraste iodé ; c'est l'examen de choix dans la spondylolisthésis, la scoliose. Elle est utile dans les échecs de l'IRM ou de la tomodensitométrie.

ÉVOLUTION

-#gt; Dans la très grande majorité des cas l'évolution du lumbago se fait vers la régression en quelques jours, même si des gênes ou des douleurs épisodiques persistent pendant des semaines ou des mois. A moyen et long terme, l'évolution est variable avec la survenue possible de nouveaux épisodes de lumbago. Cependant, dans la majorité des cas le lumbago reste un épisode unique.

-#gt; En cas de lombalgie commune chronique, l'évolution spontanée est dans la grande majorité des cas favorable. Elle se fait vers une diminution progressive des douleurs et une amélioration. Exceptionnellement elle conduit à une invalidité marquée dans les activités quotidiennes et à un déficit moteur durable des membres inférieurs. Parmi les éléments d'évolution vers la chronicité, les facteurs psychologiques et socioprofessionnels sont fréquemment retrouvés.

-#gt; Les lombalgies spécifiques ont une évolution qui dépend de leur étiologie.

Par le Dr Béatrice Paillat

THÉRAPEUTIQUE : Comment traiter les lombalgies ?

Le traitement d'une lombalgie aiguë repose sur l'utilisation d'antalgiques, d'anti-inflam matoires et de myorelaxants pour lutter contre la douleur. Les lombalgies chroniques sont plus difficile à prendre en charge. Les traitements non médicamenteux sont essen tiels. Dans les deux cas, le repos au lit n'est pas recommandé.

LOMBALGIES AIGUËS

Une fois éliminée une étiologie spécifique (affection tumorale, lésions ostéoporotiques, infection, anévrisme de l'aorte, etc.), objet de traitements également spécifiques et non envisagés ici, le traitement d'une lombalgie aiguë commune (lumbago) vise avant tout à supprimer les stimuli nociceptifs périphériques d'une façon aussi énergique que possible. En effet, plus leur retentissement fonctionnel est important, plus les douleurs tendent à se chroniciser par la suite. Il importe donc d'obtenir une sédation rapide de la symptomatologie algique.

Longtemps, il a été conseillé au patient de rester allongé, au repos, en attendant la sédation des douleurs, c'est-à-dire pendant environ 48 heures. Cette stratégie est désormais obsolète.

Sauf situation exceptionnelle, il est au contraire déconseillé d'observer une mise en décubitus stricte. Les activités habituelles doivent être reprises rapidement dans la mesure où elles sont compatibles avec la douleur. Cette activité est par elle-même préventive de la chronicisation des douleurs. Le traitement médicamenteux du lumbago associe des antalgiques et/ou des anti-inflammatoires (souvent antalgiques par eux-mêmes) à des myorelaxants (parfois également anxiolytiques).

Ce traitement doit rester de courte durée mais être d'emblée efficace afin de permettre la mobilisation du dos.

Traitements médicamenteux

- Antalgiques

Tous les antalgiques peuvent être utilisés, sous réserve de leur adaptation au terrain (respect des contre-indications) et à la sévérité de la douleur lombaire. Dans la pratique, la prescription doit respecter l'escalade classique selon les paliers de l'OMS.

- Anti-inflammatoires non stéroïdiens

Si le libellé des AMM varie selon les molécules et les formes galéniques, tous les AINS sont potentiellement utilisables dans le traitement d'une lombalgie aiguë. Il n'y a pas lieu de privilégier un groupe particulier de molécules, mais de connaître les effets indésirables et les contre-indications de classe.

Les formes injectables IM sont bien adaptées au traitement des manifestations algiques aiguës (Feldène : 2 ampoules en un jour puis éventuellement une le jour suivant ; Profénid, Tilcotil, Voltarène : 1 ampoule/j pendant 2 à 3 jours selon AMM).

Deux références médicales opposables encadrent la prescription des AINS dans les lombalgies aiguës : elles limitent la durée du traitement sans réévaluation clinique à une ou deux semaines par voie orale, et aux tout premiers jours de l'épisode aigu par voie intramusculaire, la voie orale prenant le relais. La voie parentérale ne diminue pas le risque digestif et comporte des risques spécifiques.

Les corticoïdes n'ont pas d'intérêt dans ce condiv. Les AINS topiques ont peu d'intérêt.

- Myorelaxants

Ici encore, le choix reste ouvert selon les habitudes de chaque médecin.

-#gt; Tétrazépam (Myolastan)

C'est une benzodiazépine qui exerce donc une activité anxiolytique, sédative, anticonvulsivante et myorelaxante résultant de son action inhibitrice supraspinale. D'autres benzodiazépines peuvent être utilisées (hors AMM) : il en va ainsi par exemple du diazépam (Valium) administré par voie injectable dans cette indication aux Etats-Unis.

-#gt; Thiocolchicoside (Coltramyl)

Analogue soufré de synthèse d'un glucoside extrait du colchique, le thiocolchicoside exerce des propriétés agonistes sur les récepteurs GABAergiques (une action proche de celle des benzodiazépines). Son action myorelaxante d'origine centrale est sensible aussi bien sur les fibres striées que sur les fibres viscérales lisses.

-#gt; Méthocarbamol (Lumirelax)

Il s'agit d'un carbamate, proche donc au plan pharmacologique des benzodiazépines myorelaxantes.

Son utilisation peut être à l'origine d'une modification de la couleur de l'urine (virant au brun-noir ou au verdâtre) qui ne doit pas inquiéter le patient.

-#gt; Méphénésine (Décontractyl)

Son action décontracturante d'action centrale est susceptible d'induire une somnolence.

-#gt; Idrocilamide (Srilane)

Naguère utilisé par voie générale, l'idrocilamide est désormais réservé à une utilisation topique en traumatologie. Il constitue un traitement d'appoint de la lombalgie aiguë.

Traitements non médicamenteux

Il s'agit essentiellement du traitement kinésithérapique. Il est justifié chez les patients à haut facteurs de risque de passage à la chronicité, lorsque l'amélioration de l'épisode lombalgique n'est pas suffisamment rapide ou complète. Le kinésithérapeute réalise des massages manuels préparatoires puis fait effectuer des exercices physiques. Les exercices en extension semblent avoir plus d'efficacité que ceux effectués en flexion.

LOMBALGIES CHRONIQUES

Comme le soulignent les recommandations éditées par l'ANAES en décembre 2000, la prise en charge d'une lombalgie chronique est difficile car la maladie met en jeu plusieurs mécanismes intriqués dans lesquels la composante psychologique reste toujours importante : le patient en a souvent littéralement « plein le dos » de problèmes familiaux, socioprofessionnels ou autres...

Le traitement doit chercher à limiter les afférences nociceptives mais également à infléchir les facteurs d'entretien du comportement douloureux chronique.

Traitements médicamenteux

- Antalgiques

Les antalgiques sont adaptés aux caractéristiques propres de la douleur : dominante neurogène ou nociceptive, intermittente ou constante, etc., mais aussi aux caractéristiques du patient. Le médicament, administré souvent sur une période prolongée, doit être bien toléré et administré à la dose minimale efficace.

Le traitement doit s'envisager d'emblée comme un traitement de fond : il doit être administré à des heures régulières, en prévenant la réapparition de la douleur pour favoriser au mieux la mobilisation du sujet et le maintien de ses activités.

-#gt; Antalgiques de palier I

Les antalgiques de palier I (paracétamol, AINS, aspirine...), proposés en priorité, sont administrés dans le respect du schéma posologique de leur AMM.

Il n'existe pas d'étude attestant de l'efficacité du paracétamol dans cette indication, mais un accord professionnel se dégage quant à son intérêt, à une posologie maximale de 4 grammes par jour en 4 prises systématiques.

Le recours aux AINS antalgiques (ibuprofène, etc.) en vente libre n'est pas mieux évalué et expose à un risque non négligeable d'incident iatrogène, d'autant plus qu'ils peuvent, dans le cadre d'une automédication, être associés à d'autres AINS.

La toxicité digestive de l'aspirine en réduit considérablement l'intérêt dans le traitement des lombalgies chroniques.

Les AINS prescrits à des doses anti-inflammatoires (et donc disponibles sur ordonnance) peuvent être utiles, mais sur une courte durée.

-#gt; Antalgiques de palier II

Les antalgiques de palier II (codéine, dextropropoxyphène, tramadol, dihydrocodéine...) ne trouvent leur place qu'après échec d'un traitement de palier I.

-#gt; Antalgiques de palier III

Enfin, les antalgiques de palier III selon la classification de l'OMS, c'est-à-dire les opiacés (morphine, buprénorphine, fentanyl...), peuvent être proposés en cas d'échec des antalgiques moins puissants. Toutefois, leur administration doit évidemment demeurer limitée dans le temps, respecter les contre-indications à ce type de traitement, et s'accompagner d'un « contrat » de mobilisation d'un patient qui doit s'engager à accepter un programme de modification comportementale allant dans le sens d'une reprise minimale d'activités. La durée de ce traitement est limitée et son arrêt progressif.

- Corticothérapie

La corticothérapie par voie générale n'est pas recommandée dans le traitement des lombalgies chroniques.

- Myorelaxants

L'administration de myorelaxants semble avoir peu d'intérêt dans le traitement au long cours des lombalgies chroniques et seul le tétrazépam a fait l'objet d'une étude dans la lombalgie chronique. La prescription ne devrait pas dépasser 2 semaines, pendant la période de recrudescence de la douleur.

- Antidépresseurs

Un traitement psychique peut être proposé lorsqu'un syndrome anxiodépressif reconnu entretient la douleur : il est alors fréquent de proposer un antidépresseur en veillant à choisir une molécule bien tolérée (tricyclique ou inhibiteur de la recapture de la sérotonine par exemple).

Les antidépresseurs tricycliques ont cependant une action antalgique propre (au contraire des antidépresseurs sérotoninergiques), portant sur les douleurs neuropathiques, justifiant leur prescription éventuelle en dehors d'un condiv dépressif.

- Infiltrations

-#gt; Les infiltrations épidurales (dexaméthasone, méthylprednisolone) peuvent avoir une action antalgique à court terme : elles ne doivent pas constituer une solution de première intention ni récurrente, et leur nombre devrait se limiter à deux ou trois par an.

-#gt; En revanche, l'injection intrathécale de corticoïde n'a pas d'intérêt dans les lombalgies chroniques.

- Autres traitements

-#gt; Phytothérapie

Elle n'a pas démontré d'intérêt dans le traitement des lombalgies chroniques.

-#gt; Autres thérapeutiques

Couramment utilisées, elles n'ont cependant pas été évaluées par l'ANAES dans le cadre des recommandations sur le traitement des lombalgies chroniques. Leur éventuel intérêt reste à définir. C'est le cas de l'homéopathie et de la mésothérapie, mais aussi de médicaments couramment prescrits : chondroïtines sulfates, insaponifiables d'avocats et de soja, oxacéprol, diacerhéine, adénosine triphosphate, acide uridine-5'-triphosphorique, inhibiteurs spécifiques de la cyclo-oxygénase 2, antiépileptiques et oligoéléments (cuivre, zinc...). Les gels et pommades à base d'AINS n'ont pas été évalués par l'ANAES dans les lombalgies chroniques.

Traitements non médicamenteux

De très nombreux traitements non médicamenteux sont proposés dans le but d'améliorer la qualité de vie et de prévenir ou diminuer le handicap du lombalgique. Parmi eux, certains seulement ont démontré une efficacité.

- La kinésithérapie

Elle est basée sur les traitements de musculation intensive et de réadaptation à l'effort. Les séances peuvent se faire en groupe. Elles doivent être accompagnées de conseils ergonomiques et d'hygiène de vie.

-#gt; Les massages

Ils peuvent être proposés en préparation d'une séance de rééducation.

-#gt; Les manipulations vertébrales

Elles ont un effet antalgique à court terme supérieur à celui des AINS utilisés seuls, alors que les tractions vertébrales ne sont pas recommandées.

-#gt; Autres techniques

L'efficacité des ondes électromagnétiques, du rayonnement laser et de l'ionisation n'a pas été démontrée.

- Autres traitements non invasifs

-#gt; Repos au lit

Il n'est pas recommandé.

-#gt; Cures thermales

Les cures thermales et balnéothérapie peuvent avoir une certaine efficacité antalgique.

-#gt; Exercice physique

Quelle que soit sa forme, il est bénéfique pour son effet antalgique. Il est recommandé par les groupes d'experts de l'ANAES.

-#gt; Port d'une ceinture lombaire

Il pourrait avoir une efficacité, mais son intérêt formel reste à démontrer. Les ceintures lombaires ne doivent pas être prescrites en première intention.

-#gt; Thérapies comportementales

Elles sont efficaces sur l'intensité de la douleur et le comportement du patient face à la douleur. Elles sont également recommandées par les experts de l'ANAES.

- Ecoles du dos

Leur principe est d'informer et d'éduquer le patient sur sa pathologie : anatomie du rachis, recommandations de bonnes postures, exercices à faire, importance de l'activité physique quotidienne... L'enseignement est généralement dispensé par une équipe pluridisciplinaire associant médecin spécialiste, kinésithérapeute, psychologue et ergothérapeute, en groupe d'une dizaine de patients, sous forme de cycle de 8 à 10 heures de cours. Associée à des séances d'exercices physiques, la participation à une école du dos est efficace sur la douleur à court terme.

Les prises en charge multidisciplinaires associant séances d'éducations, conseils, exercices physiques intensifs et prise en charge psychologique sont recommandées.

- Traitements invasifs

-#gt; L'acupuncture

Elle aurait un effet sur la douleur à court terme. Sa place dans l'arsenal thérapeutique reste à définir.

-#gt; La chirurgie par arthrodèse

Elle est réservée à quelques indications exceptionnelles. La découverte à l'imagerie d'une hernie discale isolée sans signes radiculaires n'est pas une indication au traitement chirurgical.

PERSPECTIVES

Les perspectives thérapeutiques sont essentiellement axées sur une meilleure évaluation du contenu des programmes multidisciplinaires, des structures nécessaires à leur mise en oeuvre et sur l'analyse du profil psychologique des patients susceptibles d'en bénéficier.

Par Denis Richard et Philippe Azarias

L'AVIS DU SPÉCIALISTE

« L'ostéopathie complète la kiné »

Pascal Nguyen Kim, kinésithérapeute, ostéopathe

Quelle est la place de l'ostéopathie dans la prise en charge des lombalgies ?

L'ostéopathe recherche avant tout la cause de la lombalgie. Pour lui, la douleur est liée à l'hypomobilité d'une des articulations sacro-iliaques du bassin ou des vertèbres lombaires qui entraîne un réflexe nociceptif local et une ischémie, d'où une inflammation pourvoyeuse de douleur. Cette douleur déclenche une contraction de protection de certains muscles du dos et renforce l'hypomobilité de la région lombaire : c'est alors un cercle vicieux, qu'il faut briser en redonnant une certaine mobilité au bassin. C'est ce que fait l'ostéopathe. Pratiquée avec prudence et discernement, l'ostéopathie s'adresse à tous les lombalgiques, y compris les personnes âgées ou souffrant d'ostéoporose.

Peut-elle remplacer la kinésithérapie ?

Non, elle la complète. Le kiné travaille selon trois axes : le massage manuel, la rééducation de la musculature abdominolombaire et la proprioception, c'est-à-dire la rééducation des sensations du bassin dans un but de prévention. S'y ajoute la physiothérapie antalgique : utilisation du froid, de la chaleur, de l'électrothérapie... L'ostéopathe ne fait pas de rééducation. Il redonne une certaine mobilité à la région lombaire. L'idéal serait de commencer par l'ostéopathie en période aiguë et d'enchaîner avec des séances de kiné. D'ailleurs, 80 à 90 % des ostéopathes ont une formation de kinésithérapeute.

Le port d'une ceinture est-il bénéfique en cas de lombalgie ?

Elle peut avoir une efficacité antalgique quelques jours chez les personnes peu musclées. Mais elle va à l'encontre de l'action de l'ostéopathe, puisqu'elle contribue à bloquer le bassin du patient. En revanche, elle peut apporter un soulagement lors de travail de force ou de longs trajets en voiture.

Pascal Nguyen Kim interrogé par Florence Bontemps

CONSEILS AUX PATIENTS

Veiller à l'« hygiène posturale »

-#gt; Une mauvaise posture fait travailler inégalement les muscles et provoque raideurs et tension articulaire. Tous les mouvements de flexion et de rotation du tronc doivent être effectués prudemment.

-#gt; Pour se lever d'une position allongée : se tourner sur le côté, s'asseoir latéralement en poussant sur le bras et en maintenant le dos d'un seul bloc.

-#gt; Pour saisir un objet au milieu d'une table : s'appuyer d'une main sur la table avec le bras tendu pour éviter une flexion excessive.

-#gt; Lorsque la position assise est maintenue longtemps (travail au bureau...) : choisir un siège ferme, pas trop profond, à dossier droit, et régler si possible sa hdiv de façon à ce que les hanches et les genoux forment un angle droit. Face à un ordinateur, avancer la chaise au maximum sous le bureau pour être bien au-dessus du clavier.

-#gt; Certaines activités de la vie courante peuvent déclencher ou aggraver les douleurs : pour passer l'aspirateur ou le balai, ou pour faire la vaisselle, éviter la position debout penché en avant. Garder le dos droit le plus possible, jambe arrière tendue, jambe avant fléchie.

-#gt; Pour le repassage, la table à repasser doit arriver à hdiv de ceinture. Un pied peut être posé sur un petit escabeau (hdiv d'une marche) placé sous la table.

Pour faire un lit, rien ne vaut la position du « chevalier servant » (un genou à terre) pour éviter de se pencher.

-#gt; Dans la cuisine, l'espace domestique (hdiv des étagères, du plan de travail...), doit être organisé de manière ergonomique.

-#gt; En voiture, le siège doit être réglé de façon à former un angle de 110° au niveau du buste et de 45° au niveau des genoux. S'asseoir et se lever du siège d'un bloc, et faire des poses régulières en cas de longs trajets.

Attention au port de charges lourdes !

Le dos est constamment sollicité pour lever, transporter, pivoter et plier. Il n'est pourtant pas un organe de levage et la colonne vertébrale doit être maintenue droite.

Pour porter une charge lourde : plier les genoux, contracter les abdominaux, ramasser l'objet à terre en le maintenant le plus près possible du ventre et se relever droit. L'effort porte ainsi sur les jambes, sans écraser les disques lombaires et sans tirer sur les ligaments postérieurs. Si possible, pousser un objet lourd plutôt que le tirer.

S'étirer régulièrement

Matin et soir, ou dès que la sensation de tension apparaît, pratiquer des exercices d'élongation : suspension par les mains (barre fixe placée dans l'encadrement d'une porte) en détendant tous les muscles du corps, allongement axial, debout, talon et dos au mur en rentrant le ventre et le menton et en se grandissant au maximum, et pauses en position allongée sur le sol, jambes reposant en équerre sur une chaise. D'autres exercices peuvent être proposés par le kinésithérapeute.

Pratiquer un sport

L'activité physique régulière permet d'entretenir la souplesse dorsale et d'acquérir une bonne tonicité musculaire. Il faut néanmoins faire le bon choix, en sollicitant l'avis du médecin. Le plus souvent, la natation, la marche, la gymnastique d'entretien, le yoga et le cyclisme sont conseillés. L'échauffement est un temps essentiel avant tout effort physique.

Choisir son matelas

Les études les plus récentes sont en faveur d'un matelas de fermeté moyenne, qui serait plus efficace qu'un matelas ferme pour soulager les lombalgies.

Surveiller son poids et son alimentation

La surcharge pondérale peut favoriser la mauvaise statique et par suite les lombalgies. Privilégier une alimentation riche en calcium pour prévenir l'ostéoporose. Le médecin peut envisager un complément en vitamine D, en particulier dans les régions peu ensoleillées. La vitamine D permet la fixation du calcium, constituant essentiel de la charpente de l'os.

Lors des accès douloureux aigus

Le repos au lit jusqu'à disparition des douleurs, recommandé pendant des années, n'est plus de mise même en cas de lumbago. Il n'est préconisé que si l'intensité de la douleur l'impose, mais de façon intermittente et pour une durée brève. L'immobilité prolongée favorise le handicap chronique. Le traitement médical repose sur un anti-inflammatoire, un antalgique et/ou un myorelaxant. Rappeler que les AINS doivent être pris au cours des repas, en ne prolongeant pas le traitement plus d'une ou deux semaines. Les antalgiques codéinés peuvent entraîner une somnolence, majorée par celle liée à certains myorelaxants. En tenir compte en cas de conduite automobile.

Partir en cure thermale

Les différents soins proposés en cure thermale ont un effet antalgique et assouplissant au niveau des articulations : bains, douches, étuves, applications de boues, bains de vapeur, massages, mobilisations en piscine. Les stations adaptées à la prise en charge des lombalgies sont Aix-les-Bains, Amélie-les-Bains, Dax, Bourbonne-les-Bains, Luchon, Thonon-les-Bains...

Prévenir les lombalgies dès l'enfance

Chez les jeunes, il faut corriger régulièrement la mauvaise posture. Celle-ci peut concerner la position assise au repos (position avachie) ou à l'école (sièges non ergonomiques). Elle peut également être due au port incorrect du cartable qui doit être porté sur les deux épaules, son poids devant être équilibré sur la largeur du dos et ne pas dépasser 20 % du poids corporel. Le manque d'exercice physique, quant à lui, est responsable de faiblesse musculaire, mais les antécédents traumatiques rachidiens d'origine sportive sont également associés aux lombalgies.

Par Yvette Athlan

POUR EN SAVOIR PLUS

INTERNET

Ecole du dos de l'Université du Québec

http://uriic.uqat.uquebec.ca

Un site canadien destiné avant tout aux patients lombalgiques, qui mérite vraiment le détour. Le but est d'inciter le patient à devenir « expert » de sa lombalgie. Agréablement illustré de façon humoristique, ce site universitaire regorge d'informations claires, présentées la plupart du temps sous forme de jeux. La partie « Sur les chemins de la guérison » propose ainsi douze étapes de prise en charge : un contrat précis des objectifs à atteindre, des rappels anatomiques, un regard critique sur les médicaments (évidemment, les spécialités citées sont canadiennes), des stratégies simples en cas de douleurs aiguës, des exercices de préparation physique et de préparation mentale... Beaucoup de schémas, beaucoup d'humour font de ce parcours un moment agréable et instructif.

RECOMMANDATIONS

Le diagnostic, la prise en charge et le suivi des malades atteints de lombalgies chroniques. Recommandations pour la pratique clinique de l'ANAES (déc. 2000)

ANAES, 2, avenue du Stade-de-France, 93218 Saint-Denis-la-Plaine Cedex

Tél.: 01 55 93 70 00 - fax : 01 55 93 74 00 - http://www.anaes.fr (rubrique : « Publications/thème : Rhumatologie »)

Les recommandations pour la pratique clinique de l'ANAES permettent de mieux cerner ce problème de santé publique. Elles précisent le cadre des examens complémentaires (quand et dans quel but doivent être pratiqués radio, scanner...), ce qui permet de rassurer les patients souvent très demandeurs d'examens inutiles. Elles passent en revue l'ensemble des thérapeutiques utilisées aussi bien sur le plan médicamenteux que non médicamenteux, fait le tri entre ce qui est validé et ce qui ne l'est pas.

Chaque professionnel de santé peut ainsi mieux appréhender l'intérêt de chaque pratique (médicaments, kinésithérapie, ionisations, balnéothérapie, mais aussi exercices physiques, école du dos...).

Facteurs de risque de lombalgie

- La manipulation d'objets lourds, les efforts répétés, la pratique excessive d'un sport ou l'excès d'activité physique.

- Les mauvaises positions (dès l'enfance, de mauvaises postures peuvent créer des tensions et des raideurs).

- Les antécédents de traumatisme lombaire.

- L'absence d'exercice physique ou la sédentarité : en effet, plus les muscles dorsaux sont forts et solides, plus ils pourront compenser les faiblesses de la colonne vertébrale.

- Certains risques professionnels (contraintes biomécaniques, vibrations, postures prolongées).

- La fatigue, le stress.

- La surcharge pondérale accompagnée d'un mauvais état trophique musculoabdominal.

- Le tabac par usure des disques (toux chronique), l'alcool.

- Un bas niveau social et d'éducation.

- Une instabilité familiale et professionnelle.

- L'insatisfaction au travail est un facteur essentiel.

- Des antécédents de maladies psychosomatiques.

- Le vieillissement réduit la souplesse des articulations qui deviennent moins résistantes.

- Une inégalité de longueur des membres inférieurs, seulement si elle est très importante (#gt; 2 cm).

La sciatique : irradiation dans le membre inférieur

- La sciatique ou plus exactement lombosciatique est un symptôme défini par une douleur lombaire avec une irradiation douloureuse dans le membre inférieur, liée à l'irritation d'une des racines du nerf sciatique. La compression entraîne une douleur selon un trajet précis dans le membre inférieur. Ce trajet correspond au territoire d'innervation sensitive de la racine en cause.

- La douleur de sciatique est décrite comme un tiraillement, son trajet est précis et traçable au doigt. Les efforts de toux, la défécation, les éternuements l'aggravent ainsi que la position debout. La douleur est maximale en journée.

- Selon la racine atteinte, elle part vers L5 (5e vertèbre lombaire) : fesse, partie postérolatérale de la cuisse, partie postérolatérale de la jambe, dessus du cou-de-pied, gros orteil ; et vers S1 (1re vertèbre sacrée) : fesse, partie postérieure de la cuisse, de la jambe, talon, bord latéral du pied, petit orteil. Pour les atteintes des racines L4 et L3, les douleurs donnent des cruralgies (douleurs localisées à la partie antérieure de la cuisse).

Contre-indications absolues

Tétrazépam

- Insuffisance respiratoire sévère.

- Syndrome d'apnée du sommeil.

- Insuffisance hépatique sévère (risque de survenue d'une encéphalopathie).

Thiocolchicoside

- Allaitement.

- Troubles de l'hémostase ou traitement anticoagulant en cours (pour les formes IM).

Méphénésine

- Porphyrie.

Méthocarbamol

- Myasthénie.

- Antécédents de crises convulsives.

Stratégie thérapeutique de la lombalgie chronique

La prise en charge d'une lombalgie chronique repose sur quatre axes.

- Prise en charge de la douleur

Elle vise à contrôler la douleur et à apprendre au patient à vivre avec au quotidien, et ce probablement toute sa vie.

- Restauration fonctionnelle

Elle s'obtient grâce à l'exercice physique, toujours fortement recommandé chez le lombalgique, effectué seul ou sous la direction d'un kinésithérapeute.

- Accompagnement psychologique

Il est indispensable et permet d'évaluer le retentissement familial et social. Les thérapies comportementales sont recommandées, associées au traitement de la douleur et à l'exercice physique.

- Réinsertion professionnelle

Elle peut être facilitée par une prise de contact précoce avec le médecin du travail.

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